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Hayai C. Taishi
Hayai C. Taishi

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Lun 19 Oct 2020 - 19:15
La mémoire de l’Hayai eut du mal à suivre tout ce qui se passait. Comme les éclats de lumière qu’il manipulait, elle revenait par flashs et instants dans son cerveau brutalisé par le choc du dieu Singe mais aussi de la chute qui en avait résulté par la suite.

Il avait senti des mains sur son corps, ou du moins ce qui en restait. La douleur était terrible mais semblait se perdre dans les vapes de toutes les autres sensations. Taishi entendait des voix, des gens qu’il ne connaissait pas.


« C’est le déserteur-»

Un bruit de choc, un bâton coloré qui déchirait l’air. Un plumage gris et vert, qui remettait à l’ordre.

« Aidez-le, ou Yuukan vous vienne en aide- »

Noir sur la mappe-monde. Comme s’il flottait, mais c’était plutôt qu’on l’avait déposé sur quelque chose qui donnait cette impression. Une civière, peut-être. Ça aurait tout aussi pu être une rivière, vu cette impression de tomber à la dérive.

Il roulait comme une pierre qui tombait d’une falaise, mais le choc du sol ne semblait pas arriver. Juste cet arc-en-ciel doté de tons de rouge face à Iwa qui brûlait, et le sang qui maculait tout le reste. Les lumières du plafond qui défilait… Il reconnaissait cette mosaïque. L’Hôpital était toujours debout ? Comme quoi le destin avait sa manière de jouer des tours.

On tirait sur lui, on le soulevait, déposait ailleurs. Taishi lui cherchait la lumière. Celle dont on lui avait parlé. Le tunnel, ce genre de chose. Sanadare était censé l’y attendre. Aimi. L’autre Aimi, Kurai Aimi.

Où était sa place dans la lumière ? Il ne pouvait plus y nager librement. Il ne pouvait plus la toucher. Mais... Il en sentait les vagues.

N’avait-il pas gagné son droit de les rejoindre ? De laver le sang sur ses mains, celui qui n’était pas le siens ?

Mais rien. Seulement les voix, seulement les mains. On prenait son manteau. Non, c’est tout ce qu’il avait. Ils avaient leurs familles, leurs amis. Leurs rêves. Il n’avait que ce manteau. Sa main voulut s’y accrocher, glissa sur le tissu déchiré, brûlé par endroits, dégoutant de son propre sang.

On essaya de lui enlever, mais Taishi était fort. Il l’avait toujours été. Ryoko l’avait vu. Avec ces bras, il pouvait garder ce qui lui était cher. Et ces jambes, les atteindre… Mais…

Ça lui échappa, comme on essaie de retenir l’eau d’un verre trop rempli. Ça céda, comme un barrage sur une rivière trop agitée. Le vert défila. Il s’accrocha, sa main se referma dans une poche. Comme un dernier espoir.

Ses doigts calleux touchèrent des formes, qu’il reconnaissait bien. La statuette de Kanna. L’oiseau mythique. Une réplique, mais parfois elles valaient autant que l’original, non ?

Mais la pièce semblait difforme, différente. Comme lui, peut-être. Le manteau disparut de son regard, un océan vert et détruit. Sa main ramena le morceau d’argile.

Brisé en deux. Le bas manquait. L’argile était craquelé, tâché de sang. Incomplet.

Comme lui.

Il avait peut-être perdu la moitié de lui-même, mais ce n’était pas la première fois. La moitié de Taishi avait disparu il y a bien longtemps. Il était… un survivant.

Alors c’était peut-être qui il était. La moitié d’une statue d’argile. Mais c’était une réplique. On pouvait la répliquer.

Pouvait-on répliquer Taishi ?

Sa main se déposa sur le lit, et il lui sembla cesser d’entendre les cris, et tous les autres sons. Et même, la lumière, peut-être.

Les portes de ce monde étaient fermées.

Il était un survivant, et c’était son prix. Mais l’objet dans sa main lui rappelait l’alchimie divine du monde, l’automaton de la réalité.

Il aurait toujours ce droit de réplique.

Il pouvait encore voir cette lumière. La sienne.

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