Domaine Suzuri, non loin de la Grande Bibliothèque.
Depuis le lointain courrier de Meikyû Raizen qui avait posé les bases d'un partenariat concernant les rouleaux ninjas, la trentenaire s'était greffée à cette intelligente entreprise en ajoutant une annonce visant à informer ce dernier mais aussi l'ensemble de Kumogakure d'une requête quelque peu spéciale - La constitution d'un stock de parchemins vierges à l'attention du clan Suzuri.

Les finalités de cette démarche demeuraient obscures, et cela n'étonnait personne en soit qu'un clan tel que celui-ci porte son dévolu sur pareilles possessions, libres d'être calligraphiées d'une façon ou d'une autre par leurs mains expertes. La trentenaire s'était depuis quelques temps maintenant pleinement réintégrée aux activités de son clan, après tout, même les distances prises à l'égard de Kumogakure ne lui avait jamais ôté son sens du devoir envers la famille. Ses allers-venus annuels dans la cité ne se justifiaient d'ailleurs que dans cet intérêt. Raison pour laquelle elle n'avait rien manqué des intrigues propres aux Suzuri, des difficultés rencontrées jusqu'aux tensions plus récentes. Outre son avis assez tranché quant à la position que devrait adopter le clan pour se redresser, elle ne manquait pas non plus d'idées ni de projets futurs pour celui-ci, et cette collecte de parchemins en faisait partie.

Ne serait-ce que pour la transmission de compétence phare entre membres du clan, ou selon l'ambition, plutôt la mise en place de fuinjutsus puissants qui demanderaient une participation collective. Pour se faire, les parchemins demeuraient une matière rare et particulièrement précieuse.

Néanmoins l'initiative semblait être tombée dans l'oubli. Surement par manque d'opportunité concrète, et peut-être aussi faute à l'absence de dons. La valeur de tel parchemin ne pouvait en aucun cas justifier la ruine de la caisse clanique pour quelques exemplaires isolés. Aussi quelques mois plutôt, Takara attendait beaucoup du détachement kumojin rendu à Hayashi puisque le pays regorgeait d'arbres secrets capables de produire le papier d'exception. Sauf que les nouvelles avaient été plutôt sinistres, et l'idée d'une action commerciale avec les représentants locaux devenait complexe même avec une levée de fonds pour se permettre d'acheter en gros.

Bref, même elle avait relâché ce projet. Non pas mort-né, mais seulement mis de côté.
Du moins c'est ce qu'elle pensait jusqu'à ce qu'on l'informe qu'un shinobi s'était présenté à la maison clanique par rapport à sa demande. Un brin de réflexion lui avait donc permis de ce remémorer cette action passée, car elle ne voyait pas quoi d'autre aurait pu provoquer cette soudaine entrevue. Elle se hâtait donc de rejoindre l'étranger, armée d'un enthousiasme certain. Aucun doute qu'elle aurait du mal à masquer sa déception s'il s'agissait d'autre chose...

Ryû tournait en rond dans son quinze mètres carrés, qui n'était plus seulement le sien mais celui de sa concubine, depuis peu, Chiaki Sentetsu, son seul et unique grand amour. La raison de ses ronds ? Eh bien, ce rouleau qu'il avait obtenu il y a quelques temps, offert par la hiérarchie, mais dont il n'avait jamais eu usage. En fait, son but était de contenir une "technique" de sorte à ce que quelqu'un puisse se l'approprier sans que quiconque ne l'y aide. Mais le Nozomi ne savait pas comment s'en servir, et n'avait donc pas la moindre idée de quoi en fait. Certains auraient eu des idées saugrenues, du fait de la forme assez spéciale de l'objet, mais pas lui, qui savait contenter la chirurgienne avec ce qu'il possédait. Quoi qu'il en fût, il finit par sortir, toujours avec cet objet dont il n'avait aucune utilité, se disant que l'idée lui viendrait en sortant, pour prendre l'air.

L'air, en effet, lui permis déjà de se détendre, même si la situation n'était pas particulièrement stressante. En fait, Hatsu était de nature très stressée, ce que n'importe qui pourrait bien sûr comprendre, du fait du trouble qui l'habitait. Alors les bouffées d'air, dénuées de problèmes et en profitant de l'absence à durée indéterminée de Yokka, lui permettaient de revivre, d'une certaine façon. Il parcourait les rues, croisant des habitants du village, les saluant et leur souriant, jusqu'à tomber sur une sorte de tract écrasé par terre, assez vieux. Il s'accroupit, curieux de savoir de quoi il s'agissait, et sembla comme appelé par le destin... Une collecte de parchemins vierges ? Pour de vrai ? Il se hâta de se diriger à l'endroit indiqué...

Le clan Suzuri n'était pas bien connu du bleu, pourtant il en avait rencontré deux membres, et ils étaient tous deux fort étranges. Le premier, Shisei, était un grand gaillard moustachu, très vieux (au moins trente ou quarante ans) et qui semblait assez tourmenté, en témoignait sa représentation du clone que le Nozomi lui avait appris. La seconde, Akina, était encore plus bizarre, car elle n'avait rien d'une kunoichi, avec sa peur de blesser les autres. Mais sur qui tomberait cette fois le Chûnin ? L'un des deux qu'il connaissait, ou peut-être une nouvelle tête ? Tant qu'il ne s'agissait pas du Saint-Père, tout irait bien... Il sourit à cette idée, d'un sourire amer, douloureux. A l'entrée, il appela et on le fit attendre...

La trentenaire se présentait donc face à l'arrivant, dans une tenue plus épurée qu'à l'accoutumée. Ces derniers jours passés à travailler à la bibliothèque l'avait amené à prendre ses aises et se délester des équipements adaptés au voyage. Pourtant désormais shinobi officielle, on ne pouvait en rien le deviner ; un sceau mineur bloquait ses émanations de chakra au quotidien et son apparat de civil faisait le reste. Seule son attitude avenante et une certaine grâce dans ses mouvements irradiait de sa personnalité.
Elle adressa un sourire au garçon et l'invita à le suivre d'un geste de la main.

Bonjour, vous m'avez demandé ? Entrez donc, ne restons pas au milieu de l'entrée.

Takara l'amenait non loin de là, après quelques couloirs traversés dans une succursale servant de foyer. Autant destiné aux invités que pour le répit des membres du clan qui œuvraient le reste de leur temps en d'autres lieux du domaine.

Apparemment vous possédez quelque chose que je recherche.
Même s'il ne s'agit que d'un exemplaire, sachez que cela peut nous être très précieux. Pour tout dire, je commençais à désespérer concernant cette affaire... surtout depuis les dernières nouvelles de Hayashi, qui auraient pu représenter une opportunité plus concrète.

Tout en parlant la Suzuri s'assurait de ne pas laisser son hôte démuni, déposant bientôt une tasse de thé chaud sur une des tables à disposition. Elle s'en servait également une puis se délectait d'une mince gorgée. Puis elle jaugeait le garçon. Aussi naturelle qu'elle paraissait, derrière sa sérénité se cachait toutefois un petit doute - Celui-ci demanderait-il un prix ? Elle n'abordait pas encore le sujet.

Une femme d'un certain âge arriva au bout de quelques instants, pour l'accueillir. Ryû ne comptait pas passer un long moment ici, il voulait donner le parchemin et partir, aussi simplement que cela. Lorsque la femme lui adressa la parole, il répondit de manière simple avant de la suivre.

"Bonjour, en effet, concernant le rouleau."

Il emprunta alors le même chemin que la probable Suzuri, et finit par arriver à l'endroit où elle souhaitait le conduire. Ce domaine était assez grand, mais il appartenait à un clan après tout, donc ce n'était pas choquant de par la taille. Il accepta le thé sans un mot, et en bu une gorgée tandis que la blonde lui racontait quelques anecdotes dont il connaissait déjà une partie. Il sourit de manière discrète, mais tout de même visible, avant de prendre à nouveau la parole, tout en attrapant le rouleau dans sa sacoche latérale.

"Je n'ai aucun usage possible de ceci, et c'est donc avec beaucoup de joie que je m'en débarrasse auprès de quelqu'un qui pourra en faire un usage quelconque. Bien entendu, je n'attends rien en retour."

Il tendit le rouleau, et laissa la femme le récupérer. Aucune présentation ? Trop mal poli de sa part, quand bien même il pourrait ne jamais la revoir. Il termina le thé, faisant une grimace à cause de la chaleur de ce-dernier, et rendit la tasse également.

"Bien, je ne vais pas vous faire perdre plus de vôtre temps. Oh, je m'appelle Ryû, j'ai oublié de me présenter. Je vous souhaite une bonne journée !"

Il se retourna, empruntant le même chemin qu'à l'aller, pour rentrer chez lui, délesté d'un objet qu'il n'aurait pas utilisé de toute façon.

Spoiler:

Voilà une affaire comme elle les aimait !
De la simplicité. Pas d'étalage: ni questions ni indiscrétions. Geste altruiste, qui plus est.
Elle attrapait gracieusement le rouleau, l'analysant brièvement pour en identifier la valeur exacte puis remerciait d'un hochement de tête ce fugace donateur.

Merci, vous aussi.
Je vous remercie profondément pour cet acte.

Sans d'avantage de procédure elle le laissait se retirer, prenant le temps de sceller l'objet précieux parmi les divers sigles contenant son équipement. Avec celui commandé auprès de Raizen, cela en faisait déjà deux. Il lui en fallait plus, beaucoup plus. Mais au moins cette simple et soudaine traversée dans son quotidien suffisait à raviver son intérêt et ses espoirs. Il y avait à matière à en trouver d'autres par simple hasard de circonstance, d'ici qu'une opération plus sophistiquée amène la Suzuri à Hayashi.

Si les temps devenaient plus propices et qu'un meilleur budget lui ouvrait cette option, alors elle en parlerait certainement d'avantage à Shisei. Ce dernier serait un compagnon de route idéal pour représenter cette initiative du clan et former une expédition plus solide à l'extérieur. En réalité, il était même son meilleur soutien, celui qui la comprenait le mieux malgré une existence rude et inverse à celle de sa cousine.

Mais pour l'heure, il lui fallait d'abord attendre ce Jonin.