La vue était magnifique.

C’était peu de le dire. En plein cœur de cette forêt luxuriante, qui pouvait rappeler certaines du Pays de la Forêt, que Mokkô connaissait bien, avait été érigée cette immense bâtisse de bois et de pierre. Un Quartier Général pour ceux qui avaient décidé il y a quelques temps maintenant de fonder la première Coalition. En réalité, il s’agissait avant tout de constituer l’espoir pour ce monde, pour ceux qui y vivaient et pour l’ordre établi depuis maintenant des décennies et même des siècles.

Cet espoir avait désormais un toit. Et bientôt, c’est sous ce dernier qu’aurait lieu le premier Sommet de la Coalition, au sens propre du terme. Pour la première fois depuis l’union des forces shinobi, moniales et indépendantes, leurs représentants allaient pouvoir se retrouver et échanger.

Cette réunion, Sen’sei Mokkô en attendait forcément beaucoup. S’il avait su en partie être le ciment de cette maison qu’était la Coalition Shinobi, il n’allait désormais plus qu’être un interlocuteur, voire au mieux un arbitre. Les Shinobis constituaient évidemment la force principale qui devrait, malheureusement, partir au front lors d’un affrontement final que tous redoutaient tout autant qu’ils en connaissaient l’inéluctabilité.

Cruciaux seraient les échanges à venir. L’expérience, sans doute douloureuse, des uns couplées aux informations des autres ; toutes utilisées à bon escient et avec intelligence sauraient augmenter les chances de victoire. Le vieux moine se demandait s’il saurait les aider en participant à ce sommet.

Mais à entendre les pas qui résonnaient derrière lui, il comprit qu’il n’allait pas avoir à le faire seul.

« Tu es donc venu. »

Derrière le vieux Mokkô, une voix enthousiaste brisa définitive la solitude de ce dernier.

« Tu pries ton Dieu. Je prie la Nature, la Vie. Nous n’avons jamais eu les mêmes croyances... »

Une brise caressa les cheveux clairs du nouvel arrivant.

« ... mais nous sommes liés par le même pacte. Celui des Gardiens. »

Le vieux moine ne put s’empêcher de ricaner. Lui qui avait pris tant de visages, de celui de Daimyô de Hayashi no Kuni à celui de l’homme sénile lorsqu’il voulait qu’on lui épargne des questions ; il restait avant tout l’un des Derniers Gardiens. Et cet homme derrière lui était…

« Alors où sont-ils, ces Shinobis ? »

Mokkô était le premier arrivé parmi les conviés. Le Sommet n’étant que dans quelques jours, il pouvait néanmoins répondre à son comparse.

« Les premiers arriveront peut-être demain. Tu vas donc vraiment les aider ? »

L’autre Dernier Gardien croisa les bras fièrement. Et même sans se retourner, Mokkô pouvait entendre au teint de sa voix qu’il souriait. Comme toujours.

« Si les Shinobis sont devenus aussi forts que tu le dis, peut-être qu’ils n’ont besoin d’aucune aide. J’ai hâte d’en rencontrer ! »

Sen’sei Mokkô s’esclaffa sans pouvoir se retenir. Il n’avait pas du tout changé malgré les années.

« Toujours optimiste et bienveillant. Mais nous savons que de tous les Derniers Gardiens, tu es le plus fort… et le plus proche du niveau de nos ennemis. »

Le Gardien des Gardiens s’approcha de deux pas. Ce fut à son tour de rire, mais une oreille attentive aurait compris qu’il se forçait. Comme s’il souhaitait afficher un enthousiasme perpétuel.

« Ha ! Ha ! Qu’importe ! Je ne pourrai de toute façon rien leur enseigner. C’est seulement s’ils sont dignes… qu’ils apprendront l’Éveil. »

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