La secte Nocturne de Shitô

L'heure n'était pas à la rigolade, je sortais d'une rapide réunion pour me briefer sur ma prochaine mission. J'allais devoir retrouver une certaine personne, une capture et non un assassinat, ce n'était pas plus mal, j'adorais ce genre de mission.

Quelques heures de préparations, de quoi m'équiper, prendre quelques parchemins explosifs, des fumigènes et il était temps de me rendre au point de rendez-vous. Je n'étais pas seul pour accomplir cette tâche, mon camarade m'était inconnu, mais nul doute qu'il était compétent. Les dirigeants faisaient rarement les choses aux hasards, pas besoin d'un abruti qui fonçait dans le tas, plutôt d'un homme qui réfléchissait. Pour ma part, je préférais agir, souvent trop rapidement, j'en étais conscient, voilà une mission qui allait me faire progresser dans ce domaine.

Descendant les quelques marches, parcourant les quelques rues qui me séparaient de ce point de rendez-vous, je réfléchissais à la mission. Nous étions deux équipes à chercher des renseignements, la capture était pour nous, eux était dans le renseignement. Je ne savais pas quand avait débuté leur mission, en espérant recevoir quelques informations de leur part.

Le trajet vers la forêt dense de Hi no Kuni allait prendre quelques heures, une bonne course pour s'échauffer et faire connaissance. J'avais mes propres idées mais lui avait sûrement les siennes, une tactique, des moyens spécifiques pour capturer notre cible ou pour le trouver, nous devrions jouer carte sur table pour être sûr de réussir cette mission.

Posté au niveau de la cabane de contrôle, j'attendais mon partenaire, mon compagnon, mon sous fifre ? Non, j'avais un visage et une coupe de cheveux spéciales, mais j'étais surtout là pour accomplir ma mission et rien d'autre. Je ne savais pas à qui j'avais à faire, à moi de le cadrer si c'était un rigolo…

* Reste plus qu'à attendre... J'espère qu'il ne sera pas en retard, 5 minutes d'avance, on est bien... *

Spoiler:

« Bonjour ! »

Vêtu tout de couleur et d'apparats, l'émissaire du Teikoku revêtait aujourd'hui une apparence pour le moins singulière. Pour apporter un vent d'unité et de prospérité sur les terres de Hi, il avait fait son apparition. L'homme eut connaissance de l'essentiel. Pour le reste, il se déplaça par ses propres moyens jusqu'à trouver ce poste de surveillance niché dans la forêt, en bordure de la ville la plus proche.

Devant lui se tenait dorénavant son équipier pour cette mission de traque. L'anonyme s'arrêta le temps de poser au sol son imposante armoire à pharmacie qu'il portait sur son dos. Un léger bruit de bois marqua une pause.

« Je suis le soldat du Teikoku chargé de travailler avec vous. Enchanté ! »

Il n'avait pas de nom à proposer. Il n'était qu'un émissaire de l'Empire après tout. Comme tous, il était un enfant du Feu, héritier de la volonté du Feu. Cela était bien suffisant.

« Par où commencer ? Le mieux serait de partir au plus vite, et de discuter du moyen de débusquer notre homme sur le chemin. La route risque d'être longue. »

Avant de rejoindre son acolyte, il avait vaguement consulté une carte. Il avait pris conscience de la distance les séparant des grands bois méridionaux de Hi. Le simple fait d'accéder au théâtre de cette mission constituait une première étape majeure dans l'accomplissement de la dite mission. Ce détail prit en considération, l'homme aux tatouages fit l'effort de porter à nouveau sur son dos ses affaires. Puis, les deux Teikokujins commencèrent à mettre le cap vers le sud.

Les informations dont disposaient à l'heure actuelle le duo étaient maigres : un dénommé Nijo Nagasuke était en cavale. On le soupçonnait de présider un groupuscule à tendance sectaire, agissant à la tombée de la nuit dans les ruines de Shito. Il ne fallait pas moins que quelques suspicions de pratiques cabalistiques pour inciter les autorités à envoyer des soldats inspecter sur place.

Sur la route, l'homme aux mille couleurs lança la discussion.

« Pour quelle raison cet homme se serait enfui ? Si on avait ne serait-ce qu'un indice, cela nous aiderait grandement à le débusquer. En attendant… s'il agit en solitaire, la chose sera plus aisée pour nous. Seul, dans ces grandes forêts, il ne tiendra pas bien longtemps. Il nous suffira de suivre ses traces pour le retrouver. Est-ce que vous connaissez ces bois, par hasard ? »

Alors que l'anonyme présentait ses idées, le décor évoluait peu à peu. Les rayons du soleil perçaient plus ou moins, au gré des feuillages changeant. Les dernières traces de civilisation s'évanouissaient. La nature reprenait ses droits. Et bientôt, les deux hommes pénétrèrent dans le domaine absolu de Mère Nature.

Spoiler:

Un homme pour le moins coloré se présenta devant moi, voilà mon camarade de mission prêt à l'action bien que sa tenue ne soit pas ce qu'il y a de plus discret. Au moins, avec un tel accoutrement, on passera pour des touristes, de quoi mettre en confiance notre cible en cavale.

L'heure était au départ, il avait raison, nous n'avions plus une seconde à perdre pour partir à la recherche de notre cible. La discussion se ferait lors de notre trajet, celui-ci prendrait plusieurs heures, de quoi discuter d'un plan, de réfléchir à nos points forts et à ce que nous savons.

En effet nous devions retrouver un certain Nijo Nagasuke, en fuite après avoir quitté une secte pour le moins étrange. Des pratiques occultes seraient pratiquées, de quoi mettre la puce à l'oreille de l'empire qui préférait régler tout cela avant que ça ne dégénère. La raison de sa fuite nous était inconnue, une réflexion qui pouvait nous mener à une piste et peut-être nous amener des indices quant à sa future destination.

« Difficile de savoir pourquoi il a quitté une secte de ce genre, peut-être un désaccord avec les autres membres, ça arrive fréquemment avec les croyants. Il suffit d'un détail pour que naisse des guerres parfois, après il peut très bien avoir eu peur de ce qu'il se passait, un novice qui ne pensait pas que les choses pouvaient aller si loin, que ça soit en terme de sacrifice ou de coutume. La liste est longue, on lui demandera une fois capturé. »

Impossible de poser un réel diagnostic sur cet individu dont nous n'avions aucune donnée, mais Ami avait raison sur un point, s'il était bien seul, il ne nous faudrait pas longtemps pour le rattraper. Mais ça apportait un désavantage considérable en contrepartie.

« Je connais parfaitement ces bois et les quelques recoins qu'il peut avoir choisi pour se reposer, malgré tout, comme il y a de grandes chances qu'il soit seul, il sera plus difficile pour nous de le repérer. Après est-ce que Nijo Nagasuke sait qu'il est poursuivi, c'est une autre question… »

La forêt devenait de plus en plus dense, j'étais comme chez moi, un terrain d'entraînement propre à notre région, j'avais mis au point mes techniques spécialement pour des lieux comme celui-ci.

« Il y a très peu de chance que notre cible soit là-bas, mais il existe une sorte de grotte quelques kilomètres plus loin. Un lieu idéal pour se reposer, ça ne coûte rien d'aller jeter un œil tout en restant discret, nous ne savons rien de lui, ni de ce qu'il sait faire, restons prudent. »

Détournant légèrement la direction prise, nous allions arriver au niveau de cette grotte dans quelques minutes, un expert en détection pourrait aisément nous voir venir, espérons que ça ne soit pas le cas avec lui…

Faute d'en savoir plus sur leur cible, les deux hommes allaient se contenter de le traquer à travers l'épaisse forêt de Hi no kuni. Même le coéquipier d'Ami ignorait les motivations de ce membre de secte. En revanche, le quidam apporta sur la table une solide connaissance des environs. Un atout de choix pour débusquer le dénommé Nijo Nagasuke. L'Apothicaire resta silencieux, et écouta attentivement les informations fournies par son acolyte.

Son acolyte évoqua la présence d'une grotte, lieu idéal pour débusquer le fuyard. Sans détour, le tandem perça à travers la sylve pour tenter de trouver Nijo dans cette cavité. En se basant sur les détails fournis par le tatoué, Ami s'approcha avec une grande attention de la grotte pour ne pas se faire repérer. Le duo se faufila discrètement pour arriver à l'entrée de la grotte. Cette dernière surplombait légèrement en hauteur une clairière, offrant un point de vue idéal afin de surveiller les alentours. Les deux hommes fouillèrent aussitôt la cavité.

Sur place, l'Apothicaire ne trouva qu'un lieu abandonné. Aussi loin que ses yeux lui permirent à travers l'obscurité, il discerna une grotte qui se rétrécissait à mesure qu'ils s'enfonçaient. Par précaution, il essaya de trouver une autre entrée - ou une sortie de secours, selon le point de vue. Aucun autre passage à l'horizon. Ami s'arrêta sur un feu de camp éteint, et au vu de l'allure des cendres, indiquait que personne n'était venu ici depuis au moins deux semaines.

« On dirait que notre homme n'est pas venu ici. »

Il soupira de façon neutre, avant de balayer une énième fois les alentours. Son regard s'arrêta à nouveau sur le feu de camp, une idée en tête.

« Ou du moins, pas encore. »

Il quitta momentanément la grotte pour trouver une branche. Puis, à l'entrée de cette dernière, et face à son acolyte, il commença à dessiner sommairement un plan des alentours. Il traça le chemin que les avait conduit jusqu'ici, désigna la caverne d'une croix. Avec autant d'application que possible, il essaya maladroitement de désigner les zones correspondants aux forêts.

« Voilà mon idée : à l'heure actuelle, on ne sait pas où se trouve notre homme. En revanche, on sait à quels endroits il peut aller pour se cacher. Maintenant, supposons que notre homme sache qu'il est suivi. Si on manifeste notre présence au bon endroit, alors on le forcera à se cacher là où le souhaite. »

Toujours armé de son bâton, l'Apothicaire insista davantage sur la croix représentant la grotte.

« Vous qui connaissez bien ces bois. Pouvez-vous m'indiquer où se trouvent les caches potentielles dans les bois ? »

Tandis qu'il lui tendait spontanément son bâton pour qu'il prête à son tour à l'exercice du dessin, il poursuivit.

« Chercher Nijo Nagasuke dans les bois sera bien trop compliqué. En revanche, le forcer à se terrer dans cette caverne serait bien plus facile. Si on lui coupe tout accès aux différentes caches dans les forêts, alors il n'aura pas d'autre choix que de venir ici. Il ne nous restera alors plus qu'à venir le retrouver, épuisé, pour lui poser toutes les questions dont nous avons besoin. »

Justement épuisé, l'Apothicaire profita de cette pause stratégique pour se reposer. En attendant une réponse complète de son acolyte, il décida de poser à nouveau son armoire à pharmacie portable. Puis il se reposa contre l'une des parois de la caverne.

L'exploration de la grotte n'amena aucune information, notre homme n'était pas venu ici, c'était une vérité absolue. Je n'étais pas déçu ni surpris, si j'étais en cavale je n'irais pas dans la première grotte que je verrais, surtout un endroit comme celui-ci qui parait peu protégé naturellement. Une fois à l'extérieur de la grotte, mon camarade proposait à voix haute un plan tout à fait sensé.

En effet il y avait plusieurs lieux ou un fuyard pouvait se rendre dans les environs, son objectif était donc de forcer l'homme à se rendre dans l'endroit de notre choix. C'était comme pousser un lion dans sa cage, une fois pris au piège, il serait bien plus facile pour nous de poser des questions. Nous avions l'avantage du nombre, donc ce plan était vraiment bien pensé pour cette situation.

Attrapant le bâton qu'il me tendait, je pointais grossièrement les différentes cachettes potentielles.

« Pour avoir séjourné une nuit là-bas, à environ 10 kilomètres en suivant la clairière, on tombera sur une cabane abandonnée. Si elle est toujours en état, elle peut servir de refuge à n'importe qui, il faudra donc être prudent à ne pas effrayer des civils ou autres.

Tu as à l'Ouest une parcelle de bois assez spéciale, très feuillue, on dit qu'une rivière souterraine passerait par là et alimenterait grandement les arbres. C'est un endroit très pratique pour se cacher, pas forcément très confortable mais quelqu'un qui ne connait pas la forêt ne pourrait se rendre là-bas

Pour finir nous avons une grotte assez similaire à celle-là bien plus loin, elle sera facile à détecter pour notre cible car elle sert de refuge à des civiles très régulièrement. Un service gratuit pour dormir en cas de route trop longue, si j'étais un fuyard je n'irais pas là-bas mais si on m'y pousse, je n'aurais sans doute pas d'autres choix… »

Une fois les endroits localisés, je pris quelque chose à manger dans mon sac, nous allions devoir parcourir des distances importantes et rapidement, pas question de manger pendant cet exercice. Je décidais de cette sorte de pause pour parler à mon collègue de mes capacités, il avait l'air doué en stratégie, bien plus que moi, peut-être aurait-il plus d'idée s'il avait plus de carte en main.

« Pour te parler de moi, j'ai des talents dans le son, concrètement je suis capable d'entendre des sons à une certaine distances et produire des sons plus forts que prévu. Je m'en sers pour détecter mes cibles, il ne devrait pas avoir beaucoup d'individus dans ces bois, avec un souffle rapide, le trouver ne devrait pas être trop difficile je pense. Faisons courir le lapin directement dans sa cage ! »

L'Apothicaire écouta avec grande attention les explications de son acolyte. Dans leur tente de généraux de fortune, il se laissa guider par les indications tracées sur la carte de terre au gré du bâton du shinobi. Trois points d'intérêt furent notés par le tandem : deux à l'Ouest, et un au Sud, dans la continuité du chemin les ayant conduit à cette caverne. Le vendeur de remèdes prit le temps d'imprimer cette carte de fortune dans son esprit, apposant sa main sur son menton.

« Très bien… Huuum… Je vois… »

Finalement, il retira sa main, et décida de prendre à son tour le bâton pour dessiner. L'Apothicaire détailla à nouveau son plan.

« En se basant sur les informations que vous avez mentionnées, je pense qu'il serait plus judicieux de revoir mon plan. Nous avons deux directions à couvrir : la cabane au sud, et l'ouest, où se trouvent la seconde caverne et la rivière souterraine. Si nous cherchons à forcer notre homme à revenir ici, la tâche sera éprouvante pour nous aussi. Cependant… »

Il désigna avec son bâton la seconde caverne. Il traça ensuite deux chemins. Une première ligne droite, reliant les deux cavernes ainsi que la rivière souterraine. Puis un arc de cercle reliant les deux cavernes en passant par la cabane abandonnée.

« Si nous nous séparons, et que nous nous déplaçons ainsi d'Est en Ouest, nous sommes certains d'attraper dans notre filet notre homme. Vous semblez bien connaître ces bois ; aussi je vous propose d'agir ainsi : je ferai le grand détour en passant par la cabane abandonnée pour s'assurer que notre cible se dirige bien vers la caverne. Pendant, vous traverserez la forêt. Avec vos talents, la traque, et votre connaissance des lieux, la traque sera plus simple. »

L'Apothicaire abandonna finalement le bâton pour se consacrer entièrement au Teikokujin qui l'accompagnait dans cette mission.

« Qu'en dites-vous ? Si vous n'y voyez pas d'inconvénients, je vous propose de partir dès à présent. Au même moment, il commença à récupérer sa valise et à la porter sur son dos. Avant de partir… existe-t-il un endroit à proximité de la deuxième caverne où nous pouvons nous retrouver sans risquer d'être vus ? »

L'idée était donc de se séparer pour mieux l'encercler, notre homme avait plusieurs possibilités de refuge, les inspecter les unes après les autres prendraient du temps. Je trouvais sa méthode très bonne pour une situation comme celle-ci, si j'avais eu la faculté de créer plusieurs clones, cela aurait été différent. Je hochais la tête en guise de confirmation, terminant ma collation, il était temps de se lancer dans le vif du sujet.

« Tu trouveras un arbre plus grand que les autres quelques mètres plus loin, derrière la caverne, je pense que tu ne pourras pas le rater. On a qu'à s'attendre en hauteur, pour être sûr de ne pas être repéré. Si jamais tu rencontres un quelconque problème, crie, je t'entendrais aisément. »

Une petite pause pour ranger mon papier, pas question d'être repéré aussi bêtement et il était l'heure de lancer la chasse.

« A tout à l'heure !! »

Partant en direction de la forêt, je devais me rendre rapidement vers la rivière souterraine. Nijo Nagasuke ne devrait pas pouvoir la trouver, mais il était primordial de s'en assurer. Il s'agissait d'une trop bonne cachette pour un fuyard, lui laisser cette opportunité était impossible. Avec mon collègue en direction de la cabane, on s'assurait de le pousser vers cette autre caverne et ainsi de terminer la chasse. L'heure était à la rapidité, plus on lui laissait de temps et plus il pourrait réfléchir à un moyen de nous échapper.

Avalant les mètres tel un guépard sur sa proie, j'approchais du but. Il était hors de question de tomber dans un piège, se sachant suivie il aurait peut-être pris le temps de se protéger, c'est en tout cas ce que je ferais si j'étais en fuite. M'arrêtant sur une branche, j'étais à la bonne distance pour pouvoir utiliser ma technique de repérage. Les yeux fermés, un signe de la main et je pouvais déceler tous les sons qui se dégageaient en face de moi. Mon esprit parcourait les arbres, les quelques animaux présents pour enfin tomber sur cette cachette parfaite. Il y avait du bruit, était-ce un animal ou bien un être humain ? J'entendais seulement le bruit des feuilles qui bougeaient, impossible d'avoir d'autres informations. En tout cas il ne parlait pas, si c'était un homme, il était bien là pour se cacher.

J'avais l'effet de surprise, lui voulait seulement passez inaperçu, se fondre dans la forêt. Ouvrant les yeux, je partis à toute allure pour confirmer mes doutes. Je n'avais pas entendu de crie en direction de la cabane, à moins qu'il ne soit pas encore arrivé, il avait un peu plus de chemin à faire que moi...

« Un grand arbre, derrière la caverne, en hauteur. C'est compris. Retrouvons-nous là-bas ! »

Ce fut ainsi que les deux émissaires du Teikoku se séparèrent, l'un à l'Ouest, l'autre au Sud. Le vendeur de remèdes fit de son mieux pour supporter le poids de son armoire à pharmacie. Peu habitué à parcourir de si grandes distances en si peu de temps, il fit appel à ses dernières forces pour éviter d'être un fardeau auprès d'Ozuka. Ce dernier, en comparaison, s'éclipsa bien assez vite dans la pénombre de la forêt.

Bien qu'essoufflé par intermittence, l'Apothicaire n'avait rien d'un simple itinérant. Lors de la première partie de son trajet le conduisant à la cabane méridionale, il tenta de réduire la distance au mieux, sans pour autant trop forcer. Sur la route, l'Apothicaire croisa quelques voyageurs. Aucun ne semblait partager de sympathie pour le fuyard. Par précaution, il échangea quelques mots avec ces derniers pour s'assurer que sa cible ne les avait pas croisés. Cette inquiétude écartée, il poursuivit son chemin et atteignit non sans mal la cabane. Là, une centaine de mètres le sépara du lieu. Il entrapercevait vaguement la toiture de ce refuge pour pèlerins et chasseurs, et décida aussitôt de presser le pas. La démarche était simple : faire un maximum de bruit pour annoncer sa présence, et forcer l'éventuel gourou à prendre ses jambes à son cou.

Impossible pour le galéniste de s'assurer de l'efficacité de son plan. Toutefois, une fois arrivé au seuil de la cabane, il constata être bien seul. Après une pause de quelques minutes, le temps de reprendre son souffle, l'homme aux mille couleurs reprit la route. Cette fois-ci, sa destination finale l'attendait : la caverne de l'Ouest où l'attendrait Ozuka. Là-bas, tout se jouerait; il était impératif que le gourou se retrouve sur place, acculé entre le marteau et l'enclume du Teikoku.

Après un long moment de marche, au cours de laquelle l'Apothicaire mit ses dernières ressources en jeu, il parvint finalement à son ultime destination. Tandis qu'il serpentait entre les arbres, la vue de l'abri de roche le soulagea. Essoufflé, se savoir si proche de son objectif lui donna un regain de vitalité, suffisant pour balayer les derniers mètres le séparant du grand arbre. Un nouveau soulagement se fit ressentir, à la vue de Nuy Ozuka, présent probablement depuis bien plus longtemps que l'Apothicaire. Conscient de la probable présence du fugitif, il se contenta d'échanger avec lui un simple geste de la main avant de s'approcher plus près.

« Je n'ai trouvé personne dans la cabane, ou à proximité… chuchotait-il, alors qu'il essayait d'étouffer le fait qu'il haletait péniblement. Bien… maintenant qu'on touche au but… Je propose qu'on se rapproche discrètement de l'entrée. L'un bloque l'entrée, et l'autre tente de débusquer ce gourou. »

Un bref échange de regard entre l'Apothicaire et son camarade de mission suffisait à affecter les rôles. Couvert de sueur, essoufflé, et maigre de son état, l'Apothicaire n'avait pas le profil adéquat pour interpeller avec efficacité le gourou, et ce qu'importe son gabarit. Sa tenue bariolée n'aidait pas en outre à maintenir un effet de surprise sans doute essentiel pour appréhender l'individu en cavale. Il décida alors de confier cette responsabilité au maître du son.

« Si… si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je ne serai pas contre l'idée de bloquer la sortie. Dans mon état… je serais peu disposé à maîtriser notre homme si besoin… »

En toute logique, l'Apothicaire se sépara provisoirement de son armoire à pharmacie. Avec ses frêles bras, il s'assura de déposer la valise avec discrétion. Il s'épongea ensuite le front de son bras droit, avant de prendre une grande bouffée d'air. L'acte final approchait à grand pas.

Fondant sur ma cible, j'eus la stupeur de ne trouver qu'un lièvre blessé qui essayait tant bien que mal de se sortir la patte d'une branche. Les animaux connaissaient bien mieux que nous les recoins de cette forêt, mais parfois mère nature reprenait le pas sur eux. Détachant sa patte, je le laissais partir à sa guise, blessé de cette façon peut-être réussira-t-il à s'en sortir. Pour ma part, je devais me dépêcher, si notre homme n'était pas ici et que je n'avais pas entendu de signal d'alerte de la part de mon camarade, c'était que le plan fonctionnait. La prochaine destination était donc le dernier refuge à ma connaissance, une caverne plus loin à l'Ouest.

* J'espère qu'il se trouve bien là-bas, sinon la suite de la poursuite va s'avérer compliqué... *

Je repris donc ma route vers cette dernière cachette, j'allais avoir de l'avance sur lui qui allait devoir voir un plus grand tour que moi. J'en profiterais pour réfléchir à un plan d'action, la capture était un procédé assez complexe à mettre en place. Heureusement j'avais les armes qu'il fallait pour que tout se passe au mieux, surtout grâce à notre supériorité numérique, cet avantage allait être la clé.

En haut de l'arbre que je lui avais désigné comme point de rendez-vous, il finit par arriver bien plus essoufflé que moi. Il n'avait pas eu la tâche la plus facile et son bagage dorsal ne devait pas être évident à porter.

Comme prévu il n'avait vu personne à la cabane, notre homme devait donc bien se trouver ici. Après avoir sondé la cabane, j'entendais des bruits de pas à l'intérieur, elle était habitée, aucun doute là-dessus. J'entendais aussi des bruits de respirations, notre chasse se terminait bientôt et le lapin semblait bien fatigué. Le plan était sur le point de se terminer, je m'occupais d'intercepter notre homme et lui bloquait la sortie. Avant de se mettre en position, j'expliquais rapidement mon procédé.

« Je vais le faire sortir, je l'intercepterais à ce moment-là, s'il m'échappe à toi de jouer. Logiquement l'effet de surprise aura raison de lui... Ha, ne sursaute pas quand tu entendras l'explosion, tout est sous contrôle. »

En effet, j'avais déjà omis de prévenir mes alliés lors d'une mission, je ne voulais pas revivre la même scène de panique alors que tout était fait exprès. Je me plaçais sur le côté droit, mon allié se trouvant quelques mètres plus loin sur le côté gauche. Impossible de rater la cible. Je composais un mûdras, fis un léger bruit de bouche et le bruit d'une explosion retentie derrière la caverne. Du stress supplémentaire pour notre homme qui allait sans aucun doute fuir, quand on est en cavale, le bruit d'une explosion n'est jamais très bon signe. Comme prévu il finit par sortir, d'un geste rapide je lui attrapais un bras, le déséquilibra pour le mettre au sol et finit par attraper son deuxième bras. Appuyant mon imposant poids sur son corps, il était bloqué avec aucun moyen de s'enfuir.

« Enfin on te retrouve Nijo Nagasuke... Tu as beaucoup de choses à nous dire je crois non ? »

Il ne disait rien, il semblait trembler de tout son corps, mais ne sortis pas un mot de sa bouche...

Spoiler:

Le maître des sons se dirigea vers l'entrée de la caverne, suivi au loin par l'Apothicaire. Le piège se refermait enfin sur leur proie. L'excitation de la chasse, savoir si le gibier était bel et bien présent là où on l'attendait, restait présente. Mais l'assurance de l'acolyte du galéniste ne laissait aucun doute sur la conclusion de cette traque. Ce même soldat décida de prévenir de la suite des évènements auprès de son partenaire de mission avant de se lancer.

L'Apothicaire se contenta d'acquiescer de la tête, et laissa le reste se mettre en place. Un signe incantatoire de l'adepte de l'Onkyōton transforma un simple son en une véritable détonation. Sans l'indication au préalable d'Ozuka, l'Apothicaire aurait été très certainement surpris, voire apeuré par pareille déflagration factice. En ce qui concernait leur homme, qui n'avait certainement pas été mis au parfum, la réaction fut toute autre. La peur domina ses réactions, le poussant à fuir son abri. Ses yeux, exprimant déjà une angoisse intense, s'écarquillèrent davantage à la vue du shinobi à la chevelure atypique, tandis que ce dernier l'immobilisa immédiatement.

« Que… que me voulez-vous ? Qui êtes-vous ?! Je n'ai rien fait de mal ! Je vous en supplie… »

Jusqu'à présent, l'Apothicaire n'avait semble-t-il eu aucun rôle à jouer dans cette traque. Il avait certes mis au point le plan leur permettant de s'assurer que Nijo Nagasuke tomberait dans leurs filets. Mais sa carrure chétive ne fut à aucun instant mise à contribution dans l'exercice de cette chasse à l'homme.

Il était temps pour l'Apothicaire de rentrer en scène.

Assuré de la présence maîtrisée de leur cible, l'homme bariolé s'approcha calmement de l'entrée de la caverne. Il hocha la tête, comme pour s'assurer de leur réussite. Ses yeux fins examinèrent la silhouette du fuyard. L'instant d'après, il s'absenta, et revint avec sa valise à pharmacie. Le poids du bois de cette armoire souleva un léger écran de poussière tandis qu'elle retomba au sol.

En fouillant dans les multiples tiroirs de cette armoire, l'Apothicaire trouva de quoi attacher Nijo Nagasuke afin de libérer Ozuka de sa pénible tâche. Pieds et mains liés, l'homme se calma, bien que toujours paniqué. En ligotant les poignets de sa cible, l'Apothicaire remarqua que les ongles de ce dernier étaient maculés de sang séché. Certains interstices entre les doigts étaient eux aussi teintés de ce rouge organique.

Finalement, l'Apothicaire se releva, et observa le présumé membre de la secte assis à même le sol contre la paroi de la caverne. Le ligotage était sommaire. Mais au vu de l'épuisement du fugitif, il semblait peu probable que ce dernier parvienne à s'en libérer.

« Nijo Nagasuke, nous sommes mandatés par l'Empire pour vous retrouver, et vous poser des questions à propos d'une secte prenant place aux ruines de Shito. »

Il n'eut pas le temps de poursuivre son laïus qu'il fut rapidement interrompu par l'intéressé.

« U-une secte ? Je n'ai jamais entendu parler de cette secte ! Je n'ai rien à voir avec tout ça, je vous le promet !
— Nous avons des informations que nous laissent penser le contraire. Et vos doigts couverts du sang que vous n'avez pas réussi à enlever suggèrent fortement que vous prenez également part aux sacrifices perpétrés par cette secte.
— Comment ? Je vous assure que je n'ai jamais sacrifié quelqu'un !
— Je n'ai jamais parlé de sacrifices humains, monsieur Nagasuke. »

L'homme se sentit trahi par ses propos. Conscient qu'il avait grillé son absence d'implication dans le groupe - la dite secte étant connue pour ses sacrifices humains, il décida de s'emmurer dans le silence face aux autres questions de l'Apothicaire. Plusieurs minutes s'écoulèrent sans réponse de la part de Nijo Nagasuke. Il avait employé la meilleure défense à l'heure actuelle. Mais c'était sans compter la riposte de l'Apothicaire.

L'homme aux mille couleurs retourna à son armoire à pharmacie. Le silence de l'accusé fut suivi par la valse du bois, et des produits en tout genre se succédant entre les mains de l'envoyé du Teikoku. Dos à l'homme ligoté, il fit soudain volte-face avec une fiole remplie d'un liquide coloré et d'un senbon. Il suffit d'un geste expert pour que l'Apothicaire enduise l'aiguille de ce liquide, et que l'instant d'après, le projectile de fer vienne se planter dans le bras de l'accusé. Il y eut un silence, un couinement de douleur. L'Apothicaire s'approcha de Nijo Nagasuke, les bras croisés, et observa son travail prendre forme.

« Que… que m'avez-vous fait ? Je me sens tout… bizarre… »

La panique reprit de plus belle. L'homme commença à hyperventiler. Sa peau devint plus rouge, et son corps s'échauffa, tandis qu'il suait à grosse goutte. Son cœur s'emballait. Il sentait la fin venir pour lui.

« Répondez-moi ! Qu'est-ce qu'il m'arrive ?!
— Ce qu'il vous arrive, monsieur Nagasuke, je vous laisse le deviner. Je vous ai inoculé un poison de ma conception. Libre à vous d'en apprécier les effets, du moins si vous survivez suffisamment longtemps. »

La dite préparation était vicieuse : à mesure que l'homme paniquait, les effets s'amplifiaient. Au même moment, l'Apothicaire fouilla son armoire à pharmacie, et dégotta une seconde fiole. Il la présenta de loin, entre ses deux doigts sveltes.

« Je pourrais vous administrer l'antidote que je tiens entre mes doigts. Mais pour ça, il me faudrait une raison suffisante de le faire. Que vous passiez à table, par exemple. »

Le fugitif hésita, mais les effets de la préparation de l'Apothicaire l'empêchèrent de prendre le temps d'étendre sa réflexion. Après quelques secondes de doute, il releva la tête, les yeux toujours grands ouverts.

« Tr-très bien ! J'accepte, oui, je dirais tout, je vous le promet, mais par pitié sauvez-moi !
— Bien sûr, que je le ferai. Mais pas avant que vous nous en ayez dit un peu plus sur votre secte, ses membres, et celui qui la dirige. »

Le captif était prêt à passer aux aveux. L'Apothicaire s'approcha alors de son camarade Teikokujin et lui glissa simplement:

« Il est tout à toi, à présent. »

La cible était neutralisée, une bonne chose de faite même si la mission n'était pas encore terminée. Pour me libérer de ma tâche ingrate de bloquer un homme au sol, mon camarade le ligota pour que l'interrogatoire puisse se faire bien plus simplement. Un petit sourire en coin, j'allais assister aux aveux d'un homme.

Menacer un homme, le torturer, ce n'était vraiment mon fort, mais lui avait l'air bien plus doué que moi. Sa grosse armoire en bois, son allure, un homme assez chétif pour un shinobis, comment penser que cet énergumène pour le moins original allait être si persuasif. Il remarqua immédiatement les traces de sang séché sur les mains de Nagasuke, une preuve indéniable que des choses louches se passent dans cette secte.

Il finit par se trahir tout seul, laissant penser qu'il n'était pas du genre à être quelqu'un de fort mentalement. Sous la pression, il se tu pendant plusieurs minutes, comprenant que la vérité allait finir par éclater au grand jour. Lorsqu'un prisonnier agit de la sorte, c'est qu'il sait qu'en répondant aux questions des examinateurs, il ferait des erreurs et creuserait sa tombe. Nier en bloc du début à la fin est beaucoup plus crédible que de se taire.

« Bon, il va falloir passer à la manière forte si tu continues à te taire... Qu'est-ce que tu n'aimes pas chez toi, qu'on te change quelques trucs... T'es couilles tu les aimes ? Tu t'en sers ou on les dégages ? »

Bon ok, j'ai menti, menacer, sortir des insultes, c'était tout à fait dans mes cordes, après tout je devais être capable de faire parler un homme sinon à quoi bon être un shinobis. Bien plus professionnel que moi, mon camarade retourna trifouiller dans son armoire et piqua notre cible avec un senbon. Pris de panique, il utilisa la ruse pour faire perdre ces moyens à Nagasuke, le suppliant de le sauver.

* Vraiment très doué, voir vicieux... J'espère que je n'aurais jamais à être interrogé par lui... *

Je pris place devant notre homme, prêt à écouter tout ce qu'il avait à dire.

« Je t'écoute, n'oublie rien si tu ne veux pas que l'antidote disparaisse... »

« Nous sommes une vingtaine environ... Ou-Oui c'est ça... On a tous été recruté par notre maître, le puissant Hay.... Je ne devrais pas dire son nom... Je vais mourir !!!! »

Il était de nouveau paniqué et le poison augmentait l'effet laissant place à homme incapable de se contrôler. Frappant son visage avec mon poing, je lui remis les idées en place et surtout le calma.

« Reprends où tu en étais, calme toi et concentre toi. Pour l'instant je ne veux pas de détail, je veux le nom de ton maître et votre objectif. »

Secouant sa tête comme pour faire sortir tout ce qui le dérangeait à l'intérieur, il me fixa droit dans les yeux, se servant de ma tête comme point de concentration.

« Haya Nitch, c'est le nom du maître. Nous travaillions à la résurrection du grand Shinigami, celui qui viendra nous libérer de ce monde. Le sacrifice est un rituel obligatoire pour l'invoquer, c'est l'étape la plus importante... »

« Pourquoi tu as quitté la secte alors ? »

En effet, c'était bien là le problème, que faisait-il ici ? Que fuyait-il ?

« J'étais le prochain.... Le prochain à être sacrifié... J'ai eu peur et je suis partie... Le Maître me fait peur !!! Il est horrible !!! Puissant !!!! Haaaaaaaaaaaaa je vais mourir !!!!! »

Je soufflais, la mission était accomplie, nous avions toutes les informations dont nous désirons. Je fis un signe de la tête à mon collègue pour qu'il lui administre l'antidote, je ne voulais pas que Nagasuke fasse une crise cardiaque. Il avait peut-être d'autres informations à nous donner, cela allait sans doute mener sur une mission pour détruire directement la secte à sa source...

Le fugitif décida enfin de passer à table. Sous l'impulsion de l'Apothicaire, Ozuka mena l'interrogatoire tant attendu. La pression imposée par le dit poison du vendeur de remèdes délia très rapidement la langue du membre de la secte de Shitō. Tandis que son acolyte Teikokujin cuisinait l'homme ligoté, le blondin à la tenue fantasque se tenait plus en retrait. Son regard était fermement verrouillé sur la cible de cette mission, alors qu'il se reposait contre la paroi de la grotte, les bras croisés contre le torse.

Durant toute la durée de l'interrogatoire, l'Apothicaire resta silencieux. Il observa avec une expression neutre, lui donnant néanmoins des airs de renard Nagasuke se confier auprès des envoyés impériaux. Il dévoila quelques maigres détails sur l'organisation de sa secte, en révélant notamment l'identité de leur chef. Un certain Haya Nitch. Il livra d'autres informations çà et là, fortement soutenu par quelque coup au visage pour lui redonner de l'entrain. Le poison pressait ses décisions. Son pouls effréné et son corps en sueur inhibaient le moindre doute quant au fait de livrer des informations sur sa secte. Un véritable sablier toxique s'écoulait dans ses veines, et Nagasuke ne désirait en aucun cas être témoin de sa propre mort.

Pourtant, bien qu'Ozuka estima en avoir eu assez, et demanda à écourter les peines de son prisonnier, l'Apothicaire resta insensible. Plusieurs secondes se passèrent sans que le blondinet ne réagisse. Sa réaction était difficilement visible, mais son poing serré tremblait avec une intensité jamais vu auparavant. Les mâchoires du marchand de remèdes s'entrechoquèrent également avec violence, alors que son regard devenait plus dur et froid que jamais. D'un coup, il quitta sa position pour se diriger vers Nagasuke qui l'observait avec incompréhension et une grande peur. Le coup de poing réduisit l'espace en un éclair. L'Apothicaire prit soin malgré tout de le frapper de côté pour éviter que sa tête ne se cogne contre la paroi et compromette leur mission.

Cela ne l'empêcha pas néanmoins de libérer sa colère avec véhémence contre Nagasuke qui n'y comprenait plus rien. À mesure qu'il prenait peur, et réclamait d'arrêter, l'Apothicaire continua de plus belle. Avec ses bras chétifs, Nagasuke n'avait rien à craindre de la pleine puissance du soldat Teikokujin. Pourtant, les minutes s'écoulèrent, et le blondin déchainait encore toute sa colère sur le pauvre homme. Bientôt, il s'essouffla, et alors que ses mains couvertes d'un mélange inextricable du sang et de celui de son défouloir tremblaient de fatigue, il s'arrêta. Ses yeux luisaient avec haine.

Nagasuke reprenait ses esprits dans le même temps. Il ne savait plus quoi dire, si ce n'était essayer de trouver un moyen de se sortir de ce pétrin. Quand il se plaignait pas des effets de la drogue inoculée par son tortionnaire, c'était pour supplier de l'épargner. Il répéta ce qu'il savait aux deux soldats. Cela n'intéressait guère l'Apothicaire, qui empoigna l'homme boursoufflé par le col, prêt à lui porter un ultime coup.

« Je-je… n-non non attendez ! Il… notre… euh Haya Nitch- oui, il … il disait que c'était un moine. Voilà, un moine ! Un-un ancien moine de Hayashi. Ou-oui, je m'en souviens maintenant. Je… je vous le promet ! »

L'Apothicaire conserva l'emprise sur le col de l'homme, l’agressivité en moins.

« Il dis… il disait que c'était un ancien moine, m-mais qu'il a quitté son ordre pour suivre la voie du Shinigami. J-je vous promet que c'est vrai. Alors par pitié, pitiéééé… ne me tuez pas ! »

Nagasuke craqua enfin. Il éclata en sanglots. Ses blessures le faisaient geindre avec une voix insupportable. L'Apothicaire se releva, épousseta son costume souillé de sang et de poussière.

« Je crois que nous en avons effectivement assez entendu. Il est temps de partir. »

Nagasuke l'observait désespérément, dans l'attente d'un remède à ses souffrances incompréhensibles.

« La drogue que je vous ai donné n'est qu'un stimulant fortement dosé, rien de plus. Les effets se dissiperont dans quelques heures. Je n'ai pas de raison de gaspiller un réel poison sur vous. »

Incapable d'être soulagé de son propre sort, le prisonnier fut laissé en proie à son corps en surchauffe. L'Apothicaire retourna à son armoire à pharmacie, et la replaça dans son dos. Il s'étira, puis invita Ozuka à partir en emportant avec eux leur prisonnier. Le Teikokujin prit soin de refaire les liens de Nagasuke afin qu'il puisse marcher à leurs côtés en direction de la capitale impériale. La mission touchait à sa fin.

Sur la route les conduisant à Urahi, l'Apothicaire s'emmura à son tour dans le silence. Il ne daigna pas communiquer les raisons qui le poussèrent à un tel déchainement de violence. Tout ce que le rapport de mission indiquerait à ce sujet, c'est que l'envoyé du Teikoku avait fait le nécessaire pour que l'individu dévoile des informations au sujet du culte sectaire qui sévissait dans la région. Au terme de plusieurs heures de marche, les deux soldats arrivèrent enfin dans Urahi; envoyèrent Nijo Nagasuke derrière les barreaux, et terminèrent leur journée au cœur du Palais impérial afin de déposer leur rapport de mission.

L'Apothicaire s'éclipsa par la suite, traçant sa route sur les chemins de campagne de Hi no kuni. L'homme aux mille couleurs disparut de la circulation, toujours aussi chargé de mystères.

» La secte nocturne de Shitô - Espionnage [Mission C]
» Interrogatoire ▲ Shinichi
» Rapport d'interrogatoire ✣ Hokazuka Rie
» [Quartiers du Kyoi] Interrogatoire
» Un interrogatoire inhabituel [Nara Joben]

La secte Nocturne de Shitô - Interrogatoire [PV Ami / Rang C]

La secte Nocturne de Shitô - Interrogatoire [PV Ami / Rang C]

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