Sous un ciel agité et une brume plus dense que jamais, le Nobuatsu contemplait le début de l’automne avec une certaine perplexité, travaillant de concert avec ses conseillers pour mettre en œuvre les plans pour amener le village de la Brume vers la voie de la domination et prospérité. Les yeux portés vers l’horizon, à l’intérieur de son bureau de chef de village, son esprit était quelque peu perturbé par l’absence de nouvelles de la part de l’équipe envoyée à Yuki, dont la ministre en diplomatie Kaya qui manquait toujours à l’appel. La dernière équipe envoyée dans les terres enneigées de l’oubli permettrait non seulement de mettre à jour la situation au port du souvenir, comprendre les rapports qu’ils avaient reçu sur des turbulences locales, et peut-être avoir enfin une piste concrète sur le Dieu qu’ils cherchaient à localiser depuis un bon moment déjà. Il ne soupçonnait pas qu’une telle expédition demandât autant de ressources et autant de temps pour se conclure, et il ne pouvait malheureusement se permettre d’affecter d’autres personnes à cette opération dont l’enjeu était effectivement de taille pour Kiri mais aussi la Coalition. Il s’agissait entre autres de mettre la main sur une arme qui les aiderait à se mesurer à l’Homme au Chapeau.

Pendant ce temps, le sommet de la Coalition shinobi s’approchait à grands pas, et il avait déjà une idée de la délégation qu’il comptait envoyer là-bas. Même s’il avait d’ores et déjà annoncé sa présence par lettre, le compte-rendu de Kaya sur le dernier sommet l’avait convaincu qu’il n’y trouverait aucun intérêt. Il préférait plutôt donner sa chance à des shinobis désireux de prouver leur valeur ou de participer à des événements importants, tandis que lui resterait au village pour la protéger d’éventuels danger et de gérer les affaires, tel était le rôle qu’on lui avait donné, qu’il s’était donné. Alors que le Palais était d’un grand calme en cette fin de journée, le Nobuatsu ne semblait guère surpris d’entendre la membre du Shiden frapper à sa porte puisqu’elle avait la charge d’assurer sa protection, elle n’était jamais loin, sauf quand il lui fallait partir en mission. Il avait d’ailleurs pensé à elle pour une mission bien particulière qui signifierait la confiance qu’il lui accordait désormais, une juste récompense à ses années de loyauté envers la Brume.

— Ah… tu l’as remarqué. C’est vrai que je manque d’exercice ces temps-ci. Tu m’as beaucoup accompagné lors des déplacements mais nous n’avons jamais vraiment discuté ou échangé de coups, je te propose de résoudre cela par une petite visite aux Marécages Brisés. Je connais un endroit où nous pourrons être tranquilles.

Sous un ciel qui s’assombrissait de plus en plus, le duo naviguait au milieu des artères marchandes du village jusqu’à passer les portes où les gardes les saluèrent avant qu’ils n’atteignent le coeur du pourtour marécageux de Kiri, où la brume s’épaississait davantage. En tant que chef de Kiri, il connaissait l’itinéraire sur le bout des doigts pour ne pas se perdre dans le brouillard de guerre sans tomber dans les eaux profondes qui tapissaient une grande partie du terrain.

— J'ai besoin de toi pour m’aider à mettre au point une technique de grande ampleur qui me permettrait de plonger tout une zone dans les flammes. J’en maîtrise déjà une, mais celle-ci est bien trop puissante et consomme beaucoup trop de chakra pour être utilisée souvent: j’espère compter sur ton aide pour apprendre à canaliser mon énergie affinitaire et ainsi amoindrir ma perte de chakra. As-tu déjà rencontré des problèmes similaires?

De son côté, il était curieux de partager ses connaissances techniques avec la chef bestiale, qui avait suffisamment impressionné le chef de la Kenpei pour devenir membre d’élite de lu Shiden. Elle ne devait donc pas manquer de techniques impressionnantes dans son arsenal… Elle était la parfaite interlocutrice pour lui apporter des conseils pour le combat.

Si les Marécages Brisés ne manquaient pas d’espace où se déplacer afin d’expérimenter leurs techniques respectives sans craindre de blesser quiconque ou provoquer des dommages qui n’avaient pas déjà été causés à l’environnement, ils offraient un cadre idéal pour les combats d’une ampleur supérieure surtout pour des combattant de haute volée qu’étaient la matriarche des Yasei et le chef de la Brume. Une fois qu’ils avaient pris place au milieu du labyrinthe marécageux et couvert de brume, il demanda conseil à sa partenaire au sujet d’une technique de brasier qu’il ne maîtrisait pas suffisamment pour brûler le moins de chakra possible. Certes il avait la réputation d’être un maître du Katon au point qu’on le surnommait “Cavalier de Feu”, mais cette affinité avait la particularité d’être si puissante qu’elle était souvent très difficile de la canaliser avec la précision suffisante pour être considérée comme efficace en termes de consommation de chakra.

Il avait besoin d’une perception externe à la sienne pour trouver un moyen de revoir son schéma d’exécution de la technique, car avec l’expérience, venait souvent l’habitude et donc la répétition des mêmes erreurs. Arrivée à un tel niveau de maîtrise technique, il devenait presque surhumain d’effectuer le moindre progrès dans le domaine et de se remettre véritablement en question. Pour autant, c’est le défi qu’il se lançait en posant la question à la Yasei qui partageait beaucoup de traits similaires à une personne qui lui fut, qui lui est toujours très chère, il se demandait s’il s’agissait de caractéristiques physiques propres à tous les membres du clan Yasei ou s’il ne s’agissait que d’une coïncidence? Il esquiva de lancer ce sujet de conversation qui la mettrait à coup sûr dans une situation fort gênante, et ils avaient tous deux besoin de se concentrer au maximum.

Il reçut d’un hochement de tête le compliment de la jounin, avant que celle-ci n’érige dans un grondement surpuissant une immense muraille de pierre portant l’image d’un tigre lui faisait maintenant face. Il ne lui suffisait que d’un regard pour constater la solidité du roc et l’épaisseur du monument, fruit d’une puissance affinitaire semblable à la sienne. Cela ne pouvait que lui donner confiance sur le niveau de son partenaire mais aussi la force des piliers de la Brume dont elle faisait évidemment partie: avec de tels ninjas dans leurs rangs, Kiri n’était pas prête de plier. Ses yeux suivirent le mur dans sa longueur jusqu’au sommet, avant de reculer de quelques pas, anticipant d’ores et déjà la puissance de l’attaque qui allait suivre… Composant plusieurs mudrâs à une main, la Tigresse libéra depuis tout son être un flot de chakra d’une puissance inouïe, prenant la forme de plusieurs rafales de vent gigantesques découpant tout sur leur passage, au potentiel tranchant si élevé qu’on avait l’impression qu’ils découpaient l’air lui-même.

Pour autant, on remarquait une chose. Aussi puissante soit la technique, il ne put s’empêcher de relever de la finesse du chakra épuisé par rapport à la puissance dégagée, il était vrai que le Fûton était parmi les affinités les plus à même d’illustrer à quel point la puissance reposait sur la précision.

— Je vois ce que tu veux dire. Contrôler mes “cordes” de chakra, de la même manière qu’un artiste manipulerait avec précision chacun de ses doigts de manière à produire une mélodie harmonieuse, selon un tempo et une succession strictes. La puissance n’est pas toujours dans l’énergie pure que l’on peut produire, mais dans la maîtrise de son instrument. Dans notre cas, le chakra.

Le défi que lui lançait la Yasei n’était pas tant de détruire le mur qu’elle venait d’endommager avec sa précédente attaque, mais au contraire de ne pas le faire s’écrouler avec la technique qu’il lancerait et pour ce faire il se devait de modérer la puissance de son attaque.

— Je vois, si ma technique est trop puissante le mur tombera.

Effectuant une série de mudrâs à une main, il dégaina la lame de son autre main afin de tracer face à lui une série d’entailles dans l’air jusqu’à former plusieurs vagues de feu semblable aux rafales de vent qu’avait pu produire l’enseignante. A ce moment précis, une image lui traversa l’esprit, une distraction soudaine qui troubla sa concentration. Si le début de l’impact s’annonçait prometteur et que le mur tenait bon, le mur calciné resta debout encore quelques secondes avant de finalement s’écrouler presque sans bruit de sa composition cendrée. Regardant cette première tentative échouer, l’Ombre de la Brume se gratta la tête tout en rangeant sa lame encore brûlante. Il se demandait s’il avait mal calculé son dosage de chakra:

— Hum… pourtant je suis sûr d’avoir canalisé la juste quantité de chakra pour cette technique. Ai-je oublié quelque chose?