Intime lecture de bouquins avec mon rouquin coquin.
Mangez des mots, et vous vous remplirez le coco ! Bouffez des livres, et vous... vomirez sûrement, ne mangez pas ça ! Bientôt, vous développerez vous aussi cette dépendance, ah ça oui, car la lecture peut être un passe-temps incroyablement enrichissant, de par ses innombrables histoires, apprentissages et découvertes que l’on y fait. Vous vous en ferez des injections tellement on en devient fou ! Lire peut tout aussi être l’objet d’un plaisir absolu, nous entraînant dans des univers parallèles où l’imaginaire et la créativité vous réchauffent et vous bercent par ses mots, leurs sens et leur musicalité. Dans le cas qui m’occupait aujourd’hui, je me retrouvais en pleine quête de connaissances quant aux capacités surnaturelles qui m’habitaient depuis... aussi longtemps que je me souvienne. Lors de ma charmante rencontre, au Panda Unijambiste – restaurant familial, apportez votre vin, promotion deux pour un sur les plats de nouilles aux fruits de mer -, celui-ci m’avait offert d’aller rechercher de l’information sur ces pouvoirs, d’aller étudier à la légendaire bibliothèque de Kumogakure no Satô. Juste moi et lui, entre amo... ensemble ! J’avais aussitôt accepté son invitation, pleine d’excitation en attente de ce nouveau rencart. Je comptais bien en profiter, héhé.

Je quittai de bon matin le domicile familial, n’ayant que peu dormie la veille tant j’avais hâte d’aller à ce rendez-vous galant si littéraire. Un être original, dans le choix de ses sorties, ce mignon panda! J’avais bien sûr mis mes plus beaux atours, enfilant une robe verte bien ajustée et de hautes bottes brunes de cuir, laissant partiellement voir la prothèse bien fixée au reste de ma jambe droite. Tout en peignant mes jolis cheveux de la manière qui m’était si habituelle, j’avais imaginé une fois de plus ce beau garçon de Tengoku. J’avais d’ailleurs fait ma toute première mission en sa compagnie, peu de temps auparavant, dans la singulière ville d’Hidshu. Là-bas, répondant à un appel à l’aide des plus désespéré, nous y avions un tantinet batifolé, lui et moi. Un diluvien débordement par rapport à nos objectifs de mission, pour tout vous dire, mais si plaisant celui-ci. Oh. Que. Oui ! J’étais fin prête à aller le rencontrer.

Je pris le temps de faire un arrêt à ma pâtisserai préférée, y récupérant quelques croissants au beurre et deux breuvages chauds, puis me dirigeai en direction du lieu convenu. J’avais tellement hâte de lui offrir cette petite pensée gourmande. Je dévalai rapidement les rues de la cité, sans prendre le temps de décrire les lieux ou l’action qui s’y déroulait, puis arrivai devant un immense bâtiment. Celui-ci, à l’image des plus imposantes cathédrales, semblait tutoyer les cieux de par sa stature. C’était la grande bibliothèque de la ville, lieu de savoir incontesté, connu dans tout le Yuukan. Restant un instant à m’inspirer de sa beauté, je pénétrai ce lieu à la recherche de mon être préféré. Peut-être m’attendait-il quelque part à l’intérieur?

Un silence apaisant régnait en ce lieu, presque culte. Les larges vitraux, tout autour de la structure, laissaient passés quelques rayons colorés de lumière divine, bénissant le décor d’une aura mystique, hors de l’ordinaire. Je fus, comme toujours, subjuguée par ce merveilleux spectacle. Il y avait un je-ne-sais-quoi qui me charmait, mais pas autant mon partenaire. Après tout, qui aurait su résister à tellement de beauté ? Pendant une bonne minute, je me pris à jouer à Trouvez Panda, inspectant rangée par rangée les allés et venus des visiteurs. Je le vis enfin, non loin de moi, déjà à la tâche, en train d’inspecter un livre qu’il tenait entre les mains. Coup de foudre absolu, une fois de plus. Il me donnait toujours autant envie... Je l’approchai, toute excitée de ma trouvaille, puis rapidement lui tendis la surprise que je lui avais apporté. Je rougissais, fidèle à la coutume natsumienne.


« Coucou Tengo ! Je suis vraiment heureuse de te revoir. Tiens, regarde ce que j’ai acheté pour toi... Bon, par où et quoi on commence ? »

Rougissant rouquin taquin lisant de coquins bouquins.
Mon jeune ami aux joues rosies accepta, bien malicieux, le délectable breuvage que je lui avais tendu, douteux quant à la possibilité de consommer des aliments sur place, dans la grande bibliothèque de Kumo. Bien maligne comme j’étais, j’avais fait fi des consignes à l’entrée, dissimulant le petit-déjeuner apporté sous les yeux d’une bibliothécaire particulièrement détestable. Ni vue, ni connue. Le garçon déjà à la tâche, replaça un mystérieux volume qu’il venait tout juste de – faire semblant – de consulter... Parce que oui, les pandas géants lisent, mais pas n’importe quoi. Leur grand fétiche, compris-je aujourd’hui: les revues érotiques, histoires sensuelles entourant les plaisirs de la chair et autres livres à vous en faire griller les bajoues et saigner du nez. Ce qu’il prit et ouvrit ensuite me fit ricaner, car je voyais bien, de par la couverture, que mes informations sur cet animal bicolore étaient exactes. Je tentai de l’avertir, oups, trop tard :

« Euh... Tengo, tu... tu sais que ce sont des... »

En fait, non, ils ne lisent pas. Ils se rincent l’œil d’images plus alléchantes les unes que les autres, de viande fraîche innocente ou d’illustrations dégradantes. Ce Panda roux n’était clairement pas l’exception parmi ses semblables, pandastiques lecteurs. Un vrai obsédé, un pervers, ce charmant Tengo ! Ou bien, oui, peut-être cherchait-il l’inspiration pour un rendez-vous galant futur en ma compagnie. Une littéraire rencontre littéralement livrée dans mon lit ? Oh, le coquin ! Venez donc me faire la lecture, jeune Hercule ! Il devait y avoir pris goût, depuis nos fougueuses aventures corporelles dans cette chaleureuse cabane hidshujine. En manque de Natsumi, mon chéri ? Oh oui ! Et, moi aussi, pour être parfaitement honnête avec vous, son enveloppe corporelle me manquait, et pas que. Gênée comme tout, je lui dis :

« Qu’est-ce... Qu’est-ce que tu... tu... préparais avec ça? On... on ne devait pas faire des... des recherches sur les pouvoirs héréditaires ? » bégayai-je tant bien que mal, rougissement en bonus.

D’une main maladroite et visiblement angoissée, perturbée par la présence de pareil objet à caractère pornographique, mon pauvre Tengo tenta le tout pour le tout, redéposant sa sympathique trouvaille – comme si je ne l’avais pas remarqué - non pas sur l’étagère prédestinée, mais au sol, en compagnie d’un paquet d’autres revues toutes plus malaisantes les unes que les autres. Drôle de façon de ranger les bouquins. J’observai la pathétique scène sans dire un mot, m’esclaffant intérieurement à gorge déployée alors que je profitais visuellement du genin en perdition. Tellement mignon, mon panda, accroupis, en panique, à ramasser sa cocasse gaffe, je vous le jure !

Grande bonté oblige, je pris sur moi de lui venir en aide, peu importe si cela devait entraîner un malaise encore plus important par la suite entre nous. « Je... Je vais t’aider Tengo... » Vous me connaissez, cependant, moi, la trébuchante Natsumi, non ? Dans une manœuvre aussi malhabile que négligeante de prendre plus de livres que nécessaire, j’échappai l’ensemble de ma boisson chaude sur les revues, réduisant à néant ce légendaire héritage kumojine qu’étaient la luxure et les plaisirs de la chair (sous forme littéraire). Oups. Avais-je mentionné que la consommation de nourriture était interdite, ici ? Mince.

Chocolat propagé, revues entachées.
L’art de la maladresse, par Natsumi, au programme dès cet hiver.
Car, vous ne vous en douterez sans doute pas, mais j’avais une fois de plus gaffé. Oui, oui, une bourde de plus à mon tableau, quoi. Dans ma grande bonté, voulant aider un Panda dérouté par la malheureuse tombée de bouquins tous plus coquins les uns que les autres (une machiavélique stratégie de sa part pour que je me rapproche physiquement de lui, c’est clair !), j’avais malencontreusement renversé tout le contenu de mon gobelet, un chocolat bien chaud, sur ces revues toutes aussi chaudes. Ah, Gastonne la gaffeuse, toujours au rendez-vous pour empirer les situations en ajoutant une couche d’absurdité en surplus, aux frais de ses coéquipiers et partenaires – c'est-à-dire, pour la plupart du temps, Tengoku. Hi hi ! Mignon ricanement intérieur.

« Pa-Pardon Tengo ! Pardon, pardon, pardon... c’est encore de ma faute ! J’aurais... je n’aurais pas dû apporter la nourriture ici, c’est... c’est ma faute. Qu’est-ce... Qu’est-ce qu’on fait ? »

Bégayai-je probablement trop fortement, avec la panique qui m’emportait, puisqu’une vieille dame apparue tout à coup, une vraie chienne enragée, prête à nous faire sauter sur place. Une Lieutenante de l’Empire ? Non, une bibliothécaire, et frustrée, en plus. Notre temps était compté. Au premier regard, une profonde crainte s’installa en moi. Ah ça oui ! J’en étais persuadée, je vous le jure, que cette peau fripée cachait bien plus qu’il n’y paraissait. Si la grand-mère de l’auberge d’Hidshu avait été bien sympathique à mon endroit, celle-ci se comportait réellement comme le grand méchant loup. Je n’étais pas dupe, pourtant, c’était qu’une mère-grand, sans plus, bon. Elle devait avoir eu le nez trop longtemps collé dans des contes et légendes de la bibliothèque (L’histoire du petit ninja rouge, ça ne vous dit rien?), la mémère, car elle copiait coup sur coup les manières du fameux vilain poilu. Une ‘ouanabi’, quoi. Fausse et mensongère, un vrai rôle. Halala...

« Bien, montrez-moi vos pièces d’identité, maintenant ! Ce ne serait pas la première fois que des p’tits jeunes tentent de passer par-dessus les règles. Vous me prenez pour une sénile, c’est ça ? Eh bien vous ne m’aurez pas comme ça, gamins. C’est le temps de délier les cordons de vos bourses, mes chers, pour nous aider à remplacer ce gâchis. Allez ! »

Je me retournai aussitôt vers le mignon Tengo anxieux, qui tentait tant bien que mal de prendre sur ses propres épaules le résultat de mes actions. Non, non, non, pas de cela avec moi, le Panda ! Je levai timidement un doigt pour interrompre mon partenaire, préférant prendre mes responsabilités, puis sortie de ma poche une légère bourse colorée afin d’offrir le montant à rembourser. Oui, bon, me voilà à sec. Peut-être aurais-je dû tolérer l’aide du preux chevalier, finalement... Enfin, avec un malaise bien visible, je lui tendis la pièce demandée, au grand dam de mon coéquipier

« Euh... Voi-voici l’argent, Madame... Et... et la pièce d’identité... C’est ma faute. J’ai apporté la nourriture pour mon... ami... et j’ai... j’ai renversé ma boisson sur vos livres. Désolée. » dis-je, en détournant le regard, embarrassée à l’idée de ce qu’elle allait découvrir bientôt. La bibliothécaire approcha le bout de papier de son visage, concentrée, les yeux presque clos, scrutant l’objet d’un œil minutieux, précis, insistant. Soudain, stupéfaction ! Ses sourcils se froncèrent alors, énervée par la révélation qui lui sauta en pleine face. Définitivement plongée dans une colère noire, elle me pointa la sortie du doigt, non loin, et nous observa tour à tour, Tengo et moi. Sèchement, elle prononça son verdict, sans équivoque :


« Dehors, tous les deux, tout de suite ! Oui, toi aussi, le rouquin, puisque tu aimes si bien mentir. La brunette, ne remets plus les pieds ici avant une bonne semaine, sinon tu auras affaire à moi. Allez, ouste ! »