Le Colisée. A peine était-il arrivé près de l’entrée que ses tampons se faisaient agresser par le vacarme que provoquait la foule. Une foule particulièrement agitée, elle ne tenait en effet plus sur place, comme pouvait le témoigner la mini-secousse générée par les dizaine de coups de pieds que chacun infligeait aux gradins. Une foule qui demandait du sang. Non, elle l’exigeait. La voix du speaker surplombait le tumulte pour venir rassurer mais surtout exciter davantage chacune des personnes présentes.

Genji se tenait à l’extérieur. Il était un peu en avance et attendait patiemment son acolyte du jour, près du mur où leur rencontre était prévue. Il demeurait calme en apparence, mais au fond son sang s’agitait, parce que d’ordinaire il serait entré dans le Colisée pour repérer les criminels et les éliminer en douce, comme il avait pour coutume de faire. Il ne pouvait se le permettre, pas aujourd’hui, car il était là en « mission », pour Kuuli, pour leur projet, un projet qu’il nommait curieusement sous appellation de « Rafflesia ».

Ainsi, il se contint, puis finit par se mouver lorsqu’il repéra sa collègue, même s’il ne la considérait pas encore ainsi. Rien d’anormal, surtout si on connaissait bien le fils du désert. Un homme compliqué et d’ordinaire solitaire. Chose qui avait quand même tendance à changer, petit à petit, depuis la perte de ses pouvoirs et le rapprochement avec sa cousine.

« Tu es en retard. » Rétorqua -t-il en suivant la jeune femme.

En réalité, elle ne l’était pas, ou alors pas plus d’une minute.
Le surnom « Kuroko » ne le dérangeait pas. Il prit également note de celui de celle qui l’accompagnait. Une fois qu’elle se procura les tickets, les deux complices pénétrèrent au sein du Colisée. Ils trouvèrent assez facilement leur emplacement, qui leur offrait d’ailleurs une très bonne vue sur l’arène.

Genji écouta l’exposé de la jeune femme avec une certaine attention avant d’acquiescer d’un léger signe de tête. Certains de ces noms lui disait vaguement quelque chose, sur un en particulier à vrai dire.

« Je vois. Aucun d’eux ne vaut le champion des Meikyu qui a visiblement tourné le dos aux siens, comme beaucoup d’autres, mais on s’en contentera. » Lâcha -t-il, tandis que quelques flash lui apparaissaient, le renvoyant à une époque qui semblait si lointaine.

Il balaya brièvement les gradins du regard avant de poser ses iris sur l’arène, là où un combat semblait se profiler. La foule s’agitait de nouveau. Les bookmaker étaient présents, non loin, et magouillaient, comme ils avaient pour coutume de le faire. Rien ne semblait échapper à l’Asaara, du moins il le croyait. Puis, soudain, l’interrogation de Makuro le fit tourner la tête.

« Kuuli n’a pas jugé bon de te le dire ? Je suis en effet un fils du désert. » Rétorqua -t-il, avant de porter son attention sur le combat qui se profilait. « Je veux qu’on soumette les « élus » à d’autres épreuves, car la force physique ne fait pas tout, et je préfère prendre mes précautions pour éviter des éventuels traîtres. » Lâcha -t-il, tandis que débutait le premier combat tant attendu.

L’interrogation de Makuro stimula son imagination, lui permettant de songer à une multitude d’épreuve susceptible d’éprouver ces futurs soldats, qui n’allait en définitive n’être que des vulgaires chairs à canons. Un détail non négligeable, dont le fils de désert semblait avoir reléguer au second plan.

« Hum… » Fit-il, tandis que son regard interrogeait sa partenaire, qui semblait visiblement un brin perplexe quant à l’idée d’éprouver ceux qui auront le malheur d’être choisi pour le compte de leur organisation, de leur projet.

Les explications de Makuro ne se firent pas prier longtemps. Jugeant les arguments de sa comparse comme étant trop laxistes, Genji n’insista pas pour autant, puisqu’il s’agissait des consignes de la future impératrice de Kaze, Kuuli, sa cousine, envers qui il avait prêté allégeance. Il croyait en Kuuli, en ses projets, elle restait, selon lui, la seule apte à redonner la grandeur de leur clan, de leur pays. Elle était celle qui ferait, un jour, briller et rayonner Kaze aux quatre coins du monde, d’une façon ou d’une autre. Il frôlait le fanatisme.

« Tu seras responsable des moindres de leurs méfaits. » Lâcha -t-il, à l’égard de sa collègue, tandis que son masque se retournait lentement en direction de l’arène, là où un combat était sur le point de commencer.

Il acceptait de suivre les consignes de Makuro, qui n’étaient à priori que la transposition de celles de Kuuli, leur cheffe, néanmoins le fils du désert se refusait d’endosser la responsabilité de leurs futurs recrues, puisque les choses n’allaient pas se faire comme il l’entendait. Pas certain que la perte de ses pouvoirs lui permette de rivaliser avec sa nouvelle collègue, mais il était du genre pragmatique, et ferait ce qu’il jugeait nécessaire, quitte à tuer cette jeune femme, si jamais leurs futurs recrues venaient à commettre des actes qui leurs seraient dommageables.

Écoutant la remarque de sa comparse, sans pour autant se retourner complètement vers elle, il observait attentivement l’homme qui rentrait sur l’arène. L’homme dont elle parlait. Ce fameux stratège.

Seijuro, le stratège, fit la démonstration de son talent et remporta rapidement son combat, sans transpirer. Genji reconnaissait qu’il était doué, et soupçonnait que le combattant en question ait fait volontairement traîner le combat pour que cela ne s’achève pas dès sa première offensive. Restant aussi impassible et froid que son masque, le fils du désert attendait patiemment le prochain affrontement.

« Il est talentueux… » concéda -t-il.

Comment comptait-elle dompter un tel individu, se demanda -t-il. Lui couper un bras serait intéressant pour le soumettre, songea -t-il, tout en pensant à d’autres possibilités, tandis que les affrontements se succédaient, tous aussi ennuyeux les uns que les autres, en dehors de celui de Seijuro. Se faisant à l’idée que ce n’était pas à lui que revenait la tâche de soumettre leurs futurs recrues, Genji se contenta d’observer un énième combat, bien plus intéressant que ceux qui lui précédèrent. Il n’aurait probablement pas parié sur le type qui arriva en final, qui allait s'opposait au fameux Seijuro, mais saisit parfaitement pourquoi cet Atsushi en était arrivé jusqu’à ici.

« Atsushi. » Rétorqua -t-il, spontanément.

Il n’était pas du genre à parier, et ne s’était en réalité pas rendu compte de ce qu’il venait de prononcer. Trop tard.

Seijuro avait incontestablement plus de talent et un potentiel hors norme, il pourrait limite rejoindre ses hommes de mains. Cependant, sa nonchalance, son orgueil et son excès de confiance étaient autant d’handicap qui pourraient le mener à sa perte. Aussi, c’était exactement le genre d’individu qu’il fallait, à ses yeux, éviter dans l’organisation. Car, ce genre de type n’était pas sans ambition, et c’était typique le genre de personne qu’on ne pouvait pas facilement briser, du moins pas avec les méthodes laxistes de cette Makuro. L’autre individu, grand en taille et particulièrement imposant, était le genre de petit chien à obéir docilement, pourvu qu’il prenne peur.

Le combat débutait. La foule était tout excité. Ils recommençaient, frappant les gradins de leurs pieds, telles des animaux sauvages. Ils scandaient, de part et d’autre, le nom de leur favori. Seijuro était naturellement celui qui avait su charmer et gagner le cœur du public. Il jouissait d’une réputation hors norme, et beaucoup allaient parier naturellement sur sa personne.

« Toutes les conditions sont réunies pour que ton favori perde. » Lâcha -t-il, tandis que son regard était posé sur le combattant en question.

Ce n’était pas dans son genre de s’exprimer sans qu’il y ait la nécessité de le faire, mais il ressenti le besoin de le faire, pour que sa collège prenne le temps d’y réfléchir.

Atsushi se faisait acculer, mais Seijuro ne lui portait pas le coup de grâce, faisant volontairement durer le combat. Le public adorait. Le speaker se régalait. Impassible, Genji se contentait de regarder le combat, dont l’issu l’indifférait au plus haut point. Puis, soudain, une frappe à la hache, des plus inattendues, de la part d’Atsushi vint faire taire tout le public. Le doux son du silence. Que c’était agréable, songea et ressenti l’homme au masque de fer. Le sang giclait, sous le regard incompréhensif du public. Seijuro allait-il tomber ? Atsushi allait-il déjouer tous les pronostics ? Cela importait peu à l’homme masqué, qui se contentait de savourer ce moment de silence.