Le moment était enfin venu d'affronter son futur et d'entrer dans la danse. Elle n'y allait pas a reculons mais ces pas étaient tout de même un peu tremblants. Elle avait idéalisé ce jour comme une conquête d'un avenir radieux au sein d'une armée propre, aux bras de sa meilleure amie qu'elle avait depuis toujours, auprès d'elle. Son décès l'année précédente chamboula évidemment ses projets. Elle devrait affronter seule, tenir bon et faire face à tous ces soldats plus puissants qu'elle. Cette première journée de test serait sous le signe des épreuves physiques et pour ça, Yenno était entraînée. Depuis petite, elle avait développé l'art de la discrétion notamment et malgré sa grande taille, elle y parvenait très bien. Se mouvoir dans le silence et attaquer par surprise était là un exercice qu'elle maîtrisait déjà très bien, tout comme les attaques à mains nues. Concernant les armes, elle manque un peu de perfectionnisme avec le sabre mais cela ne saurait poser trop de problème, elle est déterminée et elle apprend très vite.
« Bonjour, Soejima Yenno. Je viens pour les tests d'aptitudes. »
La personne lui fît signe d'attendre sur le côté, quelques instants. Elle fît mine de comprendre parfaitement et effectua une courbette en guise de remerciement. Elle s'écarta alors puis son regard fût attiré par un couloir en mouvement. Des hommes semblaient se chahuter, dans un esprit de camaraderie. Elle esquissa un sourire avant de revenir à la réalité : Beaucoup d'hommes, beaucoup beaucoup d'hommes par ici. Elle releva la tête, fièrement et décida alors de ne pas se laisser intimider par leurs forces. Elle croyait en sa capacité à se battre contre tout type d'ennemis et comptait bien enterrer la timidité sous une bonne couche de confiance en soi. Elle fît glisser ses paume le long de son épaisse jupe comme pour la remettre en place et une voix, reconnaissable se fît entendre au fond de ce couloir ombragé.
Il s'agissait bel et bien d'Akira. Elle ne mît pas bien longtemps avant de reconnaître son visage. Un sourire timide, automatiquement, qu'elle cacha alors sous sa main. Puis le retour de son air sérieux et concentré, comme si elle ne devait pas s'autoriser à déborder, aujourd’hui. Difficile pour autant de garder son calme tant son cœur battait la chamade. Impossible de ne rien ressentir, Yenno reste une femme sensible à la vu d'un viel ami. Elle ne pu alors s’empêcher de tourner le dos au couloir, afin de ne plus être tenter de le regarder, au loin. Mordillant l’intérieur de sa lèvre, elle se demandait alors ce qu'il pouvait bien faire là. Était-il lui aussi entré dans l'armée de Teikoku ? Tant que questions qui défilaient à son sujet, à vrai dire cela faisait bien quatre ou cinq ans qu'elle ne l'avait plus croisé.
Akira ne parlait pas beaucoup, en temps normal il aurait été difficile de le reconnaître au son de sa voix puisqu’il s’emmurait la plupart du temps dans le mutisme. Mais aujourd’hui, la responsabilité qui l’incombait était plus grande. Adossé au mur au fond du couloir donnant sur l’une des nombreuses salles de test, le jeune homme attendait encore quelques volontaires pour ouvrir la porte. Après tout, les évaluations physiques se devaient d’être en groupe relativement réduit pour pouvoir évaluer correctement chaque candidat.
“ J’ouvre la porte quand on aura deux ou trois personnes de plus. “
Dit-il de cette voix calme et monocorde qui le caractérisait. Depuis ces quatre ou cinq années, le jeune homme avait grimpé en flèche et avoisinait presque les deux mètres. Son stoïcisme, lui, n’avait pas changé et les candidats en firent les frais lorsqu’ils tentèrent de lui poser des questions qui n’obtinrent point de réponses. S’ils voulaient savoir quelque chose, il aurait fallu se renseigner plus tôt. Ici, pas d’astuces ou quoi que ce soit du genre, les candidats montraient ce qu’ils savaient faire et étaient évalués. Et au vu de la motivation très discutable d’Akira, si lui les avait réussis quelques mois plus tôt… c’était à la portée de tous.
Un rapide coup d’oeil lui suffit pour évaluer le nombre de volontaires présents dans le couloir. 13 personnes, auxquelles deux autres vinrent s’ajouter. C’était largement suffisant pour lui, si bien qu’il commença à ouvrir la porte pour s’arrêter en plein mouvement. Quelque chose avait attiré son attention. Pas le groupe de chamailleurs, comparant sans doute leurs muscles, mais une femme au fond. Le fait de voir des femmes volontaires était déjà en soi relativement inédit, puisqu’elles n’étaient que trois dans le groupe actuel. Mais du peu qu’il avait pu voir avant que cette fille se retourne, elle lui disait quelque chose. Peu importe, sûrement son esprit qui lui jouait des tours. Akira n’avait pas d’amis et ne risquait donc pas de reconnaître grand monde. Le jeune homme ouvrit alors la porte pour donner sur une petite salle de sport, à laquelle des cordes pendaient du plafond, des poids étaient disposés dans chaque coin de la salle ainsi qu’un tracé faisant le tour de la pièce, sûrement pour les test d’endurance.
“ Le dernier ferme la porte. “
Dit-il en attendant que tout le monde se tienne prêt. Bien sûr, Akira n’était pas le seul soldat présent et deux autres de ses collègues se tenaient à ses côtés pour prendre en charge les évaluations ainsi que prévenir tout débordement ou éventuelle chamaillerie. Une fois tout le monde aligné, il pris la parole d’un ton relativement placide.
“ Bonjour à tous. Je ne vais pas vous faire le charabia patriotique habituel, vous avez fait le bon choix en voulant rejoindre les forces armées de l’empire. Si vous êtes pris, vous serez alors en mesure de choisir votre unité en fonction des besoins et de vos talents. Il y a des test d’endurance, de force, d’escalade, et de combat ou vous serez chacun l’un contre l’autre. Le premier à se chamailler sera mis dehors. Pour les shinobi, ceux qui maîtrisent le chakra, allez dans l’espace qui vous est réservé au fond de la salle. “
Dit-il en désignant l’endroit du menton. Visiblement, il y avait plus de dispositions. Un poteau pour tester la marche verticale, une petite piscine pour tester le déplacement sur l’eau… les aptitudes classiques d’un shinobi, en somme. Il s’agirait d’éviter de prendre des soldats trop débutants.
Cachée derrière deux hommes plus grands et plus larges qu'elle, Yenno ne fît plus trop la maline lorsqu'elle se rendît compte que son ancien ami serai alors présent pour les tests. En tout cas pour leurs mises en place. Elle écoutait attentivement ses directives et ne pu s’empêcher de ressentir une certaine fierté de le voir ici, si grand et enfin à sa place. Son but serai maintenant alors de passer le plus inaperçu possible au sein de se groupement. Elle se retourna sitôt qu'il ordonna aux shinobi de se rassembler en un point différent des autres, en déboutonnant les deux larges boutons qui attachait la sorte de jupe épaisse qui recouvrait son pantalon de sport. Elle ne savait pas vraiment quelle tenue porter pour ce genre de tests physiques, si bien qu'elle avait alors enfiler ce qu'elle portait pour ses entrainement externe, un ensemble relativement confortable qui cachait aux maximum ses attributs féminins et qui facilitait ses mouvements. Elle était bien au courant que par la suite, elle devrait porter l'uniforme et qu'elle devrait alors s’entraîner avec un attirail plus lourd. Mais pour l'heure, il lui semblait qu'elle devrait simplement avoir l'aisance nécessaire pour prouver ses compétences à ces futurs capitaines.
*sifflement*
Elle tourna la tête, le regard noir en direction de l'homme qui venait de la provoquer. Un autre ninja manifestement, qui se dirigeait au même endroit qu'elle. Il avait fait cela sans que personne d'autre ne s'en aperçoivent et elle était alors la seule à pouvoir le recadrer, si bien qu'elle ordonna de sa voix la plus calme.
« Ranges tes sales manières shinobi, je suis pas là pour ça et toi non plus. »
Après avoir posé le surplus d'affaires sur une sorte de petit rebord en bois, Yenno ferma les yeux un court instant pour se concentrer et entra dans une sorte de mini méditation qu'elle eu l'habitude de pratiquer avant chaque entrainement. Une manière pour elle de stabiliser son chakra au maximum. Le groupe du côté des shinobi ne se composaient alors que de 5 personnes et elle était la seule femme, elle allait devoir redoubler de concentration pour se fondre dans la masse. La force et l'endurance, elle l'a. Il s'agira surtout de pouvoir la contrôler afin de dégager ce qu'elle a déjà pu se prouver par le passé, a elle même. Un nouvel ordre de se positionner en file devant le premier test, la marche verticale. La jeune femme se plaça alors en troisième position dans la rangée, se tenait droite et tâchait de ne pas se laisser déconcentrer par la présence d'Akira, parce que même si elle espérait secrètement qu'il la reconnaisse, cela ne faciliterai en rien ces épreuves d'aptitudes qui requiert tout de même une forte contention interne.
Pour éviter ce sentiment de gêne d’être observé et jugé, les candidats passaient leurs épreuves à plusieurs à la fois. De plus, prendre la peine de passer chacun son tour serait trop long au vu du nombre de nouvelles recrues. Il fallait bien croire que le peuple Hijine était décidé à resplendir, lassé d’être traîné dans la boue durant toutes ces années. Rien de tel que le ressentiment pour redresser une nation… mais il restait tant à faire. Et si la lenteur était frustrante, il fallait bien faire les choses consciencieusement. Recruter était une étape nécessaire, voire la plus nécessaire. La décision d’y affecter Akira restait un mystère au vu de son caractère volage et détaché, mais ce n’était finalement pas une si mauvaise idée. Plus le temps passait, plus le jeune homme se montrait impliqué dans le développement de l’empire.
“ N’essaie pas de monter à la seule force de tes bras. Passe un pied sous la corde pour en faire une plateforme et pousse avec l’autre pour grimper. On demande avant tout de la technique, pas de la force brute. “
Dit-il à une jeune recrue avant de se diriger vers les shinobi. Puisqu’ils n’étaient pas beaucoup, leur évaluation restait simple. Quatre hommes, une femme. La même femme que tout à l’heure d’ailleurs. Akira les observa un peu tous à leurs postes, jusqu’à ce qu’il s’arrête sur la femme plus longtemps. Outre le fait qu’elle savait comment s’y prendre, quelque chose chez elle éveillait son intérêt. Comme une drôle d’impression sur laquelle il n’arrivait pas à mettre de mots. Mais à mesure qu’il l’observait, le jeune homme eut comme une révélation. Cette chevelure… il ne pouvait pas passer à côté ni l’oublier. Elle était trop reconnaissable. S’il ne l’avait pas reconnue directement, c’était sûrement dû au temps qui s’était écoulé depuis leur dernière rencontre.
“ … “
Néanmoins, Akira resta stoïque. Mieux valait éviter de la déconcentrer, et il ne comptait pas faire ses retrouvailles au beau milieu d’une salle de sport bondée. C’est pourquoi le jeune homme passa à quelqu’un d’autre, comptant attendre la fin de la séance pour aller parler à la jeune femme. Cette jeune femme qu’il avait perdu de vue il y a déjà de nombreuses années lorsqu’il s’était décidé à rejoindre Urahi, la capitale. Akira avait toujours cru la revoir un jour… mais les récents événements, la guerre l’avaient contraint à remettre ces pensées à plus tard. Quelle drôle de manière de lui renvoyer son passé en pleine figure, alors qu’il ne s’y attendait pas du tout. Akira se demanda si elle l’avait reconnu également. Après tout, lui n’avait pas beaucoup changé malgré toutes ces années. C’est ce qu’il verrait bien sous peu…
Malgré cela, son rôle restait en vigueur et le soldat ne s’attarda pas sur les sentiments. Sentiments qu’il avait mis totalement de côté depuis de nombreuses années, ce qui expliquait son apathie quotidienne et sa placidité. Aussi loin qu’il se souvienne de toute manière, et Yenno pourrait peut-être confirmer, le jeune homme n’avait jamais été très expressif. Du moins à première vue, pour les moins attentifs. Mais il n’attendait pas de quiconque de pouvoir le comprendre.
Une fois les trois premières épreuves validées haut la main, la jeune femme reprit alors son souffle un instant. Le moment pour elle de retrouver ses pensées. Evidemment qu'à ce moment-là, un petit mouvement de tête en direction de la salle. Akira était là, près du groupe dont elle faisait partie. Rassemblant ses cheveux dans une queue à l'arrière de sa nuque, elle reprit une grande bouffée d'air puis l'expira un peu bruyamment.
Il était maintenant temps pour elle de se diriger vers l'épreuve finale de l'affrontement, les quatre autres étaient manifestement eux aussi sur le chemin de celle-ci. C'est à cet instant qu'ils se rassemblèrent tous en ligne, face aux soldats en charge d'évaluer leurs capacités. Deux soldats, dont évidemment Akira. Elle ne pouvait plus vraiment se cacher ni esquiver son regard, il lui fallait donc rester impassible et concentrée malgré tout. Ses lèvres se pincèrent et elle avala sa salive comme pour faire disparaître l'embarra, aligna sa tête avec son corps bien droit et plongea alors son regard dans le mur, en face d'elle. Le second soldat désigna alors Yenno du doigt, puis suivi avec le petit malin qui lui avait fait une réflexion un peu plus tôt.
« Vous deux, en place. »
Les examinateurs reculèrent alors de quelques pas, laissant la place aux adversaires pour installer le combat. Elle attrapa un sabre en bois, se disposa et salua alors l'homme en face, avec une certaine amertume dans la gorge. La concentration, puis elle lança alors une première attaque aveuglante grâce à une technique utilisant son pouvoir Hikariton, puis enchaîna avec un coup de sabre qui fût stoppé par son adversaire. S'en suivi alors un combat honnête mais bestial, contre cet homme qui se croyait évidemment bien plus fort qu'elle et que tout ses autres camarades.
Une fois terminée, Yenno était alors plutôt fière de sa manière de s'être donnée sur cette bataille. Elle avait eu la justesse des gestes qu'elle aime tant travailler, jusqu'à une perfection sans pareil. Des mouvements secs mais élégants et une façon de mouvoir son corps la plus silencieuse possible. Après avoir salué son partenaire qui ne manqua pas de lui lancer un clin d’œil, elle se retira un peu à l'arrière en soupirant. Elle se rassurait en se disant qu'elle n'aurai probablement plus à faire à lui, par la suite. Elle ne rétorqua pas et se mura dans le silence, observant le prochain affrontement se mettre en place. Malheureusement, elle s'était trompé et son camarade d'examen vint se coller à côté d'elle en lui lançant des regards douteux. Comme s'il avait besoin de marquer une quelconque position supérieure et de montrer son intérêt pour la jeune femme. Elle emboîta quelques pas à nouveau, sur le côté, afin de s'éloigner de cet imbécile.
S’il avait remarqué la lourdeur du candidat envers la jeune femme, Akira n’intervenait pour l’instant pas. Nul besoin de renvoyer quelqu’un pour de légères brimades, tant qu’il n’allait pas plus loin. L’empire avait besoin de soldats et il s’était relativement bien défendu. Mais la performance qui avait nul doute tapé dans l’oeil du jeune homme était celle de sa vieille amie. Aussi loin qu’il se souvienne, elle ne savait pas faire tout ça lorsqu’ils se côtoyaient. Enfin, ceci dit… lui aussi avait quelque peu évolué. Rien d’incroyable, il restait au niveau d’un shinobi basique.
“ Pour l’instant, je dirais que les cinq sont aptes à l’engagement. “
Dit-il à l’un de ses collègues, qui semblait du même avis. En comptant Yenno et son adversaire, dont le combat avait été convaincant, les trois autres avaient également un niveau correct. Tant mieux. Les Shinobi avaient parfois la fâcheuse tendance à se penser intouchables de par leurs aptitudes, et venir sans aucune connaissance. L’empire recrutait certes par nécessité, mais ce n’était pas pour autant qu’il polluerait ses rangs avec des bons à rien. Du moins, pas des bons à rien pensant n’avoir rien à faire.
Une fois les combats terminés, les volontaires furent replacés en rang. L’un des soldats se plaça devant eux, une liste à la main. Sûrement celle des participants. Pendant ce temps la, Akira attendait, adossé au mur près de la sortie. Son objectif était clairement d’alpaguer Yenno quand elle passerait à son niveau. Dans le même temps, son collègue pris la parole.
“ Bien. Merci à tous d’avoir participé. Vos performances ont été évaluées et seront discutées plus tard avec un supérieur. Vous recevrez une convocation si vous êtes pris, et dans le cas contraire, un courrier vous préviendra du refus. Si c’est le cas, sachez que vous serez libre de candidater à nouveau autant de fois que nécessaire. Mais mieux vaut se tenir prêts. En tout cas, merci de votre attention et gloire à l’empire. Rompez les rangs. “
La sélection n’était pas si terrible finalement. Il y a quelques mois, lorsqu’Akira s’était engagé… celle-ci était nettement moins bien organisée. Heureusement, l’empire progressait. Il progressait vite, et efficacement pour le moment. C’était tout ce dont avait besoin le peuple Hijine pour se préparer aux événements futurs. Mais pour l’heure, un peu moins de formalités et de professionnalisme. Akira avait un être cher à revoir.
Le moment était venu pour Yenno d'aller récupérer son par-dessus posé un peu plus tôt au fond de la salle, ce qu'elle fît en silence après avoir écouté le discours du soldat. Un instant de soulagement, elle venait de terminer sans erreurs ni égratignures cette épreuve, elle fût heureuse. On aurait pu deviner un sourire sur son visage mais c'est à l’intérieur que l'envie d'arriver au bout de sa trajectoire, bouillonnait. Elle restait alors neutre d'expression faciale, préférant ne rien montrer à autrui. Le sabre était maintenant posé à l'exact endroit ou elle l'avait emprunté et son vêtement sous le bras, la jeune femme se décida alors à sortir de la pièce.
En s'avançant vers l’encadrement de la porte, son regard balaya la pièce. Elle n'avait évidemment pas oublié qui venait d'assister à son épreuve. Maintenant la pression relâchée, elle songeait alors qu'il serai bon de pouvoir lui parler, lui demander comment il va, prendre de ses nouvelles. Depuis leur toute première rencontre à l'aube de ses 15 ans, elle n'eu cessé d'avoir des pensées pour cet homme dont le mystère avait chamboulé l'adolescente qu'elle était. Le souvenir des rendez-vous chaque soirs à l'orée de la forêt avoisinante, elle le revoit parfaitement dévorer le bol de riz qu'elle lui amenait en cachette de ses parents. Il s'agit là d'une aventure qui lui ouvra un peu plus les yeux sur le monde et sa difficulté. Sans le savoir, Akira avait fait de Yenno, la femme généreuse qu'elle est aujourd'hui.
Malheureusement, la salle s'était vidé dans son ensemble et il avait lui aussi, disparu de son champ de vision. Mais cela voudrai alors dire qu'il ne l'a pas du tout reconnu ? Aurait-elle alors tant changé ? Une mine désappointée, elle se souvenait pourtant avoir lu ces mots, dans cette lettre, quelques mois auparavant. Elle n'eu jamais la possibilité d'y répondre, n'ayant aucune information sur la position géographique du jeune homme. Mais ce n'est pas l'envie qui manquait, la temporalité était même plutôt idéale. Lors de la lecture de cette lettre, Yenno traversait cette période très sombre de deuil et le réconfort d'un ami aurait été le bienvenu. Soit, elle replaça ses cheveux correctement avant de sortir enfin de cette pièce.
Le couloir se vidait doucement et, relevant ses yeux brûlants d'un marron rougeâtre, elle l'aperçu même pas deux mètres plus loin, adossé au mur. Une petite goutte d'humidité rejoint alors le coin externe de son œil et ses lèvres se pincèrent, encore, pour retenir le sourire qui pouvait exploser à tout moment. Yenno était si heureuse de le voir, en vie et en forme. Elle s'approcha franchement de lui, l'air sérieuse. Soucieuse de se montrer en train de discuter avec un soldat, elle regarda autour d'elle pour s'assurer que personne ne la voyait, puis elle osa.
« Akira... » Dit-elle en lui attrapant le poignet.
Son bras rigide ne bougea pas, mais le frisson traversa la jeune femme.
« Tu ne m'as pas laissé la possibilité de répondre à ta lettre, je ne connaissais pas l'adresse à laquelle je pouvais la retourner. Akira, je suis heureuse de te voir... »
Akira attendait sans trop savoir pourquoi. Evidemment, son envie de revoir la jeune femme après toutes ces années était indiscutable. Mais sa difficulté à éprouver des émotions et encore plus à les exprimer se montrerait sans doute bien handicapante face à la sensibilité de Yenno. Ou du moins la sensibilité qu’il lui prêtait par le passé. Peut-être avait-elle changé. Si c’était le cas, peut-être ne seraient-ils pas aussi proches qu’auparavant. Après tout, le temps pouvait faire des ravages… il n’y avait qu’à voir le changement qu’avait subi Hi no kuni. Et pourtant, à terme, le pays s’était enfin relevé. Peut-être serait-ce parallèle avec la relation qu’il entretenait avec Yenno.
D’ailleurs, il n’attendit pas longtemps avant de la voir arriver. Sa grande taille lui assurait sans problèmes d’être vu, difficile de le manquer. Surtout pour elle, qui le connaissait. Malgré que cela aille plus loin que cela…
“ Yenno. “
Au final, le jeune homme ne savait même pas ce qu’il voulait. Il l’avait contactée dans un moment de flottement il y a de cela quelques mois, sans vraiment avoir d’espoir de retours. Sa solitude et son manque d’intérêt pour les relations sociales s’arrêterait peut-être à elle… ou peut-être pas. Après tout, la jeune femme avait une place particulière. Bien sûr, Akira avait rencontré plusieurs gens bien au fil de ses pérégrinations, mais personne d’aussi bienveillant. Et personne qu’il avait revu ensuite. Il y a une première fois à tout.
“ Oui, désolé. J’ai pensé qu’il serait mieux de se rencontrer en tête à tête plutôt que d’entamer une correspondance par courrier. Ce serait… moins authentique. “
Il referma doucement sa deuxième main sur celle de Yenno, celle avec laquelle elle lui avait saisi le poignet. Ce genre de gestes de tendresse étaient si rares pour lui qu’il n’était même pas certain de bien faire, ni s’il le faisait correctement. Peut-être était-ce ce qui le rendait authentique au final.
“ Moi aussi. Tu as beaucoup changé. J’ai rarement vu une femme aussi grande. “
Dit-il, posant ses yeux dorés dans ceux de la jeune femme. S’il n’était lui-même pas aussi grand, sans doute aurait-il été davantage impressionné. Mais si le physique changeait, la jeune femme semblait être restée aussi sensible qu’avant. Ce qui n’était pas pour lui déplaire, surtout en ces temps troubles. Broyer du noir en permanence ne lui ressemblerait pas. Du moins, pas dans le souvenir qu’il avait elle…
“ Nous devrions aller ailleurs. L’endroit n’est pas très convivial, tu ne trouves pas ? “
Plus rien. Cette sensation de bulle qui avait pu envelopper les deux adolescents par le passé, comme si rien n'avait finalement changé. Au moment ou la main du soldat se referma sur la sienne, Yenno s'envola dans une sorte de bien-être indescriptible. Les doigts larges et chauds de cet homme étaient alors, sur cet instant, une véritable couverture venant emmitoufler la peine qu'elle traînait jusque là. Mais alors, comment un simple geste de la main pu à ce point là rassurer la demoiselle ? Il y avait bel et bien quelque-chose de singulier entre les deux protagonistes, une chose sur laquelle il était pour le moment impossible de mettre des mots.
« Tu as raison, sortons d'ici. »
Un sourire crispé, elle le laissa lâcher sa main en premier avant de se diriger vers la sortie, précédant les pas du jeune homme. La rue s'était vidée et seul quelques clampins peu pressés traînaient encore devant la caserne. Elle tourna alors dans la première rue adjacente, plus petite et bien plus calme, à l'abri de tout regard. Elle attendu alors de le voir derrière elle, passer le coin de la ruelle.
« Elle me pose bien des problème, ma taille. Je préférerai largement passer inaperçu mais c'est rarement le cas. » Dit-elle dans un très léger rire.
Alors qu'elle avançait dans une destination inconnu, elle ne pût alors s’empêcher de plonger son regard dans le sien pendant leur marche.
« C'est très satisfaisant de voir que tu as trouvé ton chemin Akira, je n'imaginais pas un seul instant te croiser au sein de l'armée, tant tu étais imprévisible à l'époque. »
Elle replaça la mèche qui cachait son visage, derrière son oreille.
Akira n’était pas doué pour détecter une quelconque alchimie entre deux individus, pas même lorsqu’il en était le protagoniste. Ce genre de choses changeraient peut-être avec le temps… car après tout, avant de devenir soldat, le jeune homme n’était qu’un vagabond. C’était déjà une grande évolution, et Yenno était sûrement la seule personne à pouvoir s’en rendre compte excepté lui-même. Ainsi, une fois isolés, Akira se plaça à côté d’elle pour discuter informellement. Bien que les soldats soient libres, voir un recruteur dans un cercle intimiste avec une recrue pourrait vite alimenter les rumeurs. Il serait simple de croire au favoritisme, ce qui n’avait pas été le cas.
“ Certes, mais cela te donne plus d’allonge. Et m’est avis que même avec 20 centimètres de moins, tu resterais toujours remarquable. “
Dit-il sous entendant qu’elle avait d’autres “qualités” pouvant attirer les regards, qu’il s’agisse de sa beauté ou de la douceur mêlée à l’assurance qu’elle dégageait sans même ouvrir la bouche. Du moins, à ses yeux. Chacun ne perçoit pas forcément quelqu’un de la même manière qu’autrui. Après tout, Yenno était sûrement l’une des rares personnes pouvant voir en Akira autre chose qu’un solitaire apathique. Du moins… si elle parvenait vraiment à voir au delà de ça.
“ Je le suis toujours. J’ai rejoint l’unité coloniale pour cette raison. Nos déplacements sont tout autant imprévisibles, sauf que cette fois, je suis entouré de camarades ayant choisi cette voie, je n’y suis plus contraint. “
Expliqua t-il avec lucidité, évoquant un passé désormais révolu au profit du présent bien plus appréciable. Du moins, pour lui. Les tensions actuelles et l’homme au chapeau n’étaient pas vraiment des bénédictions.
“ C’est tout aussi satisfaisant de te voir ici d’ailleurs. Je n’étais pas sûr que tu répondes à mon appel, mais je ne me doutais certainement pas que tu viendrais t’engager. L’empire aurait bien besoin du vent de fraîcheur que tu apportes dans ton sillage.“
Ou pour coller parfaitement au thème, de l’aura rayonnante.
“ J’en avais marre de cette vie. Et quand j’ai assisté au massacre Hijine par les Kumojins, j’ai décidé que je ne pouvais pas laisser cet affront envers notre peuple impuni. Je me suis engagé pour participer aux représailles envers Kumo. J’étais certainement animé par la haine, mais je ne peux pas regretter mon choix. “
Expliqua t-il avec placidité, méticuleux dans sa diction. Akira était connu pour être peu bavard et communicatif en général, être en présence d’une vieille amie lui déliait visiblement la langue. Après tout, lâcher un peu ce que l’on a sur le coeur fait toujours du bien, même aux plus renfermés.
“ Et toi Yenno ? Qu’est-ce qui t’as poussé à faire ce choix ? “
Un brin de rosée vint teindre ses joues dessinées lorsqu'il répondit. Jamais elle n'eu entendu de la part de cet homme de tel propos à son égard, aussi bienveillant soit-il depuis toujours. Le constat qu'elle ne peut réfuter était le suivant : il avait gagné en assurance et en aplomb dans ces paroles, l'adolescent mystérieux qu'elle eu connu existait toujours face à elle mais il avait évolué. Elle se souvenait de ce garçon lors de leurs premiers "rendez-vous", un jeune homme déjà carré mais bien silencieux, il ne lui paraissait pas timide mais totalement empreint d'une pudeur intriguante. Par le passé elle se souvient avoir essayer avec la plus grande prudence de le mettre à l'aise et de l'aider à communiqué avec elle. Ce qu'elle réussi plus ou moins, quelques longues conversations nocturnes ponctuaient parfois leurs moments. Juste quelques-une, qui suffisaient largement pour convaincre la jeune femme que cet individu était précieux, de part notamment sa débrouillardise sans pareil. Elle ne pouvait s'empêcher de se remémorer ces moments, puis elle visualisa la découverte de son sourire. Il mit un moment à se montrer mais lorsqu'il était là, Yenno se souvînt alors de cette plénitude qu'elle avait pu ressentir.
« Je ne suis pas étonnée que tu ai choisi de rejoindre la coloniale en effet, cela te correspond bien. »
Un bruit au bout de la rue. Inquiète, Yenno se penche légèrement vers l'avant afin de jeter un oeil sur l'objet qui provoqua ce son. Elle ne souhaitait vraiment pas être aperçu avec un soldat, d'autant plus que leurs position à l'égard insinuerai clairement à autrui le souhait pour les deux jeunes adultes de se cacher.
« Tu te souviens peut-être de mon amie Ameko, avec qui je suivais mes entraînement, il me semble te l'avoir évoqué à l'époque. Elle est décédé l'année dernière après un long moment à tenter de se battre contre la lèpre. Cela m'a beaucoup affecté et j'ai failli abandonner tout les rêves que nous poursuivons ensemble. Comme tu le vois, j'ai changé d'avis et je préfère me concentrer sur la défense de ma patrie que de m'apitoyer dans la tristesse... »
Elle pouvait dorénavant parler de cette histoire sans trop trembler de la voix. C'est en effet une épreuve qui fut vraiment compliquée pour la jeune femme qui se pensait alors invincible. La perte d'un proche est toujours difficile et lorsque c'est l'unique personne avec qui nous sommes vraiment nous-même, cela devient un combat constant contre la mélancolie. La mine tout de même un peu moins enjouée, elle enchaîna :
« J'aspire à me battre et à prendre part également à la défense de Teikoku dans les affrontements probables futurs, je ne pouvais plus attendre inutilement dans mon coin. »
La hijin attrapa dans un élan de courage, la main du soldat pour le tirer un peu plus loin dans la ruelle, afin de rejoindre un endroit encore plus calme. Non loin d'ici, près d'un ruisseau dont elle connaît la trajectoire de l'eau et l'emplacement des pierres par coeur.
Ainsi, voilà ce que “cachait” cette venue. Akira se souvenait encore d’Ameko, bien qu’il n’ait jamais été proche d’elle. Peut-être éveillait-il moins l’intérêt de la jeune femme. Cette sensation de perdre un être cher, en voilà une qu’Akira ne connaissait pas. A vivre en ermite, on s’habitue à la solitude… et on ne perd personne. Excepté son père, peut-être, bien que cette perte fut plus une bénédiction qu’autre chose. Ainsi, de par son expérience -ou plutôt son inexpérience- dans le domaine, Akira ne put partager la douleur de Yenno. Au moins pouvait-il comprendre. La lèpre avait fait quelques morts dans les villages plus éloignés… et c’était une manière bien horrible de mourir.
“ Je comprends. Tu as bien fait d’aller de l’avant. Beaucoup d’Hijines ont perdu des proches durant ce conflit, c’est ce qui les pousse à s’engager pour certains. Même si tes raisons ne sont pas les mêmes, tu n’es pas seule. “
Dit-il tout en avançant vers la destination prévue, loin des autres. Akira n’était pas du genre à faire des discours motivants de la sorte, mais pour une fois, tout lui venait avec fluidité. Peut-être était-il simplement plus appliqué lorsqu’il s’agissait d’elle ou de son pays. Ce qui était sûr, c’était que la situation se prêtait particulièrement à ce genre d’échanges. Peut-être qu’un jour, tous ces problèmes et conflits ne seront plus qu’un lointain souvenir. Akira se demandait seulement s’il serait encore en vie pour le voir de ses propres yeux.
“ Tu as raison. Mais il faut aussi avoir conscience des risques malheureusement. Je ne voudrais pas qu’on se sépare aussi vite que l’on s’est retrouvés. “
Dit-il, pragmatique et relativement pessimiste. Akira ne croyait pas vraiment aux belles histoires et le Teikoku pourrait très bien foncer tête baissée vers une fin prématurée. Néanmoins… lorsqu’ils arrivèrent sur les lieux, ou Yenno le mena intentionnellement, ses pensées dérivèrent ailleurs. La quiétude et l’onirisme de l’endroit lui retirèrent toute envie de continuer sur cette lancée. En vérité, Akira aurait très bien pu se rendre dans ce genre d’endroits dans ses nombreux moments de solitude pour se ressourcer. C’était bien son genre. Le calme, la nature… mais ce soir là, quelqu’un était à ses côtés.
“ C’est beau. Tu es déjà venue, je me trompe ? “
Dit-il en posant un pied à la surface de l’eau, concentrant son Chakra pour y marcher. C’était sûrement la première chose qu’il avait apprise en tant que Shinobi. Mais la ou la plupart apprenaient dans une académie ou avec leurs parents, le jeune homme l’avait acquis seul. Comme beaucoup de choses d’ailleurs. Au final, peut-être que Yenno était la seule personne avec qui il avait partagé quelque chose, aussi minime soit-elle.
La jeune femme s'installa au bord de l'eau, en prenant soin de poser ses mains en arrière sur l'herbe bien verte, pour plus de confort. Elle observait alors les poissons s'éloigner à chaque pas du soldat à la surface du point d'eau, profitant également de l'apaisement de sa musique ruisselante. Elle su cette fois-ci cacher la petite gène que les mots du garçon provoqua en elle, concernant leurs retrouvailles. Elle afficha alors un franc sourire pour contrer le pessimisme visible du soldat avant de lui faire comprendre par un hochement de tête que non, elle n'abandonnerai pas une énième fois la possibilité d'entretenir une quelconque relation entre-eux. Avec le nombre de pensées qu'elle eu à son égard durant les années qui venaient de s'écouler, elle comptait bien, maintenant qu'elle jouissait d'une plus grande liberté familiale, garder contact avec lui. Peu importe l'issu de cette liaison, elle ne souhaitait plus le voir disparaître à tout jamais. Sentiment qu'elle eu ressenti par le passé.
« En effet, justement lors de mes nombreuses hésitations à m'engager dans mes tests d'entrée dans les rangs de l'armée impériale je suis souvent venue ici. Que cela soit pour pleurer un bon coup, ou simplement peser le pour et le contre d'une telle décision. »
La franchise. C'était une qualité que Yenno arborait sans aucun problème lorsqu'elle se sentait en confiance avec son interlocuteur et elle savait pertinemment qu'Akira ne la jugerai pas. Aussi ténébreuses soit ses pensées, il connaissait très bien la facilité de la jeune hijin à se confier à lui, elle lui avait déjà montré à plusieurs reprises à l'époque de leurs escapades secrètes.
« N'as-tu jamais besoin d’extériorisé de la sorte, toi aussi ? Je te connais si fort que je me suis souvent posé la question. » Dit-elle en attrapant sa longue et brillante chevelure pour la placer sur un côté de son cou.
Entremêlant des mèches pour former une tresse imposante, elle contemplait l'homme avec les yeux d'une personne admirative. Son regard sur lui n'avait jamais changé et force est de constater qu'avec l'age prit entre temps, elle semblait sous le charme du mystère qu'il dégageait. Sans pour autant le montrer, Yenno avait envie de s'évader de ses pensées noires et c'est grâce à lui qu'elle y parvenait, à cet instant. Une fois la coiffure terminée, elle laissa sans le vouloir l’extrémité de sa natte devant son torse, traîner au milieu des petites algues verdâtres.
« Tu sais Akira, je suis heureuse d'avoir pu te croiser aujourd'hui. Je remercie le temps de m'avoir donner la chance et la force de ta garder près de moi, dans le cœur, durant ces dernières années. »
Elle sentait une sorte de vibration dans son corps, provoquée probablement par la présence si imposante et à la fois si discrète du soldat. Elle semblait bien partie pour contrôler les pensées fougueuses que son cerveau d'adulte lui fît la surprise d'amener jusqu'à son esprit. Elle ressentait à ce moment-là, comme une envie, un besoin d'avoir un contact charnel. Le bien-être qu'elle eu ressenti quelques minutes plus tôt lorsqu'il posa sa main sur la sienne, lui manquait déjà.
Akira, lui, n’était sur de rien. Ses relations ne pouvaient même pas se compter sur les doigts d’une main. Le jeune homme n’avait que des connaissances, des collègues… Yenno était la seule personne avec qui il entretenait plus que de simples échanges banals ou poignées de mains formelles. Et pourtant, il leur restait un long chemin à parcourir ensemble pour admettre qu’ils se connaissaient vraiment. Akira ne lui avait jamais parlé de son passé, de son père, de la raison pour laquelle il était devenu un vagabond. Et peut-être que, tout comme lui, Yenno gardait certaines choses secrètes malgré la franchise dont elle avait toujours fait preuve. Ce genre de choses étaient communes à tous, mais Akira n’en savait rien. La sève des relations sociales lui restait grandement inconnue. Mais quelque chose lui disait que plus il y réfléchirait, moins leur accointance serait authentique… c’est pourquoi le jeune homme se laissait simplement porter.
“ Je vois… je suis la si tu as besoin. Enfin, maintenant que la décision est prise, tu devrais moins cogiter. “
Du moins il le supposait. Akira n’était pas du genre à pleurer et ne le faisait même jamais, ce n’était pas dans ses réflexes naturels. Tout comme le fait de remettre en cause ses décisions d’ailleurs. Qu’importe ce qu’il faisait, le soldat le faisait par automatisme en suivant son instinct. Nul besoin de regretter quoi que ce soit. Mais tout le monde n’était pas pareil, et tout le monde avait quelque chose à perdre contrairement à lui.
La question de la jeune femme lui valut quelques secondes de silence, alors qu’il réfléchissait. S’il avait répondu du tac au tac, Akira lui aurait sans doute répondu non mais ce n’était pas exact.
“ Disons que j’extériorise autrement. En me baladant par exemple. Ou en lisant des livres. Ça permet de s’évader un peu. “
Mais s’il était totalement honnête, Akira n’avait pas vraiment besoin de s’évader. Se confronter au monde était pour lui la meilleure des doctrines. C’était en vivant comme un vagabond et en ayant cette enfance misérable qu’il était si “fort” aujourd’hui. Bien que ce terme ne veuille plus vraiment dire grand chose pour lui. C’était sûrement pour cela qu’il n’avait aucune idée de la manière dont le voyait Yenno. Lui la voyait comme une amie à qui il était facile de parler, une jeune femme sensible et joviale… mais il était bien loin de s’imaginer qu’un quelconque mystère pouvait émaner de lui, ou qu’il pouvait aider autrui à se sentir mieux. La plupart des gens qu’il croisait le voyaient comme un homme étrange ou désagréable de par son manque d’intérêt. Comme quoi, si l’on dit souvent qu’il ne faut pas se fier au regard des autres, il peut parfois être très instructif vis à vis de sa propre personne. Encore faudrait-il être courant de ce que les autres pensent réellement, bien sûr.
“ Je n’étais pas sûr que tu te souviendrais de moi. Ça me fait plaisir. Désormais, plus besoin de m’héberger. Même si ma maison est loin d’être paradisiaque, enfin bon… “
Nul besoin de préciser que lui non plus ne l’avait pas oubliée. Cette lettre n’aurait jamais existé sinon. Néanmoins, il n’était pas très fort pour exprimer ce qu’il pouvait ressentir… et si elle recherchait encore un contact physique avec lui, elle allait devoir le lui faire comprendre.
Le jeune homme avait raison, plus aucun retour en arrière n'était possible pour la teikokujin, assez sur d'elle. Yenno ne doutait pas vraiment de ces capacités à être acceptée dans les rangs de l'armée. S'il y a bien une qualité que l'on peut lui constater, c'est l'assurance. Déjà petite, elle était une fillette dégourdie et pleine de vie, sans aucune difficulté à passer les étapes habituelles de l'évolution d'une enfant. Sa curiosité naturelle aidant, elle reste aujourd'hui une femme très ouverte d'esprit et généreuse.
S'évader. Elle fût assez étonnée d'entendre le soldat prononcer ce mot-là, rempli de sens pour elle. Si son passé familial fût organisé avec un schéma classique, le mot d'ordre à la maison était toujours le même : efficacité. Avec un père militaire, chaque chose devait avoir sa place et chaque geste devait être utile et réfléchi, pas le temps de faire de vague. Avec un esprit comme celui de la petite fille qu'elle était, difficile d'avoir accès aux distractions dont elle rêvait.
« Je serai curieuse de savoir dans quelle lecture est-ce que tu t'évade. » annonça t'elle, un sourire malicieux sur les lèvres.
Le temps commençait à s'assombrir légèrement au dessus des arbres encore colorés et la brise, caressait agréablement le cou nu de la demoiselle qui se couvrit d'une vague de frissons. Si bien qu'elle releva légèrement le col de son kimono pour envelopper le bas de sa nuque. En se redressant, Yenno attrapa la sorte de sacoche dans laquelle elle rangeait ses maigres affaires, les papiers officiels et un carnet. Avant de l'ouvrir elle s'exprima.
« Je la gardais avec moi au cas ou... »
Puis, elle fît glisser entre les pages, une feuille pliée trois fois sur elle-même. Une odeur agréable se dégageait de la besace, probablement les gouttes de parfum qui par mégarde tombe sur son peigne en bois qui se trouvait lui aussi, rangé à l’intérieur. En s'approchant de lui, un doigt vint s'entortiller dans les cheveux encore libres sous l'attache de sa natte, un petit signe de timidité probablement. La main tendue face au jeune homme, elle profita de cet instant pour effleurer une nouvelle fois la surface un peu rêche de sa peau, avant de lui donner la lettre.
« Et sinon alors, ou est-ce que tu as élu domicile ? Si je peux me permettre de te demander. »
Akira ne doutait pas non plus des capacités de sa camarade. En fait, il savait déjà qu’elle serait prise. L’empire avait besoin de membres, et s’il se devait bien de filtrer les incapables, la majorité des candidats étaient éligibles à l’engagement. Il suffisait d’un peu de capacités et de beaucoup de motivations, l’empire se chargeait du reste. Nul besoin de ne prendre que des machines de guerre, l’apprentissage faisant partie de la vie de tous. Chacun évoluerai au sein de son unité et deviendrait une valeur sûre tôt ou tard. Et au vu des qualités avec lesquelles commençait Yenno, sans parler de son statut de Shinobi, elle avait 100% de chances d’être engagée. Le reste ne dépendait que d’elle et de ce qu’elle voudrait y faire une fois soldate.
Malgré la dureté et le côté strict du père de Yenno, Akira l’appréciait d’une certaine manière. Simplement parce que lui était la pour sa fille, aussi strict soit-il. Peut-être cela traduisait-il même un réel attachement à sa famille. Il était l'antithèse totale du père laxiste et haineux qu’avait eu Akira durant toute son enfance, ce qui l’avait d’ailleurs mené à cette vie de vagabond sans attaches. Bon, il était vrai que la seule fois ou ils avaient interagi, cela avait bien failli en venir aux mains… mais Akira ne pouvait pas vraiment lui en vouloir.
“ J’aime bien les ouvrages relatant une autre époque anachronique, un autre monde, ou un futur lointain. Des univers totalement différents du nôtre. “
Cela aurait sûrement eu le terme science fiction, mais à l’époque actuelle il serait bien curieux de l’utiliser. Il arrivait parfois au jeune homme de lire des ouvrages philosophiques ou historiques, mais ce genre de choses n’avaient pas pour but de le transporter ailleurs. Au contraire, ils l’encraient plus que jamais à la réalité. Quand on se contente de constater le monde limité à la perception que l’on a, notre vision est en fait bridée. Mais quand l’on s’intéresse au monde dans sa globalité à travers les différents moyens possibles, et relativement restrictifs à cette époque… alors la lucidité grandit, et on devient plus conscient que jamais de ce qui nous entoure. Dans le cas d’Akira, sa vision pessimiste ne s’était pas vraiment arrangée en faisant cela… mais sa curiosité avait assurément grandit quand il s’était rendu compte du flot de choses à découvrir de par le monde.
Voyant que le temps commençait à s’assombrir, et le vent à se lever, le jeune homme leva la tête vers le ciel. Ses cheveux ondulaient au gré du vent tandis qu’il fixait la lune, alors de plus en plus apparente dans la voûte céleste. Aussi loin qu’il se souvienne, Akira avait toujours aimé observer les étoiles. Et il allait sans dire que la nuit était idéale pour ça, dévoilant alors ce flot de points lumineux au loin. Chaque nuit, le jeune homme se demandait bien ce que cela pouvait être. Des boules de feu, des êtres vivants, des hallucinations ou des petits soleils très éloignés… quand on vit dans un monde ou certains peuvent cracher du feu tandis que d’autres réaniment des morts, tout est possible. Pour le meilleur comme pour le pire.
“ Hm ? “
Encore une fois, le jeune homme s’était perdu dans ses pérégrinations mentales et spirituelles à partir de quelque chose aussi banal que la meteo. La voix de Yenno le ramena à la réalité, ce qui lui fit se demander de quoi elle pouvait bien parler. Lorsqu’elle lui tendit la feuille parfumée, Akira la récupéra… perplexe. Quelque chose lui disait qu’il s’agissait de la lettre qu’il lui avait adressée. Elle l’aurait donc gardée ? Même s’il ignorait l’utilité de ce geste, Akira trouva cela touchant. Néanmoins, sa question vint bien vite briser la glace. Si elle savait.
“ Dans une maison un peu miteuse. Je n’avais pas beaucoup de moyens, j’ai fait avec ce que j’avais mais c’est mieux que rien. En plus, elle est relativement proche des murs et je peux donc sortir en forêt facilement. “
Néanmoins, cette question vint en soulever une autre. Yenno devait maintenant vivre ici, mais ou ?
Yenno ne s'attendait absolument pas à ce que l'homme vive dans une immense maison luxueuse, sa réponse ne l’étonna alors pas vraiment. De plus, ayant la plupart du temps les mots justes, Akira avait cependant parfois tendance à sous-estimer les choses, comme si le négatif semblait lui apparaître en premier plan.
« Tant que tu t'y sens en sécurité, c'est l'essentiel. Pour ma part je suis encore chez mes parents... Et autant te dire que je commence à avoir des envies furieuses de m'en échapper. J'ai essayé de leur parler de l'idée d’emménager seule une fois engagée mais tu te doutes bien que ça passe difficilement. Ma mère accepte, mon père refuse. »
Cela faisait déjà bien des mois que la jeune femme envisageait alors de s'en aller, de quitter une bonne fois pour toute le foyer familial. Aussi confortable pouvait-il être, elle en avait simplement marre de subir la pression de son père, leurs désaccords et sa propre tristesse. La belle Hijin aussi patiente soit-elle, commençait sérieusement à éprouver des sentiments négatifs envers son géniteur, chose qu'elle supportait difficilement. Après tout, c'est une place importante dans une famille qu'être père. Elle rêvait souvent des moments privilégiés qu'ils échangeaient lorsqu'elle était enfant.
« Mais bon, il va devoir se rendre à l'évidence que je ne pourrais plus faire le trajet depuis Urahi maintenant que je vais servir l'empereur. » Elle esquissa un sourire amusé.
Elle était intimement persuadée que l'amour qu'elle portait à son papa serai plus puissant et véritable, si elle arrivait à garder une certaine distance avec lui.
Alors que la météo semblait enivrer le soldat, Yenno elle, perdait son regard sur les reflets de l'eau transportant avec son courant, les feuilles d'un automne presque terminé.
« Heureusement pour moi, il a accepté que je loge dans une auberge de la capitale pour quelques mois. »
Yenno mettait le doigt sur un bon point. Néanmoins, Akira lui répondrait sûrement que le négatif prend le pas sur le positif, ainsi va la vie. Une goutte de poison suffit à tarir tout le puits. Mais rien ne l’empêchait d’apprécier les bonnes choses à leur juste valeur. Comme la conversation et ces retrouvailles.
“ Je me sens en sécurité partout en mon pays depuis l’avènement de l’empire. Du moins pour l’instant. Et concernant ton père… et bien, j’imagine qu’il va bien devoir te lâcher un jour. Tu es grande. Prouve lui que tu as un projet solide, et il te laissera sûrement partir. Déjà, je doute qu’il reste sur ses positions une fois que tu seras officiellement enrôlée. Il faut vivre le plus proche possible de son unité, pas question de devoir faire des heures de trajet tous les jours. “
Expliqua t-il, voulant lui donner un peu d’espoir. De toute manière, elle allait bien devoir se rebeller un jour. Akira était sûr qu’elle en serait capable. Et il l’y aiderait en cas de besoin. Son père n’était sûrement pas animé de mauvaises intentions à ses yeux, mais il fallait bien laisser un peu de lest à sa fille si elle voulait pouvoir se développer un jour.
Mais la jeune femme évoqua le même point, ce qui confirma ses dires. Elle allait devoir vivre à Urahi désormais. Et si elle voulait, Akira lui proposa une alternative.
“ Je pourrais t’héberger en attendant que tu trouves quelque chose de mieux. Ça ne coûte rien d’essayer. “
Akira n’avait aucune arrière pensée, étant de toute manière bien incapable de garder pour lui ses ressentiments envers les autres. Au contraire, cet acte relevait d’une grande confiance envers Yenno. L’inviter ainsi sans hésitation au sein de son intimité, son domicile privé ou il pouvait être seul sans risques d’être dérangé par des indésirables… nul doute qu’il ne l’aurait pas proposé à n’importe qui.
“ Enfin, a moins que ce soit plus pratique que tu restes à l’auberge. “
Ajouta t-il tout en observant le papier qu’elle lui avait donné. De quoi pouvait-il bien s’agir ?
Rares sont les personnes qui connaissent assez bien la jeune femme pour déterminer chacune de ses expressions faciales, la plupart du temps le visage neutre sans pour autant être froid. A cet instant, le sourire plus ou moins large qu'elle trimbalait depuis le début de la conversation s'estompa. Les coudes posés contre le haut de ses genoux, points fermés sous son menton, ses joues devinrent roses et ses yeux arrondis se posèrent sur un têtard déterminé à rejoindre sa destination. La shinobi n'avait pour l'heure, jamais vécu avec autrui et en un instant son esprit imagina un tas de situations inconnues. Vivre en colocation avec un homme était une conjoncture qu'elle n'eu jamais envisagé auparavant, si bien qu'elle semblait totalement déboussolée face à la proposition du soldat. Du moins, c'est ce que son silence de quelques longues secondes pouvait pour une fois, laisser entrevoir.
« Oh, et bien... Euh... C'est une idée oui. » Dit-elle, d'un ton peu sur d'elle.
La présence d'un homme à ses côtés la troublait, la présence de cet homme. Certes, si n'importe quel autre protagoniste masculin lui avait fait cette proposition avec un si grand détachement que lui, elle aurait été déstabilisée. Mais aurait cependant largement su répondre avec aplomb, ce qu'elle eut du mal à exécuter à ce moment là. Elle devait à tout prix reprendre ses esprits et ne plus fondre comme une idiote devant la situation, si bien qu'elle redressa son dos avant de le regarder droit dans les yeux - cela lui donne de la confiance - :
« Peut-être pourrai-je t'aider à donner un coup de neuf à cette maison, pour te remercier de ta proposition. »
Il était difficile pour elle de se rendre réellement compte de la situation. Elle qui avait tant de fois songer à cet homme, qu'elle eu imaginé si seul ou pire, mort. Se retrouver enfin face à lui était déjà une grande chance et une très bonne nouvelle pour elle, elle s'en réjouissait beaucoup. Le fait qu'il lui fasse une si grande confiance relevait alors, de l'impensable. Elle sût depuis toujours, Akira est un grand solitaire... Peu après les silences, alors qu'elle se rendait doucement compte de la bonté du bonhomme, Yenno retrouva son sourire discret et bienveillant.
« Il va, à l'occasion, falloir que tu me fasses visiter ton antre alors, mon cher Akira. En ce qui me concerne, la chambre de l'auberge a été payée d'avance jusqu'à la fin du mois. »
Aussi rare le fait de la voir aussi expressive fut-il, Akira n’eut pas grand mal à remarquer la gêne sur le visage de la jeune femme. Il fallait reconnaître que personne n’aurait pu passer à côté de ses yeux ronds et cet air ébahi. Yenno semblait avoir vu un fantôme. Sa proposition ne lui semblait pourtant pas si folle. Mais Akira n’était pas vraiment non plus du genre à agir comme n’importe qui, et avait proposé ce coup de mains le plus innocemment du monde. Peut-être était-ce cela qui rendait la proposition d’autant plus déroutante. Le soldat ne savait pas vraiment comment s’y prendre. Néanmoins il ne fallait pas compter sur lui pour clarifier la situation.
“ Je n’ai qu’un lit mais bon, il m’arrive de dormir dans les arbres. Le canapé ne serait pas si terrible. “
Dit-il, redoublant donc d’attention pour la jeune femme. Prêter son lit était plus anodin que son appartemment pour lui -puisqu’il n’y dormait finalement pas si souvent- mais pour une personne “normale” peut-être y verrait-on un geste un peu trop intéressé ou au contraire excessivement généreux. Akira ne se situait dans aucune de ces cases. A vrai dire, bien qu’il n’ait que peu d’attaches aux biens matériels, Yenno était tout de même différente des gens qu’il croisait tous les jours et aurait largement droit à un traitement de faveur de sa part. Sans vraiment qu’il puisse se l’expliquer d’ailleurs. Certaines choses lui apparaissaient simplement comme logiques et il ne les remettait pas en question.
La jeune femme se redressa pour le regarder dans les yeux. Une manière de s’affirmer à n’en point douter, à moins qu’elle ne soit bipolaire. Akira avait plus de facilités à lire dans autrui qu’en lui-même, et ces manières lui sautaient aux yeux. Très bien, après tout, elle ne voulait peut-être pas paraître frivole et faible. Akira savait pourtant déjà que la jeune femme était forte, nul besoin de se forcer devant lui. C’est du moins la réflexion qu’il se fit intérieurement. S’il parlait autant qu’il pensait, le jeune homme serait sûrement insupportable pour n’importe qui.
“ Pourquoi pas. Je ne savais pas que tu étais maçon. “
Encore une remarque pince sans rire laissant incertain sur le ton employé. Ou peut-être que la jeune femme n’avait vraiment pas conscience de l’état qu’avait évoqué Akira. Le toit avait un petit trou qui attendait toujours d’être rebouché… certes, celui-ci était placé au dessus de l’entrée mais il se révélait problématique par temps pluvieux. Et Akira n’y connaissait rien en charpenterie. Peut-être avec une technique doton…
“ Attention aux pièges à l’entrée. “
Dit-il, impassible. La jeune femme avait retrouvé son doux sourire, sûrement signe qu’elle se sentait de nouveau à l’aise.
“ Parfait, j’aurais le temps de préparer un peu ton arrivée dans ce cas. Ma porte te sera toujours ouverte. Les fenêtres aussi. Et même une partie du toit quand j’y pense. “
Un énième rire sur le visage de la jeune femme, maintenant détendue. Il était vrai qu'elle n'eut jamais l'occasion de travailler réellement sur les travaux de la maison de ces parents. Cependant, adolescente, elle eut passé de nombreuses heures a regarder les artisans refaçonner la maison familiale, en posant toujours un tas de questions -un peu énervantes parfois- aux travailleurs, la plupart du temps amusés devant la petite. L'une des qualité de la jeune femme se traduisit alors au dur et à mesure des années, une grande capacité de compréhension et une attention à toute épreuve.
« Tu serais étonné mais j'ai bel-et-bien quelques connaissances dans le domaine. »
Fière de pouvoir avancer de tel propos, elle ajouta :
« Mais je te rassures, je suis plus douée en cuisine. Ma mère s'en est bien assurée. » chuchota t-elle en ricanant.
Il est bien vrai que de vivre dans une famille en tant que femme/fille à cette époque, avec de telles perspectives d'avenir, n'était pas la situation la plus facile à assumer au quotidien. Soucieuse de ne décevoir personne, Yenno s'était habituée à se comporter de la manière la plus correcte et ordonnée. Ce qui finalement, fît d'elle une jeune femme à la fois attentionnée, calme mais aussi sans pitié et sanguinaire au besoin. Selon les situations, la hijin dévoilait alors des visages différents, voir opposés. Mais pour l'heure, il s'agissait bel et bien d'un moment de plénitude. La lumière de la lune commençait alors à éclairer le ciel devenu bleu argenté lorsqu'elle ne se cachait pas derrière les nuages de passage. L'ambiance de ce tête-à-tête évoluait doucement vers quelque-chose de plus intimiste, ce fameux sentiment qu'apporte la nuit avec son arrivée, tout le monde le connait.
« Je tâcherai de faire attention à mon arrivée alors. Et je me contenterai largement du canapé ou alors j’amènerai mon matelas de sol même. »
Avec cette phrase, elle venait bel et bien d'accepter la proposition. En y réfléchissant, cela lui rendrait un immense service le temps qu'elle trouve ou s'installer de son propre chef. Encore faudra t-il trouver une explication valable pour ses parents. La reconnaissance qu'elle portait à son vieil ami en cet instant était grande et elle sentait le besoin de lui faire comprendre. Elle s'approcha alors du garçon puis lui attrapa la main.
« Ta proposition me fait chaud au cœur Akira, cela va grandement m'aider. Je tâcherai de trouver rapidement une solution pour me loger seule. »
Plus fort qu'elle, la jeune femme libérée enroula ses bras minces et musclés autour de l'homme et lui offra un geste que l'on pourrait qualifier de déplacé en guise de remerciement. Elle posa sa joue rebondie contre son torse stoïque et le serra dans ses bras. Elle devinait qu'il n'était surement pas à l'aise en cet instant probablement un peu trop sentimental pour lui. Mais elle s'en fichait, elle profita de cet acte pour le presser contre elle puis relâcha alors tout le soulagement qu'elle eu ressenti en l'apercevant pour la première fois, plus tôt dans la journée. Akira était vivant, palpable, là.
Akira haussa un sourcil. Soit, tant mieux. Il n’aurait pas douté de ses talents de toute manière, elle lui avait déjà prouvé beaucoup de choses. Et il lui en fallait peu pour être satisfait. Impressionné, c’était autre chose mais on ne peut pas tout avoir.
“ Je n’en doute pas. Contrairement à moi. “
Dit-il, laconique. Sa palette de talents se résumait à ceux nécessaires à un vagabond, à savoir voler et se contenter du peu qu’on a. A l’avenir, si dormir au clair de lune sans couverture ni nourriture entouré de 10 loups affamés lui arrivait, peut-être ses talents lui seraient-ils utiles. Mais ce genre de choses n’arrivaient plus depuis son admission dans l’empire.
Une chose était sûre, avec son éducation, il aurait été difficile pour le jeune homme d’évoluer différemment. Confiné des années dans une maison en ne sortant que pour travailler aux champs, Akira ne communiquait presque jamais avec son père si bien qu’il appris à parler très tard. Mais ce passé resterait à jamais tû, son seul détenteur étant désormais Akira depuis le meurtre de son père. Acte qui avait conduit à sa fuite et qu’il ne regrettait pas le moins du monde. Tout comme Yenno ne lui avait pas exposé tous ses masques, le soldat gardait en lui des choses inavouables. Au final, peu lui importait. Tout le monde n’a pas besoin de tout savoir d’autrui, et cela allait dans les deux sens. Mieux valait pour lui n’avoir affaire qu’à la meilleure partie de Yenno.
“ Comme tu veux. Tant que ça ne te gêne pas. “
Dit-il sans insister davantage. Il se doutait bien qu’elle n’accepterait pas de lui prendre son lit de toute manière. Le jeune homme repensa un instant à leurs échanges passés alors que la lune se faisait de plus en plus grande dans le ciel. Ainsi, il ne la vit pas s’approcher et réalisa qu’elle venait de lui prendre la main. Inconsciemment, sa main se crispa pour devenir raide, ce qu’elle sentit sans problèmes, bien qu’il ne fasse rien pour la retirer.
“ C’est normal. Tu m’as aidé aussi après tout. “
Dit-il avec une humilité stoïque qu’elle connaissait bien désormais. Néanmoins, s’il ne changeait pas, elle se montra bien plus entreprenante qu’il l’aurait cru. N’attendant pas son aval, la jeune femme vint l’enserrer dans ses bras. Si son torse large et musclé aurait pu être difficile à enlacer pour petit brin de femme, Yenno restait très grande et relativement musclée elle aussi. Du moins, c’est l’idée que s’en faisait Akira. Bien qu’il resta stoïque, relativement décontenancé, le soldat la laissa reposer contre son torse quelques instants, écoutant les battements affreusement lents de son coeur.
Mais plutôt que de rester immobile, le jeune homme plaça ses mains sur les hanches de la jeune femme et la souleva sans problèmes pour la hisser à son niveau, la regardant alors dans les yeux.
Elle fût surprise de sentir ses pieds décoller du sol, comment s'attendre à un tel geste de la part de ce soldat manifestement si détaché. La jeune femme sentait la pression des mains vigoureuses sur ses hanches et son expiration lui proposer alors, de peut-être changer de positionnement. Un sourire sincère apparut alors sur les lèvres joliment dessinées de la hijin.
« Ah, non... Je n'ai pas spécialement envisagé de rester ici la soirée entière. A vrai dire je n'avais rien envisagé de précis. »
Dit-elle, soudainement assez sûr d'elle. Le ton employé laissait alors deviner une part de curiosité chez la demoiselle. Lorsque elle releva ses bras autour du cou du jeune homme, ses yeux se noyèrent. Elle ne quittait plus un instant les siens, comme hypnotisée. Elle déposa alors ses deux mains fraîches d'une part et d'autre de la nuque d'Akira et quitta son large sourire pour lui en offrir un plus discret et mystérieux. Cette proximité était naturelle chez elle, bien qu'elle n'eu ce genre de rapprochement physique qu'une seule fois auparavant.. Elle se sentait bien mais la timidité monta doucement le long de ces jambes pour atteindre son ventre. Elle avala sa salive silencieusement puis posa à nouveau sa tête contre l'épaule du garçon, lui offrant alors la chaleur de son souffle au creux du cou.
« Où est-ce que tu voudrais aller, Akira ? »
Ne sachant plus vraiment quoi faire, comment réagir, ni envisager un endroit meilleur pour profiter un peu plus longtemps de leurs retrouvailles, elle se te tut alors. Profitant de l'odeur naturelle de l'homme, elle souriait encore secrètement, cachée entre le col et la peau doré du soldat. Bien que longs, ses bras n'entouraient pas vraiment l’entièreté du corps musclé du shinobi, elle agrippait alors ses doigts dans le tissu que composait le haut de son habillement. Un câlin, geste de tendresse pourtant assez rare dans la vie de la toute jeune soldate. C'est pourtant bel et bien ce qu'elle prenait actuellement plaisir à faire. Il n'y avait rien de plus véritable et franc en ce temps là, que ce câlin inopiné. La boule qui venait de s'installer dans son estomac n'était pas douloureuse mais quelque-peu gênante, tout en étant presque agréable. Une drôle de sensation, que finalement, beaucoup de gens lui enivraient probablement.
Lui-même ne savait pas vraiment pourquoi il avait fait ce geste, mais les choses étaient ainsi. Peut-être s’était-il senti assez en confiance pour la toucher. Peut-être avait-il simplement eu envie de la regarder dans les yeux pour voir le reflet de son âme. Après tout, Yenno semblait si pure que ses yeux eux-même renvoyaient cette forme de pureté. Un terme sans doute inexact, mais auquel il ne trouvait pas de substitut valable. Quelque part, voir ces grands yeux emplis de vie s’opposer au regard translucide et vague du jeune homme créait un contraste surprenant. Mais un contraste qu’aucun des deux ne pouvait constater.
Son regard changea ensuite, en accointance avec son sourire. Quelque chose de plus indéchiffrable, qu’il n’expliquait pas mais qu’il interprétait comme une expression positive. Après tout, il ne l’avait pas sentie se crisper et semblait plutôt détendue. Le jeune homme avait pris garde à ne pas la soulever d’une manière inconfortable ou trop rapidement sans lui laisser le temps de réaliser. Le temps semblait même s’être figé alors que les deux Hijines s’observaient, leurs regards plongés mutuellement l’un dans l’autre. Suite à quoi la jeune femme l’enlaça alors qu’il ramena ses jambes vers lui pour la faire tenir plus facilement en l’air. Son souffle, doux et régulier, avait le don de l’apaiser à mesure qu’il caressait son cou.
A sa question, le jeune homme n’y apporta pas tout de suite réponse, profitant simplement de la plénitude de l’instant.
“ Il fait presque nuit. Je peux te montrer ou j’habite. “
Dit-il en la ramenant davantage contre lui pour lui tenir chaud, et sûrement accroître cette enlaçade emplie d’une tendresse à laquelle il n’était pour ainsi dire jamais sujet. Lui qui pensait ne plus ressentir d’émotions en raison de son indifférence générale, peut-être que cette envie, cette chaleur qui remontait jusqu’à ses membres était l’expression de quelque chose enfoui au fond de lui. Etait-ce dû au souvenir qu’évoquait Yenno ? Ou un quelconque manque à combler indépendamment de la personne qui s’en chargerait. Ou plus simplement un intérêt, une empathie inexpliquée pour la jeune femme pour ce qu’elle était sans regard pour le reste. Une chose était sûre, ce ne serait pas aujourd’hui ni demain qu’Akira trouverait les réponses. Peut-être n’en avait-il même pas envie. Le temps le lui dirait.
“ Ce n’est pas très loin, c’est plus pratique pour aller travailler. “
Précisa t-il pour la convaincre. De toute manière, au vu de leur position, elle n’était même pas obligée de faire le trajet de ses propres jambes.
Des frissons. Lorsque les mains du brun soldat glissèrent contre le pantalon de sport qu'elle portait avec élégance, une vague de sensations remontait alors le long de sa colonne vertébrale. N'était-il pas le temps d'apprécier simplement l'instant ? Elle décida que si, cette étrange journée remplie de sentiments variés serait alors, une sorte de pause cérébrale. Comme si, après des années à ressentir des choses semblables au cours de sa vie, il ne suffisait que d'une seule journée pour découvrir une longue liste d'émotions vivent et intenses.
Une couleur douce couvrait alors ses joues, la brise froide mêlée à la timidité qu'elle tachait de garder pour elle. Cette proximité de plus en plus présente rendait la jeune shinobi différente de d'habitude. Elle se sentait à ce moment-là, simplement femme, simplement la femme sensible qui se cache derrière son sabre. Alors qu'elle nouait ses pieds autour du bassin d'Akira, elle acquiesça de la tête en imaginant qu'il comprenait que ce mouvement faisait office de confirmation quant à sa proposition précédente.
« On a de la chance, il ne pleut pas ce soir. »
Alors que les mains du garçon glissait doucement contre le tissu, elle les attrapa délicatement pour se défaire de son corps et ainsi, le suivre jusqu'à sa tanière. Elle attrapa sa main, en portant attention à la sensation qu'elle eu ressenti plus tôt dans la journée, lors du premier contact. Les yeux fermés, elle lança alors :
« Tu me guide jusqu'à ton château, soldat ? »
Le souvenir de leurs aventures de jeunes ados, lorsque Yenno faisait le rôle de guide pour montrer au jeune vagabond sa cabane. Ce jour-là, il accepta de jouer le jeu du guidé avec son air renfrogné habituel, mais la petite s'en accommodait bien. Elle n'eu jamais de jugement envers lui, elle eu toujours le plaisir de partager avec lui, sa gaieté enfantine.
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