Plusieurs gros coups de poings frappèrent à la porte de notre protagoniste aux cheveux blanc. Il était encore tôt, la rosée matinale pouvait encore être reniflée même de l’intérieur. Moe était déjà debout bien entendu, elle avait depuis de longues années le sommeil extrêmement léger ainsi qu’une certaine inquiétude permanente qui n’arrangeait bien entendu rien de tout cela. En se réveillant, celle-ci se fit couler un bain tout en dégustant une tasse de thé avec un peu de gâteau pour faire le plein de force avant le début de la journée. Moe n’avait rien prévu de sa journée, elle n’avait pas d’équipe avec qui s’entraîner, elle n’avait aucune mission de prévue pour les jours à venir. Peut-être irait-elle faire un tour à la bibliothèque, continuer d’agir comme un rat de ce bâtiment, à fouiner entre les différentes allées à la recherche de le perle rare. Mais elle fut soudain tirée de ses rêvasseries par ces fameux coups de poings donnés assez violement sur la porte d’entrée de l’appartement. Ayant réalisé avoir renversé du thé, elle lâchait un sourire de dépit avant de se diriger vers la porte.

En ouvrant, elle vit un homme visiblement d’une vingtaine d’années. L’homme fut extrêmement surprit à la vue de la jeune femme et se mit à rougir avec une force étonnante. Pourquoi était-il en train de… Oh ! Moe se mit à rougir également quand elle vit qu’elle n’était pas forcément habillée de la tête aux pieds. Un simple tee-shirt et un bout de tissu couvrant ses parties intimes étaient les seuls vêtements qu’elle portait. Normal que le jeune homme se mit à bégayer et à bafouiller de la sorte. Rouge à son tour, elle prit rapidement le rouleau qu’il lui tendait avant de refermer la porte derrière lui. Le pauvre avait du être choqué, il ne devait certainement pas s’attendre à ça. Se sentant totalement idiote de ne pas avoir pensé à ça, Moe revint alors à la table, ramassait le liquide tiède tombé sur la surface avec une éponge avant de s’installer, tout en ouvrant le parchemin. Que cela pouvait-il être ? Et quel type d’importance cela pouvait-il avoir ? En ouvrant le dit parchemin dans un bruit de papier que l’on froisse qui était un ravissement pour les oreilles, Moe se mit à lire.

Visiblement, une jeune femme avait été trouvée vivante dans les filets d’un pêcheur de la brume hier soir. Vivante, mais terriblement souffrante, elle avait été amenée immédiatement à l’hôpital afin d’avoir accès aux premiers soins. A son réveil, elle fut prise d’une peur panique et fuyait absolument tout contact avec les autres. Moe lisait ces lignes en prenant une gorgée de son thé à chaque pause. La jeune femme aurait alors décidée de fuir et de quitter l’hopital sans prévenir personne. Moe était chargée avec une autre personne de la traquer pour la retrouver et de la rassurer. Elle n’était pas une cible de Kiri, mais bien une citoyenne sous état de choc, il fallait effectivement la retrouver avant qu’elle ne finisse pas se faire du mal ou pire, du mal à quelqu’un. C’était une mission de bas rang, C d’après ce que disait le parchemin, et Moe était donc en charge de la retrouver rapidement. Le parchemin précisait qu’il allait devoir travailler avec un autre membre du clan Yasei. Approchant son visage pour voir les petits caractères du nom ajouté à la main : Yasei Zoku. Un sourire illuminait son visage.

« Ah ! Zoku ! »

Zoku était déjà une connaissance de la jeune femme. Elle avait rencontrée le raton laveur au port de Naragasa il y avait peu. Celui-ci avait d’abord été craintif de Moe, mais finalement rassuré, il fut un baume pour le cœur perdu et solitaire de notre héroïne aux yeux orangés. Il avait été d’une grande aide pour répondre aux nombreuses questions qu’elle se posait quant à ses origines, ce que pouvait être son clan, ou même qui pouvait bien être son père. Certaines questions restèrent sans réponses, mais beaucoup en trouvèrent. Moe avait fortement apprécié la compagnie du mammifère et était pressée de le rejoindre au port une nouvelle fois. Pactant rapidement ses affaires, elle prit son attirail shinobis, s’occupait de ses cheveux en formant un chignon sur sa tête, tenu par une sorte de bandana blanc avant de quitter son domicile en direction du port.

Il fallut une dizaine de minutes seulement à la pécheresse pour arriver au niveau du port. Sans même y penser outre mesure, elle s’était rendue directement au niveau du ponton où ils s’étaient rencontrés pour la première fois. Visiblement en avance, Moe s’asseyait sur le rebord en pierre juste avant de ponton, laissant son sac dans son dos après en avoir sortit le parchemin. Elle le relisait attentivement pour voir si elle n’avait ratée aucune information importante qui pourrait la mettre sur la piste de cette jeune femme. Si, visiblement elle avait bien ratée quelque chose : la femme en question faisait partie du clan Umimori. Un air d’incompréhension s’affichait alors sur le visage de la jeune femme. « C’est quoi le clan Umimori ? » finit-elle par dire à haute voix, toujours la tête plongée sur le parchemin en attendant son raton préféré.

A peine revenu d’une mission que le village renvoyait déjà le polymorphe sur une autre. Un soupir d’exaspération s’éleva jusqu’au plafond de sa cabane où il était allongé. L’air frais s’engouffrait par les lattes mal alignées pour faire mouvoir l’onde de son pelage. Il n’était pas sensible à ces températures grâce à sa forme animale. Après quelques minutes à se convaincre de se lever, il se plia pour finir assis sur sa paillasse. Il n’était clairement pas le plus enjoué pour retourner dans une mission. La dernière l’avait particulièrement agacé, faute de son mauvais caractère. Quelqu’un d’objectif aurait vu la situation sous un autre angle mais le dénouement précédent avec les massacres de tortue l’avaient rendu particulièrement aigri.

Il en était tellement dégoûté qu’il n’avait même pas décacheté le parchemin qui lui avait été transmis. C’était toujours le même Chûnin acariâtre qui se présentait chez lui, l’œil mauvais et juge de l’endroit où il vivait. Zoku s’était promis de trouver un moyen de pisser dans une de ses bottes un de ses jours. Un projet futur qui devrait attendre. Il lui avait précisé que c’était urgent et que le rendez-vous avec sa coéquipière était déjà fixée. Fallait en prime qu’il se retrouve avec une gonzesse. Le soupir d’exaspération n’était plus assez fort pour témoigner du degré de lassitude qui le traversait. Il se saisit enfin du parchemin pour en lire le contenu et l’exaspération se calma.

Non seulement l’intitulé de la mission lui parlait mais celle qui l’accompagnerait aussi. la fameuse Moe qu’il avait croisé il y a quelques jours. Ils seraient envoyés sur la recherche d’une femme provenant du clan Umimori. Une famille d’hommes-poissons que le Yasei connaissait. Il savait à peu près où les retrouver, aussi il pourrait peut-être gagner plus vite la confiance de celle qui s’était échappée, sûrement apeurée par les Kirijins. Il ne pouvait pas lui en vouloir. Le mécontentement remonta aussitôt à cette pensée, crocs dehors et babines retroussées. Il fut dehors en un rien de temps.

Arrivé au point de rendez-vous qui était le même qu’à leur rencontre, Zoku n’eut aucun mal à retrouver sa partenaire de mission. Déjà sur place, il s’approcha d’elle sans qu’elle l’ait remarqué. Elle parlait toute seule, s’interrogeant sur le clan. Toujours curieuse et innocente apparemment. Le trentenaire continua de s’avancer pour finir à son niveau.

- Un clan d’hommes-poissons. Sûrement des cousins à nous du trois cent soixante sixième degré j’imagine.

Il passa une main sur son béret pour saluer la kunoichi qui savait maintenant qu’il était là. Leur ordre de mission était clair sur la démarche à suivre et ils ne devraient pas tarder s’ils comptaient retrouver la disparue.

- Bon on va aller voir les pêcheurs histoire d’entendre ce qu’ils ont à dire.

Il avait plus ou moins pris la direction de l’équipe pour l’instant. De toute façon il n’y avait pas de gradés parmi eux. Par conséquent il n’y aurait que collaboration et non subordination. Ce qui lui convenait parfaitement au vu de sa dernière expérience en la matière. Ils prirent la direction des quais où les marins déchargeaient leur prise de la matinée. A quelques pas de leur position, Zoku fut pris d’un affreux doute. Il tourna la tête vers la polymorphe pour s’assurer d’une chose :

- T’as pas eu de mésaventures avec eux hein ?! Genre ils t’ont pêché par mégarde pour faire des takoyakis ?

« Aaaaaaah ! »

Ce cri provenait de l’âme de notre héroïne. Alors qu’elle était assisse sur le rebord en pierre, la tête plongée vers le bas, lisant caractère par caractère les mots écrits sur le parchemin de la mission afin de ne rien rater, elle n’avait pas entendu l’homme qui s’approchait. Moe était un eu maladroite, mais pour le coup, elle était extrêmement concentrée sur la mission qui était la sienne. Après tout, c’était la toute première mission qui lui avait été confiée par les forces de la brume. Et c’était une mission de rang C donc pas des moindres. Loin d’être vraiment très dangereux, mais l’affrontement était toutefois possible. Non pas avec des shinobis, mais au moins avec des villageois, des truands, des bandits, des rebelles, etc. Moe faisait très certainement un excès de zèle, comme si un message caché pouvait soudainement apparaître entre les lignes du parchemin. Mais l’homme qui était venu l’extraire de ses pensées l’avait surprise et donc lui avait arraché un cri de surprise.

La main sur le cœur et le souffle haletant, Moe dévisageait alors son interlocuteur inattendu. Inattendu pas tant que ça, car il s’agissait de l’homme qu’elle avait attendu pendant de longues minutes, son binôme de mission et membre de son clan : Zoku. Effectivement, elle allait effectuer sa mission C avec lui. C’était d’ailleurs de ça dont il avait parlé en faisait peur à Moe. Il avait répondu à haute voix à une question qu’elle avait posée sans réellement attendre de réponse. Le clan Umimori était des polymorphes hommes-poissons, capables de se changer au plaisir en ces créatures des mers. C’était donc des parents de près ou de loin, des deux métamorphes qui avaient été assignés à cette mission. Moe pensait tout de même qu’elle était bien plus proche d’eux que Zoku pouvait l’être, car elle venait de l’océan comme les poissons alors que l’homme au béret lui était un mammifère rayé. Cette pensée fut coupée par Zoku qui saluait la jeune femme avec son béret alors que celle-ci lui répondit d’un simple sourire. Naturellement, il prit la tête des opérations, ce à quoi Moe ne s’opposait pas, c’était une suiveuse, pas un leadeuse.

« Très bien ! »

Confirmait-elle alors qu’ils se dirigeaient tous les deux en direction du village de pêcheur. La jeune femme avait été repêchée dans un sal état par les filets d’un homme qui travaillait comme à son habitude. C’était d’après Zoku le meilleur moyen d’avoir une première source d’informations fiables. Et ce n’était pas une mauvaise idée. Si Moe avait été toute seule sur cette mission, elle aurait très certainement fonctionnée de la même manière. Il fallait d’abord trouver l’homme, le pêcheur qui avait trouvé cette créature dans ses filets. Les deux protagonistes de cette étrange chasse se devaient de faire vite, car chaque minute qui passait pouvait devenir dangereux pour l’objectif, pour la femme ou pour ceux qu’elle pourrait agresser. Elle était en état de choc, et se sentait très certainement en danger. L’urgence était pour le moment la clé de la réussite.

« Des takoyakis ? Quoi ? Non, mais c’est horrible »

Dit-elle en réaction aux paroles de son compagnon de mission. Celui-ci en se retournant furtivement avait demandé si elle n’avait pas eu des problèmes avec ce clan, sans quoi ils risquaient de la transformer en takoyakis qui était un plat local à base de poulpe. Cette idée de elle, tailladée et mise en morceaux par des hommes enragés et visiblement affamés était absolument ignoble et pendant un instant, l’imagination fertile de Moe lui jouait des tours. Tout cela était accentué par le fait qu’elle ne savait pas vraiment si Zoku plaisantait ou s’il était sérieux en disant ça. Pourraient-ils faire ça ? Elle secouait la tête. Non ! C’était une mission de rang C, rien d’aussi horrible ne pouvait arriver. Elle réfutait cette question d’un simple signe de tête accompagnée d’une moue insatisfaite avant de continuer sa route en direction du village des pêcheurs.

Quelques dizaines de minutes plus tard, les deux compères arrivèrent sans problème au village de pêcheur. L’activité était la même que dans le village d’où elle était originaire. L’odeur également. Ca sentait de poisson, et certains marchands étaient déjà là, voulant doubler les concurrents en venant se réapprovisionner directement chez le pêcheur. Il y avait aussi comme dans chaque village de pêcheur un comptoir car des particuliers venaient également directement chercher du poisson dans ces villages. Un mouvement qui mettait du baume dans le cœur de Moe, qui se remémorait pas mal de souvenirs. Mais il fallait se concentrer sur la mission. La dame blanche se permit de demander à une femme du village où se trouvait la cabane de l’homme qui avait repêché la jeune femme. Elle tendit le bras en montrant une cabane précise. Ils se dirigèrent forcément en cette direction.

« Je vous laisse lui parler.. »

Même si la polymorphe s’était montrée ouverte à la plaisanterie lors de leur première rencontre, elle ne semblait pas encore habituée aux propos du raton. En même temps il fallait être bien accrochée et, comme il lui avait dit lui-même la première, il valait mieux en tenir une sacrée couche. La sauvage Imekanu en avait fait les frais avant de réussir à mater le sale caractère du mammifère masqué. Même si sur l’instant, le raton n’avait pas pensé à mal il avait juste voulu s’assurer qu’il n’y avait pas eu de malentendu entre Octofille et les pêcheurs. S’ils avaient attrapé une Umimori, la Yasei aurait pu également se faire avoir. A sa réaction, il semblerait que non et c’était mieux ainsi.

Arrivés au quartier des pêcheurs, ils eurent rapidement contact avec une femme qui leur indiqua la maison de celui qui avait malencontreusement pêché le mauvais poisson. Alors qu’ils approchaient de l’habitation, Moe préféra prévenir d’avance son coéquipier qu’elle le laisserait parler. Difficile de dire que c’était une bonne idée. Très mauvaise même mais elle s’en rendrait compte bien assez vite. Le meilleur moyen d’affronter sa timidité était de laisser Yasei Zoku s’occuper de la partie diplomatique. Il donna quelques coups à la porte pour laisser entrevoir un jeune gaillard tout en chair et en muscles. Il rendait deux tête au polymorphe, ce qui ne voulait pas forcément dire que ce dernier mettrait des gants. Plus ils sont gros, plus ils sont bêtes.

- Il paraît que c’est vous qui avez confondu une femme-poisson avec un thon. Vous pourriez nous en dire plus, ordonna Zoku sans avoir pris la peine de mettre des formules de politesse.

Un peu surpris par un tel aplomb, le colosse ne s’offusqua pas pour si peu. Il devait être habitué aux têtes brûlées qui tentaient de l’écraser par la voix pour compenser leur faible constitution. Comme il se savait capable de les écraser rien qu’avec un pouce, il avait arrêté de s’énerver pour si peu. Le Genin n’en était qu’un de plus parmi une longue liste. Sereinement, il croisa les bras, qui devaient bien dépasser le torse du polymorphe en terme de volume, pour prendre le temps de réfléchir. Zoku se gaussa intérieurement. Comme il le disait : gros et bête.

- Je me souviens qu’elle n’était pas si « mélangée quand je l’ai trouvé. On aurait vraiment dit un poisson mais très gros ! Quand j’ai remonté les filets c’est là que j’ai vu mon erreur. Elle était écorchée de partout mais c’était bizarre. C’est pas le genre de blessures que peuvent causer un filet, même sur les poissons normaux.

Le raton aurait aimé ajouter quelque chose de cinglant pour continuer sur la lancée de la provocation mais il se retrouva hébété face au discours concis et précis de leur témoin. Il ne pourrait pas leur en apprendre plus. Il s’apprêtait à prendre congé sans même dire au revoir lorsqu’une dernière question lui vint à l’esprit.

- Et vous l’avez pêchée où exactement ?

- Oh c’était pas loin d’ici. Je relevais mes derniers filets avant de rentrer au port.

Cette fois il y avait un élément intéressant qui perturbait la réflexion du Yasei. Ils étaient loin du territoire habituel Umimori. Pourquoi se serait-elle retrouvée là ? Leur village était à l’opposé d’ici. Derrière ce bête accident se cachait quelque chose d’étrange qu’il faudrait élucider en même temps. Toujours impoli, et trop aspiré dans ses pensées, Zoku s’en alla sans accorder la moindre politesse à leur aimable hôte. Il se tenait le bouc d’un air songeur. Il était trop tôt pour tirer des conclusions de toute façon. Il verrait à l’hôpital, deuxième destination où les attendaient les soignants. En prenant la route néanmoins, il partagea son ressentiment avec sa camarade.

- C’est bizarre par contre qu’elle ait été retrouvé dans le coin. Le clan Umimori s’est établi de l’autre côté, à des kilomètres d’ici. Ça fait loin pour une simple balade en mer, même pour un membre du peuple poisson. En tout cas pour l’hosto je te laisse prendre la parole cette fois-ci !

Les deux héros de cette histoire se plantèrent devant la maison/cabane de l’homme qui avait trouvé le corps endolori de la jeune femme du clan des hommes-poissons. Comme elle l’avait demandé à Zoku, celui-ci prit la direction des opérations. Il frappait plusieurs fois avec des coups sourds et nonchalants avant que la porte ne s’ouvre. Un géant ouvrait la porte. Il faisait plusieurs têtes de plus que Zoku, qui lui déjà rendait plus d’une tête à Moe, autant vous dire à quel point elle se sentait petit à l’instant présent. Sans attendre une seule seconde, le raton prit alors la parole pour lui demander si c’était bien lui qui avait « confondu une femme-poisson avec un thon » et en lui demandant plus d’informations sur le sujet. Moe tournait lentement la tête et le regard en direction de son homologue. Celui-ci s’exprimait avec un tel dédain que cela la choquait. Pas assez pour engendrer des sentiments de mépris envers sa façon de faire, mais elle n’avait pas été elevée comme ça, et ce n’était pas dans son caractère non plus. Mais après tout, cela ne voulait pas forcement dire que c’était lui qui était dans le feux en ce comportant ainsi.

Ymir le géant de la mythologie nordique devait pâlir de jalousie devant la taille de ce colosse. C’était décidé, qu’importe son nom, désormais, ce pêcheur s’appellerait Ymir. Bien que les dires du polymorphe furent bien trop directs au goût de Moe, le géant lui ne s’en offusquait pas le moins du monde et se mit à répondre tranquillement au duo de shinobis qui se trouvaient devant lui. Quand il l’a pêché, la jeune femme était visiblement sous sa forme animale et donc ne vit pas immédiatement la différence. Mais finalement, il constata avec surprise que sa taille était bien supérieur à tout ce qui pouvait exister comme « pur » poisson dans ce monde et donc que c’était une membre de la famille Umimori. Vu sa taille, il avait du la transporter directement dans les bras, cela ne lui aurait posé aucun problème. Il aurait même très certainement pu la lancer comme un javelot jusqu’aux portes de l’hôpital. Cette idée assez marrante fit sourire intérieurement la Yasei qui tint un air sérieux lorsqu’Ymir s’exprimait. Il précisait également qu’elle avait beaucoup de marques sur le corps, provenant d’autre chose qu’un filet, car un filet de pêcheur ne pouvait pas provoquer ce genre de blessures. Effectivement, en tant que femme d’expérience dans le domaine, les filets pouvaient étrangler les poissons, leur arracher les écailles, parfois les couper en deux pour les plus faibles, mais c’était rare. Des blessures de tout autre type ne seraient pas la cause de ces filets. Surtout que généralement, les pêcheurs faisaient attention à bien traiter les poissons pour garder leur fraicheur.

Après une dernière question quant à la localisation exacte de l’endroit de la pêche, les deux compères filèrent sans un mot avant que Zoku ne partage ses inquiétudes. Il précisait qu’elle se trouvait vraiment loin de son village et que cela faisait loin pour une balade en mer. Moe pendant ce temps et en prenant le direction de l’hôpital, se rappelait alors soudainement du visage rouge de haine de l’homme qui l’avait agressée alors qu’elle s’entrainaient avec la doyenne du village. Celui-ci avait viré au rouge lorsqu’il avait vu les pouvoirs de Moe, et à l’entendre, il avait une haine viscérale non envers Moe, bien qu’accentuée à cause de Pô, mais surtout car elle était polymorphe. Si c’était ça le fond du problème ? S’arrêtant en chemin, elle se tournait vers Zoku, car le plus naturellement du monde et selon les propos de celui-ci, elle prendrait la tête pour l’hôpital.

« Les blessures dont parle le pêcheur me dérangent. Pourquoi si loin de son village ? Et pourquoi de telles blessures ? Le parchemin de mission parlait d’un état lamentable. Et pourquoi aurait-elle besoin d’une escorte pour rentrer chez elle ? Penses-tu que cela pourrait être de la chasse aux polymorphes ? »

Demandait-elle avant de reprendre le chemin de l’hôpital. Quelques dizaines de minutes plus tard, ils étaient tous les deux dans la chambre de la jeune femme, laissée en l’état pour que les shinobis puissent mener une enquête. Les draps étaient encore défaits, le lit de travers. L’assiette de nourriture qu’ils avaient apportés était totalement intacte, cependant, le grand vase d’eau était vide. Un pot de fleur se trouvait également à côté, les fleurs par terre, et le vase également vide. Elle devait avoir tout bu, elle était déshydratée. L’infirmière en charge de la jeune femme vint à leur rencontre. Après un bref bonjour d’un simple signe de tête, Moe prit la parole le plus sérieusement du monde. Elle était très concentrée.

« Dans quel état était-elle en arrivant ? Le pêcheur que nous avons vu nous a expliqué qu’il y avait des blessures sur son corps, qu’elles étaient-elles ? ». Dit-elle avant que l’infirmière ne prenne la parole. D’après la vieille dame, son état était effectivement catastrophique. Elle avait de nombreuse lacération sur le corps, avec des marques de brulures en formes rectangulaires,. Elle avait également des hématomes sur les jambes et les bras, des côtés brisés et un manque de fer dans le sang. En écoutant le rapport de la dame en blouse blanche, Moe fixait attentivement le sol, puis elle finit par se diriger vers le vase de fleur vide. Elle l’attrapait , vidait les fleurs restantes avant de le secouer sur le sol, demandant silencieusement pourquoi il était vide.

« Je ne comprend pas, nous l’avons rempli hier soir et ce matin avant le départ de l’Umimori. » Finit-elle par lancer. Moe remerciai alors l’infirmière qui quitta la pièce. Moe se tournait vers Zoku. « Elle a été torturée. Les brûlures en forme rectangulaire sont les marques des filets qui sont coutumes chez les poissons. Avec la peau blanche de la jeune femme cela ne devait s’en voir que plus encore. Cependant les hématomes, les coupures et le manque flagrant de fer cependant n’ont rien à voir avec le filet de pêche. Elle a du boire le bros d’eau ainsi que deux fois le vase de fleur. Elle était hautement déshydratée. Je suis certaine qu’elle était retenue captive. »

Moe mettait le doigt sur un élément intéressant auquel le raton n’avait pas accordé d’importance sur le coup. Les blessures incongrues. Le pêcheur connaissait parfaitement les méfaits des filets sur la peau des animaux et il avait à juste titre remarqué certaines traces inhabituelles. Octofille s’en souciait et elle avait bien raison. Tout comme cette histoire d’escorte. La Yasei en vint même à supputer l’existence d’une chasse aux polymorphes. Zoku ne serait pas celui qui lui répliquerait que c’était une folie. Il avait assisté à cette dernière et il connaissait la nature malsaine de l’Homme. C’était une piste qu’il ne fallait pas exclure et une possible retombée de leur enquête. Ce qui ne faisait que renforcer son instant de réflexion. Au moins ils étaient tous deux sur la même longueur d’ondes et pleinement impliqué dans l’affaire. Raison pour laquelle on avait dû les choisir.

- C’est encore un peu tôt pour tirer des conclusions mais ça m’étonnerait pas qu’il y ait ce genre de saloperies. Pour les blessures peut-être que les toubibs pourront nous éclairer mais jusque-là, on ferait mieux de pas se montrer trop hâtif dans nos conclusions.

Ils venaient à peine de commencer. S’arrêter sur des idées reçues dès maintenant pourrait leur porter préjudice pour la suite. Le caractère de Zoku pouvait laisser penser à un parfait imbécile incapable du moindre bon sens. Pourtant dès que le clan ou que la cause animale se retrouvaient dans la balance, il adoptait une certaine maturité dans sa manière de penser qui n’était pas la même qu’au quotidien. On pouvait la comparer à ses réflexions avant un vol, marques d’une maestria criminelle.

Leur arrivée à l’hôpital débuta par la visite de la chambre déserte. Une infirmière les y avait conduits en précisant que sa collègue qui avait géré le cas se présenterait. Ils purent observer un peu la chambrée, constater certains éléments inhabituels, comme les fleurs au sol. Puis la membre du personnel soignant vint à leur rencontre. Comme convenu, ce fut Moe qui mena l’interrogatoire. Zoku resta silencieux mais attentif, aussi bien aux dires qu’aux détails. Que ce soit dans la chambre ou sur le visage de l’infirmière. Il n’accordait aucune confiance à la race humaine et ce cas ne lui inspirait pas un bête accident. Une fois les questions posées, le duo polymorphe se retrouva isolé dans la chambre. Octofille venait d’un village de pêcheurs, aussi pouvait-elle reconnaître les marques des filets. Mais il y avait bien des séquelles anormales. Ecoutant les conclusions de sa partenaire de mission, Zoku opina du chef.

- Ouais c’est bien ce que je craignais suite aux dires du pêcheur. Ce qui nous pose un autre problème. Si elle a été torturée, elle était en effet captive. Si elle l’a été et qu’elle a atterri là, c’est qu’elle s’est enfui. Et dans ce cas…

Le polymorphe avait entamé une fouille plus approfondie de la pièce. Il recherchait un élément bien particulier qu’il espérait trouver afin de poursuivre leur enquête. Ici s’arrêtait la piste des autorités et c’était là que le véritable travail commençait pour eux. Il furetait de ci de là, sondant le bas des rares meubles de la pièce jusqu’à trouver l’objet de sa quête. Il passa une main sous le lit pour en tirer un bout de bandage légèrement rosé par de l’hémoglobine, à n’en point douter.

- …nous ne sommes pas les seuls à la chercher, termina-t-il de conclure avec un air fataliste.

Son nez devint truffe et vint parcourir la pièce de tissu de plusieurs reniflements. Ce qu’il espérait y trouver vint s’imprimer dans sa mémoire olfactive. Il garda le bandage dans sa poche au cas où mais ils purent sortir. Il avait une piste et le duo pouvait continuer. Ils quittèrent le village, en se fiant à ce que le raton pouvait sentir. Lorsqu’ils furent plus loin, il se mit à l’aise en adoptant sa forme totale de raton-laveur. Truffe plaquée au sol, il ne lâchait pas la fragrance iodée qu’il avait capté sur ce tissu ensanglanté. Il suivait l’odeur jusqu’à les amener vers des bois. Curieux endroit pour une femme-poisson. Mais ce comportement confirmait ses doutes.

- Elle se cache. Ouvre l’œil Poulpy. On va pas être les seuls à ses trousses.

Puis le duo s’aventura plus profondément parmi les arbres centenaires.

Au départ, le Yasei était sur la réserve quant aux dires de la jeune femme. En effet, Moe suspectait quelque chose de plus viscérale dans cette affaire, quelque chose de plus haineux, de plus morbide, de plus infâme qu’une simple femme-poisson s’étant aventurée dans une eau trop profonde. Elle suspectait une chasse au polymorphe. Zoku quant à lui essayait de rester calme devant cette situation et en vint à demander à Moe de ne pas faire de conclusions hâtives. Il fallait encore passer à l’hôpital pour avoir de plus amples confirmations. Mais bien entendu, une fois devant l’infirmière, dans cette chambre vide, les dires de la jeune femme se confirmèrent. L’homologue de notre pècheresse lui semblait déjà avoir atteint cette conclusion de par les dires du pêcheur, ce qui, dans le même temps, avait eu pour effet d’impressionner Moe dont la réflexion fut plus longue à venir. L’homme avait l’habitude de ce genre de traquenard apparemment, ce qui n’était pas forcément une bonne chose. Moe avait un regard inquiet, elle n’arrivait pas à cacher ses émotions, son faciès ou sa voix changeait régulièrement, sauf quand elle faisait attention bien évidemment.

Plus sérieux cette fois-ci, Zoku se mit à chercher dans les moindres recoins un indice qui pouvait éventuellement diriger les deux héros de cette histoire en direction de la jeune femme-poisson, ou du moins sur une piste plausible. Une chose dans l’attitude de son compère Yasei avait changée d’un instant à l’autre. Il semblait bien plus impliqué et bien moins nonchalant qu’il ne l’était quelques minutes auparavant. Ce qui eut un effet plus que positif sur Moe, mais qui n’était pas sans aggraver son inquiétude quant à la situation dans laquelle se trouvait la cible. Grâce à son chakra et à son contrôle de ses pouvoirs polymorphes, l’homme au béret avait finit par changer son nez en truffe afin de pouvoir profiter de l’odorat légendaire des ratons laveurs. Il cherchait toujours une piste, jusqu'à se concentrer sur un bout de tissu où l’odeur de la femme semblait s’être accroché. Ils filèrent alors hors de l’hôpital. Moe était sur les talons de son homologue, tout en faisant de plus en plus attention à ce qui l’entourait. Si c’était bien une chasse, et comme venait de le confirmer Zoku, ils ne seraient pas les seuls à chercher la cible. Il fallait s’attendre à une confrontation donc, sauf s’ils étaient plus rapides, ou beaucoup plus lents.

« S’ils chassent les polymorphes, nous ne sommes pas à l’abri qu’ils s’en prennent également à nous. » Susurrait alors Moe en direction de son homologue, assez fort pour qu’il puisse l’entendre malgré la distance et la concentration de Zoku. Truffe toujours sur le sol, Zoku finit par s’adresser à Moe en lui demandant d’ouvrir l’œil, car ils se rapprochaient de la cible. Tous ses sens en alerte, la pècheresse continuait de suivre le raton, sur ses talons, à l’affut de la moindre trace qui pourrait indiquer la voie. Et quelque chose effectivement attirait l’attention de la jeune femme. Des bruits de déplacements rapides, certains bruits au loin pouvaient paraître comme métalliques. Des armes ? A cette idée, Moe ouvrit grands les yeux, croisant le regard de son homologue qui avait du, de par sa vitesse d’esprit, arriver à la même conclusion qu’elle. Sans un mot, les deux Yasei s’enfoncèrent dans la forêt à grande vitesse, en essayant de ne pas faire trop de bruit pour ne pas attirer l’attention sur eux.

Une poignée de minute plus tard, ils arrivèrent finalement très près des bruits métalliques qui furent effectivement ceux de combat, de lames s’entrechoquant. Collée derrière un arbre devant la scène, Moe devait prendre de la hauteur. Concentrant son chakra dans la totalité de son corps, elle finit par se transformer totalement en une grande pieuvre blanche dont les huit tentacules pouvaient totalement entourés les arbres. La pieuvre était bien plus grande que ses homologues de l’océan mais plus petite encore qu’un humain, non pas de la taille de ces puissants et géants kuchiyoses que l’on pouvait voir dans les pactes d’invocation. Sans plus attendre, concentrant de nouveau son chakra, la pieuvre blanche disparut soudainement, ne laissant qu’un simple bruit de ventouse derrière elle. En réalité, Moe n’avait pas disparut, mais elle changeait sa couleur de peau en fonction du décors, ce qui faisait qu’à l’œil nu, personne ne pouvait la distinguer, sauf de près, avec les reliefs. En un clin d’œil, elle se trouvait sur une branche en hauteur. Zoku et Moe étaient arrivés à une sorte de ravin, pas très profond, de la taille de deux hommes à peu près. Dans ce ravin se trouvaient plusieurs personnes, dont une qui faisait face aux autres, armé d’un simple kunai, le corps ensanglanté, qui titubait et qui laissait s’échapper des râles de douleurs. Cette femme qui faisait face, devait être la cible, la Umimori que les deux Yasei recherchaient.

Que fallait-il faire ? Attaquer de front ? Les disperser ? En tant que chef d’équipe, Zoku agirait certainement le premier. Moe elle s’adapterait. Mais une chose était sure : la jeune femme n’en avait plus pour très longtemps…

La traque pouvait commencer. Jamais Zoku ne s’était retrouvé dans cette configuration-là. Il était plus un adepte du camouflage en général. Mais les circonstances l’obligeaient à prendre la place du chasseur. Même si le terme restait péjoratif car il n’y avait là aucune idée de proie. C’était simplement la recherche d’une innocente avant que des gens réellement mal intentionnés ne mettent la main dessus. Il craignait d’arriver trop tard aussi ne perdait-il pas de temps. Il se comportait comme un vrai limier, il ne levait même pas les yeux pour garder sa truffe bien au ras du sol. Ses oreilles lui servaient de repères pour s’assurer qu’ils n’étaient pas suivis ou encerclés. C’est là qu’il perçut le bruit timide.

D’abord indistinct puis de plus en plus précis. Rien de très rassurant d’ailleurs. Un son métallique. Comme deux fers qui s’entrechoquaient. Un combat avait lieu non loin. Ils étaient arrivés trop tard. Certains qu’il s’agissait là de la raison de leur venue, Zoku n’eut plus besoin de se fier à son flair, les oreilles prenant le relais. Ils parvinrent à l’orée du bois où se dessinait une anfractuosité dans le terrain. A l’intérieur, un groupe armé face à une silhouette solitaire. Mal en point mais toujours debout et armé, leur cible faisait face à ses ravisseurs.

Le sang bouillonnant, Zoku fit volte-face pour s’adresser à Moe. Elle n’était plus là. Du moins visuellement car il percevait toujours sa présence. Son ouïe capta un bruit très discret mais reconnaissable. Celui d’une ventouse. Le camouflage faisait donc partie des attributions d’Octofille. Intéressant. Elle avait dû se poster quelque part, prête à se lancer à l’assaut quand il donnerait le signal. Il observa la situation attentivement. Il comptait moins d’une dizaine de gus armés. De gros courageux pour s’en prendre à une femme blessée qui n’évoluait pas dans son environnement habituel. S’ils avaient dû la chercher dans l’eau ils auraient sûrement rameuté une armada toute entière. L’Umimori semblait les impressionner un minimum puisqu’ils préservaient une distance entre eux. Le ravin continuait derrière elle vers on ne sait où. Le duo polymorphe avait l’avantage de se trouver derrière eux.

Sa stratégie en place, il commença à effectuer des mudras. Conscient que sa partenaire était non loin, il chuchota :

- Tiens-toi prête je tente de les éloigner un peu plus d’elle. Occupe-toi de ceux qui sortent du rang.

Puis le mammifère masqué disparut sous terre. Il creusait à vive allure en direction du groupe. Il avait bien mémorisé leur position et c’était sa destination souterraine. Lorsqu’il fut arrivé, il décrivit un cercle qui devait comprendre le groupe entier. Puis il remonta progressivement pour que la galerie se trouve au plus proche de la surface. Des petits craquements se faisaient entendre et Zoku fila avant que son ouvrage ne s’écroule sur lui-même, entraînant dans sa chute les malfrats. Le sol fut remué et les parois du ravin s’effondrèrent sur le groupe. Heureusement pour eux, ils ne risquaient aucune blessure mortelle. Sauf si le raton en décidait autrement. Heureusement encore pour eux, il avait plus urgent à faire.

Lorsqu’il refit surface, il vit ses opposants en train de se démener pour sortir les pieds du tas de gravats. L’air hébété de l’Umimori qui découvrit l’animal souterrain fit perdre quelques secondes de réaction à Zoku. Un des brigands n’avait pas été pris au piège et il se jetait sur lui. Le Yasei dû redoubler d’agilité et de coups pour s’en débarrasser. Moe s’était jointe à la partie comme prévu. Il pouvait lui faire confiance vu ses capacités. Il voulut donc se retourner pour interpeller la pauvre femme. Mais elle avait disparue. Pestant dans ses moustaches, il usa de nouveau de son flair pour la retrouver. Un des arriérés le coursait et il dû s’interrompre pour l’assommer lui aussi. Encore de précieuses minutes perdues.

A force d’en perdre, il retrouva la piste de la femme poisson qui s’évanouissait sur le sable fin d’une petite plage perdue dans une crique. Le ressac des vagues venait lui souffler les échos de son échec. Il enragea à l’idée d’avoir perdu sa seule piste valable. Ils se retrouvaient à la case départ. A moins que Moe ne fasse usage de son don. Il rebroussa légèrement chemin pour s’assurer qu’elle n’était pas en trop grande difficulté et lui expliquer la situation.

Prête à bondir, la jeune femme aux cheveux aussi blancs que la peau attendait patiemment le signal de son homologue Yasei avant d’intervenir. Celui-ci, conscient que Moe attendait tapis dans l’ombre, s’était précipité sur ses adversaires. Non pas frontalement, mais en passant par le sol, surprenant Moe par la même occasion. Il était vrai que le raton laveur était accoutumé à la terre, moins que la taupe, mais cela ressemblait à la pieuvre avec l’eau. Finalement, le sol s’effondrait, le ravin entier fut affecté. La grande majorité des hommes furent bloqués par des gravats qui s’effondraient de chaque côté du ravin. Cependant, cela fit un bruit monstre et avait attiré sans qu’ils ne puissent les remarquer, des hommes qui progressaient hors du ravin, dont deux qui avaient été très proche de Moe. Elle aurait du les voir avant, mais s’en vouloir n’était pas à l’ordre du moment. Il fallait se battre, Zoku avait commencé le combat, il fallait donc partir à l’assaut. Il comptait sur elle.

Rassemblant tout son courage, elle sautait sur le deux hommes hors du ravin, juste au bord. Avec ses tentacules elle accrochait les deux hommes eu niveau du cou avant de les emporter avec elle dans le ravin, lançant alors ses proies sur deux autres hommes qui tentèrent avec difficulté de rattraper leurs collègues. Ayant reprit une apparence presque humaine lors du saut, seules six tentacules étaient sorties, les autres étant ses deux jambes. Ainsi, elle vint directement au combat avec différents hommes, se rendant compte par la même occasion qu’elle pouvait combattre plusieurs ennemis en même temps grâce à ses innombrables membres. Collant sa ventouse sur les yeux d’un ennemi, et le trimballait partout en s’en servant également comme arme contre les armes de ses adversaires. Ils finirent par sortir des armes blanches, décidés à tuer, Moe n’avait pas d’autres choix que de répliquer. Utilisant son bouclier humain pour parer les attaques au couteau, celui-ci finit vraisemblablement par périr sous les coups de ses alliés.

De son côté, Zoku lui poursuivait la jeune femme qui s’était enfuie, visiblement poursuivie par des ennemis. Le raton lui-même était poursuivi par un homme bien trop loin pour que Moe ne puisse l’attraper. Concentrant son chakra, après quelques mudras céphalopodiens, la Yasei prit une grande inspiration avant de cracher une grande quantité d’eau. Celle-ci sortie alors de sa bouche en se dirigeant vers sa cible, prit une forme de grande boule d’eau qui vint s’écraser sur son adversaire, ayant remarqué l’attaque que trop tard pour faire quoi que ce soit. L’homme fut propulsé en direction d’une paroi du ravin, qui s’assomma, incapable de combattre outre-mesure. Quelques minutes plus tard, tous les adversaires furent morts, vaincus, ou en fuite. Moe restait figée quelques secondes quand elle vit à ses pieds l’homme ayant servi de bouclier. Les genoux posés sur le sol, elle tremblait. C’était la première vie qu’elle enlevait, indirectement certes, mais cela n’en restait pas affreux. Elle s’en voulait énormément, mais son esprit combattait cette pensée : ils étaient mauvais, et la mission n’était pas terminée.

Moe se redressait rapidement lorsqu’elle entendit son coéquipier revenir en courant comme un dératé. Quelque chose s’était mal passée. Les deux se rejoignirent et le raton forçait Moe à le suivre rapidement. Expliquant la situation, Zoku lui avouait que la cible s’était échappée dans l’océan. Ne prononçant pas un mot, Moe se dirigeait alors avec hâte dans l’eau avant d’effectuer un grand bond en l’air. Changeant son corps en chakra, elle se changea entièrement en pieuvre blanche et partit rapidement à la recherche de sa cible. Son changement avait laissé s’échapper du chakra et c’était cette piste que Moe, douée en sensorialité, suivait activement. Se croyant plus à l’abri, et bien blessée, l’Umimori perdait beaucoup de sang et avait du mal à se déplacer. Mais en voyant la grande pieuvre blanche arrivée derrière elle, elle redoublait de vitesse. Même blessé, le poisson était bien plus rapide que la pieuvre, c’était une faiblesse très handicapante. Lançant alors une tentacule, elle accrochait le poisson avec sa ventouse avant de le ramener vers elle, tout en nageant vers la surface. Elles revenaient vers Zoku. Sortant alors de l’eau sur la plage, Moe était encore sous sa forme de pieuvre blanche alors que toutes ses tentacules étaient enroulées autour de la cible qui avait reprit son apparence humaine. Moe était très fatiguée de cet échange rapide. Elle avait dépensée pas mal de chakra. Tout en immobilisant sa cible, elle laissait à Zoku le soin de la rassurer.

Zoku s’était mis à faire les cent pas sur la berge de sable fin. il était impuissant maintenant. Il avait fait son possible pour rattraper l’Umimori mais elle avait pu regagner son habitat naturel rapidement. La trace était encore fraîche étant donné qu’elle saignait, Moe ne devrait pas avoir trop de problème à la traquer. Il ignorait si elle était douée du même sens de la sensorialité que lui, les pieuvres n’étant pas spécialement connu pour ça. Ceci dit, le raton se fit la remarque qu’il en connaissait bien peu sur le sujet, voire rien du tout. Mais ce n’était pas le moment de s’interroger sur son niveau de culture personnel.

Un bruit vint perturber le mouvement incessant de l’eau. Un mouvement qui suivait les vagues tout en les fendant. La Yasei revenait, accompagnée de la femme poisson. Un soulagement pour le raton-laveur qui se précipita à leur rencontre. Il avait repris forme humaine le temps de l’attente afin de s’économiser du chakra. Malgré la prise très serrée de l’Octofille, l’Umimori commença à se débattre. Elle devait avoir perdu toute confiance envers l’Homme pour avoir réagi ainsi depuis que ce pêcheur l’avait récupéré. Zoku commença à lever les mains en guise d’apaisement mais c’était peine perdue. Elle se débattait toujours et devait mettre à mal la résistance de sa cousine.

Le polymorphe en revint donc à sa forme animale, qui serait peut-être un bon moyen de s’attirer les bonnes grâces de la jeune femme. Elle se calma mais semblait toujours réticente au dialogue. Guère connu pour sa patience, Zoku avait cette fois la conviction d’y arriver et de se faire attendre. A sa manière peut-être mais qui ne serait possiblement pas exempt de résultats.

- Calme toi ! Arrête de te remuer comme ça t’es en sécurité avec nous !

- Non ! Vous êtes comme eux ! Laissez-moi je ne veux plus pleurer, répondit-elle d’une voix pourtant larmoyante.

- C’est pas notre objectif, répliqua le polymorphe en haussant le ton. On est là pour t’aider et te ramener chez toi. Chez les Umimori.

Un instant de doute sembla se profiler sur le faciès écorché de la pauvre polymorphe. La faille que le raton-laveur attendait pour l’amener à arrêter de les prendre pour des moins que rien. Ce n’était pas pour rien que cette étape entrait parmi les objectifs de leur mission. Cette fois il fallait sortir le grand jeu. Zoku n’était pas à l’aise de parler de ça devant Moe mais il n’y avait que cette solution pour ramener l’Umimori à la raison.

- Regarde, fit-il en se retournant et en écartant certains poils sur son dos.

L’affreuse cicatrice qui lui parcourait la colonne vertébrale se devinait malgré le pelage. Un trait blanchâtre et grossier qui n’était pas beau à voir. Une aubaine pour le raton-laveur que ses poils qui camouflaient cette horreur. Lui-même n’osait jamais se gratter le dos de peur d’y déposer un doigt. Chaque toucher lui refaisait vivre l’enfer. Il s’interdisait d’y penser mais par des soirs d’ébriété, il était forcément rattraper par ses vieux démons. L’instant était suffisamment humiliant pour lui, aussi ne resta-t-il pas trop longtemps exposé de la sorte. Cette fois la femme poisson resta statique, Moe avait dû pouvoir relâcher sa prise, elle aussi sûrement surprise par cet acte. Le visage d’abord bas, Zoku releva ses yeux pour les planter dans ceux de l’Umimori larmoyante.

- Je sais ce que c’est. J’ai déjà vécu ça aussi et je le souhaite à personne. Sauf peut-être à ceux qui t’ont fait ça. Nous sommes au courant. Nous voulons juste te sortir de cet enfer et te ramener sauve auprès de ton peuple.

La tension venait de grandement diminuer sur la petite plage isolée de tous. La demoiselle en détresse était définitivement calmée mais elle restait silencieuse. Pour rompre ce silence, le raton-laveur fit quelques pas dans l’eau salée sans trop approcher son interlocutrice pour autant. Il n’avait fait que deux ou trois pas en lui laissant deux mètres pour son confort personnel.

- Tu t’appelles ? demanda-t-il.

- Namiko, murmura-t-elle.

- Zoku, se présenta-t-il. Et voici Moe. On est là pour te protéger, tu n’as rien à craindre. Tu veux nous dire ce qui t’es arrivée ?

La pieuvre blanche était toujours sur le sol, les tentaculaires enroulant la jeune femme blessée qui se débattait avec férocité. L’Ambrée était extrêmement surprise de la force qu’il restait à la femme Umimori. Malgré ses blessures dont certaines pouvaient être vraiment graves et la fatigue qui se lisait sur son visage, elle continuait de gesticuler et de se débattre avec force et fureur pour se défaire des liens qui l’entravaient. Moe avait prit soin de bloquer les mains de sa cible pour ne pas qu’elle ne puisse la blesser. La pècheresse était sur le sol, totalement épuisée par cette suite d’événement. Profitant de cette accalmie, laissant soin à son compagnon velu de rassurer la jeune femme pendant qu’elle se reposait. Celle-ci en profitait alors pour compter ses blessures. Le combat ne lui avait pas fait de grands dommages, mais certains coups de ses adversaires l’avaient atteints, aucun de dangereux bien heureusement. Elle avait veillée à ce qu’aucun coup de lame ne puisse la toucher.

Alors que le Yasei transformé de nouveau en raton laveur essayant avec difficulté de rassurer la femme poisson, il finit par lui demander de regarder. Zoku se tournait alors en montrant une blessure qui semblait vraiment grave. Moe ne put s’empêcher de planter son regard dessus, de profiter de l’instant pour en apprendre plus sur son compagnon du jour. Le raton avait une immense cicatrice qui longeait toute sa colonne vertébrale d’une façon peu commune, cela n’avait pas été fait pas la médecine usuelle, sûrement par des bouchers. D’une façon alors bien plus rapide, la femme poisson qui se nommait Namiko relâchait la pression, semblant dès lors croire aux paroles de Zoku. Elle avait totalement lâchée prise, ce qui permit à Moe d’également retirer ses tentacules au fur et à mesure du corps meurtri de la femme. Dans le même temps, son apparence humaine était revenue, abandonnant totalement sa forme céphalopoïde usant pas mal de son chakra. Moe le sentait dans son corps, ses méridiens criaient, elle n’avait pas l’habitude de dépenser autant de chakra en si peu de temps. Mais après tout, cela serait un bon entrainement.

« Il y a plusieurs jours.. J’étais en train de me rendre dans un village de pêcheur à quelques kilomètres du village Umimori afin de faire des courses. J’étais accompagnée de deux autres personnes, un homme et une femme. Mais sur le chemin, le groupe que vous avez combattu nous est tombés dessus et nous ont agressés. Ils étaient encore plus nombreux de base. Nous nous sommes battus, mais ils étaient trop nombreux. Nous avons donc essayés de fuir. J’ai ensuite cherchée mes compagnons, mais sans pouvoir les retrouver. A la place j’ai été pourchassée puis kidnappée et torturée. C’était… » Finit la jeune Namiko avec pleins de larmes dans sa voix.

« Vous ont-ils demandés quelque chose lorsque vous étiez sous torture ? » demandait alors Moe toujours haletante, pratiquement allongée sur le sable, toujours en train de se remettre de ses folies. Cela avait deux objectifs, le premier étant d’avoir des informations sur les raisons de cette monstrueuse chasse, et la deuxième, plus passive était d’empêcher Namiko de repenser à toute cette horreur et de ne pas se laisser aller aux larmes, ce qui ne rendrait que plus compliquée la tâche des deux Yasei. Le jeune femme plantait son regard vert dans celui de l’Ambrée avant de reprendre, toujours des larmes plein la voix. « Ils m’ont simplement demandés… Ou était le reste de ma race.. »

Le corps toujours douloureux, notre héroïne se relevait avec difficulté avant de s’approcher de Namiko au sol pour finalement de mettre à genoux devant elle. Sans que celle-ci ne résiste outre-mesure, Moe regardait les blessures de la jeune femme, dont une à la jambe qui était sanguinolente et potentiellement dangereuse. Ne demandant aucune permission, Moe se saisit d’une compresse et d’un bandage qui se trouvaient dans sa poche, en cas que, avant de l’appliquer sur la jambe de Namiko. La moitié de la compresse servait à nettoyer la blessure pleine de sang, de sueur et de sable avant que le reste ne serve à empêcher le sang de couler plus encore. Plusieurs blessures nettoyées et le plus graves étant apaisées par les premiers soins de Moe, la Yasei se redressait, laissant Namiko seule un instant avant de se diriger vers Zoku.

« Ses blessures ne sont pas mortelles, mais peuvent le devenir si ça s’infecte. Nous devrions l’emmener à l’hôpital avant de la ramener chez elle. Dit-elle en marquant une pause. Je ne suis pas à l’aise avec l’idée de cette escorte. Que pensez-vous que nous devrions faire Zoku ? Ce n’est pas une affaire banale. »

Le duo shinobi avait dû redoubler d’efforts et d’astuces pour apaiser l’Umimori. Un travail qui ne s’avérait pas vain puisqu’elle avait repris sa forme humaine, à l’instar de Moe qui pouvait également se détendre. La dénommée Namiko se mit à expliquer comment tout ceci avait commencé. Le groupe qu’ils avaient attaqué avait pris pour cible trois Umimori, dont elle. Zoku s’était légèrement détendu aussi, se permettant d’affaisser ses petites épaules alors qu’il écoutait attentivement l’histoire de la polymorphe marine. Son clan était encore la proie de nombreuses haines. Les crocs serrés, il dû faire un effort colossal pour les écarter afin de s’exprimer.

- Et c’est là que tu as fini dans les filets d’un des pêcheurs. Pour les fuir ? s’interrogea le raton.

Un petit acquiescement de tête tout timide vint corroborer sa théorie. Même si le colosse avait cru bien faire en la conduisant à l’hôpital, elle avait pris peur maintenant qu’elle devait voir l’Homme comme l’être vil qu’il était. Zoku ne la convaincrait pas du contraire, il pensait la même chose et serait bien incapable de jouer l’hypocrisie au point de trouver des arguments de défense. Qu’ils n’étaient pas tous comme ça ? Facile mais pas si simple. Moe avait pris le relais en écartant un peu le sujet. Ils avaient cherché à savoir où était réfugié le clan. Légèrement inquiet, Zoku réagit au quart de tour :

- Tu n’as rien dit ?!

Un simple non de la tête vint lui répondre. Il devait s’arrêter là pour le moment. Octofille s’était mise à inspecter avec douceur les blessures de leur cousine. Elle leur faisait enfin confiance, un tel exercice n’aurait pas été envisageable il y a une heure. Profitant de cet instant de silence, Zoku croisa les bras sur sa poitrine pour se mettre à réfléchir à la suite. L’ordre de mission était clair : ils étaient maintenant censé la remettre à une escorte qui l’accompagnerait jusqu’à son village. Dès qu’ils avaient eu la confirmation qu’il s’agissait de bien plus qu’un bête accident, il avait vu d’un mauvais œil le fait de la confier à d’autres personnes, aussi bien intentionnées pouvaient-elles être. S’ils avaient fait tout ce travail de mise en confiance, il finirait caduque s’ils n’allaient pas au bout de leur mission.

Les premiers soins terminés, Moe vint faire le diagnostic. Les blessures restaient risquées si elles n’étaient pas traitées tout de suite. Un passage à l’hôpital semblait obligatoire. Le raton-laveur opina du chef alors que sa cousine éloignée marqua une pause. Elle exprima ensuite ses doutes quant à la fameuse escorte. Le Genin était ravi de voir qu’ils étaient sur la même longueur d’onde. Il acquiesça avec encore plus de ferveur que précédemment.

- Depuis un moment ça me trottait en tête aussi. C’est stupide de la laisser avec d’autres alors que nous sommes ceux l’ayant rassurée. De toute façon il vaut mieux la reconduire à l’hôpital pour l’instant. On avisera ensuite.

A deux, les Yasei approchèrent délicatement de leur protégée. Elle était apaisée mais comme absente. Le mouvement lui fit relever la tête. Malgré toutes les précautions prises, Zoku fut rassuré de voir qu’elle ne semblait plus aussi intimidé par leurs présences. Restant cependant à bonne distance, le raton-laveur laissa place au trentenaire à béret qui se mit à genou.

- Ecoute Namiko nous ne pouvons pas te ramener chez toi dans cet état. Moe pense que nous devons quand même te conduire quelque part où nous pourrons te soigner. Cependant nous n’allons pas te lâcher d’une semelle. Personne d’autre que nous ou le médecin ne sera autorisé à t’approcher. Si tu te sens d’aplomb pour marcher et que tu nous fais confiance…

Il fut de suite interrompu par le mouvement hésitant mais ferme qui permit à l’Umimori de se redresser pour le dominer de sa taille. Son regard n’était plus larmoyant, ils avaient séché et une autre étincelle plus vivace y grelotait faiblement. Son pas n’était pas le plus assuré qui soit mais elle semblait prête à marcher. Zoku se releva et se décala pour la laisser passer. Il resta cependant à bonne distance sur ses flancs pour l’intercepter en cas de soucis, et même en cas d’embuscade pour pouvoir la défendre. Le trio polymorphe put donc gagner l’hôpital par les bois redevenus calmes. A plusieurs reprises, le Genin scrutait les alentours de son ouïe fine. Rien d’alarmant. Ils purent progresser en profitant du calme environnant.

Lorsque les premières habitations se distinguèrent derrière les arbres, le pas de Namiko se fit plus lent. Elle semblait traîner des pieds en s’écartant un peu du duo qui l’encadrait. Zoku porta son regard sur elle sans dire un mot. Un geste instinctif lui vint : celui de lui tendre la main. Son faciès était rarement aussi sérieux. Pas l’once d’une malice ou méchanceté, encore moins de nonchalance. Il affichait un air aussi déterminé que l’Umimori lorsqu’elle s’était relevée sur la plage. Ils arrivèrent dans l’enceinte du bâtiment médical où ils réussirent à retrouver l’infirmière qui les avait renseignés plus tôt. Le duo expliqua bien qu’ils devaient réduire les effectifs autour de la jeune femme. Le strict nécessaire pour la soigner et lui permettre de retourner dans son foyer dans un état décent. Un médecin donna son accord pour isoler le trio dans une chambre à part où lui seul pourrait accéder. Alors qu’il dispensait ses premières observations, Zoku fit un signe discret à sa partenaire pour lui glisser un mot à l’oreille :

- Assures-toi qu’elle soit bien, je vais régler cette affaire d’escorte en attendant. Ne la laisse pas toute seule.

Sur ce conseil, Zoku quitta la chambre puis le bâtiment. Son pas pressé l’amena aux portes du village, là où un avant-poste regroupait quelques shinobis en attente d’être utiles. L’assemblée était de cinq individus que le Yasei interpella de son ton malaimable et légendaire.

- Qui sont ceux qui ont été assignés à une mission d’escorte ici ?

- C’est nous, répondit un blond accompagné de deux autres shinobis.

- Parfait, bah vous pouvez retourner chez vous on s’en charge.

- C’est pas ce qui était convenu, commença à s’indigner l’un d’eux.

- Peut-être mais cas de force majeure. Merci pour tout ce que vous faites pour la nation, retournez à vos occupations, se moqua le polymorphe en singeant un mauvais salut militaire.

Il avait fait volte-face pour s’en aller mais une forte poigne sur son avant-bras le stoppa net dans sa lancée. Il se retourna pour retrouver le blondinet avec la mine moins réjouie que deux secondes avant. Il resserra sa prise alors que sa voix légère avait laissé place à un ton impérieux.

- C’est un rapport que tu veux c’est ça ?

- Si ça te chante, cracha le raton en libérant son bras. Yasei Zoku si t’en as besoin pour ton papelar ducon.

- Tu sais pas ce que tu risques toi, répliqua-t-il avec un sourire mesquin.

- Tu sais pas ce que j’ai déjà risqué alors va faire ton petit rapport, mentionne mon nom et le fait que je te pisse à la raie.

Cette fois, le Yasei s’engagea d’un bon pas dans l’allée principale. Il entendait les vociférations derrière lui ainsi que certains qui tentaient de calmer Boucle d’Or. Que son nom soit mentionné il s’en moquait éperdument. Il tenait juste à éviter des ennuis à sa cousine. Elle venait d’arriver, elle n’avait pas besoin de ça pour commencer sur la voie shinobi. Il risquait d’être convoqué etc. Peu lui importait. Il regagna sans encombre l’hôpital après un rapide passage chez lui. Lorsqu’il retrouva ses deux consœurs, il était chargé de paquetages. Le médecin avait laissé les deux jeunes femmes qu’il aborda directement.

- Alors Namiko ? Tout va bien ? Si tu te sens d’attaque on va pouvoir te ramener chez toi. Je me suis arrangé avec l’administration. On doit en avoir pour un ou deux jours si je ne m’abuse alors j’ai pris de quoi tenir pour la route.

« Très bien »

Venait d’acquiescer l’Ambrée face aux paroles de son compère Yasei. Celui-ci en écoutant les propositions de Moe s’affirmait du même avis, qu’il fallait la conduire à l’hôpital pour la soigner de ses blessures avant de reprendre leur chemin pour escorter la jeune femme à la place d’autres. S’ils réussissaient à gagner la confiance de cette femme jugée dangereuse pour les autres, le duo avait également gagné le droit d’effectuer eux-mêmes l’escorte. Répondant alors à quelques questions de Zoku, Moe n’y prêtait pas attention et se dirigeait lentement vers sa compère venant de l’océan pour l’aider à marcher. Bien que le sang de sa blessure ait cessée de couler, la douleur elle devait être encore présente, et n’étant pas une kunoichi médecin, elle ne pouvait pas la guérir entièrement. L’aidant à se redresser, elle écoutait par la même occasion Zoku expliquer à Namiko la marche qu’ils allaient suivre tous les trois. C’est à dire l’aller retour à l’hôpital avant de prendre l’escorte pour la ramener chez elle. En la soulevant, Moe tournait son visage vers la femme-poisson.

« Pourquoi t’es tu enfuie de l’hôpital ? Demandait-elle avant de commencer à marcher, Zoku prenant la tête de la marche, ses sens aux aguets. La jeune femme tournait également la tête comme pour répondre, mais l’on sentait alors dans sa voix un certain mépris. Car je n’ai aucune confiance dans cette race de bipède. »

Bien entendu, si elle était pourchassée pour son pouvoir et l’appartenance au clan des polymorphes, c’était absolument normal qu’elle ne soit plus en confiance avec la compagnie des humains. Tout Yasei ou Umimori avait déjà ressenti cette sensation, d’être en trop, de toujours être la proie. L’Ambrée elle n’avait pas forcément vécue autant que Namiko, même si la haine de l’ennemi de son père avait été complète et profondément encrée dans le cœur de notre protagoniste. Terminant la conversation à ce stade afin qu’elle se concentre sur la marche, le trip restait silencieux, pour ne pas non plus attirer l’attention sur eux. Une poignée de grandes minutes plus tard, ils arrivèrent devant les portes de l’hôpital. Une infirmière arrivait en courant devant les jeunes femmes, c’était la même infirmière que celle qu’ils avaient interrogés. Zoku prit alors congé, demandant à Moe de rester auprès de Namiko. Ce qu’elle allait faire.

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Environs deux heures plus tard, Zoku pénétrait énergiquement dans la chambre individuelle ou se trouvait Namiko, assise sur le lit, Moe accoudée à la fenêtre et l’infirmière qui s’occupait de terminer les bandages de l’Umimori. Celui-ci prit immédiatement des nouvelles de la jeune femme, se contentant de répondre qu’elle se sentait mieux et que c’était aussi grâce à eux. La partie de confession du raton laveur avait bien aidé Namiko à faire confiance aux deux membres du clan Yasei et avait été une bonne source de connaissance pour Moe concernant son compagnon au béret. Une fois tout préparé, ils prirent alors les affaires, quittant l’hôpital de Kiri avant de rejoindre la porte pour organiser l’escorte de Namiko pour la ramener chez elle.

Entretemps, pendant que l’infirmière était en train de soigner l’Umimori, la céphalopode en avait profitée pour se reposer également, elle et ses méridiens. Un médecin en avait profité pour faire un check de l’état de Moe dans le même temps, ce qui n’avait pas été un luxe. Mais finalement, elle n’avait rien eu de grave si ce n’était deux ou trois contusions du à l’affrontement avec les détracteurs de Namiko. Bien que légèrement fatiguée, elle était de nouveau d’attaque pour le reste de la mission. Les deux femmes se tournèrent alors vers Zoku, c’était lui qui dirigerait l’opération.

Le polymorphe retrouva les deux kunoichis là où il les avait abandonné. Apparemment Namiko semblait remise et hors de danger, Moe elle de son côté avait une mine un peu moins marquée que lorsqu’ils étaient sur la plage. Ce moment lui avait permis de se reposer elle aussi. Ils en avaient tous besoin même si Zoku n’avait pas vraiment eu l’occasion de se calmer, surtout au niveau des nerfs après cette altercation avec la prétendue escorte. Il s’attendait déjà à des retombées qu’il assumerait cependant. Il ne laisserait pas une Umimori entre les mains de personnes qu’elle ne connaissait pas. Elle avait le caractère farouche de ses compères que Moe et Zoku pouvaient parfaitement comprendre.

L’expérience qu’elle avait vécue n’était pas loin de celle du raton-laveur. Alors qu’ils quittaient l’enceinte du village pour la destination du village de Namiko, il repensait à ce passé douloureux. C’était interdit normalement mais ça le prenait de temps à autre. Cette indescriptible douleur, la chaleur lancinante de sa cicatrice qui faisait remonter les tragiques traumas du passé. Il menait la procession mais gardait le regard bas. Il n’était pas aveuglé puisque concentré sur les sons même si sa réflexion allait ailleurs. Alors qu’ils progressaient sur un sentir légèrement pentu, il se retrouva au même niveau que les deux demoiselles. Il n’avait échangé aucun mot avec elles depuis leur départ. Ce fut l’Umimori qui le brisa d’une voix presque honteuse.

- Dites…qu’est-ce qui vous êtes arrivé ?

Il aurait pu jouer les imbéciles en prétendant ne pas voir de quoi elle parlait pour la dissuader de continuer dans cette voie, il pourrait même ignorer totalement sa question pour continuer d’avancer. Seulement, leur protégée s’ouvrait un peu plus maintenant qu’elle avait confiance en eux. Le polymorphe avait pris le risque de dévoiler les stigmates de son passé qui devait forcément pousser à l’interrogation. Même Moe devait s’en poser mais elle était trop polie pour demander. Après quelques secondes de doute, Zoku se résigna à lui répondre.

- La même chose que toi. L’Homme qui se croit tout permis et jalouse notre don. Il a tenté d’en percer les secrets, n’hésitant pas à me charcuter et me recoudre. Le dernier héritage de mes parents qui m’avaient vendu pour une miche de pain.

Même sans être à la place de Namiko, ils purent entendre sa gorge se nouer suite à cette révélation. Il ralentit le pas et se retourna pour s’assurer que tout allait bien. Elle était bien là, debout sur ses pieds mais le regard embué par l’émotion. Il fit une grimace pour la rassurer sur son état. Un moyen de dire « Boarf pas grave ». Même si lui-même n’y croyait pas. Ils continuèrent et ce fut de nouveau l’Umimori qui prit la parole pour s’adresser au raton.

- Ce sont des monstres et des abrutis. Ils m’avaient capturé parce qu’ils pensaient que j’étais une sirène, et que mes larmes offraient la jeunesse éternelle.

Les mots de la jeune femme revinrent à l’esprit du polymorphe. « Je ne veux plus pleurer ». La situation avait fait qu’il n’avait pas exactement compris ce qu’elle voulait dire. Sa hargne envers l’espèce humaine ne faisait que s’accroître suite à ces révélations. L’Homme démontrait encore une fois son ignorance et l’impuissance dans laquelle il se perdait, cherchant par tous les moyens à se hisser au sommet d’une chaîne alimentaire ayant existé bien avant son existence et subsistant sans lui. Ce qu’il ne contrôlait pas, il le craignait. Comme le règne animal ou la Mort. Les propos de Namiko furent accueillis par un petit rire mesquin du Yasei. Il se retourna avec un air malicieux figé sur son faciès.

- Comme quoi, des années d’évolution mais toujours aussi cons !

Puis il se fendit d’un rire franc. Un baume au cœur qui redonna de l’entrain à la marche. Ils purent ainsi continuer leur progression jusqu’à la nuit tombée où ils trouvèrent une clairière tranquille. Ils établirent leur camp, chacun remplissant une action, pour s’installer auprès du feu alors que la nuit jetait son dévolu sur les bois. Ils profitèrent des rations que Zoku avaient réuni avant de se préparer à dormir. Mais le raton-laveur ne ferma pas l’œil. Il resta auprès du feu et prévint sa partenaire de mission :

- Il vaudrait mieux que quelqu’un reste éveillé pour monter la garde au cas où. Repose toi si tu veux je prends le premier tour.

Son regard se perdit ensuite dans la danse hypnotisante du feu qui se trouvait devant eux. Les vieux démons se frayaient une nouvelle fois un chemin jusqu’à son cœur et son esprit.

Pendant le voyage, Namiko et Zoku parlèrent. Principalement de ce qui était arrivé au raton. Effectivement, celui-ci avait relevé des marques absolument ignobles sur son corps, vraisemblablement infligées de la main de l’Homme, mais il n’avait pas forcément donné plus de précisions. Bien que silencieuse, la délicate jeune femme aux cheveux et à la peau neige écoutait avec attention, tout en ayant tous ses sens en alertes bien entendu. De l’arrière, Moe voyait bien que même en discutant avec la brunette du clan Umimori, il arrivait à rester totalement concentré sur ce qu’il faisait, c’est à dire la garde et l’escorte de la jeune femme-poisson. Elle arrivait à percevoir ses traits foncés et concentrés, ce qu’il n’avait pas eu au départ, lorsqu’ils s’étaient rencontrés tous les deux, sur le ponton du port Naragasa. Pendant de longues minutes les deux compères de ce trio parlèrent de ce qui leur était arrivé respectivement, tous les deux chassés par la main humaine, jouant au juge, juré et bourreau, outrepassant les lois naturelles, se prenant pour Dieu en essayant de mettre la main sur un pouvoir d’une lignée ancestrale qui était celle des métamorphes. En y pensant, Moe elle pouvait s’avérer chanceuse, car elle n’avait jamais vécu ce genre de chose, du moins pas avec cette intensité, ni cette peur de mourir.

Au bout du chemin, alors que le soleil disparaissait à l’horizon, laissant peu à peu l’obscurité et le fraicheur gagner du terrain, baissant son voile de lumière sur le pays de l’eau, Zoku, le polymorphe en charge de cette équipe improvisée prit la parole, décidant et affirmant aux deux autres qu’ils resteraient dormir ici pour la nuit. Bien que nyctalope, il ne voulait pas forcément prendre le risque de continuer leur route en pleine nuit où l’obscurité pouvait être une grande aide… Ou une funeste ennemie. Dans une clairière dégagée, ils montèrent un camp, firent un feu autour duquel ils se rejoignirent tous les trois le temps de manger quelques provisions avant que vienne le moment de dormir. Zoku prit alors la parole avant de demander à Moe d’aller se coucher, qu’il prendrait le premier tour de garde. Un simple signe d’affirmation de la tête avant de se lever pour aller se coucher, laissant alors son compagnon raton prendre le premier tour de garde.

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Se redressant d’un seul coup, une trentaine de minutes plus tard, Moe regardait à côté d’elle. En tant que femme, elle dormait avec Namiko pour éviter tout quiproquo avec Zoku. Simple règle de routine pour que tout le monde puisse dormir tranquillement. Le souffle de l’Ambrée était haletant, elle avait chaud, de la sueur coulait de son front et sur l’entièreté de son corps. Un mauvais rêve, encore. Elle en faisait malheureusement plus souvent qu’elle ne le reconnaissait ou même qu’elle ne s’en souvenait. Souvent, elle se réveillait en sueur, mais n’avait aucun souvenir de ce dont elle avait rêvée. Frustrant, elle se demandait cependant si ce n’était pas mieux comme ça. A tout les coups, c’était le fantôme de son frère qui essayait de lui jouer des tours, comme avant. Un sourire s’affichait le visage fatiguée de Moe avant qu’elle ne s’habille pour sortir, retrouvant alors Zoku, toujours assis près du feu. Son regard semblait se perdre dans les flammes et son esprit dans ses pensées. En approchant cependant, Zoku en sortit pour tourner la tête vers son homologue céphalopode.

« Je n’arrive pas à dormir. Ca vous dérange si je m’assois avec vous ? » Dit-elle sans réellement attendre la réponse. Bien que cauchemardant, elle était tout de même fatiguée. Mais pas assez pour retourner se coucher. Moe restait là, assise devant le feu, son regard captivé par celui-ci. Bien entendu, en tant que poulpe en herbe, son élément était l’eau, elle adorait l’eau. L’on disait que la mer était une femme faisant tournoyer ses courbes pour attirer des marins en quête d’aventure. Cela était certainement car son animal totémique était l’octopus, donc une créature marine qui vivait, habitait et adorait l’eau. Reprenant ses esprits pour revenir dans le monde terrestre, Moe se mit à regarder Zoku avant de prendre la parole.

« Je suis désolé pour ce qu’il s’est passé. Les humains sont… » Elle fut coupée. Les deux compères se mirent à regarder dans une direction. La clairière bien que dégagée, comprenait quelques buissons, arbustes, etc. Un bruit venait de couper Moe dans ses excuses. Qu’est ce que cela pouvait-il être ?

La danse rougeoyante et imprévisible faisait refléter la teinte marron du regard du polymorphe. Le corps et les oreilles étaient présents mais l’esprit était ailleurs. Il songeait de plus en plus à ce qui lui arrivait. C’était la première fois qu’il ressentait ça. Depuis quelques temps, il ne parvenait plus à agir avec le même détachement qu’auparavant. Même lorsqu’il menait sa vie de vagabond cambrioleur, il avait toujours su garder un certain recul sur ses maux. Seulement un élément déclencheur semblait avoir bouleversé cet équilibre de pensées qu’il s’était forgé. Autrefois, seul l’alcool à outrance pouvait le replonger dans ses vieux démons. Les bras croisés sur les genoux, il y déposa son menton alors qu’un petit soupir s’échappait de ses narines.

Son fil de pensées se brouilla lorsqu’il perçut du mouvement du côté des deux kunoichis. Il ne s’en alarma pas pour autant, reconnaissant l’odeur de sa partenaire de mission. Elle se joignit à lui juste après. Elle l’expliqua car elle n’arrivait pas à dormir. Elle demanda la permission pour s’asseoir, ce qui fit hausser un sourcil au raton. Il acquiesça mais resta surpris qu’elle lui demande ça. Il n’était pas propriétaire des lieux ! Après avoir pris place, elle se joignit à son cousin dans la contemplation de la fleur rouge. Un petit silence apaisant où les deux êtres se perdaient spirituellement.

Finalement Moe brisa l’ambiance de cathédrale pour compatir aux malheurs du raton. Elle avait forcément perçu sa conversation et elle en avait appris un peu plus sur le désagréable personnage qu’il présentait habituellement. Elle commençait à exprimer son avis sur l’Homme lorsqu’un autre bruit leur parvint. Il était suffisamment fort pour que même Octofille en ai conscience. Se redressant par automatisme, Zoku était prêt à détaler vers l’Umimori mais son odorat lui indiqua une précieuse information. Il reconnut la fragrance d’un animal sauvage. Quelques secondes après, en scrutant avec attention l’obscurité ambiante, il perçut le mouvement du renard qui se glissa derrière des buissons. Il se rassit avec un soupir de soulagement.

Après avoir rejeté une bûche dans le modeste foyer incandescent, il attendit les premiers craquements et sifflements du bois sec pour reprendre la parole, suite aux propos de sa partenaire de mission.

- Ouais… Pour ça que d’un côté je prends toujours plaisir à chaparder. L’Homme s’est réfugié dans le pouvoir et l’argent, c’est comme retourner sa création contre eux. Même si la peau de la raclure de bidet qui m’a fait ça m’apaiserait suffisamment.

Il lâcha du regard le spectacle flamboyant pour tourner la tête vers son interlocutrice, qu’il dévisagea de ses yeux marron.

- Je ne souhaite ça à personne. C’est pour ça que j’ai rejoint la cause de Reikan. Je suis pas trop famille forcément mais je sais ce qu’on peut endurer quand on a un talent comme le nôtre. Elle a le droit à la pérennité de son foyer, dit-il en désignant du pouce la tente où dormait Namiko.

Il en revint à son hypnotique danse du feu qui d’un côté l’apaisait. Il ne le quitta plus mais ne laissa pas un vide pour autant dans la conversation.

- J’espère que t’as pas eu à vivre ça, que ce soit dans le passé ou à l’avenir, avoua-t-il.

Fausse alerte ! Le bruit qui avait dérangé le duo Yasei s’avérait être simplement une sorte de renard en train de chasser, difficile à distinguer dans cette obscurité qui planait sur le pays de l’Eau. Jusque là captivé par les flammes, le Raton-laveur replongeait son regard dans les courbes incandescentes, brûlant et dansant au son des crépitements du bois qui se consumait peu à peu. Au fil des minutes, la couleur rouge des braises montait sur les bûches de bois encore marron, légèrement noirci par les flammes qui s’aventuraient trop en hauteur. Le tipi de buche s’affaissait progressivement, attendant patiemment que le feu d’une chaleur insupportable ne les consume. C’était un spectacle remarquable, la beauté de la nature dans toutes ses formes. Bien que cela n’égalait pas la volupté de l’eau allant au gré des vents, cela restait un spectacle absolument fascinant, que Moe ne se lassait pas de contempler de ses yeux mi ouverts mi fermés.

Le raton reprenant sa place, s’étant levé par réflexe pour protéger l’Umimori en cas d’attaque, il lâchait un soupir de soulagement ou de fatigue –Moe n’arrivait pas forcément à le distinguer- avant de regarder son homologue polymorphe afin de répondre aux paroles que Moe avait eu à son égard. Ecoutant attentivement, Moe approuvait certaines paroles d’un simple signe de tête, mais en réalité, elle était absolument d’accord avec le raton. Bien qu’elle n’avait pas vraiment eu l’occasion d’explorer le monde, elle en voyant sa décadence, les Hommes ont reniés depuis bien longtemps le peu de divinité qu’ils avaient, jusqu’à la mère nature. L’Homme reniait la nature, la faune, la flore pour ne laisser place qu’à la puissance et l’argent. La quête de pouvoir avait rendu tant de personnes folles, et maintenant, prit dans cet engrenage, tout le monde devait s’y adapter. Pas forcément par ambitions, mais principalement pour se défendre, pour survivre, pour avoir le privilège et l’immense honneur, comme il était rare à cette époque, de mourir de vieillesse.

C’était pour cette raison que le compagnon au béret de Moe avait rejoint la cause de Reikan, qu’ils avaient vu lors de leur première rencontre. Lui n’était pas particulièrement famille, mais il en comprenait le sens et l’importance. Avec une famille unie, même lui le raton indépendant et fier aurait un endroit où se retrancher en cas de nécessité. C’était la même chose pour le clan Umimori. Beaucoup de clans étaient rattachés à la faune visiblement. Les Yasei, les Umomiroi. Moe avait également entendue parler d’un clan qui n’était pas polymorphe, mais dont le corps était en partie poisson, certainement une branche du clan Umimori : les Hoshigaki. Mais elle ignorait tout d’eux, si ce n’était le nom. Moe levait les yeux vers le ciel avant de prendre la parole à son tour.

« J’ai connu quelques épreuves, mais rien de semblable à ce que vous ou Namiko avez vécus. J’espère que cela durera longtemps. Elle marquait une courte pause. Je crois que je commence à comprendre l’importance de ce que Reikan essayait de m’expliquer quand nous nous sommes rencontrés au temple du Bronze Oxydé. L’importance de réunir la famille Yasei sera certes quelque chose de complexe, mais une nécessité, pour que chaque personne de notre clan puisse se sentir en sécurité, protégée et aimée par ses pairs. »

L’Ambrée marquait de nouveau une pause un peu plus longue. Elle se contenait de regarder les étoiles un moment avant de redescendre son regard vers le feu. Puis elle le tournait vers son compagnon au poil long avant de lui adresser un léger sourire sincère. « Je n’arrive pas à dormir, donc si vous voulez, je peux prendre la garde maintenant. »

Heureusement pour Octofille, elle n’avait pas eu à rencontrer ce genre de difficultés. Zoku comprenait qu’elle n’avait pas eu une vie toute rose non plus mais son rapport à l’Homme était différent du sien. De plus, son caractère posé devait y jouer. Tout comme la Tigresse qui n’avait pas partagé la même hargne que le raton sur l’espèce humaine, ou du moins qui avait gardé ses émotions pour elle pour mettre en avant son objectif de pacification et de réunification. Le raton avait été clair, il ne croyait pas en son utopie de paix. Mais le clan à nouveau réuni et plus soudé que jamais, ça c’était une cause en laquelle il pouvait croire. Et surtout, atteignable.

Le témoignage du polymorphe eut pour effet de permettre à Moe de bien comprendre la nécessité de cette unité. Reikan agissait comme une matriarche avec sa meute, cherchant à protéger ses proches, aussi éloignés pouvaient-ils être. Au moins sa partenaire de mission devait mieux comprendre les motivations de la Tigresse comme ceux du Raton. Pour ce dernier, l’affect personnel jouait tout particulièrement et il ne tenait qu’à un fil de se retrouver perdu par sa haine profonde. C’était un sentiment qui ne s’atténuait pas, même au sein de la Brume. Sa mission avec le Kaguya et la sauvage l’avait prouvé, tout comme les histoires autour du peuple Umimori. Ils pouvaient être un appui considérable pour l’archipel mais ils étaient relégués à celui d’abominations. Des propos qui arrachaient des grimaces de haine chez le polymorphe.

- Je crois en son projet d’unification. La paix entre Bêtes et Humains néanmoins… Je ne pourrais jamais en être partisan.

Etant dans l’incapacité de dormir, Moe proposa au raton-laveur de prendre son tour de garde. Ce dernier se perdait depuis déjà trop longtemps dans ses pensées obscures, suscitant l’air de rien un peu de fatigue mentale. Fermer les yeux quelques heures lui ferait du bien. Il remercia sa partenaire de mission en prenant sa forme animale. Le petit mammifère masqué se roula en boule sans bouger de sa place. Il profitait ainsi de la chaleur réconfortante du feu. Il ne lui fallut pas plus de quelques secondes pour se laisser glisser dans les limbes du sommeil. L’inconscience fut néanmoins perturbée par quelques cauchemars relatant ses sévices passés. Malgré ces désagréments, il put dormir et récupérer ses forces.

Il se réveilla quelques heures avant le lever du soleil pour relayer sa collègue. Jusqu’à ce que le Soleil ne refasse son entrée sur la scène. Le trio se réunit autour du feu encore présent pour grignoter quelque chose avant de reprendre la route. Namiko avait pu récupérer un peu plus de forces après une nuit de sommeil. Elle avait meilleure mine et le pas était plus assuré que la veille. Un peu plus éreintés, les deux shinobis de la Brume tenaient le coup malgré tout. Ils progressaient, maintenant plus très loin de leur destination. Une petite crique se profilait au détour d’une colline qui leur permit de voir au loin. La marche se déroula sans encombre jusqu’à ce que leurs pieds ne foulent de nouveau le sable fin.

La mer ressassait son incessante symphonie au gré des vagues venant lécher le rivage. Un petit souffle de contentement s’échappa des narines du raton après une profonde inspiration d’air iodé. Il se tourna vers la raison de leur présence ici. Umimori Namiko. Elle leur avait donné du fil à retordre mais il était content du résultat. Un petit sourire orna le faciès du trentenaire. Il désigna la mer d’un geste du bras.

- C’est ici que nos chemins se séparent je crois. Je n’irais pas plus loin pour ne pas troubler la quiétude de ton village. Et puis je suis mauvais nageur, plaisanta-t-il. En tout cas, prends soin de toi Namiko. Et s’ils vous arrivaient malheur à nouveau, n’oublie pas que vous n’êtes pas seuls. Notre clan est lié au vôtre et nous traversons les mêmes difficultés.

Déjà très loquace, et ce sans grossièretés, Zoku conclut par un semblant de salut militaire : deux doigts sur la tempe avant de les pousser vers l’avant. Il n’attendait pas de « merci » ou de gratitude éternelle. Juste le fait de savoir qu’elle serait en sécurité. Il laisserait le soin éventuel à sa partenaire d’escorter la jeune fille par les voies aquatiques. Lui pour sa part l’attendrait ici si elle en décidait ainsi. Après une nuit à observer la danse ardente du feu, son regard se porta sur l’immensité océanique et sa respiration rythmée par le vent.

La paix entre les bêtes et es humains serait difficile effectivement. Le souci ne résidait cependant pas du côté de la faune, mais bien de celui des Hommes avides de pouvoir et de territoire à dominer. Ils voulaient asseoir une domination sur tout ce qui était vivant, les plantes, les minéraux, les animaux et même sur leur propre espèce. C’était ainsi depuis que l’homme est l’homme et cela ne risquait pas de changer. La meilleure option dans ce cas pour les animaux était de monter en puissance, en unité afin de pouvoir, si l’occasion devait se présenter, pouvoir mener une guerre concrète. Après tout, les humains ne respectant que la puissance, s’ils voyaient en l’union Yasei-Umimori-Autres une force armée respectueuse et respectable, ils signeraient un traité de paix naturel, ce qui laisserait la faune intact, du moins le temps que la balance ne penche d’un autre côté. Une autre solution aussi serait de rester caché, mais quelle solution sombre.. Et bien trop peu acceptable pour, dans l’esprit de Moe, les membres du clan Yasei.

Après le tour de garde de Moe, Zoku prit le suivant avant que tous les trois ne se réveillent et se mettent en route en direction du village de Namiko. Quelques heures plus tard, alors que tout s’était déroulé sans encombre, ils arrivèrent à destination, près de l’eau. Le raton prit alors la parole pour entamer la séparation, prétextant qu’il n’irait pas plus loin car il n’était pas bon nageur. Il assurait une entente éternelle entre les deux clans, assurant également que si elle avait besoin d’aide, Namiko pourrait compter sur eux. Alors que Zoku s’écartait d’un simple signe de la main, la femme céphalopode venait de dire au revoir à Namiko lorsqu’elle remarquait que des larmes montaient aux yeux de la femme-poisson. Celle-ci ne quittait pas Zoku des yeux. Puis, elle s’approchait du raton avant de le prendre dans les bras, avec affection. Cela voulait bien entendu dire merci à l’homme qui avait donné confiance en le duo, mais aussi une marque d’affection certaine. Zoku était malgré son caractère compliqué, bon orateur et assurait de la confiance des gens, surtout de cette jeune femme qui se semblait s’être éprise du raton.

Le céphalopode émit un sourire ainsi qu’un signe de la main à Namiko alors que celle-ci disparaissait ensuite dans la mer en direction de son village. Un petit coup d’œil à Zoku avant de lui lancer un taquin « Bourreau des cœurs ». Par la suite, les compères Yasei rentrèrent au village. Moe s’étant un peu plus reposée que son homologue, elle proposait elle d’aller faire le rapport au conseil de mission.

Moe écrira :

« La mission est un succès, la femme Umimori a été trouvée et raccompagnée jusqu’à son village sans causer aucun dégâts matériel ni civil. Cependant, nous avons engagés le combat avec un groupe d’individus visiblement des civils appartenant à une organisation. D’après la cible, ils étaient à la poursuite de sa « race » pour mettre la main sur ses pouvoirs de métamorphe poisson. N’ayant confiance qu’en Yasei Zoku et moi-même, nous avons insistés pour réaliser l’escorte nous-mêmes afin d’éviter qu’elle ne puisse fuir de nouveau. La cible ne possède aucune confiance en l’Homme et effectuer l’escorte était donc la solution la plus adéquate. Nous n’avons pas pu capturer les hommes que nous avons affrontés, privilégiant le fait de retrouver l’Umimori fuyarde. Une poignée d’hommes ont trouvés la mort dans cet affrontement alors que la reste à fui. Peut-être que des cadavres sont encore sur les lieux. Vous trouverez la localisation exacte sur la carte jointe à cette lettre. »