En cette journée ensoleillée, l’humeur du samouraï n’était pas à la méditation profonde. Il ne la quittait jamais véritablement et pourtant, sa sérénité découlait d’un entraînement journalier intensif qu’il préférait esquiver aujourd’hui. Ses pas lents résonnèrent au milieu des couloirs du Grand Dojo des sabreurs, il avançait, la tête légèrement abaissée, son doulî cachant en partie ses yeux. D’une salle à l’autre, il pu observer quelques personnes s’entraîner, certains en groupe, d’autres seuls, aux prises avec un mannequin de bois matelassé. Il ne savait pas exactement ce qu’il recherchait. Rien du tout en soi, mais l’idée de parcourir ces lieux lui était venue dès son réveil, comme un signe du destin. Qui sait ? Peut-être ferait-il de nouveau la rencontre d’un élève souhaitant d’entraîner et partager son savoir du maniement de l’arme.
Mais alors que les mouvements de son corps se firent de plus en plus lents, il ressentit quelque chose, non pas une aura ou une essence de combativité comme ça avait déjà pu être le cas. Non, il ne ressentait pas… Il sentait.
Une odeur animalière émanait d’une des salles, trop peu forte pour que le commun des mortels la détecte, mais assez pour que ses sens aiguisés par son état constant de méditation le lui fasse remarquer. Quelques dizaines de mètres suffirent pour qu’il atteigne la salle qui semblait propager cette odeur, à l’intérieur, la forme d’une femme semblait se dessiner. Mafuyu restait attentif, hésitant d’abord à entrer, avant de finalement franchir le premier pas, curieux de ce qu’il allait trouver.
Dernière édition par Higure Mafuyu le Lun 24 Fév 2020 - 20:15, édité 1 fois
➜ Automne de l'An 203, Village de Kiri, Grand Dojo des Sabreurs
Les pérégrinations de la Tigresse blanche l'avaient rendu aussi sage que forte. Si forte que toutes les salles ordinaires du Grand Dojo des Sabreurs ne pouvaient contenir l'entraînement effréné qu'elle s'infligeait sans en subir les impacts conséquents ; à l'exception de la plus éloignée d'entre elles, qui avait pour avantage de donner en partie sur un extérieur vert de flore et à moitié noyé dans la brume. Une particularité qui ne pouvait être que la bienvenue, parce que la féline ne trouvait guère d'intérêt à un entraînement bénéfique seulement en apparence. La jolie brune était de ces enfants des bêtes qui avaient été bercés par l'intensivité et l'adrénaline du combat, depuis leurs plus lointains souvenirs. Et malgré les a priori populaires sur la gente féminine, l'élégance de son enveloppe charnelle n'entachait en rien la dangerosité de ses coups, si bien que la pugnacité lui collait à la peau et parfois, au pelage. Ce n'était pas pour rien que Reikan était la digne Fille du Lion de l'Atlas, Yasei Ragna.
Cependant, c'était en vain que la féline avait osé espérer que sa séance journalière puisse se dérouler en toute tranquillité. Pour autant, aujourd'hui, la virulence de ses exercices l'empêcha de remarquer la discrète et fraîche apparition du samouraï. Et aux yeux de ce dernier fut aussitôt révélé la véhémence qui avait investi les lieux. L'odeur bestiale qui l'avait guidé jusqu'ici n'appartenait non pas à elle, mais à lui. Un prodigieux félin à la fourrure immaculée, dont la seule taille suffisait à dissuader la moindre tentative d'interruption dans ce qui semblait être une lutte plus vraie que nature, se tenait fièrement face à l'enfant des bêtes qui se relevait à peine d'un précédent assaut. Une poignée de secondes n'eut même pas le temps de s'écouler qu'un autre la guettait déjà, alors que le Lion blanc envoyait un puissant coup de queue, similaire à un véritable fouet en ce qu'il était nimbé d'un chakra de nature venteuse, pour balayer le sol.
Mais la féline avait déjà disparu de sa position, pour se retrouver directement près de cette merveille de la nature. Le temps sembla se figer, lorsque la longue chevelure de la Fille du Vent se hérissa et que, de l'épiderme de ses bras, naquit un épais pelage rayé de noir et de blanc. De ses épaules jusqu'au bout de ses fins doigts, toute trace d'humanité venait d'être avalée pour la bestialité d'une métamorphose sans pareille. Toutefois, une telle transformation n'avait en rien été employée par hasard ; puisque l'énorme fauve revenait d'ores et déjà à la charge, avec un coup de patte dévastateur en plein sur la jeune femme. Quand bien même l'esquive aurait été envisageable, la changeforme décida ne pas s'abandonner à une telle facilité ; au point d'encaisser intégralement ce véloce élan de férocité grâce à ses deux pattes transformées. Si Shiroitora parvint étonnamment à rester en place sous l'ampleur du coup, l'impact fut tel que le sol sous ses pieds s'éclata en de multiples fissures qui en firent trembler même les murs les plus solides.[invisible_edit]
Sans prévenir, une violente bourrasque vint à éclore de la rencontre des deux bêtes pour perturber tout ce qui se trouvait autour d'elles. Chose qui, dans la logique des choses, permit aussi bien à l'énormité qu'à la combattante de se rendre compte de la présence intrusive qui s'était faufilée à l'entrée. Les affaires mises de côté par la féline, se résumant à une veste, son bandeau ninja et son brassard de la Kenpei, furent même écartées au pied d'un mur. La troublante brise se calma, permettant aux voiles orientaux et aux longs cheveux d'ébène de la féline de retourner à nouveau sous le joug de la gravité. Lentement, presque avec délicatesse, les poils qui couvraient l'entièreté de ses bras se résorbèrent à vue d’œil, révélant l'épiderme de l'un et les bandages de l'autre. Et alors que le Lion blanc ramenait sa patte au sol, la métamorphe, elle, se redressait fièrement. Malgré les signes de fatigue qui ne pouvaient tromper sur son corps, son dos persistait à rester droit.
La flamme d'éther, qui grésillait en reine dans les yeux de Reikan, se promena sur l'étranger et plus précisément sur son chapeau, avant de se planter dans le noir des siens. Il me fait penser à cet homme qui... Cette silhouette bien atypique venait d'éveiller son intérêt, au point qu'elle accorda une maigre pause à son corps. Peu importe. La native du Vent prit la parole en se laissant guidée par une curiosité presque instinctive, manquant même à sa courtoisie habituelle ; faute sûrement à l'épuisement temporaire qui commençait à la ronger.[invisible_edit]
« À qui ai-je l'honneur? »
Spoiler:
Chakra: 1S
Dernière édition par Yasei Reikan le Sam 11 Avr 2020 - 18:23, édité 4 fois
Alors qu’il passait à peine l’entrée de la large salle, les yeux du samouraï, en partie cachés par le doulî qui lui servait de couvre-chef, épièrent lentement les lieux. D’un balayage il pu remarquer une scène assez remarquable. Celle d’un combat entre deux bêtes, l’une de grande taille, le poil majestueux, l’autre, d’allure humanoïde, semblait être la force détentrice des affaires laissées quelques mètres plus loin. D’une rafale puissante, résultat de l’assaut théâtral qui prenait place en ces lieux, l’odeur se fit plus intense ; au point que le Chûnin abandonna son réflexe sensoriel de la traquer, maintenant certain de son origine.
Ses yeux partirent épier la forme humanoïde alors que celle-ci se tournait vers lui, le dos arqué, signe d’une fatigue liée à la dureté de l’entraînement, pour lui échanger les positions. Il n’était plus l’homme en quête de réponse, mais bien la cible d’une interrogation qu’il ne tarderait pas à éclaircir.
Le regard apaisé et la respiration lente, le samouraï représentait en tout point le quotidien qu’il s’efforçait de maintenir. Celui d’un adepte perfectionniste de la méditation qui ne faisait que repousser les limites de ses voyages spirituels. Sa voix calme relâcha quelques phrasés largement articulés, prêt à répondre à la métamorphe.
...Un curieux attiré par le fléau de sa sensorialité.
Ces premiers furent le début d’un enchaînement qui pouvait paraître réfléchit, mais bien le fruit d’un cerveau en partie perturbé par la majestueuse bête qui s’imposait au sein de la salle. Il porta alors lentement son regard vers l’immense Lion, dont les poils vibraient encore de l’atmosphère guerrière régnant.
Et je ne pouvais m’imaginer une pareille créature en ce monde. ~ Quelle superbe.
Non le fruit de la déclaration d’un fétichisme pour le corps poilu de la shinobi, le samouraï aurait eu les yeux rayonnant face à la vue de la grande bête si son apaisement total ne le gardait pas de ses émotions. Il était émerveillé du félidé, bien plus qu’il ne l’imaginait lui-même.
Reprenant le fil de ses pensées, le samouraï renvoya ses yeux vers celle à qui il s’adressait. Effectuant les premiers pas dans la salles et brisant par la même occasion d’aspect statuaire qu’il affichait jusque là. Des pas mesurés qui ne lui permirent que d’entrer pour se présenter, préférant tout de même ne pas interférer dans l’espace des deux créatures ; plutôt amené dans un rôle de spectateur à vrai dire.
Aisatsu*. Je me nomme Higure Mafuyu, Chûnin de la Brume, samouraï de l’ombre de mon état. ~ Je n’avais pas pour idée de perturber la violence de vos échanges, mais je me rends compte que ma curiosité m’aura amené à la découverte d’un animal que je n’aurais jamais espéré croiser un jour...
挨拶 – Salutations.
Des mots simples pour essayer de justifier l’origine de sa perturbation, sans pour autant réellement se justifier ; bien trop pris par l’aspect de l’immense bête.
La mimique rendue par Reikan, lorsqu'elle plissa les paupières, avait eu pour seul but de traduire la naturelle méfiance qu'elle éprouvait, tant que l'identité de celui qui venait de s'imposer n'était pas révélée au grand jour. D'ailleurs, l'insistance avec laquelle ce dernier se permit d'observer son compagnon d'armes n'eut que pour seul effet d'accentuer davantage son instinct presque trop préventif. Car la Fille du Vent savait son majestueux ami convoité, depuis qu'elle s'était rendue au cœur des arènes gladiatrices pour mettre à mal le réseau d'esclavagisme qui y régnait et briser les chaînes de l'animal. Même au cœur de la Cité Brumeuse, la prudence était probablement de mise, dans la mesure où la féline n'avait surtout fait que gagner en renommée depuis son retour de l'île d'Asosan. Et un Lion blanc, aussi grand et féroce, ne pouvait être qu'une préciosité parmi les raretés de la nature. Une véritable perle que Reikan s'était jurée de protéger et inversement, en signant une promesse indélébile de son propre sang à son égard.
Pour autant, le regard de cet étranger ne mentait pas. Très vite, la Tigresse blanche remarqua la discrète flammèche admiration qui rougissait dans les yeux de son interlocuteur, pour la grandiose bête. Puis vint une présentation concrète de l'individu au curieux chapeau, qui ne manqua pas de rassurer celle qui avait déjà bien repris son souffle et qui, de ce fait, s'était déjà préparée à ce que la situation prenne une tout autre tournure. Si ce n'était qu'à quelques détails près, le respectueux samouraï était d'un grade sensiblement similaire à elle. Alors, pour toutes ces raisons, Shiroitora écarta les doutes qui voilaient ses pensées et pencha avant tout l'échine vers l'avant, pour rattraper le manque de politesse dont elle avait fait preuve. Lorsqu'il fut redressé, son visage fermé n'était plus qu'un mauvais souvenir, si bien qu'elle avait habillé ses lèvres charnues d'un malicieux sourire en coin.
« La curiosité est un vilain défaut, aussi bien qu'elle est un utile remède contre l'ennui. Je suis Yasei Reikan, Chūnin de la Brume et fière enfant des bêtes. »
La Fille du Lion de l'Atlas pencha la tête sur le côté à la manière d'un félin, alors même que son regard myosotis s'était baladé sans gêne sur la silhouette de Mafuyu, jusqu'à se planter sur le fourreau qui ornait sa ceinture. Entre-temps, l'énormité à la pure fourrure ne perdit pas de temps pour se rapprocher presque aux côtés de la jeune femme. Le pelage d'une de ses pattes avants caressa tendrement le bras droit de l'enfant du Désert, qui était couvert de bandages apparemment en fin de vie, car trop abîmés par le labeur de son intensif quotidien. Intriguée par le combattant, Reikan en avait presque oublié que l'entorse tout juste faite à son entraînement s'allongeait dans le temps.
Si la Fille du Vent nourrissait une idée très stricte de la Paix et un puissant sens de la Justice, au point d'en être parfois trop sévère avec elle-même et autrui, il y avait toujours cette même chose qui l'obligeait à être plus indulgente ; les rares Hommes capables de reconnaître la valeur de l'animal. Au fond, celle qui mettait sur un piédestal les membres de son clan bestial ne pouvait que grandement estimer ceux qui appréciaient la compagnie des bêtes.
« Je suis ravie que Rakasha* te fasse autant d'effet, tant que cela ne t'apporte que du bon. Je ne t'ai jamais croisé dans le village, auparavant. Se pourrait-il que tu sois venu ici pour t'entraîner? Si c'est le cas, sache qu'il y a assez de place ici pour... bien t'accueillir. »
Cette singulière malice qui parcourait chaque trait de son faciès s'intensifia, révélant l'espièglerie dont était capable la jolie brune. Et pour cause, elle venait d'inviter en toute subtilité le samouraï à peut-être croiser la lame et les griffes, s'il en avait l'envie. Parce que si le Lion blanc pouvait amplement suffire à n'importe qui pour progresser dans le domaine des arts martiaux, il semblait que la féline ne savait pas, ou plutôt ne voulait pas, limiter ses efforts.[invisible_edit]
rakasha:
*Rakasha (litt: राकाईश, Seigneur de la Pleine Lune)
Dernière édition par Yasei Reikan le Sam 11 Avr 2020 - 18:03, édité 2 fois
Le regard ne cachant ne pouvant toujours pas cacher l’admiration qu’avait provoqué la vue de l’énorme bête à ses yeux, le samouraî ne perdit pas de temps pour répondre. Il n’était pas venu croiser le fer, mais pour aucune raison au monde il aurait refusé une invitation pareille. Peut-être était-ce l’unique fois qu’il apercevait l’animal, sa discrétion au village faisant partie de son mode de vie.
Sa voix traversa l’espace, son regard maintenant dirigé, avec difficulté, vers la femme à l’aspect féroce. De nouvelles questions lui vinrent à l’esprit.
Et c’est avec grand respect que j’accepte cette invitation. ~ Et donc, loin de moi l’idée de trop m’immiscer, mais je me demande le genre de lien qui vous unie tout deux. Ton aspect affiche une animalité qu’il serait difficile de ne pas remarquer.
Le samouraï laissa planer quelques courts instant pour respirer, contemplant maintenant son interlocutrice. Jamais encore il n’avait eu affaire à avec un membre du Clan Yasei. Du moins, il se doutait de son appartenance à celui-ci, se référant aux légendes qu’il avait pu croiser au cours de ses voyages aux travers du monde et de l’épiation de centaines de conversations de comptoirs et casernes.
Tu fais partit des Yasei du village, j’imagine ? Je n’en avais encore pas croisé un seul. Ma patience et mon désir perpétuel d’apprendre commençait par être mis à mal. Il était temps que je rencontre l’un d’entre vous.
Un grand respect s’afficha au travers de ses paroles, sinuant le rythme de sa voix apaisée et de son corps serein. Il venait lui-même d’une lignée de Tetsu au passé turbulent et malheureusement prestigieux qui lui avait fallu la quasi-extinction des siens. Mafuyu respectait depuis toujours ceux qui représentaient certaines des plus grandes lignées et clans du monde.
Quelques pas de plus au sein de la salle en guise de signature du pacte qui le joignait à l’entraînement. Le samouraï tourna de nouveau son regard vers l’immensité de la bête au pelage blanc qu’il ne pouvait stopper de regarder.
Enchanté Rakasha… ~ Ton nom sied parfaitement ton aspect. Je n’aurais pas pensé croiser un Seigneur lors de mon réveil.
Ses yeux continuaient de fixer l’animal alors que son dos s’inclina de nouveau. Le Chûnin ne paraissait pas spécialement prêt à combattre, et pourtant, il l’était en permanence. Traces d’une vie entière passée à survivre et tuer pour rester en vie. Il avait toujours été traqué. Plus aucun moment n’était signe de sécurité pour Mafuyu.
La Yasei à la peau dorée par le soleil de Kaze ne put se retenir de laisser se glisser un mesquin sourire au coin de ses lèvres charnues, réaction presque instinctive qui faisait suite à la décision de l'homme au doulì de rejoindre le centre de la salle d'entraînement. Sans détour, cet Higure Mafuyu ne perdit pas plus de temps pour faire part à l'enfant des Bêtes et son Lion blanc des questions qui le taraudaient, lui qui était empreint de marques de politesse aussi évidentes que le nez au milieu de la figure. Nul doute que sa curiosité de combattant s'était laissée piquer, créant une entorse béante et surtout imprévue dans le déroulement de sa journée. Mais peut-être que cela en valait bien plus la peine que tout autre activité, en définitive, puisqu'il n'était pas le seul dont l'intérêt avait été titillé lors de cette rencontre. De surcroît, il n'hésita ni à la questionner sur cette transformation bestiale, qui faisait foi de son appartenance aux métamorphes ni à couvrir davantage d'éloges son plus fidèle ami.
Naturellement, Reikan dévia son regard éthéré sur le côté pendant que Rakasha revenait au plus près d'elle, du haut de ses sept mètres seulement au garrot. De façon délibérée, elle laissa tomber un silence symbolique avant de venir le poignarder et l'éventrer de son plein gré, dardant ses pupilles d'un profond bleu roi sur la silhouette de son vis-à-vis.
« Devant toi se tient une fière enfant des Bêtes née dans le Désert mais éduquée par le monde, aujourd'hui au service de la Cité Brumeuse en tant qu'Héroïne de l'Eau. Quant à ce qui m'unie à Rakasha... »
La Fille du Vent, dénuée de la moindre trace de gêne, plissa les paupières sans quitter de ses yeux céruléens le samouraï de l'ombre. Sur le coup, difficile de savoir ce que la jeune femme avait en tête lorsque c'était la première que l'on croisait sa route ; non pas qu'elle était trop nébuleuse, mais plutôt que sa bestialité et son exotisme ne faisaient qu'épaissir le voile de mystères qui la couvrait. Son joli minois eut vite fait de se peindre d'une couche de malice sans pareille, alors que son côté espiègle – intimement lié à la personnalité prédatrice, revenait à la charge. Cela lui valut même un petit coup d’œil de la part de l'immaculé félin, avant que celui-ci ne fasse aussi peser son attention sur Mafuyu. Celui qui souhaitait satisfaire sa soif de connaissances, en découvrant la nature du lien a priori monstrueusement solide qui rattachait ces deux êtres à part entière, n'allait pas en finir déçu.
« ...peut-être serait-il mieux que tu parviennes à le découvrir au détour de coups, et non pas de mots parfois cruellement creux de sens. Qu'en dis-tu? »
Sans le moindre échange physique enre eux, la Yasei et le Lion blanc se dressèrent côtes à côtes, comme si prêts à se lancer dans une rixe qui promettait bien des choses. Tout à coup, l'épiderme des avants-bras de la Fille du Lion se mit à disparaître, avalé par l'apparition d'une sublime fourrure tigrée qui grimpa jusqu'au bas de son cou. Ses membres devinrent d'épaisses pattes et sa longue chevelure de jais se rendit plus dense, plus sauvage, comme si la totalité de son être était traversé par une vague de chakra bestial. Pour l'heure, Rakasha demeura silencieux devant le natif du Fer admiratif, accentuant plus encore le poids de l'énigme qu'il incarnait sur le flanc de la Tigresse blanche. Seul le glas de la violence attendait de résonner entre ces murs, désormais.
Épris d'un silence de marbre, le samouraï laissait s'échapper une sérénité rare dont il était le seul maître. Les paroles de la femme agirent comme un breuvage venu combler les lacunes intellectuelles qu'il avait à propos du Clan Yasei. Rapidement, le corps de celle-ci se mit à changer, arborant un pelage autour de son enveloppe humain. La mixité de sa forme physique parue comme une claque; à la fois étrangère et intriguante, de celles qui forment à l'apprentissage et dont la douleur rappelle la force de frappe d'une paternité empreinte à partager.
La voix de Mafuyu perça de nouveau l'espace, apaisée, relâchant quelques mots articulés.
Tu as raison. ~ Le savoir n'attend pas.
A ces mots, le samouraï laissa ses muscles se relâcher et son cerveau se fondre au sein de pensées extasiées. Aucune expression ne pouvait à présent prendre le dessus. Il restait à la fois raide et souple; concentré et apaisé; heureux et horrifié. Le chakra parcourant les divers canaux de son corps agit comme un stimulant qui n'avait de cesse de le motiver à cacher son véritable jeu; à dissimuler ce qu'il dissimulait au fond de lui. La personnalité fulgurante d'une âme vengeresse.
Le léger courant d'air qui s'engrouffra à cet instant dans la salle fit valser les pliures des couches de tissu souple que Mafuyu arborait. N'empêchant à aucun moment sa main gauche d'aller enserrer le fourreau se trouvant du même côté de son corps, au niveau du bas des hanches. D'un regard désintéressé, le samouraï fit comprendre que son état méditatoire était plein et prêt à démarrer les hostilités.
Sans même un mot, il se mit à parcourir l'espace en un mouvement fluide, presque artistique, afin de s'approcher. Sa main droite partit en direction de son fourreau pour accrocher sa lame, sans réellement agir; début d'une illusion ciblée vers la change-forme. L'invocation ne verrait rien de l'attaque qui allait partir; seulement l'hostilité d'un samouraï empoignant le pommeau de son katana, sans jamais réellement le dégainer.
Quant à la femme. Elle allait faire connaissance avec la rapidité d'une technique ancestrale de maniement de la lame. Le Iaidō.
Chez Yasei Reikan, la bestialité semblait n'avoir rien de laid. Son exotisme venant d'ailleurs faisait presque oublier aux plus étourdis les dangers de son état mi-humain mi-animal. Et sa délicatesse, même en tant que fière et digne guerrière de Kiri la Grande, n'arrangeait en rien le contraste entre ce qu'elle laissait paraître et ce qui sommeillait au fond de ses entrailles. Mais si l'enfant des Bêtes avait grandi derrière le guide de la férocité avec rigueur, le Samouraï paraissait s'amuser avec les limites de son carcan et de son esprit en les outrepassant sans le moindre mal. Scrupuleux, aérien et vif dans l'âme, tout dans l'attitude de l'homme au doulì montrait à quel point sa confiance en lui pouvait espérer rivaliser avec celle que nourrissait la jolie brune. De pauvres détails en apparence, qui pourtant constituaient toute la beauté de la découverte mutuelle entre deux combattants qui se profilait dans l'enceinte du Grand Dojo des Sabreurs. Une découverte inhabituelle, qui allait se faire par la force.
Lame contre griffes et crocs allaient se mêler pour ne faire naître qu'un combat d'exception.
Le courant d'air balaya tant les lisses atours de Mafuyu que l'épiderme de velours de Reikan, dont la peau cuivrée, mariée à un pelage de contraires, se laissait caresser par cette brise pendant que le combattant au fourreau venait d'accrocher le manche de son arme. Le bruit aiguisé du métal vint frapper les tympans de la changeforme, qui ne se doutait pas de la supercherie et crut être en proie à un assaut conséquent. Sous les yeux de son invocation, la Fille du Lion effectua un déplacement très rapide sur le côté pour échapper à ce qui se déroulait seulement derrière les barreaux de son psyché. En retombant sur ses coussinets et en retrouvant la réalité, elle entendit la voix caverneuse de Rakasha l'indiquer en même temps que son regard d'éther était retourné se blottir auprès de la silhouette de son adversaire du jour et qui tenait encore son katana rengainé.
« Méfie-toi, Reikan. Cet homme m'a l'air de jouer sur l'esprit. »
D'un petit mouvement de gueule vers l'avant, le Lion blanc intima à son invocatrice de jeter un œil à l'absence flagrante de dégâts sur le sol à son ancien emplacement. Devant ce constat, la Yasei à la peau dorée par le soleil du Pays du Vent fronça les sourcils et essaya de démêler le vrai du faux à l'intérieur de ce qu'il venait de se passer. Du Genjutsu? Encore ignorante du moyen de propagation de l'illusion, la féline remonta son attention sur cet individu au couvre-chef. Consciente du manque d'attention qu'elle ne voulait plus retrouver, elle dressa sa dextre pour faire signe à Rakasha d'agir. Sans plus attendre, sa queue de fauve ne fit qu'un tour avant de frôler le sol à l'instant où Reikan fit glisser d'une de ses manches un fumigène. Un nuage opaque fut relâché et le tapis d'entraînement se souleva sous l'impulsion de la distraction, afin d'amoindrir le champ de vision du natif du Pays du Fer. Et d'un coup, après la formulation d'une série de mudrās, elle profita de l'effet de surprise pour laisser une tête de Lion faite de Vent sortir à mi-chemin de la fumée et se diriger droit sur la position du Samouraï.
résumé:
Santé: Tout va bien. Chakra de Reikan: 1S 2B 2D Chakra de Rakasha: 1D
Récapitulatif du tour: Reikan esquive le coup de lame qui n'est en fait une illusion, détail qu'elle ne saisit qu'après-coup avec l'aide de Rakasha et du décor l'entourant. Le Lion blanc soulève avec sa queue de la poussière, le tapis du Dojo ainsi que la fumée du fumigène relâchée par son invocatrice pour gêner la vue de Mafuyu, alors que la métamorphe propulse aussitôt un projectile Fūton en sa direction pour le surprendre.