Nous étions l’après-midi de ce jour d’hiver de l’an 5. Iwagakure no Sato vidée de la quasi-totalité de ses habitants, semblait vivre au rythme de l’hiver justement, calmement, silencieusement. La cité autrefois tumultueuse, grouillant de monde, pleine d’étrangers allant et venant des artères du cœur commerçant, voyait aujourd’hui toutes les échoppes tristement closes. Pour tomber sur une âme qui vive, il fallait chercher ou alors faire usage de dons connus des seuls shinobis.

Chioshi Genosuke, fraîchement arrivé du village de Toori, venait de se positionner sur un toit au-dessus d’une cantine. De son poste d’observation, il usa de sa vue afin d’inspecter les environs. Il faisait partie d’un groupe de ninjas qui avaient été rappelé de Toori afin d’accompagner le Jonin Borukan Ashitaka devant répondre à la convocation de la nouvelle Tsuchikage, Chiwa Aimi. Dans la foulée de son arrivée, il avait été affecté aux unités en charge de la surveillance d’Iwa, les zones commerçantes, et résidentielles en priorité. Même vidées de leurs propriétaires, ces lieux devaient rester pleinement sous surveillance afin qu’une fois Iwa repeuplée, que les populations puissent reprendre sereinement leurs activités.

Usant d’une technique certainement liée à l’élément futon, le Jonin, après avoir terminé son inspection, fit signe discrètement à deux ninjas qui faisaient partie de son équipe, qu’ils allaient se déplacer en direction de l’hôpital. Ils avaient déjà passé au peigne fin les quartiers résidentiels et avaient soigneusement évité la fameuse zone de non droit iwajuku.

En ces temps troubles de retour du front contre le dieu singe, la plus grande activité du village se trouvait désormais autour de ce bâtiment. A cet endroit se trouvaient le gros de la troupe de ceux qui avaient fait face au dieu singe ; ceux qui étaient revenus du front. La Tsuchikage avait ordonné une certaine surveillance sur ce bâtiment afin de garder l’œil sur divers ninjas d’Iwa impliqués dans une affaire certainement sur le point d’être vidée.
Alors que la petite escouade arrivait à proximité de l’hôpital, Le Jonin interrompit subitement son déplacement intimant ses compagnons à en faire de même, ne serait-ce que par précaution. Son attention semblait portée sur quelque chose ou plutôt sur quelqu’un…

« Est-ce ? » Mumura-t-il.

Oui, tous les éléments semblaient bel et bien en concordance. Il prit une impulsion et arriva aux pieds de la personne concernée. Une jeune femme, aux cheveux roses et aux pupilles couleur de sang. Quelqu’un qui s’était déjà présentée à Iwa par le passé et qu’Iwa ou du moins, certains shinobis d’Iwa, connaissaient d’une façon ou d’une autre.

« Neiko San ? Est-ce bien vous ? »

Troublé, l’individu bredouilla bien assez vite une présentation dès lors qu’il eut le sentiment que son interlocutrice n’avait pas idée de qui il est.

« Chioshi Genosuke… » Souffla-t-il le visage subitement changé, comme marqué par une légère la tristesse ou peut-être l’anxiété.

On aurait dit qu’il se sentait redevable de la kunoichi à qui il s’adressait. Sa mine presque aussitôt s’assombrit. Du haut de sa stature, le bonhomme semblait désolé.

Spoiler:

Il ne s'était donc guère trompé. Il avait vu juste dès lors que les signes distinctifs s'étaient révélés justes. Neiko San ou de son propre aveu Chinoike Katsuko. Le bonhomme, dans d'autres circonstances, aurait été fier de son sens de la déduction mais en ce moment précis, la vie ne lui rappelait que la difficile situation dans laquelle se trouvait Neiko San ; situation à laquelle Iwa était mêlée et indirectement lui-même. N'était-il pas le porte-parole du village de la Terre dans cette affaire ? En tant que Jonin, il avait été chargé manu militari d'informer, où qu'elle se trouve dans le monde, Neiko San de la disparition de son frère : Yutaka. Un ninja qui avait été enrôlé depuis quelques temps dans le village ; village qu'il servait avec honneur, jamais il n'avait rechigné à la tâche. Genosuke ne l'avait pas tellement pratiqué, il ne le connaissait que de loin. Il connaissait son visage, le timbre de sa voix mais c'est tout. Il connaissait surtout Yutaka au travers de son dossier ninja.

« Neiko San... Je vous prierai de ne guère me tenir rigueur quant à l'absence de réponse à votre missive... Iwa a connu moult difficultés qui m'ont personnellement occupé à d'autres urgences... » Dit-il d'un ton d'où pointait réellement l'amertume. Il avait appuyé ses propos, de regards et d'une ouverture des mains si large qu'elle invitait nécessairement à regarder autour de soi et à prendre en considération la situation actuelle, ce village vide. Était-ce la seule justification à cette absence de réponse ? Puis cette justification était-elle valable aux yeux de Katsuko ?

« Je suis désolé de devoir produire ces réponses et surtout dans un contexte pareil, mais je n'ai guère le choix... J'espère que vous serez assez forte pour entendre ces paroles... » Dit-il avec hésitation tout en portant son regard sur la kunoichi, en soutenant son regard.

« Yutaka a accepté un contrat hors de la juridiction d'Iwa. Nous n'avons pas tous les détails de l'affaire mais une des personnes concernées par l'affaire a pu être retrouvée et ramenée au village. Compte tenu de son état de choc nous n'avons pas eu l'opportunité de bien l'interroger et nous n'avons eu que des bribes d'information. » Il marqua un temps d'arrêt. Portant une attention particulière à la kunoichi en faisant attention de ne pas se faire prendre en défaut. Lorsque certains sont en proie à la douleur, ils perdent littéralement leur capacité à se contrôler. Le Jonin ressentait une douleur et une rage sourde, enfouie en Neiko San, une rage qui ne demandait qu'à exploser. Il ne souhaitait pas être la cible de tous ces sentiments, de tous ces ressentiments. Il n'était que le messager.

« Il s'agit d'un marchand que nous avons dû évacuer peu après avec la population lors de l'irruption du Yonbi. Il se trouve actuellement avec le reste de la population iwajine, au village de Toori » Dit-il comme pour se justifier.

Il marqua un temps d'arrêt. Il restait cependant une question à laquelle répondre. Katsuko lui avait demandé ce qui était advenu de sa mère. Une question sensible qui pourrait générer beaucoup de frustration...

« Quant à votre mère, elle a quitté Iwa afin de s'en aller à la recherche de Yutaka. Elle n'a pas voulu attendre que l'on envoie une équipe et nous a précédé... C'était peu avant l'évacuation du village... » Avait-il argué. Il portait un regard inquiet en direction de Katsuko. Essayant d'anticiper d'éventuels problèmes, il essaya tant bien que mal de corriger la situation.

Il se tourna alors à gauche et à droite afin de chercher du regard ses acolytes. Ces derniers étaient restés en retrait. Cependant ses quelques dons sensoriels avaient permis d'en débusquer. Ce serait lui qui serait de corvée à n'en pas douter.

« Daiki ! Sors de ta cachette et vient par ici... » Avait lancé le Jonin et attendant que le Genin s'exécute, il acheva dès lors que ce dernier fut à ses côtés.

« Quoi qu'il advienne, Iwa a le devoir de tirer au clair toute cette affaire. Veuillez accepter la présence d'Iranos Daiki à vos côtés dès lors que vous jugerez bon de vous lancer au moins à la poursuite de votre mère... Il vous sera d'un soutien de taille. »

S'étant tourné vers Daiki, le Jonin hocha de la tête comme pour lui intimer l'ordre d'appliquer ses décisions. Pour le reste, la suite appartient à Katsuko.

Résumé:

Les mots ont un sens. Cette phrase de la kunoichi eu le don de heurter la sensibilité du ninja. Il ne sut que rétorquer face à la douleur de son interlocutrice, douleur qu’elle laissait refléter par une posture des plus dures et des mots aussi tranchants que le katana. Il pouvait la comprendre, à sa place, lui aussi aurait certainement été très amer et ce d’autant plus que deux membres de sa famille étaient peut-être actuellement dans une situation très délicate. Pour autant, s’était-il trompé sur le terme de mort lorsqu’il avait écrit cette lettre. Il y avait repensé, longuement, mettant en corollaire les informations qu’il avait obtenues d’avec sa connaissance de ce type de situation. Il baissa les yeux, continuant à chercher dans son esprit la meilleure justification possible, mais il ne la trouva guère. C’est alors qu’il osa reporter son attention sur la kunoichi et soutenir son regard.

«D’après ce que nous a dit le marchand, des événements fâcheux ont eu lieu au sud, probablement une attaque. Mais nous n’avons peu pu obtenir beaucoup d’information dudit marchand… » Il marqua un temps d’arrêt, il semblait hésitant. Pourtant, il se résolut à poursuivre : « il s’appelle Genichi, Aasaru Genichi. La cinquantaine, barbe volumineuse plutôt grise. Je l’ai confié au Chuunin Mitarashi Anbu. »

Il marqua un temps d’arrêt tandis que son hésitation semblait à son paroxysme. On aurait dit qu’il souhaitait encore s’excuser au nom d’Iwa, mais Katsuko n’était guère en état d’entendre des mots d’excuses, c’était déjà à peine qu’elle le supportait. Pourtant, il ne pouvait se résoudre de la laisser ainsi sans mise en garde, qui quelle soit et quel que soit son niveau en tant que kunoichi.

« Neiko San, je dois vous prévenir. Avec les événements récents, le sud a possiblement subi des incursions de Tsumejins… » A nouveau un temps d’arrêt, mais une hésitation qui s’estompait. Il ne perdait rien à aller au bout de ses idées quand bien même celles-ci pouvaient être rejetées.

« Je serai vous, la priorité serait de retrouver votre mère. Ce serait certainement déjà beaucoup… » Dit-il en faisant une petite révérence en signe de salutations respectueuses. Leur entretien allait prendre fin incessamment, à moins que la kunoichi ne le retienne.

Un regard et à nouveau tous ces regrets qui le submergeaient. Il n’était en rien responsable de toute cette affaire, mais Iwa l’y avait impliqué et il s’était impliqué dans la mesure du possible. Cependant, il en tirait un goût amer : celui du travail inachevé, inaccompli. C’était à Iwa de régler cette affaire et non pas à Neiko de se jeter à la poursuite de sa mère ou de son frère.

A présent, portant son attention sur Daiki, il se rapprocha de ce dernier lui porta la main à l’épaule afin de le pousser à croiser son regard. Les mots qu’il lui adressa ne le concernaient que lui, à moins que Neiko San ne soit dotée d’une ouïe particulière :

« Daiki… Fais attention à toi et tâche de revenir entier. »

Un regard appuyé, une mise en garde et déjà le bonhomme s’élançait avec son binôme afin de poursuivre la tâche initiale pour laquelle il avait été mobilisé, tâche qu’il avait suspendue à la vue de Katsuko…

HRP: