Cela ne faisait pas très longtemps que Namue était de retour au village depuis sa dernière mission et elle avait espéré avoir la possibilité de prendre un peu de temps pour se reposer, mais les autorités du village de la brume semblaient en avoir décidé autrement puisqu’à peine avait-elle déposé ses affaires dans son logis qu’un léger cognement se fit entendre et après un profond soupir, la jeune chuunin alla ouvrir la porte, révélant un jeune messager qui lui tendit une missive qu’elle s’empressa d’ouvrir d’une main lasse avant d’en lire le contenu.

Comme elle s’en doutait, il s’agissait d’un ordre de mission qui l’envoyait une nouvelle fois à l’extérieur du village, cette fois-ci elle devrait retourner sur une île qu’elle avait visité peu de temps auparavant, l’île de Buntan où elle devrait emporter une aide financière et alimentaire avant d’en assurer la distribution. Pour s’y rendre, un transport naval avait été mis la disposition de sa partenaire de mission et elle-même et ce dernier devait prendre la mer dans moins d’une heure ce qui ne lui laissait aucunement le temps de se poser.

Rattrapant son paquetage qu’elle n’avait pas eu le temps de défaire, la jeune femme passa ce dernier par-dessus son épaule avant de prendre la direction du port Nagamasa où l’attendait déjà sa partenaire, une certaine Imekanu avec qui elle avait déjà exécuté une mission sur l’île de Buntan quelques semaines auparavant. S’approchant tranquillement, la chuunin lui fit un signe de la main avant de replacer son brassard qui signalait à quiconque en connaissait la signification son appartenance à la Kenpei. Puis, une fois arriver à la hauteur de sa partenaire, la kunoïchi la salua.

Bon matin Imekanu-san, je m’excuse pour mon arrivée tardive, je viens tout juste de recevoir l’ordre de mission… À vrai dire, je viens à peine de revenir de ma mission précédente, je n’ais même pas eu le temps de défaire mon paquetage…

En prononçant cette dernière partie, la jeune femme pointa du menton le sac en toile qu’elle portait sur son dos avant de passer une main maladroite dans sa chevelure courte pour finalement reposer son regard sur sa partenaire de mission.

Le chargement de l’aide semble pas mal terminé, nous allons bientôt pouvoir partir. Tu es prête à prendre la mer ou je dois signaler au capitaine d’attendre encore un peu ?

Elle avait prononcé cette dernière phrase d’un ton qu’elle voulait bienveillant tandis que son visage s’étirait d’un doux sourire. Elle n’attendait plus que l’acquiescement de sa partenaire avant de monter à bord du navire qui les amènerait jusqu’à destination.

Namue accepta la brochette tendue par sa partenaire avant d’en prendre une grande bouchée, remerciant au passage celle-ci, la bouche pleine de délicieux poulpe.

Merchi ! Elles chont délichieuse !

Rapidement les deux jeunes femmes terminèrent leur brochette avant de monter à bord du navire qui les transporta sans le moindre événement jusqu’aux abords du port de Buntan où sa partenaire lui partagea ses appréhensions sur la tâche à venir.

Nous allons bientôt arriver, nous devrons nous organiser pour aider les sisams et nous méfier de ceux qui voudront voler la marchandise, beaucoup sont désespérés…

Les derniers mots de la jeune femme avaient été emprunts de tristesses que la jeune Kayuri partageait elle aussi lorsqu’elle repensait à la détresse qu’elle avait ressentit chez les jeunes habitants forcés au banditisme qui avait tentés, sans succès, de détrousser la prêtresse et son escorte lors de la précédente mission des deux jeunes femmes au cœur de cette île.

L’important c’est que nous leur venions en aide maintenant…

La nouvelle chuunin prit un moment de silence durant lequel elle ordonna ses pensées, cherchant à imaginer un plan qui permettrait aux jeunes femmes d’effectuer le travail qu’elles devaient effectuer tout en limitant au stricte minimum les possibilités qu’un événement indésirable se produise. Puis, une fois satisfaite, elle en fit part à sa comparse tandis que les matelots s’attelaient à l’amarrage du navire.

Afin d’éviter les problèmes le plus possible, je propose que nous organisions un système de distribution à même le navire qui est un endroit que nous contrôlons plutôt bien…

La jeune femme sortit un morceau de parchemin ainsi qu’une plume qu’elle plongea dans un minuscule flacon d’encre avant de dessiner un croquis rapide du port de Buntan puis, d’un geste expert, elle y ajouta un minuscule navire avant d’en faire le point central d’un périmètre d’une centaine de mètre de diamètre en forme de demi-cercle.

Idéalement nous devrions avoir des gardes contrôlant l’accès sur l’ensemble de ce périmètre, mais au vu de nos objectifs plus que restreint, je propose simplement de limiter l’accès via mon shôton à cet espace seulement.

Afin d’appuyer ses mots, la jeune femme traça de sa plume un demi-cercle bien plus restreint, d’une dizaine de mètres uniquement.

Il n’y a que trois points d’entrées, ici, ici et ici. Je propose d’utiliser deux clones afin de bloquer l’accès à ceux de chaque côté et d’imposer une file disciplinée à ceux qui viendront chercher notre aide par le point d’accès central, tant et aussi longtemps qu’il y aura de la discipline, tout devrait bien se dérouler…

C’était un plan digne de la Kenpei et Namue ne put s’empêcher de sourire tandis que cette pensée lui traversait l’esprit. Elle n’était pas membre de celle-ci depuis longtemps, mais elle commençait déjà à en prendre les traits. Toujours souriante, la jeune femme tourna enfin son attention vers sa partenaire.

Si le plan te convient, que dirais-tu d’aller offrir aumône à ses pauvres gens ?

Tout en attendant la réponse de sa partenaire, la jeune femme exécuta une paire de mudras tandis que deux clones se matérialisaient à ses côtés avant de se diriger immédiatement vers les deux points d’entrées que la chuunin avait indiqués quelques instants plus tôt.

Sa comparse l’imita rapidement et fit apparaître deux clones qui partirent couvrir les zones non couvertes par les clones de la Kayuri. Puis, une fois ce périmètre de fortune érigé autour de la zone de distribution, sa partenaire prit la parole afin d’expliquer le pourquoi de leur venu en ces lieux et lorsque cette dernière eut terminé, son regard croisa celui de Namue qui ne put s’empêcher de lui sourire avec bienveillance, marquant du même coup son assentiment à chacun des propos qu’elle venait de prononcer.

Ce fut sans le moindre échange de paroles supplémentaires que la distribution commença et, sommes toutes, celle-ci semblait bien se dérouler, mais après plusieurs minutes sans la moindre perturbation, une aura sombre recouvrit l’humeur de la soldate tandis qu’une appréhension la gagnait, la mission se déroulait trop bien et trop de richesses étaient distribuées pour ne pas attirer quelques pommes pourries et même si celles-ci n’attiraient actuellement pas l’attention des deux kunoïchis, cela ne voulait pas pour autant dire qu’elles ne se trouvaient pas à proximité.

Les minutes s’écoulèrent et les appréhensions de la jeune femme commençaient à se calmer lorsque des éclats de voix se firent entendent au loin.

… LÂCHEZ MOI ! … NO…

Le son qui suivit ne fit aucun doute sur le destin funeste de l’homme, ou plutôt de l’enfant, à l’origine de cette exclamation, mais alors que Namue s’apprêtait à s’élancer vers l’origine du bruit, une silhouette sortit d’entre les bâtiments portuaires qui les entouraient en titubant avant de s’effondrer au sol à peine quelques pas plus tard, recouvrant les pavés d’une marre bourgogne et tandis que les yeux de la kunoïchi reconnaissait le visage de l’inconnu comme étant l’une des personnes qui venait à peine de recevoir un paquet de denrées accompagné d’une petite sacoche de fonds monétaires et, sans la moindre surprise, la Kayuri pouvait discerner l’absence de ces deux éléments sur l’homme qui tendait désormais la main dans leur direction dans une supplice d’aide.