Cela ne faisait pas longtemps que Namue était au cœur du village de la brume et pourtant, elle commençait déjà à s’y faire une place et son cercle de contact s’étendait doucement. C’était justement l’un de ses contacts qui l’avait fait mandater, une chûnin du nom de Yuki Misaki auprès de laquelle la Kayuri avait déjà peaufiné ses connaissances en ninjutsu.

La demande était vague et c’était avec une tête remplie de question que la genin de la brume arriva enfin au lieu du rendez-vous au cœur du grand dojo des sabreurs. Après les salutations d’usage, Misaki ne perdit pas de temps et entra directement dans le vif du sujet et la jeune femme ne put s’empêcher d’être surprise à la mention du dojo itinérant de la brume. Ainsi, la dame de glace voulait en connaître plus sur cette caravane itinérante qui l’avait élevée depuis son plus jeune âge et Namue n’était pas certaine d’être complétement à l’aise de divulguer l’ensemble de ses connaissances à ce sujet. Elle ne pouvait toutefois pas ne rien divulguer et c’est donc dans cette optique qu’elle prit finalement la parole.

Bon matin Misaki-san… Vous me posez une très bonne question et je pourrais passer plusieurs heures à vous expliquer les fondements du Dojo, mais si vous me le permettez, je me contenterai de vous faire un bref résumé de son histoire.

Tout en dialoguant, la jeune femme alla se placer devant celle qui semblait avoir décider d’assumer le rôle de mentore pour la Kayuri puis, après une courte pause, cette dernière reprit la parole, son regard fixé dans celui de son interlocutrice.

Historiquement le dojo itinérant de la brume était une caravane marchande. Je ne connais pas l’ensemble des tenants et aboutissants, mais les grandes lignes veulent que la hausse de la criminalité au sein de l’archipel de la brume poussât ces derniers à rechercher un moyen de se défendre contre les brigands. De fil en aiguille, certains membres devinrent adeptes du bushido et plusieurs décennies plus tard, la vocation autrefois marchande devint purement protectionniste et le dojo itinérant de la brume naquit.

Prenant un moment pour reprendre son souffle, la jeune femme en profita aussi pour faire le tri des informations qu’elle pouvait divulguée ou non à celle qui lui était hiérarchiquement supérieure. Puis, satisfaite de ce dernier, elle reprit finalement la parole sur le même ton neutre.

Pour ce qui est de mon historique avec celui-ci, j’ai été recueillie très jeune par les membres de ce dojo qui m’ont élevé comme l’une des leurs. J’ai donc, depuis mon plus jeune âge, parcouru les nombreuses îles qui composent l’archipel de mizu en leur compagnie. J’ai aussi été formé au maniement du sabre même si je ne me considère pas comme une maître-lame.

Détachant son nodachi de sa ceinture, la jeune femme le tendit ensuite devant elle en direction de la chûnin.

Lorsque j’ai atteint l’âge adulte, j’ai plus ou moins été contrainte de quitter la caravane et l’on m’a offert ce sabre afin que je puisse me protéger lors de mes voyages… Ais-je répondu à vos questionnements Misaki-san ?

Tandis qu’elle terminait sa phrase, la genin renoua son nodachi à sa taille puis, une fois cette tâche accomplie, elle replongea son regard dans celui de son interlocutrice, attendant la réponse de cette dernière.

Namue ne put s’empêcher de sourire lorsque son regard croisa celui pétillant de vie et de curiosité de la chûnin de la brume alors que celle-ci lui demandait si elle pourrait l’emmener rendre visite au dojo itinérant de la brume un jour, mais avant qu’elle ne puisse répondre à la demande de sa mentore, celle-ci enchaîna avec celle qui l’avait emmener à la convoquer en cette journée d’automne, elle désirait un rafraîchissement au sujet du Kenjutsu de la part de la genin et cette demande laissa cette dernière quelque peu abasourdie, pouvait-elle réellement lui enseigner quoi que ce soit ?

Un jour je retournerai au sein du Dojo itinérant de la brume et je serais honoré que tu m’accompagne…

La jeune femme avait délibérément ignoré la dernière demande de sa mentore le temps de répondre à ses propres questionnements intérieurs, que pouvait-elle apprendre à une kunoïchi aussi expérimentée que Misaki ? Certes le kenjutsu était plus son domaine que le sien, mais l’art du sabre n’était pas si éloigné du Taijutsu et la Yuki en était une adepte de ce que lui connaissait Namue. Peut-être désirait-elle réellement un simple rafraîchissement ?

Pour ce qui est des arts du Kenjutsu… Possédez-vous votre propre sabre ?

Alors qu’elle terminait sa question, le regard de la genin parcouru les multiples objets qui les entouraient avant de s’arrêter sur une demi-douzaine de bokken affichés sur l’un des murs du dojo et, sans attendre de réponse de la part de celle qui était à priori sa mentore, la jeune femme se dirigea vers ceux-ci avant d’en décrocher deux et d’en lancer un en direction de son élève du jour.

Pour le moment contentons-nous simplement de sabre d’entraînement… Je ne connais pas le niveau de profondeurs enseignés par le clan Yuki donc pardonnez moi si ce que je vais dire appartient déjà à vos connaissances et n’hésitez pas à me le signaler non plus.

Posant un regard étrangement inquisiteur sur son élève du jour, la jeune femme procéda ensuite à une démonstration pratique des différentes gardes qu’elle accompagna d’explication à chaque mouvement.

Il existe autant de gardes en Kenjutsu que de praticiens, mais la vaste majorité des dojos s’entendent sur au moins quatorze position dites de base. Seigan no Kamae, Jodan no Kamae, Sha no Kamae, O Gasumi, Shin no Kamae, Te Ura Gasumi, Ko Gasumi, In no Kamae, Hidari Gedan no Kamae, Migi Gedan no Kamae, Suwari Migi Gedan no Kamae, Suwari no Tor, Waki Tori et Tachi no Tori.

Chacun des termes étaient accompagnés d’une démonstration de la position de la part de la jeune femme à l’aide du bokken qu’elle venait d’emprunter. Puis, lorsqu’elle eut terminé, son regard alla se plonger dans celui de sa mentore.

…

Aviez-vous besoin d’un rappel sur l’utilisation de chacune des positions ?

La jeune femme regarda avec attention sa mentore pointer les deux katanas qu’elle avait emporté avec elle avant de prendre le bokken, réalisant probablement qu’il n’était peut-être pas avisé de réapprendre les bases avec une arme affilée. Puis, lorsque celle-ci eu attrapée l’arme d’entraînement, Namue écouta ses explications sur les arts enseignées par le clan Yuki en termes de maîtrise du Kenjutsu.

Shin no Kamae est une bonne posture défensive, la main forte posée le plus prêt possible de la jonction entre le manche et la lame permet à la main faible tenant l’extrémité du pommeau dans le centre de la paume de rapidement effectuer un mouvement circulaire simplement en ramenant son bras rapidement vers ses hanches.

Accompagnant ses explications d’une démonstration, le bokken de Namue effectua un mouvement circulaire avant de revenir presqu’aussitôt dans la même position de garde.

La faiblesse de cette garde se trouve dans les défenses basses puisqu’il sera très difficile de conserver ses deux mains sur le pommeau de l’arme lors d’une parade basse.

De nouveau, la genin imagea ses propos d’une démonstration, exécutant une parade basse à l’aide de sa main forte uniquement, déplaçant sa main faible instinctivement de l’extrémité du pommeau jusqu’à son avant-bras droit afin de solidifier quelque peu sa défense.

La parade reste tout de même rapide, mais ne possède aucunement la solidité d’une parade en hauteur comme illustrer précédemment. Il est possible de pallier légèrement ce problème en ramenant sa main faible au niveau de son avant-bras opposé afin de venir bloquer la rotation de son poignet en position de parade en appuyant le dos de sa lame contre son avant-bras faible, mais cette garde peut aisément se retourner contre soit puisque l’on expose son côté faible à son adversaire…

Reprenant une posture neutre, la jeune femme plongea son regard dans celui de sa mentore avant de continuer, cette fois-ci la questionna sur ses attentes plus que sur ce qu’elle connaissait déjà.

Est-ce suffisant pour rafraîchir votre mémoire ? Que puis-je faire de plus pour vous aider aujourd’hui ? Désirez-vous échanger quelques coups ?

La jeune femme écouta attentivement les commentaires de sa mentore, hochant sporadiquement la tête en signe d’approbation pour ses dires et, lorsqu’elle accepta sa proposition d’un rafraîchissement plus pratique et, quelques instants plus tard, elle reprenait le bokken que la Yuki avait laisser en faveur de sa propre lame et le tendit en direction de cette dernière.

Je propose l’utilisation des bokkens afin d’éviter des blessures inutiles.

Elle attendit ensuite que son élève de la journée lui prenne l’arme des mains avant de s’éloigner de quelques pas et, finalement, adoptée une garde polyvalente, fixant son regard dans celui de la maîtresse des glaces.

Je te laisse le premier coup.

Celui-ci ne tarda pas et la jeune femme le para aisément avant de répliquer, glissant sa lame contre celle de son adversaire avant d’effectuer une légère torsion du poignet dans le but évident de désarmer son adversaire. Il ne restait plus qu’à voir comment celle-ci allait répondre.

Namue regarda avec intérêt sa mentore se mettre en position, adoptant instinctivement une garde presqu’impeccable qui venait trahir une expérience ancienne. Son visage s’éclaira d’un large sourire lorsque celle-ci entama son assaut, enchaînant deux lacérations latérales avant de terminer avec un simple coup d’estoc que la jeune femme vint parer du plat de sa lame puis, alors que leurs deux armes étaient ainsi bloquées l’une contre l’autre, elle ne put s’empêcher de sourire avant de lancer une pique à sa supérieure.

Pas trop mal pour quelqu’un qui dit manquer de pratique.

Puis, alors qu’elle terminait sa phrase, elle rapprocha sa lame de la poigne de sa mentore et, d’un geste vif, fit tourner son poignet, cherchant à entraîner l’arme de son adversaire dans un mouvement de rotation qui ne manquerait pas de lui arracher son arme des mains si elle ne possédait pas de réponse appropriée.

Namue ne put s’empêcher d’afficher un léger sourire lorsque sa mentore modifia sa prise afin de bloquer la tentative de désarmement de la Kayuri qui para sans le moindre mal la réplique de cette dernière, d’abord sous la forme de trois frappes, puis une dizaine de frappes et, une fois la tempête de coups arrêté, la jeune femme se fendit d’un sourire malicieux tandis que trois simples mots quittaient ses lèvres.

À mon tour.

Arborant encore un sourire à pleine dent, la jeune femme enchaîna sa propre série d’une dizaine de frappe, usant de son expertise pour enchaîner les mouvements bien plus rapidement que sa partenaire d’entraînement et il ne restait plus qu’à voir si cette dernière allait être en mesure de réagir à ce soudain changement de rythme dans leur duel.

Sa mentor usa de ses réflexes de Taijutsu pour éviter une première partie de son assaut suivit d’une tentative désespéré de parade qui fut immédiatement suivit par une seconde esquive avant que la suite de son enchaînement ne fasse mouche, entraînant l’abandon de sa partenaire d’entraînement et, tandis qu’elle descendait son sabre, la genin remarqua enfin l’état d’épuisement avancé de la chûnin qui lui faisait face et elle réalisa qu’elle s’était peut-être laisser emporté lors de cet échange de coups qui était, au final, qu’un rappel pour la Yuki.

Toute mes excuses, je me suis légèrement laisser emporter.

Attrapant le bokken de son élève du jour, la genin alla ranger ceux-ci à leur place avant de revenir se positionner devant la chûnin qui commençait à reprendre son souffle.

Vous n’êtes vraiment pas mauvaise pour quelqu’un qui manque de pratique, quelques séances supplémentaires et vous aurez très probablement retrouver votre niveau d’auparavant.

Une fois sa phrase terminée, elle se dirigea vers un tonneau à proximité avant de saisir deux contenants en bois posés à proximité qu’elle remplit d’eau à même le baril avant de revenir vers son apprentie du jour et de lui tendre l’une des gourdes improvisées.

Tiens. Aviez-vous besoin d’un rappel supplémentaire ou est-ce que celui-ci était suffisant pour le moment ?