Les glaçons irréguliers se brisaient contre les godets de verre crasseux dans ce bar de la capitale. Nul ne venait ici pour s'essayer au calme ou chiner les meilleurs alcools de la région. Non, non, non... Seuls les locaux du coin et les touristes à la recherche d'un établissement avec vue sur le pont Arahi venaient ici en quête d'une coupelle de sake ou d'une gorgée de bière pas trop cher.

On pouvait renifler dans l'air les fragrances de gnôle et de parfums des croqueuses d'hommes bien trop apprêtées. Alors oui, l'établissement n'était pas bien grand ni même honorable, mais il avait ça de bon de contenir une clientèle aussi vivante qu'appréciable, et c'est exactement ça que le Shinrin venait rechercher en ses soirs de solitude.

D'habitude favorable aux quelques interactions avec les filous les plus éméchés du comptoir, il était aujourd'hui bien solitaire dans son coin de pièce, s'essayant à l'alcool pour l'une de ses premières fois, lui qui était habituellement friand de limonade fraîche. Il sirotait son eau-de-vie comme pour en apprécier le goût tout en évitant d'en faire souffrir son estomac. L'air hagard, ce n'était pas la maigre dose d'alcool qui l'enivrait. Il était en ce jour simplement pris d'un poison bien plus ravageur que la boisson, celui de la solitude.

La raison ? Il n'y en avait pas réellement. Il jouissait de quelques compagnons d'armes ; pas beaucoup certes, mais ni trop peu non plus. De même, le clan Shinrin restait au petit soin pour le jeune homme qui restait considéré comme un enfant parmi les siens. Alors pourquoi un tel maux venu de nulle part ? Il ne le savait guère, sachant qu'il y avait tout simplement des jours comme ça où l'affliction vous tombe sur la tête avec l’indécence de ne pas s'annoncer. Alors si la plèbe pouvait trouver dans l'alcool la solution à leur mélancolie, pourquoi lui ne le pourrait-il pas ?

S'enfilant une rasade du limpide liquide, il s'essuyait la bouche de son haori avant de venir glisser ses doigts dans sa chevelure ébouriffée, le regard porté vers le cellier, comme s'il s'essayait à capter l'attention de Dieu. 'Mpf..'ruminait-il.

Le pont Araho. Bordés par ces immenses qui en plus d'offrir une magnifique vue sur le paysage du feu, un pont que Yuan emprunte de temps en temps pour rejoindre l'un des célèbres bar de Urahi. L'Aburame n'était pas spécialement une fana des bars surtout ceux qui sont bruyant et fréquentés, mais lorsqu'elle en a l'occasion, venir boire une gorgée de saké ou d'un autre alcool quelconque pour se nettoyer l’œsophage ne lui fait point de mal.

Si elle avait globalement les mêmes goûts que ses insectes au niveau nourritures, l'alcool n'était pas spécialement apprécié de ses guêpes mais elle en buvait pour elle et non pour ses compagnons de combats. Entrant dans ce bar, l'odeur d'alcool environnante lui rappelait quelques souvenirs pas tous glorieux, un bar n'est jamais très sécuritaire pour n'importe qui. Et si elle paraissait aguicheuse du haut de ses sandales à talons et de sa tenue assez ouverte, elle n'était pas réellement ce qu'elle dégageait et son caractère allait à l'encontre de ce que les gens pensent d'elle.

S'arrêtant au bar même, elle pensait passer la soirée seule comme à son habitude, mais alors qu'elle commandait son regard se stoppa sur un individu qu'elle semblait reconnaître, mais pour le moment elle ne faisait rien.

« Un verre de Saké, c'est suffisant.
— Une jolie jeune femme qui boit, c'est séduisant. »

Kfh. Un lourd, encore. N'y prêtant pas attention, elle semblait habituée, mais quel choc aurait ce pauvre homme en apprenant que la belle jeune femme qu'il tente d'aborder à peut-être dix ans de plus que lui. Mais afin d'éviter une nouvelle fois d'être dérangée, elle trouva refuge vers le soldat qui lui disait quelque chose, comme pour s'embarquer dans une conversation et laisser les autres hommes en plan.

« Shinrin Hanzo, vous semblez bien solitaire en cette soirée. Puis-je me joindre à vous? »

Sourit-elle à Hanzo, si elle se souvenait de son nom c'était sûrement car ils s'étaient déjà rencontrés dans le passé. Après tout Yuan était dans l'Empire depuis les débuts et elle se devait de connaître une majorité de personnes même si ce n'est pas forcément personnellement pour certains.

Une lampée, puis une deuxième, et il se rendait alors compte que le verre avait filé plus vite que prévu. S'il avait escompté venir ici et faire preuve d'une certaine retenue, il semblait que son ébriété fine mais latente avait un autre plan pour l'énergumène en proie à la mélancolie. L'esprit légèrement confus et troublé, il replongeait dans ses mémoires les plus sombres. Une dernière gorgée et le verre qui fracasse la table vient faire entendre à l'homme de service qu'il était l'heure de remplir la coupe à nouveau.

Son discernement était à l'image de sa condition : légèrement crasseuse et pastichée. Et pourtant, il trouvait le réconfort. Légèrement affalé sur le comptoir, lui qui se voulait être de base un jeune homme soigné et soucieux de sa propreté laissait alors les gouttes d'alcool perdues s'immisçaient dans son textile. Il n'avait pour autant guère perdu ses moyens, en effet, il était à ce moment limite où son esprit tend à le quitter. Qu'il était appréciable de savoir que d'ici une petite heure, il quitterait ce monde bien trop réel à l'abri dans son petit asile subconscient.

Soudain, une voix bien trop agréable pour venir de l'assemblée de poivrot habituelle se fit entendre. Alors le jeune Shinrin reprit une position plus droite, comme pour se persuader lui-même qu'il n'était guère un siffleur de tonneau et également pour se réaligner à la dignité de celle qui l'interpellait : Yuan. A ce moment, il eut été désopilant de voir comment la vue de si formidables formes pouvaient tout à coup éclaircir l'esprit d'un mâle. Alors, raclant sa gorge comme pour se débarrasser du poison qui subsistait, il l'apprécia du regard d'une traite avant de plonger dans l'éclat de ses yeux et de lui répondre :

"Yuan, je ne vous savais pas comme habituée de cet 'éminent' établissement. "

Tirant la chaise haute voisine à la sienne, en bon galant homme il lui offrit de prendre place à ses côtés.

"…et vous savez très bien que la réponse est oui."

S'il n'était pas indifférent quant aux proportions parfaites et au charme de la vénus, il en restait appliqué à ne pas tomber sous son joug, sachant pertinemment qu'entre les mains d'une femme avisée telle qu'elle, ces atours pouvaient être une arme bien plus affutée que la lame la plus aiguisée qui soit.

Des rires, des bruits de verres se frappant entre eux, des poings frappant les tables, des bruits de ryôs qui roulaient, une ambiance de bar assez normale. Si il était populaire c'était car les meilleurs alcools étaient servis en plus d'offrir une magnifique vue et un emplacement stratégique : au centre du pont indispensable pour rejoindre Urahi.

Clan Shinrin, un autre des clans basé à Urahi tout comme les Aburame. Si Yuan connaissait des grands noms comme Shinpachi, il semblait que ses connaissances aillent au delà de ses supérieurs car même un simple soldat lui semblait familier, Hanzo. Après tout elle devait bien connaître ses camarades, sinon elle serait à jamais seule dans la vie. Il était peut-être le sauveur de sa soirée, elle n'allait pas la passer à repousser des hommes avides de son corps, lui souriant en faisant tourner le liquide dans son verre. Même si l'apparence première d'Hanzo n'était pas la plus séduisante, Yuan savait qu'il allait rapidement se remettre en place afin de faire bonne impression, après tout qui se montrerait crasseux ou mal en point volontairement face à Yuan?

« Ils font un très bon saké, donc malgré les fréquentations peu.. saines de ce bar, je viens y boire un verre de temps en temps. »

Yuan prit place sur la chaise que l'homme lui avait tiré, déposant son coude contre la petite table haute et gardant son verre en main, continuant de faire tourner le contenu avec un sourire aux lèvres.

« ..Et vous semblez être un habitué vous aussi? »

Une gorgée, puis deux avant de déposer le verre contre la table, Yuan pouvait maintenant pleinement discuter avec le soldat, si habituellement elle est réservée, il peut lui arriver d'être brusquement aguicheuse ou de faire tout comme, et c'était un peu son caractère de ce soir, l'ambiance et l'alcool se mêlait parfaitement pour lui offrir le droit de se comporter de cette façon. Après tout elle faisait simplement ça pour rire, Hanzo ne l’intéressait pas ou du moins il ne sera rien de plus qu'un ami à ses yeux, bien trop jeune.

La nymphe aux cheveux ébènes tapotait ses ongles longs et rosé contre le bar en observant son interlocuteur.

« Paisible soirée pour prendre un verre entre soldats n'est-ce pas? »

Paisible disait-elle ? Ce mot lui trottait en tête comme un parasite qui manquait de courtoisie. Car si c'était bien sous la douce lueur d'un coucher de soleil qu'il appréciait son breuvage, son esprit lui était dans la pénombre la plus totale. Alors non, au grand malheur du soldat, paisible n'était pas le terme qu'il aurait employer pour caractériser cet instant, mais il comptait bien mettre à profit cette accidentelle rencontre pour repousser ses maux comme il le pouvait.

"Un habitué ? Ai-je tant l'air d'un pochtron en cet instant ?" répondait-il, un fin sourire au bec l'air légèrement provocateur. "Vous me prenez par surprise, dans mon moment de faiblesse… ce n'est pas très gentille, Yuan-san. "

Le bras tendu, se soustrayant le temps d'un instant à la demoiselle, il laissa le gérant lui remplir le verre avant de présenter ce dernier rempli à la noire dryade, l'invitant à trinquer et à faire cul-sec, toujours orné de son allure malicieuse transpirant un léger air d'amoralité.

"Alors peut-être que pour vous faire pardonner, vous accepteriez de me rattraper pour commencer ?"

Il n'était pas question pour le Shinrin d'user de l'alcool pour un quelconque dessein, non.. il avait bien trop de respect envers sa propre personne pour s'abaisser à ce genre de gredinerie. Il était juste question de conditionner la scène, de s'aligner à la nymphe pour que, à deux, ils puissent apprécier un répit bien mérité sous le subtil effet de l'ébriété.

Yuan était adepte d'ironie. Paisible n'était effectivement pas le mot à utiliser pour décrire cette ambiance.. de bar. Les individus en état d'ébriété et tombé dans l'addiction à l'alcool grouillait ce genre d'établissement et parfois à des heures se situant en fin d'après midi, comme quoi ils n'ont pas d'heure. L'Aburame préférait la soirée tout de même, c'est alors que pendant qu'il la réprimandait qu'un sourire à la fois empli de malice et de satisfaction apparu sur le visage de Yuan qui reprit une gorgée de son verre. Histoire de commencer la soirée en bonne et due forme, elle reposa son verre, tournant son regard vers Hanzo.

« Oh, vous voulez entrez en compétition mon cher Hanzo? Attention je suis tenace. »

Lance t'elle en gardant son éternel sourire, reprenant son verre pour le terminer d'une traite, Yuan ne rigolait pas quand elle était lancée, et son bras tendu prouvait qu'elle était prête à rattraper notre jeune Shinrin. Yuan semblait parée pour gagner ce défi, observant Hanzo avec un air calme malgré son attitude aguicheuse.

De quoi déplaire à ses insectes qui n'aimaient pas cette étrange manie de Yuan à boire de l'alcool et accepter les défis de ce genre, bourdonnant à l'intérieur d'elle même, boire lui permettait de les ignorer pendant un moment, elle saura se faire pardonner en rentrant chez elle, pour l'heure elle avait le droit à ses moments de détentes. Elle n'avait pas souvent l'occasion de profiter avec un soldat et revoir Hanzo lui permettait de s'évader un peu et de quitter son travail.

« Encore un verre m'dame? Vous êtes sûr?
— Pas besoin de me poser la question, bien sûr. »

Dit-elle en tendant une nouvelle fois son verre après l'avoir descendu d'une traite une nouvelle fois, elle ne supportait pas perdre.

La donzelle avait du répondant, et si elle avait mal interprété le verre et les mots de l'éphèbe, il en restait enthousiaste tant pour lui la perspective de la compétition - qu'importe les formes qu'elle revêt - était une ode à la vie. Alors, s'arquant légèrement le dos comme pour prendre ses aises, il apporta le godet à ses lèvres, non sans d'abord trinquer auparavant avec l'impertinente Aburame.

Et d'une traite, le récipient fut vide avant de venir fracasser la table de plus belle. Pris d'arrogance, il se substitua au tenancier à l'air paternaliste en lui chipant des mains la bouteille qui à peu de liquide prêt était pleine pour que de lui-même, il baigne d'alcool le verre de la dame, puis le sien. Déposant le flacon sur la table, il s'excusa d'un simple signe de tête de son acte pour laisser le gus détacher son attention sur le duo d'un air exaspéré.

Ses doigts dessinant le contour de sa coupe, il ne put s'empêcher de marquer une pause, ne mouftant point mot, se contentant de simplement la jauger du regard. Il n'était pas question de gêner la demoiselle - même si dans une certaine mesure il appréciait le désagrément causé -, car in fine, il appréciait simplement ces moments de silence où sous les premières effluves de la boisson il pouvait appréciait la situation et sonder sa camarade.

Tendant de plus belle son verre, comme pour briser la glace, il était bientôt l'heure de débuter le second round, non sans l'accompagner de quelques palabres épicées :

"Est-ce de votre habitude de saouler les jeunes et prudes soldats de l'Empire ? Vous ne devez pas être une sage fréquentation Yuan-san."

La soirée ne faisait que commencer et pourtant il commençait déjà à laisser sa personnalité exécrable s'exprimer sans censure. Si ses propos se cantonnaient pour l'instant à de simples et mignonnes provocations, il savait très bien que la demoiselle qu'il avait en face de lui n'avait rien d'une puritaine coincée et que sous son air pimentée et alliciante se terrait un démon qu'il espérait bien rencontrer.

"Santé ?"

Observant le Shinrin faire, elle ne pouvait s'empêcher d'afficher un sourire provocateur, attrapant son verre de nouveau rempli en le soulevant légèrement. La compagnie de Hanzo semblait agréable et boire un verre avec un individu de ce genre ne pouvait qu'être sympathique, non? De plus il était aussi agréable à la vue, même si Yuan n'était pas du genre à s'éprendre de petits jeunes. Aussitôt le verre se remplissait qu'il était fini par l'un des deux soldats, visiblement confiant dans leurs capacités à tenir l'alcool.

Un verre, puis deux, puis trois. Yuan restait toujours sobre visiblement habituée à l'alcool même si ce dernier était fort. Même si on pensait voir deux alcooliques en pleine compétition, au final Yuan ne faisait pas ça pour user de l'alcool mais simplement pour passer une bonne soirée, la preuve elle était totalement consciente de ses faits et gestes pour le moment.

Relevant doucement son verre, elle s'accouda au bar pour zieuter son partenaire de boisson une nouvelle fois, écoutant ce qu'il avait à dire et notamment ses remarques plutôt désobligeante à son égard.

« Insinuez-vous que je suis un danger pour la jeunesse ? Vous êtes bien médisant Hanzo-san. »

Elle arquait un sourcil en observant le Shinrin, avant de faire rejoindre leurs deux verres après son invitation à boire ensemble.

« Santé. »

Et elle porta son verre à ses lèvres afin de reprendre encore une gorgée d'alcool, débutant le deuxième round de leurs petit jeu pas réellement fait pour les enfants.

En approchant le soldat sous l'angle de la compétition, la kunoichi avait choisi de faire face à un jeune homme animé par le désir de vaincre. Si sous le pronostic d'un affrontement il se voulait de base exécrable et mauvais, l'ajout de l'alcool à l'équation rendrait le cocktail certainement encore plus acidulé et corrosif. Alors l'insolent riait à petit éclat sous l'écoute de la réplique de sa nouvelle amie tandis que l'ébriété commençait assurément à lui chatouiller la décence.

"Médisant ? Oui, je suis au fait de ce sobriquet, mais j'imagine que vous n'êtes pas venu vous enluminer la trogne avec moi pour que nous discutions de patrimoine ou de laconisme, ou alors c'est que mon œil me joue des tours…"

Sans parcimonie, il s'approchait alors dangereusement de la pie, décalant son siège comme pour la provoquer, la faire piailler et la pousser à réagir. Il l'exhortait à craquer, à faire tomber son masque d'aplomb pour laisser entrevoir un soupçon d'insécurité sur sa délicate mine. 'Elle est émérite' se disait-il, alors il se permettrait de jouer un peu pour certainement le regretter plus tard, là le paradoxe de l'excentrique misanthrope narcissique.


Ainsi, une fois à seulement un ou deux pouces de sa silhouette, l'invitant d'un coup d'épaule, ses fins doigts vinrent porter une nouvelle fois son verre aux yeux de la dame, qu'il toisa d'un regard suffisant accompagné d'un fin sourire.

"Santé ?"

Un jeu de provocation. Le jeune Shinrin insolent contre la vénus calme, mais réussira il à la faire flancher? La faire s'énerver? Ou encore mieux la faire répondre sur le même ton. La faire réagir à ses attaques verbales qui ne faisait que la faire sourire, un air dédaigneux se ressentait sur le visage de l'Aburame, peut-être en guise de réponse pour ne pas répondre par les mots. La sobriété de Yuan commençait doucement à la quitter, mais quel sera le verre de trop? Sûrement pas le prochain, mais ça ne saurait tarder. Mais qu'est-ce que deux individus de ce genre en état d'ébriété sont capable de faire.

Mais le voilà qui attaque, poussant son siège, le faisant déraper contre le carrelage noir du bar dans lequel ils buvaient ensemble. C'était peut-être la première fois que le duo buvait dans ce bar mais pas la première fois qu'ils trinquaient ensemble, et Yuan savait de quoi il était capable. Même si elle restait dans les limites du raisonnable, se donnant un minimum de respect, Hanzo lui n'avait pas cette limite et il pouvait vriller dans la démence bien plus facilement que la quadragénaire.

De tout les soldats du Teikoku, Hanzo était bien celui à qui Yuan n'offrira jamais sa confiance. Imprévisible, insolent, arrogant, rien n'inspirait la confiance dans ce terrible personnage mais elle appréciait sa compagnie, surtout autour d'un verre, même si la méfiance prend parfois le dessus.

Relevant son verre d'alcool rempli, approchant dangereusement son visage de celui du Shinrin comme pour le provoquer, croisant les jambes. Une attitude purement féminine, visiblement Yuan ne comptait pas se laisser faire, et trinqua de nouveau avec Hanzo.

« Santé. »

Surpris, le marionnettiste plissait les yeux tandis qu'il dévisageait la demoiselle qui ne montrait aucun signe de pusillanimité ou frisson. Pire, en tendant d'elle-même son menton vers lui, elle défiait franchement le jeune homme qui restait péniblement de marbre. Portant son breuvage aux lèvres, il ne manquait pas de bien garder sa cible de visu, comme un chasseur qui ne voulait pas se faire surprendre par sa proie.

Sous l'effet des nouvelles onces de liquide, il regrettait alors ce précédent moment d'inaction, se disant que s'il avait eu l'audace, que dis-je, l'intelligence de faire le geste de trop elle aurait alors amèrement regretter d'avoir fait un pas en avant face au danger.

Une intime distance séparait à présent l'Aburame du Shinrin. Ses yeux dans l'océan des siens, il se rendait compte des quelques détails qui façonnaient le jolie minois de la dame vêtue de noir.

"Yuan-san, saviez-vous qu'il y a un soupçon de vert dans l'ambre de vos pupilles ?"

Tout n'était que jeu, si bien qu'il frissonnait d'émulation. S'il était bien sincère quant à ces propos, ces derniers visaient l'inconfort de la jeune demoiselle, comme pour appuyer sur les quelques centimètres qui les séparaient. La main libre du jeune homme vint alors trouver l'arrière du siège de la demoiselle, effleurant légèrement sa délicate peau et consolidant la posture aventurière et provocatrice du jeune homme. Le poivrot qu'il allait bientôt être ne serait pas en mesure d'apprécier ce manège, alors il devait emboîter le pas et se hâter quitte à brusquer un peu trop la demoiselle. Elle n'était pas que émérite, elle était également tenace, alors aux grands maux, les grands moyens.

"..et je note également que vous prenez grand soin à bien mettre en avant vos atours les plus… persuasifs."

De la perversion à l'état pur, la Némésis de toute femme qui avait le malheur d'être livrée à ce monde malsain avec un peu trop de somptuosité. Et comme pour clouer le nouvel acte, une fois les contenants remplis, il porta le verre même de la nymphe à son attention.

"Santé ?"

Alors qu'elle était dangereusement proche, elle fut étonnée de voir qu'il n'ai rien tenté, peut-être avait-il une once de respect et savait sa situation ou alors était-il tout simplement ignorant et n'avait simplement pas tenté de succomber au pêché. Cette distance si dangereuse qui pourrait faire tomber dans la démence n'importe quel humain sous ébriété, mais pas Yuan, bien trop fidèle sans doute.

« Observateur mon cher Hanzo. Mais avez vous remarquez que les votre sont aussi clair que les miens? Ça nous fait un point commun. »

Faisant s'entrechoquer leurs verre dans un bruit de verre insupportable pour certaines personnes, elle se recula d'un coup, appuyant son dos contre le dossier, zieutant avec un air accusateur le jeune Shinrin, un sourire aux lèvres alors qu'elle y porte son verre.

« De grands atours que vous prenez un plaisir fou à reluquer il semblait Hanzo, cela cacherait-il quelque chose? »

Quelle que soit l'occasion, Yuan était toujours magnifiquement parée, et ça beaucoup le savait. Même si les bijoux n'étaient que des bracelets de jades, cela suffisait pour faire d'elle une élégante femme. Ses créoles d'or bougeant au même rythme que la tête de l'Aburame, elle souleva son verre à nouveau rempli afin de trinquer de nouveau.

« Santé. »

'Un point commun ? Si au moins il n'y avait que ça' ruminait le soldat qui essuyait ses lèvres pour en effacer les quelques humidités de saké qui y siégeaient.

"Je pense que nous partageons bien plus de choses que le simple éclat de nos yeux."

Tel un écho-reflet, il prit également place dans le fond de son siège, ne soustrayant par pour autant sa main qui commençait à très méticuleusement venir caresser les vertèbres dévoilées de la friponne avec la délicatesse d'un duvet de coton.

"Et je vous sais bien plus intelligente que ça Yuan-san, allons… Vous êtes de ces dangereuses vipères qui plaisent et qui le savent. Vous en jouez avec autant d'aise que je me plais à en profiter. Alors respectons nous un peu et ne faisons pas comme-ci ce n'était pas le cas. "

Son allure était stridente, son sourire quant à lui était carnassier. La renvoyait vers une indécente vérité il souhaitait sans pour autant y mettre une quelconque forme. Là l'effet des lampées de breuvage qu'ils venaient de s'enfiler dans le gossier. Une chose était sûr pour autant : Rien n'irait en s'améliorant. Et alors qu'il pointait une nouvelle fois son verre vers la demoiselle, son attention libérée de la pie le temps d'un instant, il pouvait reconnaître la douce mélodie qu'un chanteur itinérant et sa troupe avait commencé à jouer.

"Dame da ne dame yo dame na no yo… ♫"

Alors enveloppée du doux son du chant de la timbale et des cordes, le Shinrin lorgnait une nouvelle fois sur la très chère, convoitant son malheur le plus pernicieux. Le tempo posé du jazz accompagnait son malin dessein tandis qu'il dessiait la suite des hostilités, son regard baigné dans le sien, toujours affublé d'une malice que l'alcool commençait à bien débrider.

"Santé, Yuan-chan ?"

Si la soirée avait pourtant bien commencé et que le verre de trop n'avait pas été dépassé, pour Yuan la dernière action de Hanzo fut celle qui ne fallait pas faire. Interceptant les doigts bien trop curieux du soldat avec l'une de ses mains placées en arrière au niveau de son dos, elle affichait un léger sourire en observant le Shinrin.

« Plaire. Je plais c'est sûr, mais malheureusement pour ceux tournant autour de moi mon cœur est déjà prit. Voyons Hanzo, vous n'allez pas franchir le cap et empiéter sur la propriété d'un autre n'est-ce pas? » Et malgré la mélodieuse chanson qui venait d'être entamée par le chanteur, Yuan ne se laissait pas tomber dans l'interdit, même si l'identité de sa moitié n'était pas révélée et que sa relation n'était pas connue, du moins au sein de l'empire, Yuan se devait de prévenir pour éviter un quelconque dérapage durant cette soirée. « Vous vous doutez bien qu'il ne partage pas. »

Une réaction étonnement calme de la part de l'Aburame, bien qu'elle aurait pu vriller à ce moment là et agresser de Shinrin pour son geste un peu trop déplacé son goût, elle ne l'a pas fait. Tapotant ses ongles contre le cristal de son verre en inclinant le visage, même après cette réprimande de sa part elle savait que la soirée n'était que sur le point de commencer.

Relachant les doigts du Shinrin qui se retrouvait désormais couvert de plusieurs guêpes, accrochée au bout de doigts comme en prévention si il recommençait un acte bien trop proche. Mais cet incident n'arrêtait pas Yuan, c'est pourquoi elle avait réagit en gardant son calme, si elle s'énervait c'était rentrer dans le jeu de l'homme et perdre et elle avait horreur de ça. C'est alors qu'elle relève doucement son verre, un sourire dans le coin des lèvres tandis que son coude était déposé contre le bar.

« Santé, Hanzo-san, en espérant que ce verre ne vous fera pas flancher. »

Là, cette réaction imperceptiblement teintée de géhenne et d'incommodité c'était tout ce qu'il demandait et ce qu'il avait cultivé depuis le moment où la nymphe l'avait abordé. Elle avait finalement pointé le bout de son dard après tous les efforts du jeune homme. Mais alors qu'il jouissait avec ardeur de ce moment, le régal fut de courte durée et se dégrada graduellement et lentement, effritant son expression si trépidante qui laissait alors place à une trogne dépitée, vite remplacée par un triste sourire nerveux. L'ivresse latente l'animait dans sa descente aux enfers, le faisant rire convulsivement tandis qu'il observait les quelques hyménoptères qui lui menaçaient le bout de ses doigts.

Il se reconnectait avec les ignominies présentes et passées qu'il avait pu commettre, ne pouvant - dans cet élan de lucidité - se soustraire à elles cette fois. Alors l'air déplorable, il dépeigna sa touffe d'une main dans les cheveux comme pour tenter d'évacuer les quelques pensées parasites qui trônaient dans sa tête.

Décalant son verre comme pour s'en débarrasser et faire place, il trouva refuge dans le creux de ses bras, symbole de défaite.

"Je ne me tenterai pas à ça, Yuan-san, vous avez gagné."

Alors cette mélodie qui se voulait de base gai et dansante pour le jeune sonnait tout d'un coup comme morose, triste, tel un hymne à la mélancolie.

Victoire pour la vénus qui prenait un dernier verre en zieutant le perdant de leurs petit jeu. Avait-il peur de devoir confronter celui qui possédait la belle? Ou abandonnait il juste après avoir fauté? L'alcool lui était monté au cerveau mais le rappel à l'ordre de la femme semblait lui avoir fait reprendre ses esprits bien vite. Elle observait, ne disait rien et déposait maintenant son verre contre le bar, célébrant sa victoire avec un simple sourire et un air plus dédaigneux que jamais, pour une fois, sa situation amoureuse lui avait fait gagner quelque chose.

Hanzo avait-il compris qu'il pouvait être à la fois la pire race et le plus sympathique des amis? Enfin, pour le dernier cela reste bien sûr à revoir, Yuan ne l'avait jamais vu comme ça, ça n'était qu'une supposition de sa part en le voyant rapidement se raviser. Il avait apprit le respect, c'est déjà une bonne chose.

« Vous voyez, je n'échoue jamais. » Vantarde elle se penche contre le dossier de sa chaise, les insectes quittant la main du Shinrin pour revenir auprès de leurs hôte adorée.

Mais il était étonnant pour Yuan de voir un homme aussi coriace se raviser aussi vite et elle se tenait prête à toutes éventualités. Il n'allait pas avaler cette défaite facilement même si c'est lui qui l'a provoquée au final, en réveillant une Yuan quelque peu agacée par la situation tout en gardant son calme.

C'était le moi qu'il aimait le moins, celui qui ne volait pas, celui qui ne dormait pas. Le bruissement des tissus, le bourdonnement des bavards, le tintamarre de la guitare, les onomatopées de l'artiste jusqu'au crissement de la chaise de la nymphe, absolument tous les sons qu'il tentait vainement d'étouffer sonnaient à ses oreilles comme un bourdonnement assourdissant. Même dans l'abri de son habit il pouvait entendre la voix de la pie qui tentait de l'écorchait alors qu'il avait déjà abdiqué. Il en venait presque à regretter ce défi, se demandant si la soirée aurait été meilleure s'il l'avait passé seul. En réalité, ça n'importait que très peu, car au fond il avait bien mérité ce châtiment verbal. Alors il l'imaginait appréciant sa victoire, gloussant de joie, toisant de haut la dépouille du Shinrin vaincu.

Victime d'un élan de dignité, il se redressa alors sans pour autant croiser le regard de la kunoichi, se contentant de simplement ramener son verre à lui et se l'enfiler d'une traite. Car s'il avait clamer un quelconque abandon, il en restait un jeune homme assoiffée qui espérait bien trouver dans l'ivresse un indulgeant repos.

"Oui, vous êtes une vraie gagnante, cela va sans dire." ironisait-il tandis qu'il se reporta une nouvelle fois vers la bouteille, remplissant égoïstement son verre comme pour sceller son destin. "Votre 'propriétaire' a tout d'un veinard, je n'en doute pas."

C'était l'acrimonie d'un jeune homme morose qui s'exprimait à présent. Ses paroles n'étaient plus inscrites dans un dessein particulier et n'avaient plus rien de réfléchies. Il continuait à se montrer désagréable comme à son habitude, comme pour se persuader qu'il était encore 'lui', qu'il était encore vivant. Car au fond, peut-être avait-il espérer se trouver en face d'une amie en cette douce soirée, mais comme le voulait sa coutume il avait tout foiré, et il ne lui restait alors plus qu'à critiquer comme à son habitude ce démon venimeux qui trônait en son for intérieur et qui se nourrissait de perfidie et de fausseté.

"J'imagine que vous me préfériez quand je manquais de vous voler un baiser n'est-ce pas ?" fusait-il, les yeux plongés dans son verre bientôt vide.

Un caractère changeant. Un autre trait atypique que démontrait souvent le Shinrin aux yeux de l'Aburame. La situation avait bien changée, et même si la musique de fond de bar peinait à faire perdurer le climat d'ébriété, il se pourrait que Hanzo soit simplement prit d'un élan mélancolique dû à une trop grosse dose d'alcool dans le sang. Yuan se portait bien, enfin même si ses pensées étaient légèrement perturbée elle n'avait pas à se plaindre, même alcoolisée elle restait totalement consciente de ses faits et gestes comparé à d'autres qui seraient capable de tout. On peut simplement remarquer qu'elle est moins réservée lorsqu'elle boit.

Le commentaire sur sa moitié la fit sourire, finissant le fond de son verre en haussant un sourcil. Hanzo regretterait-il de ne pas être passé avant? Avait-il un faible pour les femmes plus âgées ou était-il simplement un petit joueur qui aime profiter de sa vie comme il l'entend?

« Ça créer bien des jaloux, vous vous en doutez Hanzo-san. »

Enroulant une mèche de sa frange autour de son index, elle zieutait le mélancolique Shinrin en reprenant une dernière gorgée. Sa psychologie était assez étrange, Yuan tentait de l’interpréter comme elle le pouvait, de le comprendre d'une quelconque façon mais impossible. Même un Yamanaka aurait du mal, enfin c'est ce qu'elle pense.

« Vous m'aviez l'air plus vivant lorsque vous faisiez ça, il est vrai. Mais si je vous préfère comme ça ou comme il y a quelques minutes, je ne saurais pas dire, après tout j'ai à faire à la même personne, et qu'il soit audacieux ou renfermé il reste une agréable compagnie.

Une agréable compagnie ? L'alcool lui obscurcissait l'esprit, le peinant dans sa réflexion à tel point qu'il avait du mal à déterminer si la femme en face de lui parlait vrai ou si ce n'était qu'une gausserie de plus, une raillerie envers l'homme qu'elle venait de défaire. Alors son esprit craquelé se laissait emporter par les flots d'élucubrations qui le hantaient. Là il se laissait à leur merci, tel un cadavre en proie aux vautours immatériels.

Il repensait aux mots de la donzelle, à son bien-aimé qu'elle tendait dans la conversation tel une pavois pour se protéger de la perversion du jeune homme. Peut-être ne l'avait-elle pas compris encore, mais il ne fut jamais question de ses courbes. Car en réalité, aussi appétissantes était-elles, Hanzo avait simplement trouvé en la nymphe une poupée assez égayante pour le soustraire à ses pensées le temps d'une soirée. Et tel un gamin un peu gâté, tout ce qu'il souhaitait c'était la corrompre, lui abimer son expression maîtrisée à la perfection pour dévoiler ses maux les plus profonds et débusquer la petite fille poltronne qui se cachait derrière ce masque de fer.

Mais il n'en était rien, car le seul enfant qu'il avait réussi à débusquer aujourd'hui, c'était lui. Alors il la regardait, en se disant que malgré tout ça, malgré toute cette noirceur, malgré l'indécence qu'il avait pu avoir à son égard, elle avait peut-être encore la finesse, la grâce de le considérer comme une agréable compagnie. Alors il se redressa, signifiant d'un simple geste de la tête qu'il était en proie aux remords.

"Je vous ai mal jugé Yuan-san, vous semblez avoir bon fond et malgré mon état, vous me prêter une attention que je ne mérite pas. "

Son état dégradé transpirait l'insignifiance. Il semblait abattu, morne, et si ses lèvres ne s'articulaient pas toutes seules, on aurait presque pu croire qu'il n'était qu'une marionnette de piètre qualité. Alors toujours orné d'une lamentable expression de suppôt de Bacchus accablé, il se rapatria vers l'Aburame, laissant deux doigts venir lui effleurer le menton, comme pour l'emmener à lui tandis qu'il s'approchait lentement de ses lèvres, son regard camouflé sous quelques mèches.

"Alors peut-être accepteriez vous de me réconforter. C'est une chose que vous les femmes pouvez faire, non ?.."

Elle lui avait accordé un semblant de pitié, alors aussi grisé et maussade pouvait-il être, la seule réaction qu'il avait trouvé pertinente était de venir détruire les dernières possibles onces de bienveillance qu'elle avait à son égard. La morosité, le chagrin, le désespoir, tous ces maux qui l'habitaient s'avéraient ne pas avoir changé le fait qu'il en restait un dragon exécrable.

Rare sont les femmes prises mais qui sortent encore, surtout à l'âge de Yuan. Mais en plus de paraître largement plus jeune que son âge, Yuan avait un comportement bien spécial et même si elle avait juré fidélité, elle n'allait pas se priver de tout non plus. La vénus au venin mortel observait sa proie du soir se lamenter et se fermer sur lui même. Aimait-elle ça? Non. Mais on en avait l'impression, après tout même si elle était gentille, Hanzo ne méritait pas toute sa bienveillance, mais c'est sûrement par respect qu'elle se chargera de lui.

Hanzo n'avait pas eu ce qu'il souhaitait ce soir, et il eut même l'effet inverse en se posant finalement des questions sur lui même. Observant son verre vide en écoutant les dires du mélancolique, elle n'avait rien à ajouter mis à part un petit rictus, avait-il compris qu'il n'était pas le plus sympathique en cette soirée? Mal jugé? Kfh. Elle décroisa ses jambes pour se pencher légèrement en avant, plissant ses yeux pour observer le jeune Shinrin, venait-il de faire part de remords? Elle n'y croyait pas.

Se demandant même s'il n'était pas en état d'ébriété avancé, ce fut une supposition assez pertinente. Elle ne connaissait pas cette phase psychologique de l'homme et il serait étonnant de le croire aussi pitoyable. Se laissant attraper le menton malgré tout, elle haussa un sourcil avant de se dégager légèrement, attrapant le poignet de l'homme avec un sourire faux, visiblement elle retrouvait le véritable Hanzo.

« Tout dépend de ce que vous entendez par "réconforter" mon cher, je vous ai déjà prévenu. »

Elle le savait capable de tout. Et c'est bien ce qui faisait peur à Yuan qui s’efforçait de tenir son poignet malgré sa réponse. Le tordant presque, le serrant entre ses doigts fins, une sensation étrange mais que beaucoup aimerait vivre, être touché par la nymphe, ce n'est pas tout les jours.

La torture de ses ongles contre sa peau, à trop vouloir jouer avec la rose il avait fini par se confronter à ses épines, mais peut-être était-ce là tout ce qu'il désirait, sentir une once de douleur comme pour se sentir vivant. La douleur affolée, et toute à son tourment n'écoute la raison que difficilement. Alors il se laissait volontairement abîmer par la belle, ne cherchant pas à se soustraire à sa poigne comme pour lui faire plaisir, comme pour égayer sa personnalité la plus sadique et lui permettre de s'exprimer le temps de cette bien étrange soirée. Alors toujours aussi proche de ses lèvres, il s'émoustillait de la situation.

"Ne faites pas semblant, vous profitez de ce jeu tout autant que moi… Alors rangez votre 'amant', rengainez votre arrogante face et redescendez donc le temps d'un instant.. Aux travers de vos yeux, j'ai pénétré votre âme, et tout ce que j'y ai vu ce sont les ténèbres. Vous êtes habitée d'une passion morbide qui vous gangrène et corrompt d'un fiel amour trompeur. Votre âme est tout aussi noirâtre que la mienne, et la seule différence entre vous et moi Yuan-san, c'est qu'après quelques verres j'ai eu la décence de faire tomber le masque. "

S'il demeurait encore habité de mélancolie, son expression quant à elle était sérieuse. Il n'y avait pas de dessein dans ses propos du moment, juste cette brève volonté de clarifier la situation devant cette sorcière qui prenait ses aises à trop cracher sur sa personne. Il n'était pas chasseur, mais il se ferait un plaisir de lui foutre une flèche au cœur.

Une douleur qu'il semblait adoré, mais Yuan n'allait pas lui faire ce plaisir plus longtemps et se détacha du poignet du Shinrin, lui laissant très sûrement une cicatrice dû à l'implantation de ses ongles dans sa peau. Il avait réussi, il avait gagné, gagné la colère de la belle. Leur proximité était dangereuse, Yuan ne voulait se risquer à rien et elle recula brutalement son visage pour l'empêcher de toutes la tentative pouvant la mettre dans une situation désobligeante vis à vis de celui qu'elle aimait. Ce petit jeu partait loin, bien trop loin pour Yuan qui affichait un regard assez noir envers l'homme.

Il devait être heureux, oh oui, heureux de voir un visage rongé par le dégoût. Elle se retenait néanmoins, se retenait de le frapper ou de lui infliger une quelconque correction, enfin, cela ne durait pas longtemps et elle en était presque à la limite de craquer. Bien trop proche de ses limites de tolérance envers l'homme en proie à l'Hybris. Un orgueil si démesuré, le seul vice qui pouvait faire flancher Yuan. Si Gozen avait réussi à la faire flancher du coté sentimental, alors Hanzo avait alimenté sa haine et son dégoût.

« Je ne vous permet pas. Comment osez vous dire des choses pareilles? Ignoble parasite qui trouble mon essaim si parfait. C'est le masque que vous vouliez voir tomber? Alors vous avez gagné Hanzo-san. »

Sa main tremblait, comme si elle voulait lui offrir un coup des plus violents, mais il n'avait encore pas assez dépassé les bornes pour justifier cet acte et Yuan ne voulait pas de problème avec les Shinrin et encore moins avec ses supérieures. Alors même rongée par la haine, elle s’efforçait de rester calme.

Le venin de la guêpe s'était répandu dans tout le corps du Shinrin pour enfin atteindre son mental et le faire chuter dans la démence la plus folle. Yuan se demandait vraiment si le destin l'appréciait à sa juste valeur, si peu de bonne rencontre pour autant d'épisode dramatique. Elle espérait que la situation s'arrange pour plus tard, vivre dans le drame, elle n'en pouvait plus.

Voir la jeune femme le blâmer et l'insulter instillait en lui une animosité acide qui s'infusait dans ses poumons comme un liquide toxique et néfaste pour sa lucidité et les quelques traces de circonspection qui subsistaient tant bien que mal. Alors il l'observait en train de frémir, en train de se retenir de lui cribler la face et de lui lacérer la peau de ses griffes crochues. Et comme une allumette porté sur la poudre, le tonnerre gronda.

Son verre en main vint se fracasser contre la table avant que cette dernière ne se fasse également victime de l'ire du Shinrin qui la projeta au loin, manquant de peu de refroidir une jeune femme qui passait là. Le théâtre de leur jeu était devenu un champ de bataille où les quelques bris de verre qui n'avaient pas encore trouvé le sol stagnaient en l'air et côtoyaient les traits de saké gaspillés qui humidifiaient le spectacle et lui apportait un parfum nauséabond. Et lorsque la scène retrouvait son calme, tout ce qui restait lorsque l'on on faisait fit de la casse et des habitués du bar apeurés, c'était un homme debout et rigide qui portait son ombre sur sa muse encore enracinée dans sa chaise.

"Parasite ?! Vous n'êtes qu'une harpie mortifiée en proie au déséquilibre et c'est moi le parasite ?! Alors rangez vos serres vieille pie, vous n'avez et vous n'aurez jamais le cran de vous en servir, car votre seule arme dans ce monde c'est votre langue de vipère et votre corps de pute. Vous n'êtes bonne qu'à une seule chose, trimballer votre croupion dans les rues de la capitale et vous acoquiner avec le premier imbécile aveugle qui aura un minimum de statut et d'oseille pour que vous vous sentiez en sécurité comme lorsque vous étiez dans les bras de papa. Vous n'êtes et vous ne resterez qu'une succube gâteuse et ignorante, alors ramassez donc le peu de dignité qui vous reste et retournez dans les bras de votre guignol, vous ne trompez personne ici, pie. "

… et pour comble de malheur, on pouvait entendre comme une trompette qui propageait une symphonie tout droit sortie des enfers qui retentissait dans les murs comme une sorte de tintement funèbre qui racle les os et vide les entrailles. L'appréhension qui agitait le jeune homme le tourmentait plus cruellement qu'aucun autre mal. Au fond de lui, il aurait voulu implorer la miséricorde de la dame, mais son vœu ne fut pas exaucé et il en finit par invoquer la mort, espérant qu'elle ne trouve jamais le repos et que sous l'effet de ses mots le sommeil n'approcherait plus jamais ses yeux. Le for intérieur d'Hanzo n'était plus qu'enfer sans consolation.

L'orage, une tempête. Désormais tout le bar était conscient de leurs présence et tout le bar les observait se battre et s'insulter comme si ils se détestaient depuis toujours. Mais étais-ce la faute à l'alcool ou une véritable querelle, une explosion intérieure de la part de Hanzo qui sortait désormais le gros lot pour faire flancher Yuan. Et il avait réussi. Les bris de verres valsaient dans tout les sens, atteignant presque la vénus qui ne put que se redresser pour éviter qu'ils n'attaquent sa peau immaculée. Elle se sentait sale, sale d'avoir était touché même aux endroits les plus moindres par un homme aussi épouvantable. L'estime qu'elle avait pour le Shinrin avait disparu depuis un bon moment, et c'était prouvé par la création d'un semblant de guerre alors que l'horloge annonçait presque vingts heures trente.

« Vous n'êtes pas si différent de moi, un odieux personnage ne sachant qu'utiliser sa langue pour exprimer sa frustration vis à vis d'une femme qu'il n'a pas pu obtenir. Une susceptibilité monstre règne dans votre coeur, si dans le passé vous fûtes un être avec encore un peu d'humanité, cette soirée a effacé ce dernier soupçon qu'il restait en vous. Un individu sans valeur, qu'on ne peut même plus considérer humain. Une bête sauvage qui parle sans savoir, dépourvu d'une intelligence qui lui ferait prendre conscience de ses dires qui sont emplit de mensonges encore plus inconséquents les uns des autres. »

Aucun coup physique, tout se jouait dans les mots pour blesser l'autre et cela fonctionnait puisqu'elle crachait son venin encore plus fort à chaque fois. Un jeu qui pourrait durer encore longtemps, encore bien longtemps. L'amusement, le dégoût et puis maintenant la haine, trois sentiments venus à Yuan en une seule soirée. Mais quand cela avait-il dégénérer? Elle n'était pas ivre, du moins pas assez pour s'adonner à des choses pareilles inconsciemment, elle se défendait simplement des insultes du dragon de la désolation.