Voilà des lustres que la Brume n'avait pas été aussi calme. Le gazouillis des oiseaux s'était tut, comme mu par la présence d'un danger oppressant, comme évaporés, arrachés à la faune locale. Le son de sa canne posée à même le rocher, parut résonner dans un étale de couloirs, ici un enchevêtrement d'arbres discontinu étouffant l'écho sylvestre vibrant par les feuillages. Doro s'assit aux côtés de l'amas de roche. Il songea quelques instants, relevant les yeux vers les cimes éclairées par l'astre père, à moitié éblouie et pourtant peu incommodé. Un sourire esquissé sur son visage sembla lui faire parvenir à nouveaux les chants ordinaires de la peuplade aviaire, un mirage du fait de sa quiétude profonde, une communion en la nature ancienne des marécages brisés. A mesure que sa respiration rythmait les environs, il sentit peu à peu les maux ayant battus la terre. Les décennies l'avaient torturée, des premières chasses contant l'origine violente de la Brume, aux derniers assauts qui l'avaient entièrement changé. Les entrailles de la terre se souvenaient, aujourd'hui transformées en une civière portant les cicatrices d'un village aux moeurs barbare. Le Yasei avait quelque part échoué, il aurait dû être là, non pas seulement au combat, mais auprès des diplomates avides. D'une Voix active, il aurait pu empêcher tout ceci. La faune se mourrait... ou plutôt se transformait, en ce jour de deuil, de souvenir d'un ancien temps rayonnant qui marquait les derniers songes d'un futur auquel le rattacher. Chaque seconde défilant l'emmurait au sein d'un vacarme de cris et de lames entrechoquées. Son sourire s'était dissipé et à jamais en ces lieux ne serait jamais plus que mensonge. Et alors que la douleur des événements devenue insupportable, Doro détacha son regard avant d'agripper son bâton d'une main, se relevant d'ors et déjà, prêt à reprendre la route du village. Il parut ne s'être écoulé qu'un brin de secondes, mais déjà le soleil pourtant prenait une teinte rougeâtre, enjoué à se reposer pour mieux réapparaître à la prochaine aube.
Le menton relevé, l'homme fit un premier pas, lent, puis un autre, accélérant crescendo vers sa prochaine tâche. L'esprit s'apaisant, il pensa.
Voilà bien trop longtemps que je suis resté passif. Il est temps.
Un premier son résonnant vint combler le mutisme des marécages, un cri de moineau, d'abord succinct, mais finalement suivi d'autres de ses camarades. S'ils semblaient mutuellement se répondre à en deviser, il était plus vain encore de deviser sur le lien que leurs réactions portaient aux pensées pourtant indicibles du Yasei.