Ces derniers mois, Hotaru n’a été pour ainsi dire, absolument pas productive. Elle a pu échapper aux combats pendant tout ce temps à coup de bourdes, recherches diverses et variées et j’en passe. Mais aujourd’hui c’est fini. Cela fait déjà une semaine ou deux qu’on lui demande d’aller s’entraîner au complexe, sous peine de se voir condamner à diverses punitions qui ne l’enchante gère.
La jeune femme avait encore fait traîner une petite semaine, avant qu’on vient finalement la chercher chez elle pour l’amener jusqu’au lieu de prédilection pour les combats. On l’avait planté là avec un seul mot d’ordre "tu ne sors pas temps que tu n’as pas fait au moins un combat".
Résignée, la demoiselle se mit donc en quête d’un partenaire. Si possible une fille, qui soit genin et encore mieux si cela pouvait ne pas être un fana de combats… En fait, en y pensant un peu plus, il fallait que cela soit une fille. Hors de question de se retrouver avec un abruti qui souhaitera faire le coq devant elle. D’habitude elle serait enchantée de savoir qu’elle fait tourner les têtes mais ici justement, elle préfèrerait que personne ne lui prête attention.
Enfin, la genin inexpérimentée se dirigea donc à contre cœur vers les terrains d’entrainement où, une fois arrivée, elle observa les combats qui s’y livraient. Il y avait de tout, certains se battaient avec des armes blanches, d’autres répétaient les mouvements de leurs professeurs et d’autres faisaient étalages de leurs compétences.
Hotaru ne s’attarda pas sur les combats d’armes blanches, la demoiselle n’apprécie pas du tout la partie corps à corps de ce style de combat. Jeter un shuriken ? Pas de problème, mais utiliser un katana est hors de question, sauf bien sûr lorsque elle y serait forcée.
Finalement, la seule catégorie qui retint son attention et qui, elle se le doutait bien, était la raison de sa présence comprenait les jeunes ninjas usant de leur affinités et autres capacités. Si les affinités primaires pullulaient, c’est plutôt vers ceux utilisant des capacités moins conventionnelles qu’elle se dirigea.
Une jeune ninja en particulier retenait son attention, elle n’utilisait que du chakra, à la différence d’à peu près n’importe qui d’autre présent. De loin, cela semblait bien moins dangereux que tout ce qu’Hotaru avait vu et pour la débutante en combat qu’elle est, il n’y a rien de mieux. La jeune kunoichi se rapprocha donc de la petite églantine après l’avoir observée un moment, bien décidée à venir lui proposer de s’entrainer ensemble. Hotaru attendit néanmoins que la demoiselle eut un temps d’arrêt avant de l’aborder de manière simple et amicale.
Comblée par un petit-déjeuner des plus copieux en l’agréable compagnie de sa Yuki bien-aimée, Mayumi s’évertuait depuis quelques heures, déjà, à l’affinage de sa maîtrise de la modélisation de formes d’énergie condensée. Au rythme de compositions habiles de longues séries de signes incantatoires, la belle églantine enchaînait tranquillement la matérialisation de formes géométriques simples, y allant d’une progression certaine, quoique graduelle, jusqu’à peaufiner ses créations de détails divers et de traits rappelant les broderies tribales figurant sur les vêtements dont elle était drapée en ce jour. Un mouvement gracile de la dextre suivant l’autre, les yeux clos, la Sendai sculptait ses œuvres avec une habileté évidente pour quiconque posait l'œil sur celles-ci, tel un maître-artisan jetant son dévolu sur un matériau brute pour en faire naître la plus magnifique des sculptures. Le but de cet exercice ? Développer un contrôle plus pointu de son don, le chakra pur, afin de prévenir les dommages que celui-ci pouvait causer à son corps frêle et accablé par la maladie. En d’autres mots, la jeune entêtée s’évertuait… à assurer sa survie. À repousser l’échéance.
Plongée dans un état quasi-méditatif, sujette aux images émergeant au gré de ses pensées dans le néant de son for intérieur, la genin percevait à peine la présence d’autres aspirants foulant la terre verdoyante du terrain d’entraînement. Ni les échanges de coups, ni l’usage de techniques à proximité ne parvenaient à arracher l’immaculée de son intime bulle. Et pourtant...
Après autant de temps à s’acharner sur ses oeuvres, la rescapée des terres enneigées en vint à rouvrir les paupières à la douce lumière automnale, dénichant de sa senestre la silhouette d’une gourde taillée à même un morceau de bambou, posée non loin d’un arbre bordant ce territoire du dépassement de soi. Elle déversa entre ses lèvres charnues un peu de la fraîcheur du liquide étancheur de soif, puis les essuya d’un simple revers de la main avant de reposer le contenant contre le tronc de la plante ligneuse.
Quelque peu à l’écart, le dos tourné à la scène principale, Mayumi ne prit donc conscience de l’approche d’une consoeur qu’au moment où sa voix s’éleva d’entre les bruits de fond. Un léger sursaut, bien qu’à peine perceptible aux yeux de la nouvelle venue, témoigna de la surprise qui avait abruptement gagné l’ancienne yukijine tandis qu’elle posait, désormais, un regard empreint de curiosité à l’endroit de sa collègue shinobi.
« Bien sûr, quelle est-elle ? »
Une voix bercée par la bienveillance, presque sibylline, accueillit doucement l’inconnue aux prunelles violettes qui avait eu l’audace de porter son choix sur la rose sauvage. Sitôt les paroles prononcées, la belle églantine salua de sa geste l’arrivée de la platine, y allant d’une coutumière inclinaison du buste, la paume de sa main droite posée au centre de sa poitrine et les mèches argentées virevoltant au gré de sa courbette. Et, alors qu’elle se redressait et emprisonnait une couette rebelle derrière son oreille, elle égaya à nouveau les oreilles de l’étrangère de son timbre mélodieux.
« À qui ai-je l’honneur..? Pour ma part, je suis Mayumi. »
La kirijine fit mine de réfléchir, l’index posé sur le menton. L’espace d’un instant, il n’y avait que la tiède brise et le bruissement des feuilles pour combler le vide sonore laissé par l’absence de paroles prononcées. Enfin tirée de ce silence pourtant apaisant, la genin aux iris roses sourit, le souvenir d’une rencontre avec une fougueuse jônin bien en tête.
« Oh, et non, je ne suis pas une Yuki. Pas encore... »
Quelle sympathie qui accueillit la jeune femme ! Décidemment, avoir abordé Mayumi, car c’est ainsi qu’elle s’appelait, avait été une bonne idée. Il ne restait maintenant plus qu’à lui demander si elle accepterait de faire un combat d’entraînement. Mais avant tout, il fallait se présenter.
Enchantée Mayumi, pour ma part je m’appelle Hotaru, Kamiya Hotaru. Et pour ma question, je souhaitais savoir si tu es d’accord de faire combat d’entraînement…
Il était bien visible qu’elle stressait énormément actuellement. Tout ça lui faisait un peu peur. Elle n’avait jamais réellement eu son « baptême du feu » et l’idée de pouvoir être gravement blessée ainsi que le résultat du combat, qui ne se finira certainement pas par sa victoire, l’angoissait un peu.
Est-ce qu’on se moquerait d’elle si elle perdait un combat ? Est-ce qu’on la regardera différemment ? Ces questions l’amenèrent à ajouter quelques… précisions, histoire que son probable adversaire comprenne la situation.
Ça me stresse un peu… je n’ai jamais vraiment fait de combats et ce n’est pas vraiment un sujet qui me passionne…
Sur ces mots, elle alla jusqu’à se ronger un ongle, le regard quelque peu fuyant. Elle hésitait à ajouter que son choix c'était porté sur la sendai en partie à cause de l'aspect moins... "agressif" de ses techniques comparés aux autres shinobis présents
« Kamiya… Hotaru? C'est un joli nom. Enchantée, Hotaru. »
Armée d'un sourire sincère égayant les traits de son visage de porcelaine, la belle églantine hocha doucement la tête tout en faisant mine de réfléchir, l'index posé sur son menton. Ainsi, cette jeune femme était donc en quête d'un partenaire d'entraînement. Si un échange de coups ne figurait vraisemblablement pas à l'ordre du jour pour l'immaculée, face à la douceur et à la politesse dont faisait preuve la nouvelle venue, la genin ne résista point. Et puis, quoi de mieux pour affiner sa maîtrise de la modélisation du chakra pur qu'en alliant la théorie à la pratique, pensa-t-elle.
« Bien sûr ! Je ne refuse jamais un combat amical... »
Mais l'ancienne yukijine, fidèle à ses habitudes, avait scruté à la loupe les moindres faits et gestes de sa vis-à-vis tandis qu'elle lui adressait sa requête. Rien n'échappa donc à la rose sauvage, ni l'ongle furtivement rongé, ni les mille-et-un petits signaux non-verbaux que pouvait lui partager, peut-être sans s'en rendre compte, la shinobi à la tignasse platine. Bercée par l’empathie, la Sendai offrit sa mimique la plus chaleureuse, la plus réconfortante, et, d’une voix qui l’était tout autant, drapa de ses mots doux les épaules angoissées de sa future partenaire d’entraînement.
« Je comprends que ça puisse être stressant, la première fois. Ce que tu fais là est un pas important dans ta carrière de shinobi. C’est courageux. Tu peux en être fière ! »
Regagnant le confort du silence l’espace d’une seconde histoire de se remettre les idées en place, l’églantine lorgna quelque peu l’espace vide qui la séparait de son opposante en devenir. La dextre de la genin à la chevelure argentée vint alors dénicher, dans le creux de sa besace, les contours d’une arme métallique tranchante… qu’elle pointa, faussement menaçante, sur son adversaire, l’air sévère. Évidemment, sa posture et son ton n’étaient pas crédibles.
« Par contre, tu dois savoir une chose : que ce soit en situation de combat réel, ou lors d’un banal entraînement… la vie, tout comme ton opposant, ne te feront jamais de cadeaux. Dès que notre duel commencera, nous serons ennemies. Donne tout ce que tu as en réserve pour m’écraser, car je n’hésiterai pas, d’accord? »
L’heure n’était plus aux paroles joyeuses ou aux échanges de politesse. Dorénavant, ce petit lopin de terre, à proximité de cet arbre solitaire où la gourde de bambou de l’immaculée reposait, devenait le théâtre d’une bataille entre la manipulatrice de chakra pur et la fille de papier.
« Hm. »
Quelques pas suffirent à Mayumi pour se distancer de plusieurs mètres de la Kamiya. Le kunai porté à sa bouche, elle en glissa le manche entre ses dents, puis composa un unique mudra, invoquant à ses côtés un duo de copies parfaites et tangibles d’elle-même. Les trois Mayumi se regardèrent brièvement avant de se séparer, chacune des Sendai s’avançant au pas de course vers l’un des flancs de Hotaru selon un positionnement triangulaire. La véritable kirijine, quelque peu en retrait, joignit enfin un parchemin explosif au kunai entre ses lèvres… qu’elle fourra aussitôt dans son sac avant de lancer, du même mouvement, deux projectiles métalliques directement sur son adversaire. L’un d’eux était-il piégé?
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