En se réveillant ce matin, Kan se sentait plutôt bien. En même temps, il avait pas vraiment de raison de se sentir mal. Hier il avait réussi la première épreuve de l'Examen Impérial et s'était qualifié pour le second tour, sans vraiment faire quoi que ce soit. Tout ce qu'il avait fait, c'était se faire des amis humains ou non, et apparemment c'était ce que voulaient les organisateurs. Par contre ses deux collègues qui étaient avec lui dans la Raffinerie n'avaient pas été sélectionnés. Sûrement parce qu'ils n'avaient pas été gentils avec les cloportes.

Mais il était temps maintenant d'aller à la deuxième épreuve : il se rendit sur place avec un sourire aux lèvres, espérant se faire encore plus de copains aujourd'hui. Il se demandait quand même quelle épreuve l'attendrait. Un labyrinthe, ce serait trop cool ! Ou alors, une course en sac à patates ! Un jeu d'orientation ! Un escape game ! Une course de brouettes !

Du coup, il était quand même un peu déçu de voir que c'était seulement des combats. Ils manquaient d'imagination au Teikoku ! Il espérait qu'une fois que la Résistance aurait repris Kumo, il y aurait des examens plus sympa. Mais comme il était gentil, il se dit qu'il pourrait toujours envoyer une lettre à la Régente pour lui proposer ses idées, au cas-où ils veuillent retenter l'expérience une fois rentrés chez eux.

Devant le panneau, il se rendit compte qu'il ne connaissait pas le nom de ses coéquipiers mais en tout cas, leurs noms étaient plutôt cool. Surtout celui qui s'appelait Ban Zai, quand on le disait vite, ça donnait un truc marrant ! Par contre, ils devaient de nouveau se rendre dans un endroit calciné. Ils aimaient bien brûler des trucs au Teikoku, et ils aimaient bien mettre des gens dedans, ça c'était un truc vraiment bizarre. Sûrement que la personne qui organisait les épreuves devrait aller voir un spécialiste, parce qu'il avait du se passer un truc pas très cool pendant sa jeunesse...

En entrant dans l'immense Assemblée calcinée, se retrouvant enfin face à ses adversaires, il lança son habituel :

- Coucou les copains ! Vous êtes en forme ?

Il trouvait ça quand même dommage qu'aucun des deux n'ait emmené son loup comme le soldat d'hier, il avait même pas eu le temps d'aller le caresser...

Résumé:

Le lieu était historique et lourd de sens... Cette fameuse assemblée calcinée lors de la bataille contre les Teikokujin. C'était comme si l'empire voulait nous envoyer un message. De nouveau encore, nous étions deux Kumojin contre un Teikokujin, dans ce lieu. C'était comme si, on cherchait à nous opposer, mais le message était clair, il fallait qu'on coopère, qu'on tourne l'autre joue, qu'on laisse couler ce qu'il s'était passé ici même.

Un patriote aurait pu très mal prendre, cela pouvait être interpréter comme un manque de respect et une nouvelle humiliation. Organiser un événement dans le lieu même symbole de la déchéance et de l'impuissance Kumojin... Cette insolence de l'empire me faisait rire, il manquait ouvertement de respect aux forces Kumojin. M'enfin, je n'étais pas de ceux qui sont nés ici. Je n'en avais strictement rien à faire de cette histoire, après tout, c'est l'art de la guerre ou plutôt l'art du pouvoir.

C'était de la politique, le fort écrase le faible. Cette épreuve en était d'ailleurs l'allégorie parfaite. D'ailleurs, nous étions arrivés à la dernières épreuve. Comme prévu, il fallait s'entraider pour réussir la toute première épreuve. Seul la coopération nous aurait permis de réussir, alors que là, tout porte à croire que le combat est la seule issue. Vu le contexte, on dirait même que les organisateurs cherchent à ce que les Kumojin s'allient aux Teikokujin pour tuer les leurs : tel était l'impression que j'avais.

Le kumojin, Kao kan, semblait candide, voire relativement immature. Un simple "coucou les copains" lui a suffit en ce moment, alors que l'épreuve était, on ne peut plus sérieuse. Entre l'autre inactif de la première épreuve et le jeune crédule de la seconde, pas étonnant que Kumo se soit fait littéralement roulé dessus par le rouleau compresseur Teikokujin. Il fallait demeurer professionnel et même s'il semblait plus âgé que moi.

"Tu es Ban Zai ? Ou alors Kao Kan ?"

Zai était assis en tailleur sur le pan d'un mur noirci par la fumée et taché du sang séché des victimes ayant succombé le jour de l'assaut sur Kumo. Il sifflotait doucement en jouant avec son sabre, le tenant en équilibre par la pointe de la lame du bout de l'index. Même si l'endroit avait été nettoyé et vidé de tout cadavres calcinés, il persistait dans l'air une odeur âpre et piquante qui venait lui titiller gentillement ses petites narines excitées.

Il vit ses deux adversaires se rejoindre au milieu du terrain, deux gosses, encore et toujours, à croire que ce monde était rempli d'enfants soldats, une triste réalité qui cependant ne touchait pas le cœur du shinobi en combinaison de sang moulante. Le monde était déjà bien trop rempli de misère et de malheur pour qu'il laisse la pitié lui tacher sa joie aussi innocente que névrosée. D'un bond silencieux, agile, il se rapprocha un peu plus des gosses, sautant de débris en débris. Une fois à portée de voix, les pieds joints in-extremis sur une poutre de bois bancale qui surplombait la scène, il fit son entrée théâtrale.

- Oyez, oyez! Misérables chiards ! Votre super-héro préféré et Nounou du jour est ar.....

CRACK!

La poutre se brisa dans un bruit assourdissant et Zai se fracassa la tronche avant de disparaître dans un éboulement de pierres de métaux et de bois. Lorsque le nuage de poussière se dissipa, le Grand, le Sublime, l'Extravaguant Ban Zai n'était toujours pas visible, encore enfoui sous la montagne de gravas.

En entendant la question de son coéquipier, l'électrique se rendit compte qu'il avait oublié de se présenter.

- Oups, pardon ! Moi c'est Kao Kan, Genin de Kumo ! dit-il avec un grand sourire. Ah mais, peut-être que tu savais déjà en voyant mon bandeau !

Il tapota fièrement son bandeau accroché à sa ceinture, avant d'estimer la distance qui le séparait de son coéquipier.

- Quoi que, on est assez loin, peut-être que tu peux pas voir le symbole de là-bas ! C'est vrai que c'est assez petit, au final... Il y aurait peut-être un moyen de les faire plus gros...

Encore une suggestion qu'il pourrait envoyer à la Régente, en plus de ses idées d'épreuves plus sympathiques. Oh ! Peut-être qu'elle trouverait ça trop bien, et qu'elle l'inviterait à boire le thé ? Si ça arrivait vraiment, il devrait aller en parler à ses copains de la Résistance avant, pour pas dire de bêtises.

- Du coup, tu es Eichiiro ? Oui, c'est logique. Sauf si tu demandes si je suis Ban Zai alors que tu sais que c'est toi, ce serait un peu bizarre, mais c'est pas gra-

Il fut coupé dans sa phrase par une voix puissante qui résonna dans l'Assemblée. En levant la tête, Kan se rendit compte avec excitation que le troisième membre du groupe avait fait son apparition. Pourquoi "avec excitation" ? Hé bien, le personnage masqué ressemblait très fortement à un super-héros ; le spandex ne laissait aucun doute. Il parlait un peu bizarrement, mais il avait l'air trop trop cool !

Enfin, l'ambiance changea subitement quand tout s'écroula sous les pieds de l'homme en combinaison moulante. Des débris de toutes sortes et de toutes tailles s'écrasèrent au sol dans un bruyant fracas. Passé la surprise, Kan se rendit compte que l'homme en rouge n'était pas réapparut et que c'était peut-être pas bon signe dans ce genre de situation. Oubliant l'épreuve et complètement paniqué, il courut en direction de l'éboulement.

- Euhh... Euhhh.... Monsieur ? Monsieur... Zai ? Vous m'entendez ?

Il lança un regard terrifié à Eichiiro avant de lui demander :

- Est-ce que tu crois qu'on doit appeler les secours ?

Il entreprit de dégager délicatement les poutres à sa portée, ne voulant pas faire encore plus de dégâts. Si quelqu'un était coincé là-dessous, il fallait le dégager de là et vite !

La situation était complètement loufoque. Je n'avais pas l'impression de participer à un examen chûnin pour déterminer les futurs ninjas de classe supérieurs qui devront gérer, coordonner, instruire une équipe de jeunes genin. Aucun de nous ne semblait avoir l'étoffe pour assumer ce rôle. Le blond s’appelait Kao Kan il me semble et affirmait être un Kumojin tout comme moi. Le voilà donc mon compatriote. Quant à l'autre gusse déguisé en super-héros, il devait sûrement être celui qui se faisait appeler "Ban Zai". Nom très étrange soit dit en passant, au moins autant que son accoutrement.

En bref, rien n'allait dans ce groupe, j'avais vraiment pas l'impression de participer à un examen chûnin, la situation était tellement ridicule et drôle en même temps que cela retirait toute crédibilité à cet examen. Devenir gradé n'avait donc pas tant d'importance que ça. M'enfin, de toute manière, rien n'avait pour le moment commencer, il ne fallait pas tirer de conclusion hâtive. D'ailleurs, ce qui me fut rire c'est lorsque le Genin se mit à douter de mon identité, croyant que je pouvais m'appeler Ban Zai alors que je lui avais demandé s'il s'appelait ainsi. Mes camarades semblaient complètement perchés, quelque part, cela permettait de détendre l'atmosphère. Cependant, on s'écartait un peu trop des réels objectifs qu'il y avait derrière cet examen.

D'ailleurs le soldat-ninja-assassin-super héros n'a pas tardé à faire le show à son tour. Il débarqua de nul part, en appuie sur une poutre complètement défoncé pour faire sa présentation. Sa chute inévitable ne tarda pas à arriver au bout milieu de sa présentation. S'affublant de caractéristique en tout genre, le temps lui était compté avant que la poutre ne cède et il n'avait, d'ailleurs, même pas eu le temps de dire son prénom. Dès lors, je me suis accroupis vers lui pour tenter de l'aider à se sortir de cette situation. Paniqué, le Kumojin se mit à me demander si on devait appeler les secours.

"Il n'y a pas de secours, nous sommes en examen !"

"Aide moi plutôt à le sortir de là."

Je me mis à tenter de porter des gros morceaux et à en pousser d'autres pour dégager le Teikokujin des débris.

"Tu vas bien ?"

Il faisait clairement tout noir, Zai était incapable de voir quoi que ce soit ni même de bouger le moindre membre, recroquevillé en escargot, les jambes ouvertes et les genoux de chaque côté de la tête, il pourrait péter qu'il serait la première victime de ses gazes légendaires. Du coup il se retint et cracha simplement devant lui toute la terre et cailloux qu'il avait dans la bouche alors qu'on le tirait vers la surface, pour le plus grand malheur de ses courageux sauveteurs.

Il mit quelques secondes à se débarrasser des derniers débris et de la poussière coincée dans ses merveilleux yeux blancs globuleux, sans iris. Lorsqu'il put enfin discerner les deux zigotos qui venaient de le sortir d'une mort ridicule, il s’épousseta, ému aux larmes, les cuisses de quelques tapes avec ses paumes avant de se jeter à leurs pieds dans un saut magistrale. A genoux, le cul sur les talons, les mains croisées et repliées devant lui; l'échine courbée vers le sol dans un remerciement formel parfaitement exécuté, aussi théâtrale que surprenant, il ne bougeait plus.

Zai mit bien plusieurs longues secondes avant de se redresser et de les fixer d'un regard plein d'amour et de tendresse. Pour enfin finir par articuler quelques mots de pure reconnaissance et d'une joie sincère, difficilement contenue.

- Je comptais vous zigouiller la tronche à coups de Katana jusqu'à ce que même votre pauvre mère vous renie, mais maintenant je n'ai qu'une envie c'est de vous prendre dans mes bras et de vous faire pleins de poutous partout!!

Un rire effrayant bien trop aigu sortit de sa bouche, puis il commença à sautiller d'une jambe sur l'autre, tapant entre ses mains comme un gosse qui attendait sa sucette. Quelles étaient ses réelles attentions? Était-il vraiment cinglé ou jouait-il un rôle malaisant destiné à troubler ses adversaires?

La suite dans le prochain épisode...

Le Kumojin vint aussi à sa rescousse et à eux deux, ils réussirent à déblayer suffisamment les débris pour trouver le corps du soldat et l'extirper des décombres. Il lui fallut se débarrasser des morceaux ayant pénétré dans ses orifices et dans ses yeux, mais au moins il était vivant et avait l'air pas trop mal en point. Kan poussa un soupir de soulagement, mais il paniqua à nouveau en voyant l'homme en costume se jeter au sol. Est-ce qu'il faisait un malaise ? Est-ce qu'il était sorti des débris pour mourir à l'air libre ? Non, en fait, il les remerciait à plat ventre.

- Oh non Monsieur Zai, pas besoin de nous remercier ! On allait pas laisser mourir un copain !

Il lui tendit la main pour l'aider à se relever. C'était trop cool, ça se passait encore mieux que la première épreuve. Il s'était fait d'autres amis, mais en plus ceux-là étaient humains ! Et un des deux était un super-héros ! Par contre, l'électrique ne comprit pas tout de suite pourquoi il avait parlé de "zigouiller la tronche à coup de Katana". Ah, oui ! C'était le but de l'épreuve normalement. Mais c'était quand même pas très gentil comme épreuve.

Très peu inquiété par le rire diabolique, il lui répondit :

- Euhhh pour les bisous normalement je fais pas ça au premier rendez-vous mais bon...

Toujours influencé par le costume en spandex rouge, il s'exclama :

- Par contre je veux bien un autographe ! Je l'accrocherai dans ma chambre !

Pour un fan de héros comme lui, c'était une chance de fou. Bon, il avait pas autant de style que Pikachu, mais il fallait quand même avouer que Ban Zai avait beaucoup de classe avec son masque et tout. Kao Kan s'empressa de sortir de son sac un morceau de papier et de le tendre à l'homme en rouge, des paillettes plein les yeux.

Spoiler:

Le soldat-ninja-super-héros était dans une position plus que délicate. Il a réussi à se ranger la tête entre les jambes dans une position assez surprenante qui pourrait susciter certains malentendus. Il se mit à cracher les graviers qu'il avait pu stocké dans sa bouche, tandis qu'on essayait de le tirer du pétrin dans lequel il s'était lui-même foutu. Finalement, après avoir retrouvé une position décemment normale, il se mit à essuyer les quelques larmichettes, sans doute quelques morceaux de poussière dans ses yeux, puis vider son estomac du gravier et des cendres qu'il avait ingéré.

D'un mouvement brusque et surprenant, il se mit à courber l'échine devant nous, nous remerciant. S'il m'avait attaqué, je n'aurais rien vu venir, c'est un très bon acteur. J'avais baissé ma garde, il avait réussi à me faire baisser ma garde. Son comportement complètement excentrique et décalé me paraissait douteux, c'était comme s'il nous cachait quelque chose, comme s'il voulait qu'on le sous-estime. Rien que ses paroles me prouvaient qu'il était étrange, peut-être plus étrange que l'autre bipolaires de Kumo que j'avais pu rencontré quelques semaines auparavant. Ce mec était vraiment imprévisible, il ne laissait rien transparaître, c'était sûrement ce qu'il y avait de plus effrayant. Je n'arrivais pas à le cerner, je n'arrivais pas à voir au delà des apparences, de ce qu'il voulait me montrer. Je devais le reconnaître, ce Teikokujin est plein de surprise.

L'autre aussi était tout aussi étrange. J'avais la nette impression d'être dans un monde à part, à vrai dire, plus le temps passait et plus je me méfiais d'eux, car moins j'en savais sur eux. Je peinais de plus en plus à les cerner. Le tout était de ne pas se faire surprendre. D'autant que les deux se ressemblaient pas mal, on dirait qu'ils s'étaient accordés tout les deux à jouer au con pour me déstabiliser, attendre que je baisse ma garde et me neutraliser. Il ne faut pas oublier que nous étions censés nous foutre sur la gueule, or l'heure était au câlins. Et s'ils s'étaient entendus avant l'épreuve pour m'éliminer ?

Bon... Ils avaient fait connaissance, il y avait eu des embrassades et autres marques d'émotion et d'affection mais maintenant qu'ils en étaient là, ils se retrouvaient à regarder dans le blanc des yeux des chiens de faïence. Enfin, pour ceux dont les yeux étaient visibles. Personne ne parlait, comme pour ne pas perturber le calme et la bonne ambiance de ces pourtant ennemis. Ils auraient été plus confortable autour d'un café, mais Kan se doutait bien que les organisateurs ne seraient pas satisfaits. Sauf si c'était une autre ruse et qu'il fallait en fait pas se battre. C'était un peu compliqué à savoir avec l'Empire, ils étaient pas très honnête dans leurs intentions. Kan soupira. Heureusement, il avait eu une idée pour se battre sans se battre. Encore fallait-il que ses camarades acceptent, parce qu'il n'allait pas risquer leur amitié pour un examen en carton.

- Euh... Du coup... On peut ptêtre trouver un autre moyen de se battre. Comme par exemple un Shifumi ! Comme ça on se bat, mais sans se battre. C'est trop cool non ? En plus vous ressemblez à des personnes trop fortes au Shifumi, je suis sûr !

Il était de retour, avec son sourire à toute épreuve.

- Ah euh si vous ne connaissez pas les règles, je peux vous expliquer !

C'était quand même beaucoup plus original qu'un simple combat. Ça aussi, il pourrait le proposer dans sa lettre à la Régente.

Spoiler:

Le Teikokujin semblait très passif. Il n'a pas bougé, n'a même pas réagi. De l'autre côté, puisque nous n'étions pas obligés de nous battre, mes supposés adversaires faisaient tout pour détendre l'atmosphère et éviter toute forme d'animosité. Tout le monde voulait éviter la bataille, nous n'avions absolument aucune raison de nous battre, ce n'était pas obligatoire, il n'y avait pas d'arbitre, pas de règle, rien.

C'était de leur faute, les organisateurs n'avaient qu'à anticiper ce genre de comportement, prendre leur précaution. L'Empire n'était visiblement pas très compétent en la matière, il fallait donc en profiter un maximum, se jouer du système qu'ils ont voulu mettre en place, leur montrer qu'on est plus malin que leur règles inutiles et insensées. Les examinateurs commençaient aussi à s'impatienter face à tout ces bavardages, mais je n'avais que faire, mes coéquipiers ne voulaient pas lancer les hostilités. Disons que mon confrère avait de la suite dans les idées. Pourquoi sortir les armes si on pouvait se battre en jouant à shifumi. Dès qu'il eut cette idée de génie, je me mis à éclater de rire.

"C'est une brillante idée haha !!" - Affirmais-je avec enthousiasme.

Spoiler:

Son nouveau copain Eiichiro était d'accord pour le Shifumi et le sourire de Kan s'agrandit. Il se tourna vers le super héros en costume pour connaître aussi son avis, mais ce dernier ne semblait pas en très bon état. Il se tortillait dans tous les sens en poussant des gémissements. Ça ressemblait fortement... À quelqu'un ayant une gastro fulgurante, Kan savait reconnaître les symptômes. Du coup, il voulait bien aider son ami mais il était quand même un peu effrayé à l'idée d'être contaminé.

Enfin, il n'eut pas trop le temps de faire quoi que ce soit que des gens en blancs vinrent et emportèrent Ban Zai. Apparemment, des crampes d'estomac semblaient plus grave qu'être enterré vivant sous un tas de décombres. Un peu étrange, mais après ce qu'il avait vu il ne réfléchissait plus à la logique du Teikoku. Ils n'étaient plus que deux.

- C'est plus que toi et moi, Eiichi-kun !

Le surnom était venu naturellement. Le surveillant siffla encore une fois son mécontentement. Kan, toujours positif, lui fit coucou avec un sourire niais. Il savait très bien que ce n'était pas pour les applaudir mais au final, il s'en fichait pas mal. Il se pencha vers Eiichiro pour lui chuchoter :

- Ils ont jamais dit qu'on devait se battre physiquement, ils avaient qu'à être plus précis... Tant pis pour eux. Moi je suis venu pour me faire des copains, pas pour leur montrer un spectacle !

Il regarda son copain, n'ayant jamais quitté son sourire innocent. Pourtant, ses paroles avaient un sens très lourd, surtout en ces temps où la Résistance faisait parler d'elle. Bien sûr, il ne faisait absolument pas attention à ce qu'il disait.

- On le lance, ce Shifumi ? lança-t-il avec un clin d'oeil.

Il ferma sa main droite en un poing, puis le tapa deux fois dans la paume de son autre main en faisant le décompte :

- Shi, Fu, Mi !

L'idée du Shifumi avait rendu malade le teikokujin, mais ce n'était pour une fois pas une image, cela s'était vraiment passé au sens littéral du propos. Ce dernier se mit à se tortiller dans tous les sens, pris d'une douleur importante à l'estomac, lui qui était jusque-là surexcité, très dynamique et qui était rempli d'énergie. D'ailleurs, il avait déjà montré une certaine passivité depuis quelques temps, il devait sûrement se sentir mal depuis pas mal de temps.

Peut-être que sa chute a été l'élément déclencheur de son mal-être ou peut-être qu'elle n'en a été que l'accélérateur. Quoi qu'il en soit, c'était tellement si soudain et surprenant qu'il fut rapidement pris en charge par des infirmiers qui attendaient patiemment que ce genre d'événement arrive. Ces derniers ne servaient à rien d'autant qu'on ne voulait pas nous battre, il était donc peu probable que l'un de nous soit blessé. Il fallait qu'ils soient utiles, après tout, ils étaient payés à rien faire.

Ah mais suis-je bête ! Le super-héros-ninja avait semble-t-il avalé une grande quantité de poussières et de cendres lors sa chute, cela pouvait peut-être être la cause. Il est vrai que ce sont deux éléments peu comestibles et plutôt difficiles à digérer. Kao kan ne semblait pas si étonné que ça, le jeune homme semblait si pressé de jouer à Shifumi. "Eiichi-kun" m'avait-il appelé... Pourquoi pas après tout ? Ca sonne plutôt bien. Sur ces mots, je me mis en place, préparant ma main.

"T'as raison. Bien joué ! T'as eu une excellente idée sur ce coup-là."

Je m'écartais légèrement de mon adversaire pour prendre une inspiration.

"Le combat n'est pas forcément armé, le Shifumi est aussi un combat ! Un combat de dextérité, de rapidité, d'anticipation et de stratégie ! Après tout, qu'est-ce qu'un combat ? C'est une lutte entre deux personnes !" - M'écriais-je alors pour me faire entendre par tous.

"Soyez prêt ! Pour la première fois dans l'histoire de cet examen ! Nous allons montrer au monde la vraie signification du mot "combat" !"

"Un combat qui marquera l'histoire et que vous avez la chance de pouvoir assister en direct !"

"Vous pourrez dire à vos enfants : "j'y étais, je l'ai vu de mes propres yeux !" "

Après cette petite tirade, j'étais enfin prêt à en découdre. Dès que Kao Kan fut fin prêt, je lui fis un signe de la tête pour acquiescer. J'étais moi aussi impatient de pouvoir en découdre. Je fermai le poing de ma main droite, pris de l'élan avant de crier, synchronisé avec l'autre Kumojin, un puissant :

"Shi, Fu, Mi !"

C'était comme un message porté aux élites de ce système shinobi. Il suffit de deux hommes pour faire un combat, les armes ne sont d'aucune utilité.

Quel discours ! Mon dieu, quel discours ! Si puissant, si émouvant, que les poils de bras de toute l'assistance avaient dû se hérisser à ces mots. C'était un plaidoyer pour la vérité, pour la liberté, pour l'amitié. C'était le genre de discours à se retrouver dans les livres d'histoire, ceux dont les paroles traversaient les âges sans jamais perdre de leur valeur. C'était des mots qui pénétraient l'âme, qui faisaient vibrer les cœurs à l'unisson, qui redonnaient courage aux soldats sur le champ de bataille. Les phrases se matérialisaient, s'entremêlaient dans une danse parfaite comme tout un tas de fines cordelettes rouges reliant chaque personne par les fils du destin.

Le moment était si solennel que les plus sensibles virent des larmes couler sur leurs joues. Car à ce moment-là, peu importait le résultat final. Ils avaient voulu les opposer, leur faire croire qu'ils étaient ennemis ; ils en étaient ressortis en tant que frères d'armes. Au diable les règles, au diable la bienséance, l'autorité, la hiérarchie ! Dans cette Assemblée Calcinée, au milieu des cendres, un Phoenix avait déployé ses ailes et ses détracteurs ne mesuraient pas encore l'ampleur de l'événement.

Ils avaient voulu élire un vainqueur, un gagnant, sans se douter une seule seconde que ce serait eux, ceux qui tiraient les ficelles, les vaincus. Les perdants, annihilés sans avoir versé une goutte de sang, voyaient leur propre jeu morbide retourné contre eux. Ils étaient l'ombre, les ténèbres, la peur, le néant ; Eiichiro et Kan étaient la clarté salvatrice, le phare dans la tempête déchaînée, la première étincelle du grand brasier.

Et si la symbiose de leurs âmes requérait encore plus de preuves, le résultat de la première manche ne laissait aucune place à l'imagination. Il aurait fallu être fou ou aveugle pour contester à présent ce qui se déroulait aux yeux de tous. Parce qu'à ce moment-là, de leurs mains tendues, ils envoyaient un message fort au monde entier : feuille-feuille, égalité.

Le combat pouvait enfin commencer ! Nous nous serrions nos poings de toutes nos forces, prêts à le brandir, tandis que nous crions "Shi fu mi". Ce cri de guerre raisonnait partout dans l'assemblée calcinée, à nos voix, on pouvait mesurer l'enjeux et l'implication que l'on consacrait à cette bataille pour le titre de Chûnin. Aucun de nous ne voulait perdre cette bataille, je n'étais pas du genre à perdre, il ne devait pas non plus l'être d'ailleurs. Nous tendions tout deux nos bras l'un vers l'autre de manière synchronisée. Verdict ? Nos deux mains étaient tendus, c'était un feuille-feuille.

"Rah... Comment t'as su ?" - Affirmais-je agacé.

"Si t'avais su, t'aurais fait ciseau. T'as eu beaucoup de chance, mais ça n'arrivera pas deux fois, je sais ce que tu vas faire !"

"Prêt ?!!" - Hurlais-je en armant mon bras.

Je me mis à retirer mon bras, fermer mon poing. J'étais littéralement énervé, moi perdre cet examen à ce jeu ? impossible ! Tout bonnement, je refusais de le concevoir, je chassais cette possibilité de mon esprit. Je ne perdrais pas ! Shifumi nécessitait des qualités, de nombreuses qualités, c'était un combat avant tout intellectuel et mental. En tant que scientifique, je ne pouvais surtout pas perdre à ce jeu. Qui a parlé de défaite ? Il n'y a eu que match nul !

*Pourquoi je pense à ça ?*

*Pourquoi je me vois perdre ?!*

Touché dans mon ego, je ne pouvais pas tolérer faire match nul . Il avait anticipé mon coup, il parvenait à rivaliser avec moi, ce que je ne pouvais accepter. Je le considérais comme une défaite. Concentrant tout mon chakra mon corps pour l'expulser d'un seul coup, j'étais prêt à en découdre prêt à gagner ce round. Dès lors que j'eus tendu ma main, je relâchai toute mon énergie.

Mais malgré tout, il fallait un gagnant. Il le fallait. Et pour ça, ils devraient se battre jusqu'à ce que l'un des deux soit désigné vainqueur. Peu importe si ça prenait une heure ou s'ils devaient y rester jusqu'au petit matin. Les arbitres ne tiendraient certainement pas aussi longtemps, mais eux le devaient. Parce qu'ils s'étaient fait des promesses avec honneur, qu'ils combattaient avec honneur, alors ils devraient perdre et gagner avec honneur.

Kan n'avait pas su, mais il n'avait pas voulu contredire Eiichiro. Il n'avait pas réfléchi non plus, à vrai dire. Il s'était seulement laissé porter par son instinct. Le reste, c'était le destin qui l'avait décidé. Mais ils ne pouvaient pas rester sur un match nul, oh non. Ils devaient puiser jusqu'aux fin fond de leurs âmes, drainer leur dernière goutte d'énergie s'il le fallait, pour continuer jusqu'au bout, jusqu'à voir la lumière au fond du tunnel.

- PRÊT ! hurla-t-il en retour.

Il n'y avait point d'animosité dans ce cri. Il n'y avait pas de sentiments, bons ou mauvais. Seulement de la force brute. De la concentration liquide, de la testostérone en poudre. A nouveau les poings s'élevaient dans les airs, prêts à rendre leurs jugements. Puis la formule magique, elle aussi hurlée à plein poumons, se réverbérant sur les murs de l'arène, emplissant l'espace.

- SHI ! FU ! MI !

Leur ardeur était-t-elle qu'une vague d'énergie s'échappa de chacun d'eux, se rencontrant au centre pour fusionner en une puissance énorme. Comme une tempête, elle balaya l'Assemblée avant de s'élancer vers le ciel à une vitesse fulgurante. Un silence religieux s'abattit sur l'endroit alors que chacun retenait son souffle, attendant que les dernières particules de poussière retombe sur le sol. L'adrénaline et la tension emplissait l'espace au point que l'air se faisaient plus lourd. Inspirant un bon coup, ouvrant les yeux, l'issue de la manche était décidée. Une feuille à nouveau pour Kan, pierre pour Eiichiro.

J'avais perdu ? Comment il a fait ? Comment a-t-il pu me battre à ce jeu ? Il m'avait déstabilisé, il m'avait manipulé, il m'a eu. Il s'est joué de moi, j'avais pensé qu'il allait faire le ciseau, puisque j'avais feuille avec lui, j'avais donc agi en conséquence en faisant pierre. Or, il avait sûrement anticipé mon anticipation et n'a tout simplement pas changé par rapport au tour précédent. Malheureusement, la feuille recouvre la pierre.

Cependant, si on regarde ça autrement, en posant une pierre sur une feuille, la pierre gagne... M'enfin... c'était le jeu, cela faisait partie des conventions que l'on acceptait en jouant à ce jeu à la con. Il avait d'ailleurs eu l'idée et voilà que je me ridiculisais devant tout le monde en perdant face à celui-là même qui avait eu l'idée. J'avais la nette impression qu'il s'était joué de moi. Il est vrai que j'avais perdu le contrôle, je laissais les émotions prendre le contrôle de moi, je n'arrivais plus du tout à réfléchir. Il avait gagné... parce qu'il avait le dessus sur moi mentalement.

"Vas-y t'es prêt ?!"

J'étais déterminer à l'exploser. J'avais fait la feuille puis la pierre. Il jouera la simplicité en faisant la feuille, car il avait déjà gagné deux fois comme ça. Il pensait sûrement que j'avais anticipé autre chose, car c'était risqué de jouer trois fois la même chose d'affilé. Ainsi, il pensait que je m'attendais à ce qu'il fasse pierre ou feuille en vue de contrer sa prochaine attaque. Dès que le Kumojin m'eut fit un signe, je me mis à m'écrier conjointement avec lui.

"SHI-FU-MI !"

Pierre contre ciseau... Il a finalement opté pour une autre stratégie... L'enfoiré m'avait bien eu. Il menait déjà 2-0, plus qu'un point et il gagnait le combat. Impossible que cela se passe comme ça. Pire encore, il me singeait, il faisait la même chose que moi avec un tour de décalage pendant que j'essayais d'anticiper sa prochaine attaque, il ne faisait que répéter les mêmes attaques que moi. Il se foutait ma gueule avec une stratégie simple et tellement humiliante. J'avais l'impression d'être qu'un idiot. Mais, maintenant que je l'avais percé à jour, les choses allaient changer...

"REMONTADA !!!"

Soudain, alors que le Shi-Fu-Mi atteignait sa tension optimale, une étrange impression frappa les deux kumojins. Sans qu’ils ne puissent désigner la source de ce sentiment de malaise, ils purent tous deux ressentir comme un frisson instinctif, une alerte subliminale les mettant en garde.

Plus loin, naissant des ombres de l’Assemblée Calcinée, une femme apparût. Ses cheveux longs et noirs, son visage fin et son teint bistré lui donnaient un charme considérable, que ses courbes rendaient encore plus fatal. Néanmoins, les deux candidats purent sentir l’étrange aura qui émanait de cette guerrière : une force invisible et hostile qui en disait long sur sa nature sanguinaire.

Elle s’approcha d’eux avec le plus calme, avant de lever son poing, comme pour les accompagner dans le jeu du pierre-feuille-ciseaux. Peut-être purent-ils espérer l’espace d’un instant qu’elle les accompagnerait dans ces flagorneries. Doux espoir. Malheureux espoir. Il ne s’agissait que d’une feinte. Au lieu de l’un des trois signes, elle abattît son pouce vers le bas tel un Empereur réclamant la mort de ses gladiateurs, pour ensuite leur asséner sèchement le verdict final :

« Vous n’avez pas saisi les enjeux de cet examen. Votre examen s’arrête ici. »

HRP: