Le jour s’éteignait, l’astre solaire croquait les cumulus de ses rayons sanguins, les teintes rosés des nuages transformant le ciel en un tableau divin. Les ombres des saules s’allongèrent sans fin, semblable à de grands spectres se donnant la main. La pénombre quant à elle, attirait et enveloppait les monts qui se succédaient à mesure de son avancée jusqu’aux Bois enchantés.
Parmi les hauteurs de ces monts brunâtres où le vent insolent venait apporter ces brumes, après s’être exilé d’Iwagakure no Satô, Senkū en compagnie de ses frères et nouveaux alliés, cheminait les chemins caillouteux de la Terre qui le séparait de sa patrie natale.
Les frontières se dessinaient et se rapprochaient, le Yaoguaï aîné complétait le trio de tête en compagnie de son frère et du dragon de lumière. L’ancien Koretsu toujours en marche, adressa un regard du coin des yeux au mentor de Genkû, l’expression sur son visage dénotait un être dorénavant apaisé, quoiqu’un tantinet gêné d’avouer ses torts.
« Sumanaï*, Hon’. Tu avais raison depuis le début. J’ai eu tort que de m’attacher à ce village et à ses habitants.. Le rôle dont je bénéficiais m’a fait délaisser les miens, cela ne se reproduira plus, tu as ma parole. » Avouait-il à son fidèle ami.
*Désolé
Le primitif avait beau être doté d’un ego et d’un orgueil conséquent, cela ne l’empêchait point de reconnaître sa culpabilité auprès de son semblable, qui plus est, Gardien du Pays ancestral.
Il s’arrêta brusquement, contraignant le groupe à en faire de même. Le Yaojin s’approchait du bord d’une falaise, les arbres éternels pouvait s’entrevoir de sa position. Son bandeau frontal dans sa main droite, jetant un œil à l'écusson avant de le balancer dans le vide abyssal. Comme pour démontrer que la Roche ne valait plus rien à ses yeux.
« Tomoe, Ema et Kõ, dorénavant vous faîtes partis des nôtres. Jetez vos bandeaux, débarrassez-vous de ces chaînes qui vous lient à Iwa et à Tsuchi no Kuni. » Incitait-il l'air perpétuellement serein.
L’ex patriarche du Sazori invitait les anciens iwajin à se défaire de leurs appartenance aux rocailles, tout comme à son instar. Ses yeux d’or s’étaient principalement attardés sur les deux jeunes femmes et l'Asaara, qui sans aucun doute rêvait de cet instant. Le guerrier millénaire fut instantanément volt-face, sa chevelure virevoltante au gré des brises. Le soleil dans son agonie dorait les vallées et s'éteignait sans bruit, La lune au teint d'argent, resplendissante et pleine, s'élevait et dominait les vallées et frontières du Bois et de la Terre.
« Nous allons représenter Hayashi no Kuni à travers une autre entité. Désormais nous serons... » Déclarait le Sennen Mûsha sans finir sa phrase.
Ses paupières s’étaient lentement closes. Senkû faisait exprès de laisser voguer un silence, un suspens dominer l’atmosphère ambiant avant de rouvrir instantanément ses yeux fixant la sphère lunaire immaculé.
Il s’imaginait que tout cela aurait un goût différent ; que sa liberté si chère allait sustenter ce creux abyssal percé par sa sédentarisation à Iwagakure no Satô. Pourtant, il n’y avait sans en douter une large partie de Genkû qui ressentait une part d’inachevé. Le paradoxe de n’avoir pas choisi ce départ ; car même s’il en avait eu le choix en apparence, quel frère pouvait se targuer d’en rester un en laissant l’honneur familial bafoué.
Mais il n’était pas être à se morfondre et bientôt le dégoût et la colère furent maîtrisés, canalisés. Le scientifique de génie savait ce qui lui restait à faire, avançant côte à côte entre les paysages vallonnés de cette partie de Yûkan avec son fraternel. Accompagné désormais par les Gardiens comme il était habituel depuis son enfance, ce qui avait ses charmes et ses inconvénients -surtout quand Fujimi dégageait ses effroyables effluves de spiritueux- les Hayashijins avaient grossis leurs rangs. D’abord Kô, sa seule vraie relation amicale entre les murs du village de la Roche, qui avait selon lui fait le bon choix en se jetant de cette façon dans le vide. Il lui fallait seulement lui signaler de ne plus jamais ployer le genou comme il l’avait fait ; un Yaojin n’en avait pas le droit. Ensuite venait Tomoe, l’Explosive avec qui il avait arpenté les frontières de la Terre à la recherche des Varans dans une aventure pleine de rebondissement. Venait en dernier Ema, diamant brut qu’il faudrait tailler au sein du Pays du Bois dans le but d’en faire une associée à la hauteur de ses ambitions ; la fille à la philosophie la plus proche de la sienne sur le monde shinobi qui lui ait été donné de rencontrer.
À leur manière, ils étaient une entité tentaculaire, ou au moins les prémices de quelque chose qui s’élèveraient au-dessus de ces Monts Millénaires.
Senkû s’excusa à Honma et le jeune Prédateur ne put s’empêcher de laisser apparaître un rictus qui n’avait rien de moqueur ; s’inscrivant dans la palette de mœurs que ses traits laissaient parfois transparaître. Quand il s’arrêta face au vide, il en fit de même à quelques pas de lui et sortit d’à l’intérieur de sa tenue le bandeau ninja. Symbole de ce passé bref mais instructif, il se promit à ce moment précis de n’avoir plus jamais à dépendre de quelque grand-frère ou maître pour mener ses projets à bien ; de devenir celui que le Dragon Lumineux avait prédit. Plus jamais la soumission à un Etat ou aux règles qu’il n’eût pas décidé.
Au creux de sa paume, ses jointures blanches se renfermant sur le tissu et le métal, un crissement métallique vint interrompre ce moment solennel. Ouvrant sa main, il ne restait qu’une boule d’où s’étirait des filaments noirs. Il tendit son membre supérieur et laissa tomber la métaphore de l’acte qu’il fomentait de mille façons différentes.
Sans attendre la mise en branle de Senkû, le cadet se mit en marche l’air maussade mais l’oeil plein d’étincelles ; celle d’un tonnerre qu’on entendrait jusqu’aux confins du Monde Connu.
La lune était belle, ce jour-là. Le nom de ce que comptait bâtir le Sennen Mûsha sembla se refléter sur elle. Sans plus tarder, il accéléra le pas jusqu’à Hayashi no Kuni et plus tard, ayant passé un petit moment à discuter et lâcher plusieurs bribes de ses plans au Meikyû Borgne, il arriva à niveau d’épaule du Banni.
“ On rentre enfin. Il a simplement fallu un chef de village paranoïaque et ton égo pour ça. ” Il ne pouvait plus attendre d’enlever ce fichu Henge ; ça devrait tout de même se faire une fois à la maison.
Un rêve non plus du bout des doigt, atteint fermement. Ce temps terminé. Les souvenirs laissés là-bas, loin. L'heure avait bien sonné, elle qui était à présent partie.
Impossible devait-il être de trouver un air plus ravi sur un autre visage que celui habillant Tomoe. Un large sourire chaleureux, réalisait-elle véritablement ses propres décision ? Égoïste, impatiente, folle qu'elle était avait tout abandonné. Sa Obasan, son passé, son naissance, les dix-neuf premières années de sa vie, son nom. Oui. Le nom Chôkoku ne la soumettait plus. Plus jamais ! Quand bien même elle en demeurait une, était révolu le temps des comptes à rendre. Le symbole même ornant sa parure en son dos était ce dernier poids mort derrière elle. Accroché à sa cheville, elle avançait en le traînant, son esprit le sentant sous sa gorge. Bientôt, oui bientôt, la liberté à portée de main la kunoïchi en serait délivrée.
Déjà le soleil bercé qui laissait doucement place à l'obscurité. Enfin seule la luminosité de l'astre naturel qui surplombait le monde. Celui qui s'offrait maintenant à eux. La curiosité à l'affût, Tomoe les avait tous observé. Sans vraiment comprendre, sans vraiment savoir, ce faciès si enjoué, si heureux, s'était envolé. Ni regrets ni remords -impensable !- la brunette posa ses pupilles semblables à cette nuit aux petits points pétillants sur l'homme en exil qui avait, sans le savoir, précipité l'atteinte de son unique but. Il avait mis un temps mort sur cette marche collective. Le symbole de son geste, de ses mots, résonnèrent dans le cœur de la Chôkoku. Des tremblements d'excitation, d'une joie qu'elle avait connu qu'une fois auparavant, s'emparèrent de sa gorge. Les mots perdus lorsque l'Hayashijin se tourna vers elle et deux autres anciens Iwajin, de ces mêmes émotions probablement visibles uniquement par Fujimi à ses côtés, elle le détacha.
Elle déglutit en le regardant. La mémoire du dégoût lorsque jamais ce bandeau ne lui eut inspiré sympathie, protection. Non, cela n'eut été pour Tomoe que prison et haine. La sensation d'avoir brisé la ligne du temps lorsque son regard se posa sur cette représentation de la montagne, ce fier morceau de ferraille. Le passage de cette tête blonde devant elle la sortit de ses pensées lointaines. Sans un mot, elle vint alors à s'avancer, le croisant sur la route et, le visage droit, sans nulle expression, elle ne chuchota qu'à son attention à l'instant où elle arriva à son niveau. « Genkû... Quel est le bruit du symbole de la roche qui tombe du haut de sa propre falaise ? » La métaphore n'était pas loin. Était-elle peut-être trop proche du pas à franchir pour ne pouvoir s'empêcher d'avoir de telles images ?
La brune n'attendit rien de sa part alors qu'elle le contourna et, l'essence de son appartenance à la roche entre les mains, elle prit place. Le bord du gouffre. Plus jamais. La main lâcha l'accessoire et d'en haut Tomoe s'imagina le fracas de cette faible chose. Ô qu'elle était heureuse.
Tsukimono.
La Chôkoku suivait le pas à vive allure, terriblement impatiente d'enfin rencontrer le pays natal de sa sensei. Fujimi qui lui avait tant fait rêvé de ce monde par sa simple provenance, celui ouvert, celui qui était libre. Elle se doutait bien qu'il devait y avoir tant à découvrir. C'était une nouvelle porte qui s'ouvrait devant elle, des possibilités illimitées qu'elle s'imaginait. Tomoe avait rejoint une nouvelle patrie. Non. Une nouvelle famille. Et puisse-t-elle enfin y trouver un véritable but, un avenir.
Un appel à l’aide. Tout avait commencé de cette façon, en fait. Juste ça, lâché un peu à l’aveugle, sans savoir. Une manière de demander aux cieux de la libérer, enfin. Et il l’avait libérée. Genkû. Parmi toutes les rencontres faites au village, il était le seul à la comprendre vraiment, à ne pas la considérer comme une étrange bête de foire. Ses idéaux sont étranges, ses désirs n’ont pas forcément de sens aux yeux de tous ces autres patriotes. Pourtant, le jeune homme était passé à travers, l’avait écoutée mais aussi abondé dans son sens. Le seul être compréhensif de ce village, le seul en qui Ema avait eu suffisamment confiance pour libérer ses réelles pensées au sujet de leur monde.
Depuis, la Rose marche aux côtés de nombreuses personnes, connues comme inconnues. Kô, l’homme connu d’abord comme un adversaire, puis comme un convalescent. Ema regarde avec attention et … Et il est le seul qu’elle connaisse, en fait. À l’exception de Genkû, tous ces visages sont inconnus. Pourtant, ces visages représentent tous son nouvel espoir. Ils sont là, porteurs d’une ambition commune, porteurs de ce drapeau exceptionnel que la jeune femme recherchait. Pour cela, elle aura dû quitter Tenzin, cet être si particulier qu’elle affectionne tant. Faire une croix sur sa seule source de réconfort à Iwa, mais … Mais le jeu en vaudra probablement la chandelle, non ? Quitter le réconfort illusoire d’un village plein de mensonges pour se projeter dans l’inconnu … Mais un inconnu qui a déjà un air plus rassurant que les villages cachés. Il y a Genkû. Tant qu’il y aura Genkû, Ema sait qu’elle sera sur la bonne direction.
Ses prunelles se lèvent sur la silhouette qui mène la danse. Il leur indique de détacher leurs bandeaux du village, pour totalement s’affranchir. Déployer ses ailes passe par la destruction de la cage qui les retient. Hum. C’était si simple, alors ? Ema défait le bandeau et le maintient un instant dans sa main. À la fin d’une ère, au renouveau, à la disparition des anciennes rencontres, à cette nouvelle voie qu’elle trace dans sa vie. Au progrès. La Rose laisse le bandeau tomber mollement contre le sol. Il ne rebondit pas, ne fait même pas de bruit, à l’instar de son histoire à Iwa. Pas de bruit. Juste le néant. Un néant assourdissant tant il montre la médiocrité du village. La médiocrité de ses valeurs. Triste histoire. Silencieuse.
Mais cette histoire, là, celle qui commence … Celle du Tsukimono … Celle-ci ne le sera pas.
Ce jour est arrivé. Depuis un certain temps, je ne pensais qu'à une chose, partir dans lieu qui était beau de l'extérieur, mais si dégueulasse à l'intérieur. L'intérieur, vous pensez arrivé dans un endroit qui vous rendra heureux, vous montreras une nouvelle manière de pensée, un monde meilleur et que finalement, c'est un endroit remplit de mensonges, faux semblants et de chaînes invisibles, vous êtes abattus. Abattu, mais pas détruit et c'est pour cela que j'ai réussi à tenir jusqu'à ce jour, grâce à mon amitié avec Genkû. Genkû qui est d'ailleurs présent pour ce jour, comme je m'en doutais depuis quelques temps à vrai dire. Dire que je pense à cet instant depuis quasiment notre rencontre, quand on avait parlé de nos terres d'origines et de notre incompréhension aux mondes de shinobi. Shinobi, un terme que Honma m'a appris à détester, une condition de vie qui ne m'allais pas et que petit à petit, je commence à me dire qu'elle doit être détruite. Détruite par nous, nous qui avons compris que ce n'est pas une vraie vie, qui est basé sur la manipulation, qui emmènera toujours les gens à la guerre. Guerres inacceptables auxquelles je veux mettre fin en aidant ma nouvelle famille ici présente, je me sens bien avec eux. Eux que je ne connais pas tous, mais au moins quatre, dont une que je m'attendais pas à voir ici, mais je ne vais pas m'en plaindre non plus, elle peut être une alliée exceptionnelle. Exceptionnelle, comme notre équipe à vrai dire, je le sais, je le sens, nous allons faire de grandes choses tous ensemble.
On s'arrête à un moment, en haut d'une falaise qui nous permettait de voir au loin le fameux Pays du Bois, une forêt que je n'avais jamais vue jusqu'à aujourd'hui. Aujourd'hui je découvre un nouveau paysage, mais je sais qu'avec eux, ma soif de vision n'est pas prête d'être rassasiée, jamais. Jamais je n'aurais pensé me retrouver aux côtés de Senkû en dehors des portes d'Iwa, lui qui m'avait fait comprendre que si je partais, je serais traqué jusqu'au bout, jusqu'à la fin. Fin différente, Senkû montre l'exemple en lançant son bandeau d'Iwa sans aucun remords, juste pour montrer que c'est bien plus facile qu'on peut le penser. Penser à... Mais tiens mon bandeau d'ailleurs, je l'ai laissé à Iwa, je n'ai pas du tout eu envie de le prendre en allant aux portes.
Alors, je laisse le plaisir à mes compatriotes de le faire également avant de me mettre au bord de la falaise à mon tour pour regarder dans le vide. Vide qui ne me donne pas de vertige, je ne ressens que du plaisir, de la motivation et de folles ambitions. Ambitions impensables il y a encore quelques mois, aujourd'hui je n'aspire qu'à devenir aussi fort que Senkû, aussi malicieux que Genkû, aussi sage qu'Honma ou encore aussi libre que les oiseaux qui volent sous mon regard.
"Adieu, Iwa !" Je me retourne vers mes nouveaux coéquipiers. "En fait je l'ai laissé là-bas, j'en avais déjà tellement plus rien à foutre de ce bandeau qu'il passait la plupart du temps dans mon tiroir." Je ricane un peu avant de retourner dans les rangs, prêt à suivre le chemin pour notre nouvelle vie.
Prélude : Naissance ▬ 憑物 Tsukimono the possessing thing
Tsukimono Gang ▬ Tsuchi no kuni pays de la terre
Il était enfin temps de rentrer. Après tout ce temps passé dans le pays de la terre, le dragon protecteur du bois n’attendait que ça, de pouvoir rentrer chez elle, dans sa grande demeure, pouvoir passer toute une journée à se prélasser et prendre un bain chaud. Elle ne rêvait que de ça. Mais avant cela, ils devaient faire cette route, pour rejoindre Yaogakure.
Mais cette fois-ci, par rapport au moment ou elle est venu juste avec son frère dans les contrées de la pierre, pour ce retour, c’est en groupe qu’il se passe. Et elle ne s’y attendait pas du tout, à ce que toute cette histoire prenne une aussi grande ampleur. Les deux jumeaux Washi avaient un seul et unique but en venant en visite dans ce village ninja, faire en sorte d’ouvrir les yeux à Senkû et lui expliquer qu’il doit rentrer chez lui, car le bois a besoin de lui.
Il suffit maintenant de regarder ce groupe de personne pour comprendre que tout cela s’est déroulé d’une manière bien différente. Même si cet homme, le Bakuhatsu, à la tête d’Iwa, fit preuve de beaucoup retenue et de calme, tout en permettant au guerrier millénaire de partir sans avoir de problème, il était temps pour ces personnes, qui, après les mots du kage, décidèrent de suivre les Hayashijins, d’enfin se séparer totalement de ce lien qu’ils possèdent avec le village caché.
Un geste fort et signe d’un nouveau départ. Un premier bandeau qui tombe dans le vide, celui du dieu guerrier, homme de la faune. Un exemple pour les autres, une idée à suivre pour être dans le même mouvement. Mouvement qui fut vite suivi par les trois autres anciens shinobi d’Iwa. Tomoe comprise dans tout ça.
Fujimi regarde alors sa petite protégée se détacher de tout lien avec la roche. Ce moment, elle eut l’occasion de le voir plusieurs fois dans ses rêves. Elle le savait qu’un jour, elle irait chercher la Chokokû pour partir à l’aventure avec elle. Mais en ce jour, la réalité dépasse le rêve et Tomoe se trouve juste devant elle, prête à partir avec eux.
« J’imagine qu’on va enfin pouvoir s’amuser ! » dit-elle en regardant son frère et Genkû. « Yaogakure sans toi, c’était pas du tout la même chose. » en s'adressant au plus jeune des Yaoguaï.
Puis, une fois son bandeau tombé au sol, elle s’approcha de Tomoe, arrivant juste derrière elle. Elle l’enlaça, dans son dos, en passant ses bras au niveau de ses épaules, puis déposa sa tête contre la sienne. « Je suis fier de toi, tu le sais ça hein ? » C’était presque comme si on pouvait ressentir cette émotion présente à l’intérieur du dragon qui, d’ordinaire, ne laisse pas vraiment sortir ce genre de sentiment. « Je vais faire en sorte de t’offrir ce futur de rêve dont on avait tant parlé. »
Terminant sa phrase, elle leva les yeux vers son Senkû, frère de la forêt, sang de son sang. Une nouvelle tête à suivre, une nouvelle puissance à instaurer. Un changement dans le monde, un groupe qui va laisser sa marque, peu importe la manière.
❞Crois-moi. Un jour viendra où l’homme n’aura plus besoin d’amour. Un jour, il cessera de parcourir le monde comme s’il devait tout porter à bout de bras… Le soleil, le ciel, quand bien même les heures sombres de la nuit. Car à l’instant secret où il s'éveille, au son des battements. Il se rendra compte que l’amitié des hommes n’est guère ce dont il a besoin, il les exterminera tous au lever de la nouvelle ère.
Cette montagne, s’étend à perte de vue, et semble s’éloigner de plus en plus. Soleil levant, qui chute sur les cendres des layons. Lumière révélatrice qui brille sur ces terres autrefois porteuses de renouveau, chaleur rayonnante picorant sa peau de marbre et toison d'aubépine noyant son échine. Alors que l'ondée tropicale s'abat et que le soleil virevolte avec splendeur, Senku et sa troupe s’avance tel des fauves parmi l’opulence, fondant comme l'éclair dans les abysses des venelles. Sa pupille rubiconde et obscure s'ancre au travers de l'horizon empli de couleurs, la froideur qui anime ses muscles commence à s'atténuer, comme un glaçon extrait des flammes. La lente ascension du soleil semble sempiternelle tant il est impatient d’avoir à comprendre. Le clair de l'astre solaire miroite dans celui-ci et embrase les émotions qui y sont gravés. Leurs pas se meurent ainsi sur la devanture d'une jetée.
Les protagonistes sont étreints par la nature et pour le moment, leurs présences ne sont point détectables. Ainsi Honma, de par sa sagesse impie s'intéresse aux mots que prononce tout un chacun avant d'analyser chaque parcelle des environs. Dans ces moments où l'atmosphère pâmer de tension vient sinuer entre leurs âmes, ils ne peuvent que se faire confiance et entrelacer le moindre de leurs espoirs. Ainsi le discours de Senku dégage des pistes pertinentes, teintées de culpabilité et de remords amers, mais sans omettre la rage qui lui ait du. Étrange sentiment que d'apercevoir, à travers la jungle d'appréhension et de défiance envers ces trois diasporas, une similarité d'avec le gardien d’Hayashi. Lointain, ténu, et pourtant sensible.
Et alors retentis cette idée d'indépendance organisé. Non plus d'indépendants, mais de membre d’une organisation à part entière, cancer interne pour chaque groupe désormais, et non plus d’une meute solitaire issue des Indépendants eux-mêmes. Et si l'on ajoutait à cette réalité celle de traîtres ralliés à des causes contraires, il fallait conclure que le monde était devenue une sacrée taupinière. À purger au karcher, à tous les coups. Quant à l'intervention de sa jumelle, voix mordante dans cet océan de consensus, elle rappela un passé fort proche à Honma. Celui de la guerre.
Le gardien conserva dès lors sa langue immobile. Apposant chacune de ses mains sur l’épaule des deux frères Yaoguaï. C’était là un nouveau commencement. Comme si, ce fut là l’âge auquel la poésie entra dans sa vie. Il ne su pas expliquer cette sensation, d’où elle provenait… Du froid blanc de l’hiver ou bien même du torrent rugissant d’une rivière - parce que non ce n’était pas une voix, ni même un mot. Ce n’était pas non plus le silence. Honma ne savait pas quoi dire. Et c’est pour cela que ses lèvres n’ont su former ce nom. Ses yeux étaient aveuglés par tant de splendeur, et quelque chose germa dans son âme, le sortant de cette catalepsie Alors son cœur fut déchiré sous le vent.
Le pays de la terre avait été une aventure plutôt plate, pour le jeune lutin qui se tenait en retrait comparé à ses compagnons. Il s'attendait à beaucoup de nouveauté, de découverte ou encore de moments difficiles, de moments de camaraderies... et à la place, il avait eu droit à une mise en scène assez spéciale, dans laquelle il n'avait pas su contenir ses propres émotions, portée par sa naïveté divine. Cela dit, tout cela n'avait pas que du mauvais, il y avait une chose de bonne... Quelque chose qui allait apporter un sang neuf au pays du bois.
Le retour du Sennen Mûsha allait faire parler de lui. Et ce dernier, n'avait pas attendu bien longtemps pour prendre les directives, mais encore fallait-il que le lutin réfléchisse. Toute cette diplomatie et cette violence était particulièrement émouvante, pour le retour de " L'aîné ", aucune goutte de sang n'avait eu besoin d'être versé sur le sol rocailleux de ce pays en perdition. Seulement, une chose n'allait pas au fond de l'être que représentait le petit pédestre : était-il fait pour de tels idéaux ?
En scrutant le ciel, il espérait y trouver sa réponse et une fois de plus c'était avec une teinte de naïveté qui lui paraissait cette fois-ci trop évidente. Si ses nouveaux compagnons avaient déjà prêté allégeance au Seigneur Yaoguaï ainsi qu'à son jeune frère, Wagyû restait sur ses positions quant à cette décision.
Tsukimono...
C'était la dénomination exacte de ce qui allait apporter un vent de changement sur le Yûkan tout entier. Les ambitions de ces jeunes êtres tous unis par un lieu et un rêve, n'avaient de cesse de grandir. Et, Senkû de la faune avait scellé de sa parole, la création d'une " entité " qui sera dans un futur proche, reconnue pour ce qu'elle a pu accomplir sur chaque contrée de ce vaste étendu qui restait inconnu au jeune Gladiateur.
▬ Ē to... concernant tout cela, vous savez... Tsukimono et tout ce que cela peut engendrer... Je... Je dois faire un choix.
Après avoir joins bout à bout les récents évènements durant de longs moments de concentration, le jeune bœuf avait compris que le Sennen Mûsha n'avait pas gagné sa liberté, mais qu'elle lui avait été donnée. Il avait parfaitement vu, que tôt ou tard, il y aurait pu avoir une guerre pour récupérer le créateur de Tsukimono. Seulement, le lutin, ne se voyait pas comme quelqu'un possédant de telles ambitions, il n'était ni du genre très combatif, ni même un bon politicien. A vrai dire, la seule chose pour laquelle il excellait, c'était de prendre des décisions hâtives.
Mais cette fois-ci, il en était hors de question. Et, de manière timide, après avoir pris la parole, il marquait une courte pause en faisant tournoyer ses pouces l'un au-dessus de l'autre. Il lui fallait prendre une décision, maintenant. Et celle-ci était pourtant claire.
▬ J'ai... J'ai juré de m'occuper de Maître Honma du mieux que je pouvais et ce, jusqu'à ce qu'il m'acquitte officiellement de cette tâche. Alors, je suppose que finalement, je vais devoir faire plus d'effort qu'il n'en était prévu pour ne pas être le boulet de Tsukimono.
La messe était dite. Il avait juré fidélité à une personne en particulier, bien avant que tout cela ne commence. Et il n'était pas du genre à manquer à sa parole. S'il devait évoluer et devenir une personne, c'est au sein de ce groupe, qu'il avait choisi de grandir.
Les personnes qui étaient présentes ici, pouvaient désormais rentrer chez eux, à Hayashi No Kuni.