Impassible à son habitude, l'homme derrière son masque n'affichait aucune émotion. Aucune expression sur son visage, assemblage de bandages articulés autour d'un énigmatique symbole oculaire. Ami se contenta d'écouter. La Sendai remettait en question les prétendues facultés de son interlocuteur. Elle avait ses doutes, ses hypothèses. L'orateur préféra se contenter d'attendre la véritable réponse, celle qu'il attendait.

Elle appartenait au Fukkatsu.

Ami replaça ses mains dans son dos, et effectua quelques pas dans la pièce. Le bruit de ses pas éclatait dans la pièce. Après quelques longueurs dans cette piscine de l'ombre, l'orateur se tourna vers la Sendai. Entre les deux chaises, il étala à nouveau ses mains gantées sur la surface en bois.

« J'ai entendu ce que je voulais entendre. Je vous remercie de votre coopération.
Je suis certain que notre Régente sera ravie d'en apprendre davantage à votre sujet, ainsi qu'à propos du Fukkatsu. »

Ami tourna les talons, sur le départ. D'un geste de la dextre, il signala la fin de l'entretien auprès de la Sendai, dont il ne tarderait pas à obtenir le prénom. Deux gardes s'approchèrent, tandis que le clone de Hanae s'écarta logiquement pour laisser passer. Avant de quitter la demoiselle aux cheveux tantôt de braise, tantôt mauves, Ami tourna la tête, et s'adressa une dernière fois auprès de l'ancienne Kumojin.

« Un shinobi saura peut-être masquer ses expressions, mais le propre des micro-expressions est d'être subtile, inconscient. Et incontrôlable. Votre visage en a été la preuve vivante tout au long de cet entretien. Sur ce… »

L'homme au costume moderne tira sa révérence, et laissa la Sendai aux mains des gardes. Dans le couloir, l'orateur tomba nez à nez avec un des gardes de l'Arche Grise. Ce même soldat lui apportait les copies des documents dont il avait besoin. L'homme masqué remercia en conséquence le jeune homme, qui retourna aussitôt à son poste. Ami n'eut pas grand mal à filtrer les informations : il avait à faire avec une Sendai, qui plus est, qui n'était pas revenue de Kumo depuis son départ vers Hayashi. En se basant sur les registres de déserteur, et les déplacements inscrits à l'Arche Grise, un nom apparut clairement : Sendai Anzu.

Ami adressa un ultime regard vers la pièce où était détenue la farouche Anzu.

L'orateur décida de rester un peu plus longtemps pour terminer son travail en bonne et due forme. Loin d'Anzu, il s'adressa à un des responsables des lieux pour exposer le fruit de son interrogatoire : il se contenta de révéler qu'il s'agissait d'une déserteuse, qu'elle devait rester incarcérée, et qu'il allait faire son rapport directement auprès de Hokazuka Rie. La demoiselle risquait très fortement d'intéresser la Régente de la Cité des Nuages. Avant de se plonger dans la rédaction d'un rapport, l'orateur insista sur le besoin de transférer la déserteuse en lieu sûr. Son expérience avec l'Artiste, soulevant le risque d'une brèche dans la sécurité du Teikoku, ainsi que la crainte d'une action de la Résistance, le poussèrent à insister auprès du responsable pour la placer dans un endroit qui n'était pas connu du public. La discrétion était de mise, et il rassura le quadragénaire qui lui faisait face, en sa qualité de membre du Protectorat. Il termina enfin en préparant le responsable qu'Ami tâcherait d'organiser un nouvel entretien entre Anzu et Hokazuka Rie, et qu'à cet égard, il fallait informer aussitôt la Régente des prochains déplacements de la Nukenin.

Il laissa enfin la visiteuse aux mains des forces de sécurité, avant de remonter quelques étages. Là, il parvint à trouver un endroit adéquat pour rédiger un rapport adressé à sa supérieur hiérarchique. L'information était on ne peut plus capitale; aussi, Ami tâcha de rédiger avec autant d'application que nécessaire tout ce qu'il avait pu apprendre en cette journée.

Lorsque l'homme au masque abandonna l'usage de l'encre, il se leva aussitôt. Il se mit en route vers les quartiers de la Régente : cette fois-ci, il ne pouvait se permettre de confier sa tâche à une tierce personne. Les informations dont il disposait, et les potentielles informations que possédaient la déserteuse étaient bien trop cruciales. Ami déposa ainsi son rapport auprès des collaborateurs les plus proches de la Régente en fin de journée.

Le soleil se couchait peu à peu dans le village caché.
Mais l'Oeil, lui, restait en permanence à l'affût dans le ciel.

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