Été 204, Pays des Neiges, Campement Tanuki.
Au creux des pistes tamisées de poudreuses, la silhouette de l'enfant des neiges trônait seule, près du campement où les voix avaient prônées sur les actes, quelques instants plus tôt. Autrefois garant de la présence du maître de ces lieux, protecteur d'une tribu dont il n'avait pas même soupçonné l'existence jusqu'alors, son attention allait et venait auprès des ombres passagères témoignant d'éclats de vie auxquels il demeurait étranger. Et pourtant... cela lui semblait si familier, en un sens ; cette façon d'agir parmi les siens, d'être entouré d'âmes partageant la même histoire, le même but, le même pouvoir.
Sa poigne se referma sur le pinceau qui trônait entre ses fins doigts, la mâchoire contractée par cette sourde mélancolie qui avait cerné son esprit, le temps d'un instant. Il délaissa un soupir, en ravisant ses prunelles d'éther sur la face du parchemin siégeant sur ses genoux, dont la face à moitié vierge témoignait d'une écriture interrompue par les méandres de l'inattention.
Alors, avec une volonté qui se voulait tout aussi appliquée qu'autrefois, ses doigts vinrent retracer les détours de nouveaux calligrammes afin de les encrer sur l'ouvrage qui se destinait à sa vue, dans l'attente de l'arrivée de ce guide conféré par le patriarche. Ses yeux suivaient avec parcimonie les mouvements du pinceau, tant pour imprégner dans ses pensées le sens de ces mots que pour tâcher d'en comprendre toutes les implication ; si d'aventure il se trouvait là les détails d'un jutsu autrefois employé au cœur de la jungle d'Ue, le nivéen se refusait, en un sens, de demeurer à un niveau si...
vulgaire. Et il éprouvait, au sein de ce corps que tous jugeait chétif, un intense désir de poursuivre cette voie, pour une raison qui lui demeurait inconnu. Ce fut comme si étendre ses sens de cette façon, jusqu'à pouvoir ressentir la présence d'autrui, lui assurait un sentiment de sécurité, d'aboutissement. Connaître ses alentours, pour un être ne pouvant se reposer sur des années d'entrainement passé dont il avait perdu tout souvenir... c'était peut-être ce qui revêtait tant d'attrait à ses yeux. Un besoin si sincère, si vital.
Alors, de nouveau, l'enfant des neiges s'appliqua à encrer les détails de ce qu'il utilisa autrefois, afin de l'étudier, et, peut-être, trouver dans son murmure l'opportunité d'améliorer ses connaissances.
[...]
Une poignée d'instants plus tard, tandis que l'encre noire présente sous ses yeux s'étayait de toute sa splendeur, finalisée et asséchée par l'air froid de ces contrées, des éclats de voix parvinrent à ses oreilles ; ceux, sans nul doutes, de celui du patriarche et de l'un de ses comparses. Intrigué, son regard vint trouver l'ombre dessinée au-dessus des caisses près desquelles il s'était niché. Et bien assez vites, ses paumes s'affairèrent à renouer le parchemin, pour le glisser dans l'un des pans de son kimono. Il noua, habilement, une écharpe épaisse autour de sa nuque avant de s'avancer parmi ces silhouettes qui semblaient l'attendre, le regard rivé sur la stature du Tanuki.
À mesure de préparations, l'enfant des neiges serait bientôt prêt à rejoindre ces terres qui gardaient tant de mystère, tant dans son esprit que dans ceux de la Brume et du reste du monde.