Quittant le domaine Yuki pour entamer ce début de journée, Raizen marchait calmement, faisant ainsi ses premiers pas à l’extérieur. Prenant le pouls de la température, il soupira calmement. Semblait-il qu’il n’y avait aucun jour chaud à Kiri. Ceci était bien différent de ce à quoi il était habitué. Lui rappelant les forts vents de Joheki, il se contenta d’émettre un léger soupir alors qu’il venait de libérer un sceau d’un simple mudra.

Laissant par le fait même sa veste apparaître sur son manteau telle une armure, il l’ajusta de manière à s’assurer d’être bien couvert. Après tout, il était hors de question qu’il tombe malade en l’absence de Sazuka pour lui offrir un remède. Parlant de celle-ci, il devait avouer avoir une légère pensée pour elle. Il la savait forte et tenace. Pourtant, la situation Kumojin devait fort probablement grandement l’affecter. Or, chaque chose se faisait en son temps malheureusement…

Marchant ainsi paisiblement dans ce nouveau village, en dehors de Hi, il avait visité chacune des puissances de ce monde et Kiri n’en faisait pas exception… Après tout, pour comprendre une nation, il était important de la visiter, de la découvrir, de s’imprégner de sa culture et de la comprendre pour savoir comment coexister avec eux. Pour lui, c’était la moindre des choses, lui qui était un shinobi porté vers l’international, la découverte et la connaissance qu’offrait l’exploration...

Dès lors, il observait calmement l’architecture différente et les normes sociales invisibles que manifestaient les Kirijins. Appréciant le calme et la normalité qui définissait le rythme Kirijine, leur rythme était très différent de celui des Kumojins et Iwajins. Fonctionnant par intermittence, tout semblait par moment s’accélérer, comme si la nation était une eau dormante, apte à se manifester à tout moment afin de regagner son calme.

Ce même rythme fut suffisant pour le plonger dans de profondes pensées alors qu’il songeait aux prochaines étapes. Sa venue à Kiri risquait de marquer  un tournant pour le meilleur ou pour le pire au regard de tout ce qui allait suivre… Conquête de Kumo, Conquête de territoire, Conquête de Dieu, affrontement contre l’homme au chapeau, possiblement les autres nations puis contre ses propres valeurs, ses propres préceptes et ses propres fondations. Tant d’éléments avec lesquels jonglés pour des esprits n’étant fait que pour être concentré sur une seule chose à la fois… Pourtant, ils devaient considérer toutes les possibilités, toutes les opportunités, mais aussi toutes les failles, se laissant soit mener par la peur ou par le désir, deux vices ayant des envers à leurs préceptes de bases. La seule constante était que personne n’y échapperait… pas même lui.

Sur le coup, à travers toutes ses réflexions, le Meikyû ne se rendit compte de son emplacement que lorsqu’il entendit de violents bruits résonner. Ces mêmes sons avaient jadis garni son bagage shinobi. En effet, il entendait des projectiles, des coups, en bref une série de multiples signes d’affrontement. Tournant donc la tête, il s’approcha du grand dojo en plein air, se faisant petit pour ne pas trop attirer l’attention. De ce fait, il tenta d’être subtil, s’appuyant ainsi contre un arbre alors qu’il avait une vue sur l’intérieur pendant que de nombreux shinobis démontraient tout leur savoir-faire… En bref, une journée calme, paisible et tranquille s’annonçait...

un étranger au bout du monde

Le temps n’était pas à flâner, il était trop tôt dans la journée. Après avoir rendu service à la population via les travaux de reconstruction, ce qui commençait à devenir assez redondant au point que certains des gens dépêchés à cette tâche exclusive connaissent son visage, la Balance s’aventurait maintenant vers le Dojo à la recherche d’informations complémentaires sur le Cavalier de Feu et les sabreurs dans leur entièreté. L’Histoire de son pays était quelque chose de large et de parfois indescriptible, la tradition n’étant pas de noter les péchés de leurs pairs dans des ouvrages. Puis il n’aimait pas lire.

Approchant à pas de loup de la résidence principale des manieurs d’Esprits, une présence et une seule attira son attention. Un homme pourvu d’un long manteau et d’un espèce de bonnet étrange qu’il n’avait jamais vu auparavant.

Il ne connaissait pas tout le monde à Kirigakure no Satô alors il ne s’en formalisa pas mais il ne pouvait s’empêcher tout en avançant de lui jeter des regards en coin. Non pas qu’il était spécialement ridicule ou étrange ; simplement parce qu’il l’intriguait. En tenue presque civile, il observait. Était-il fort ? Avait-il une arcane secrète millénaire à lui apprendre ? Était-il l’amant secret d’un éminent dirigeant du pays ? Le fils illégitime de l’ancien Daimyô ? Autant de suppositions qu’il n’avait de neurones.

Finalement il opta pour la solution la plus simple quant à son problème et s’avança vers lui l’air aussi insouciant qu’il l’était, avant de s’incliner rapidement sans même dire un mot. Une fois relevé, il s’adressa à l’homme visiblement son aîné.

« Ohayô ! Vous êtes un Jônin ? C’est rare d’en croiser qui ne sont pas occupés, vous savez. » Pour une raison mystérieuse sur laquelle il ne pouvait mettre des mots, il venait de le vouvoyer sans même s’en rendre compte. Cela ne faisait qu’alimenter le feu de ses questions intérieures. Il n'avait pas de bandeau mais après tout, lui non plus ? « Vous venez vous entraîner ? » Il espérait un oui, à vrai dire. Un homme puissant était toujours une bonne cible pour Kyûseishu, qui avait tout à prouver.

Dur d’estimer ce qu’il désirait à son contact mais une intuition lui confirmait que se planter devant lui était sûrement la bonne chose à faire. Le visage lumineux et un sourire ornant ses lèvres, il planta ses yeux océans dans ceux de Raizen.

Observant calmement les différents individus échanger et participer à divers types d’entrainements, alors qu’il se croyait à l’abri de toute sollicitation, voilà qu’un curieux l’avait ciblé. Faisant appel à son intuition pour déterminer son nom, Raizen haussa un sourcil, se demandant par le fait même s’il avait la carrure d’un Jonin. Or, avec son long manteau et son chapeau, il était vrai qu’il ne ressemblait pas vraiment à un genin. À bien y repenser, son accoutrement avait bien changé depuis le temps, gagnant graduellement en maturité malgré lui…

-Jonin ? Oui, on peut dire que j’étais Jonin, mais depuis les choses ont bel et bien changé si on veut.

Ne mentant pas, il était vrai qu’avant de quitter Kumo, il venait tout juste d’atteindre le grade de Jonin. Depuis, de nombreuses choses avaient changé hélas…

-Sinon, je venais surtout observer si l’on veut. Il y a de cela bien longtemps que j’ai arrêté de m’entrainer malgré moi puisque je voyage de plus en plus. Par contre, c’est toujours agréable de regarder d’autres personnes s’exercer.

Souriant légèrement alors qu’il ne quittait pas son regard des gens s'entraînant, il posa finalement ses iris dorés sur le jeune homme. Ayant une carrure intéressante, il semblait beaucoup plus jeune que lui. Malgré tout, il était clair qu’il prenait soin de son corps.

-Et toi, tu venais t’entrainer, je suppose ? Si je prenais le temps de pousser ma chance un peu plus loin, je dirais même que tu venais spécialement dédier cet entraînement au combat corps à corps…

Ricanant légèrement, le Maître en Fuinjutsu et Taijutsu avait l’oeil pour reconnaître les combattants physiques. Après tout, la musculature d’une personne en disait généralement plus long sur son style de combat que ce qu’elle pouvait révéler à travers un échange. Prenant et adoptant la totalité des bonnes et mauvaises habitudes, le corps était le reflet total de la réalité constante qu’elle manifestait. Ainsi, il attendait de voir si son intuition était rouillée ou s’il était toujours cohérent après tout ce temps sans combat...

un étranger au bout du monde

L’homme sembla assez mystérieux pour qu’il affiche dès ses premiers dires une moue encore plus intriguée. Les choses avaient changées ? Quelles choses ? Kirigakure no Satô avait vécu des chamboulements mais elle était toujours restée fidèle à ses hommes alors il ne voyait pas bien en quoi cela pouvait impacter sur son grade hiérarchique. Plus l’étranger au bonnet répondait à ses questions et plus il en soulevait de nouvelles…

Quand il parla de voyage, le visage du blondinet s’éclaira de la lueur de la curiosité, ses yeux grands ouverts et sa bouche manquant de s’ouvrir. Il venait de trouver quelqu’un de bien plus intéressant qu’à l’accoutumée visiblement. « Sugoooi ! Vous avez beaucoup voyagé ? Si vous avez arrêté l'entraînement c’est que vous êtes déjà très fort, hein ? » Un maître dans un domaine ? Une élite du monde shinobi ? Il en avait déjà les yeux pleins d’étoile, à l’imaginer parcourir les mers seul contre tous. Mais pouvait-il gagner en duel singulier contre Saji-san ? L’idée d’un combat entre son chef hiérarchique et ce bonhomme lui parcourut l’esprit.

Quand il énonça sa prédiction, Kyûseishu eut l’air honnêtement étonné, encore plus qu’auparavant, comme s’il avait à faire à un sorcier marabout de Kaze no Kuni qui venait de lui prédire son avenir. Il était vraiment très intelligent aux yeux du garçon qui l’idôlatrait déjà pour les potentiels contes dont il pouvait lui faire part…

Ne se démontant pas, il entonna sur un ton sûr de lui. « Vos vêtements sont trop larges pour que je fasse de même, mince. » Un grand sourire ornant son faciès laiteux, il bluffait bonnement et simplement.

Une chose était néanmoins sûre. Dans sa carrière de Genin il avait croisé bon nombre de shinobi, plus ou moins puissant. Et cet individu semblait se démarquer d’une façon qu’il ne savait pas énoncer clairement en son for intérieur de la fange habituelle.

« Vous êtes calé en Taijutsu pour présager si bien ? En tout cas vous avez raison, je viens tous les jours depuis mon arrivée à Kiri, ou presque. Pour devenir plus fort. » Il continuait d’hocher la tête tout en débitant, comme pour confirmer ses propres dires, ses yeux océan toujours focalisés sur l’homme plus grand que lui.

Il brûlait de mille question mais Kyûseishu ne voulait pas faire fuir une si belle proie. Un homme somme toute banal qui semblait la caverne d’Ali Baba pour un gamin avide d’expériences comme lui.

Observant le jeune homme, bien qu’il semblait assez simple, il était assez perspicace, une qualité que le Meikyû appréciait déjà chez lui. Étant direct, franc et allant droit au but, celui-ci n’eut aucun mal à lui révéler ses objectifs, un peu comme il l’avait jadis fait lors de sa première rencontre dans un bar en compagnie de Shuuhei.

-Je me débrouille si on veut.

Tournant dès lors son regard vers celui-ci pour le regarder dans les yeux, il eut un mince sourire qui témoignait d’un brin de positivité qui ne pouvait faire de mal à personne.

-De quelle région es-tu originaire ? Sinon, c’est une bonne idée de s'entraîner pour devenir plus fort. Au final, tu finiras par en récolter les fruits, surtout en situation de combat réel durant lequel tous les éléments que tu auras appris sauront porter fruit.

Marquant une pause, on aurait presque dit que Raizen était un retraité du combat bien que ce n’était pas totalement faux. Après tout, sa vocation relativement diplomatique actuelle ne lui permettait pas forcément de se battre autant que dans ses années de prestige. Or, ce n’était pas pour autant qu’il ne s’entrainait plus. Simplement, il découvrait de nouveaux éléments comme la sensorialité qui représentaient une nouvelle manche à son arme et pas une nouvelle arme à son couteau.

-Ensuite, peu importe le niveau, l’entrainement reste et demeure toujours important, sinon on finit par être rouillé.

Ricanant légèrement, à bien y repenser, il devrait plus souvent s’écouter sachant que depuis le sommet, il ne s’était pas vraiment entrainé.

-D’ailleurs, pourquoi désires-tu devenir plus fort ?

N’ayant pas encore demandé son nom, il préférait en apprendre davantage sur l’individu afin de meubler la discussion alors qu’il observait patiemment les différents individus combattre.

un étranger au bout du monde

Il sentait bien qu’il avait à faire à quelqu’un de modeste, ce qui était l’apanage des véritables forts. Tous ceux qu’il avait rencontré tenaient le même discours. D’aucun dirait qu’il n’y avait pas de sommet pour un shinobi et qu’à force de gravir la montagne, on se rendait compte de la hauteur totale…

« Je viens du pays de l’Eau, j’y suis né et on m’y a élevé. Je n’ai jamais connu que celui-ci ! Et vous ? » Il écouta les dires de Raizen avec l’humilité due à son grade et à sa nature juvénile sans vraiment se sentir rabaissé. L’ordre des choses était ce qu’il était, il ne tenait qu’à lui-même de le changer. Il s’en sentait capable. Cela confirma ses pensées ; il se devait de combattre en y mettant des enjeux, sinon il ne progresserait jamais. Quitte à prendre des risques, quitte à se briser les os sur plus fort que lui.

« Vous avez raison. » Il s’inclina rapidement avec peu de déférence et beaucoup d’ardeur pour signifier son respect au sujet de cette vérité.

Content d’être en présence de quelqu’un qui se souciait d’un interlocuteur tel que lui, il redoubla d’application à se montrer clair et à employer un langage correct même si comme d’habitude, ce furent les premiers mots qui passèrent dans sa tête qui sortirent d’entre ses dents. « Pour protéger Kirigakure no Satô et participer à sa gloire. Pour la rendre plus Grande encore ! » Il avait bel et bien l’air simplet, si ce n’était pour sa détermination. Il s’était et avait répété ces mots tant de fois qu’il y croyait dur comme fer.


« Vous aussi vous voulez devenir plus fort pas vrai ? C’est quoi la raison ? » Il était certes un peu enfantin, parfois. Mais pas stupide au point de croire qu’on atteignait un certain niveau d’excellence sans au préalable s’être donné une raison. C’est ce qu’il avait choisi de croire ; que la motivation passait avant l’inné.

« Je m’appelle Raibura no Kyûseishu, mais c’est un peu long alors Kyûsei c’est mieux. » Il lui montra toutes ses dents tandis qu’il souriait, s’attendant à la réciproque et la dénomination de ce mystérieux Homme au Bonnet.