On va pas se mentir c'est un solo mais si quelqu'un veut participer... go.
Taida 怠惰
Une envie soudaine l’a pris quelques jours plus tôt. Renouer avec son passé. Ou plutôt, retourner sur les lieux de son enfance afin d’en faire définitivement le deuil. Les souvenirs sont toujours aussi frais qu’auparavant, si bien que le jeune homme redoute ne jamais s’en débarrasser. Certains tireraient peut-être leur force de la, lui souhaite juste s’en débarrasser. Ainsi, autant remonter à la source. Aller la ou tout a commencé pour se débarrasser une bonne fois pour toutes de ce qui le tiraille. Qui sait ce que cela pourrait provoquer ?
Ainsi, profitant de quelques jours de repos durement gagnés -sa paresse a été mise de côté spécialement dans ce but- , Akira s’empare d’un sac rempli à moitié et s’engage sur la route. Malgré toutes ces années, au moins 15 ans, le soldat se souvient parfaitement de la route menant à son village. Il en aura au moins pour deux jours de marche, peut-être moins en se pressant… mais l’Hijine n’est pas sûr d’être impatient d’y retourner. Ses doutes sont nombreux et rien ne garantit qu’il ne rebroussera pas chemin en pleine route. Qui pourrait le lui reprocher de toute manière ?
Akira s’engage alors. La route est sèche et il fait plein soleil, les conditions sont optimales pour partir. S’il apprécie la pluie et l’obscurité, le jeune homme commençait à en avoir marre d’y être confronté à chaque expédition qu’il fait. Aussi rares soient-elles d’ailleurs, comme si le temps lui-même voulait le dissuader de sortir. Faire la sieste et flâner toute la journée est tellement plus simple. Pourtant, depuis son engagement sur la voie du samouraï, Akira a redoublé de motivation. Comme s’il avait toujours été un bourreau de travail. Personne ne pourra prétendre le contraire de toute manière, puisqu’il ne fréquente personne. Et ce fait remonte précisément à son enfance. Tout en découle. Les traumatismes façonnent, Akira le sait mieux que quiconque.
Avançant par automatisme, le soldat rêvasse. La route ressemble pour le moment à toutes les autres routes du pays. C’est à se demander comment peut-il se souvenir du trajet si tout est identique. C’est comme s’il suivait une aura particulière. Une intuition. Akira sait quel chemin emprunter et ou il le mènera. Reste à savoir s’il sera reconnu… car personne n’a dû oublier la mort de son père. Un homme seul, assassiné alors que son jeune fils a disparu ne laisse pas beaucoup d’hypothèses plausibles. Un enlèvement, ou le fils lui-même a tué le père avant de fuir. Et le voir revenir des années plus tard comme si ne rien était validerait sûrement la seconde. Néanmoins, reconnaître l’enfant qu’il était en le voyant aujourd’hui serait bien impossible. Tout est différent, du physique au mental.
“ Hm ? “
Akira lève la tête vers le ciel. Une goutte vient de lui tomber sur le bout du nez. Et il semblerait que le ciel soit couvert. Qu’il en soit ainsi. Il semblerait que ses sorties ne puissent avoir lieu sans averses. Signe des dieux ou simple hasard persistant ? Qui sait. Les perles de pluies ne feront que renforcer la mélancolie qui s’empare déjà de lui.
Dernière édition par Kogami Akira le Dim 19 Juil 2020 - 23:39, édité 1 fois
Le chemin devient rapidement boueux et escarpé, si bien que le soldat en vient à user du chakra pour faciliter ses déplacements dans la fange. La sensation de l’eau froide s’introduisant dans les chaussures est des plus désagréables et lui promet un bon rhume. Son voyage ne pouvant être interrompu par une telle fioriture, le jeune homme décide finalement de dévier du chemin pour se déplacer dans les arbres. Ça lui coûtera peut-être un peu plus d’efforts, mais aujourd’hui n’est pas un jour comme les autres. La paresse n’a plus d’emprise sur lui. Quand Akira a un but en tête, rien ne l’en détourne.
Et alors qu’il court en direction de son passé, le soldat est arrêté par un barrage. Celui-ci est habilement placé à la sortie du chemin boisé, la ou aucun arbre ne peut couvrir un éventuel petit malin tentant de les contourner. Ainsi, Akira se voit bien obligé de s’arrêter devant. Le barrage est rudimentaire, seulement quelques planches disposées pour former une sorte de barrière servant plus pour le symbole que pour réellement arrêter quelqu’un. Le véritable moteur ce de barrage sont bel et bien les quatre bandits armés disposés devant, dont le plus grand s’avance vers Akira.
“ Hoy hoy. Droit de passage l’endormi. 1000 ryos et tu passes, c’est simple. “
Articule t-il avec de grands airs devant un Akira impassible. S’il aurait en temps normal soupiré, levé les yeux au ciel ou se serait frayé un chemin sans leur porter attention, le soldat d’aujourd’hui dégaine son katana si vite que le bandit se retrouve avec une lame sous la gorge avant même de comprendre ce qui lui arrive. Manifestement, ses entraînements sur la voie du samouraï l’ont réellement fait progresser. Et ce, sans même qu’il ne s’en rende compte.
“ J’ai des choses importantes à faire, écarte toi rapidement je ne le dirai pas deux fois. “
Balbutiant et tremblant, le gaillard finit par se décaler sur le côté sans pouvoir faire grand chose. Au moins sait-il se montrer raisonnable. Du moins à première vue. Car comme tout lâche qui se respecte, une fois qu’Akira passe… celui-ci voit l’ombre du bandit brandir son arme dans sa direction. L’attaque dans le dos, un classique indémodable pour les moins que rien. Akira l’aura prévenu. D’un mouvement fluide et vif, l’Hijine transperce le malandrin en retournant son sabre pour l’envoyer en arrière, laissant l’homme agoniser au sol sous les yeux de ses camarades.
Sans même leur accorder un regard, le soldat continue ensuite sa route pendant que les petites racailles s’enquièrent de l’état de leur camarade. Cet événement l’a contrarié davantage. Tout lui rappelle qu’à mesure qu’il renoue avec son passé, son enfance, la violence est omniprésente. Elle le tient à la gorge sans vouloir le lâcher, sauvage, froide et inéluctable. Son pas accélère. Vivement que tout ceci prenne fin, qu’il fasse enfin le deuil de ce passé révolu.
Les dernières lueurs du crépuscule prennent fin pour s’évanouir à l’horizon. L’obscurité est désormais totale, en plus de l’averse infinie s’abattant sans cesse sur lui. Ces conditions lui rappellent un peu trop les années passées en tant que vagabond, ou le simple fait de se nourrir devenait un combat. La pluie tombait sans cesse en cette époque, plus encore qu’à Kiri. L’obscurité, sa seule amie car facilitant ses déplacements discrets, l’étreignait chaque soir dans son voile froid… ce qui en faisait autant une alliée qu’une ennemie. Et le voilà qui la retrouve en ces conditions. Comme s’ils ne s’étaient jamais quitté. En revanche, l’endroit vers lequel il se dirige… n’est pas son ami.
“ … “
Quelque chose est différent. Akira le sent et le voit. La lune… la lune est iridescente. Sa lumière éclaire tant que même dans cette nuit noire, le chemin reste visible. Serait-ce un signe ? Elle n’a jamais brillé autant. Ou peut-être est-ce la première fois qu’il le remarque parce qu’il en a besoin ? Qui sait. Le soldat prend les choses comme elles viennent. L’astre lunaire sera son ami pour cette nuit. Il est tout de suite moins difficile de faire le trajet à deux.
Ainsi, le temps semble s’être figé. La route défile sous ses yeux au rythme de ses pas sans que rien ne change autour de lui, sans que personne ne vienne le troubler. Peut-être fait-il du surplace ? Peut-être s’est-il trompé de chemin ? Non… il ne manquerai jamais sa destination. Pas celle-ci, pas cet endroit chargé d’histoire. Son histoire. Mais comment compte t-il l’effacer déjà ? Le jeune homme n’y a même pas pensé. Comme s’il comptait réfléchir à une solution une fois sur place… c’est toujours ainsi qu’il a fonctionné après tout. Vivre au jour le jour. Faire sans avoir prévu la suite. S’il avait pensé aux répercussions, sans doute n’aurait-il pas tué son père. Sans doute ne serait-il pas soldat aujourd’hui. Et sans doute ne serait-il pas en vie.
“ … “
Plusieurs heures passent. Akira ne sent plus ses jambes, il n’y pense pas. Les premières lueurs du jour vont arriver et s’il prend la moindre pause, le jeune homme n’est pas sûr de continuer le chemin. Peut-être changera t-il d’avis en réfléchissant. Peut-être prendra t-il peur. Il est trop tard pour revenir sur sa décision de toute manière. Il le sent. L’atmosphère a changé. Quelque chose approche. Ou plutôt… Akira s’approche de quelque chose.
Le village. Le chemin que suit le jeune homme depuis plusieurs heures désormais s’arrête au bord d’une longue falaise donnant vue à une vaste étendue verte située en contrebas. D’ici, l’aurore est parfaitement visible et majestueuse. Comme si le soleil était à portée de main, caché derrière cette colline au loin. Mais surtout, un petit point noir vient entacher cette étendue de verdure baignée dans la lumière sanctifiée du soleil. Un village. Un petit village d’une trentaine d’habitants. Akira ne l’a jamais vu d’ici. Mais il ne pourrait pas passer à côté sans le reconnaître. Les maisons, l’odeur de la fumée s’échappant des cheminées… rien n’a changé depuis toutes ces années, ce qui est aussi terrifiant que rassurant.
“ … “
Akira reste immobile un instant. S’il s’attendait à ressentir quelque chose, un haut le coeur, des sueurs froides, une sensation de dégoût… il n’en est rien. Peut-être a-t-il surestimé l'impact de son passé sur ce qu’il est ? Ce voyage n’aurait alors aucun sens. Pourtant, le simple fait d’avoir décidé de venir lui donne déjà un sens. Une signification. Il serait idiot de s’arrêter maintenant… surtout que son ancienne maison est peut-être toujours la. Ainsi, la gorge serrée, Akira commence à descendre le long de la pente escarpée menant en contrebas. C’est étrange. Le village semble comme piégé dans un creux, ce qui ne fait que renforcer cette impression de malfaisance, comme s’il était nécessaire de le tenir à l’écart du monde. Le soldat sait pourtant très bien qu’il ne fait qu’extrapoler.
Le village se rapproche. Comme s’il approchait lui-même d’un Akira immobile. Plus les formes se dessinent, plus celui-ci semble menaçant. Les habitations se font de plus en plus haute, étouffantes, imposantes… et l’air étouffant à mesure qu’il approche. Finalement, le jeune homme a pensé trop vite. Tout ici le fait réagir de manière épidermique. Ses poils s’hérissent, sa mâchoire se comprime… et son coeur se serre. Ce n’est pourtant pas ce qu’il a vu de pire. La conquête de Kumo, le trajet jusqu’à Kiri, sa vie de vagabond… cet écho du passé ne leur arrive pas à la cheville.
Pourtant, quelque chose cloche alors qu’il s’arrête aux portes du village. La fumée a beau s’échapper des habitations, signifiant une activité récente, il n’y a pas âme qui vive dans les rues ou les champs attenants au village. Pas une bonne femme étendant son linge à la fenêtre, pas un paysan au travail, pas même une poule errant dans les rues à la recherche d’un grain à bécotter. Rien. Rien, si ce n’est un vacarme émanant de la taverne du village. Un vacarme semblable à une fête ou quelconque célébration. Curieux, Akira décide de s’y rendre sans vraiment savoir à quoi s’attendre.
Les bruits s’accentuent à mesure qu’il approche fastidieusement de la taverne. Des rires gras, des bruits de verre s’entrechoquant, de la musique jouée si faussement qu’un pianiste s’en arracherait les oreilles… et des paroles sans queue ni tête. Akira ne cherche même pas à les comprendre. Il s’agit manifestement de divagations proférées par des individus complètement saouls. Quelle idée de boire à cette heure, ce village serait-il descendu si bas ?
Alors qu’il passe la grande porte d’entrée ouverte, l’Hijine tombe sur un spectacle désolant. Des dizaines, des vingtaines d’hommes attablés autour de choppes de bières amoncelées, de plats à moitié entamés et de couverts vides ornent la salle. Ceux-ci rient aux éclats, se servent au bar, dansent, dorment parfois à même le sol au milieu de plusieurs tables et chaises renversées au sol. Akira n’en reconnaît aucun. Ce n’est de toute manière pas étonnant, le jeune homme n’est jamais sorti autrement que pour aller aux champs au cours de toute son enfance. Les visages sont troubles. En revanche… le soldat est sûr que ces gens ne sont pas des habitants. Leurs vêtements, les armes qu’ils portent à la ceinture, ce ne sont pas des paysans.
“ … “
Ceux-ci ont tout l’air d’être des bandits. Des parasites installés après avoir dégagé les occupants. Mais ou peuvent-ils bien être ? C’est la mine sombre qu’il s’avance au milieu de la pièce, cherchant du regard la moindre explication, la moindre personne un peu plus lucide que les autres. Lorsque son regard se pose sur le piano, Akira remarque une jeune fille, peut-être vingt ans à peine, pianoter les touches de manière hasardeuse. Sa longue crinière blonde ne peut cacher les tremblements de son corps, comme si elle était terrifiée. Et au vu de la manière dont le gros bras situé à sa droite est penché au dessus d’elle, nul doute qu’elle joue sous la contrainte.
“ Bordel, joue mieux qu’ça ! C’est une cacophonie ! “
S’exclame le gaillard.
“ Je… je vous ai dit que je ne savais pas jouer… “
Bredouille la jeune femme terrorisée. Mais alors qu’il s’approche pour en apprendre plus, le soldat sent une main lui agripper l’avant bras. C’est un autre homme à l’air plus lucide qui l’interpelle pour le tirer vers la sortie.
“ Viens par la mon gars, faut aider à se débarrasser des corps. “
Dit-il sans le laisser s’expliquer. Un dernier regard placide en direction de la jeune femme et Akira disparaît dehors. Il aura tout le temps de l’aider plus tard. Ou pas.
L’homme le mène jusqu’à l’arrière du village, du côté des enclos. Et à l’instant même ou Akira arrive sur les lieux, le jeune homme est pris d’un violent haut le coeur qui manquerait presque de le faire dégobiller. L’odeur est infernale. Une odeur de pourriture, de putréfaction. De nécrose. Une véritable horreur, l’horreur que l’on ne peut sentir que sur les lieux d’un champ de bataille trois jours après la fin des combats, la ou les corps commencent à macérer dans la boue. Et il y a bien une raison à cela. Plus loin, au beau milieu de l’enclos des vaches, préalablement vidé de toutes ses bêtes, un charnier d’humains trône en majesté.
“ … “
Stoïque, le soldat fixe cette oeuvre macabre d’un regard translucide. S’il ne reconnaît pas les visages, de toute manière souvent méconnaissables quand les corps n’ont tout simplement pas été décapités, Akira reconnaît sans mal les villageois. Ça ne peut être qu’eux. Leurs habits évoquent des paysans, des femmes au foyer, des habits de travail. Manifestement ne s’attendaient-ils pas à se faire attaquer de la sorte. Plusieurs hommes sont disposés autour, aspergeant les corps d’huile en sifflotant ou discutant de banalités contrastant totalement avec leurs actes.
“ Ils ont de sacrés bonnes femmes, dommage qu’on ait pas la place pour en embarquer une ou deux. “
Commente l’homme l’ayant guidé jusqu’ici avant de rapprocher un peu plus les corps entre eux afin d’en faire un tas plus compact. Ainsi soit-il. Ses efforts sont réduits à néant. Peut-être que s’il était venu quelques jours plus tôt… rien de tout ceci ne serait arrivé. Pourtant, Akira n’éprouve ni colère ni regret. Ces gens sont des inconnus et ce village n’est rien d’autre qu’un souvenir douloureux à ses yeux. Peut-être est-ce même mieux ainsi. Devrait-il les remercier ou leur en vouloir ? Ses pensées sont si enchevêtrées qu’il en devient difficile d’en retirer quelque chose de valable.
Ah, si seulement était-il resté faire la sieste…
“ Et quel est le projet ensuite ? “
Demande t-il sans quitter de chanier humain des yeux. Les bandits jettent alors une torche sur l’amoncellement de cadavres, qui s’enflamme immédiatement au contact de l’huile. Les corps brûlent, fondent presque, l’odeur tourne rapidement de la putréfaction au grillé. Comme de la viande cuite. Akira a rarement vu plus immonde. Mais il lui est impossible de savoir quoi faire.
“ Hum, on va profiter un peu des lieux et quand on en aura marre ou que l’empire aura entendu parler de ça, on passera à un autre village. Avec le bordel en c’moment c’est facile t’façon. “
Répond l’homme en retournant à ses côtés pour observer le brasier d’un air satisfait, les bras croisés.
“ Tu nous a pas beaucoup aidés dis moi. “
Le voyage semble se terminer ici. Akira ne devait rien à ces gens. Et même si c’était le cas, il est trop tard pour les sauver. Le méritaient-ils ? Probablement pas. Chacun faisait sûrement de son mieux pour survivre, labourant la terre, récoltant l’eau de pluie, chassant pour subvenir aux besoins de leur famille et du village. Tant d’efforts réduits à néant. Tant d’années pour rien. Enfants, femmes, vieillards, tous brûlent au final sur le même brasier. Quelle ironie. Et le voilà qui pense déjà à repartir. Il est inutile de s’apitoyer ou de plaindre leur sort. En revanche, il lui reste une dernière chose à faire. Pas en tant qu’homme, ni en tant qu’Akira ou en tant que shinobi. Mais bien en tant que soldat de l’empire du feu.
“ Gargl… “
L’homme se voit soudainement transpercé d’une lame au niveau de la gorge. Il ne verra pas la fin du brasier. La dernière chose que voient ses yeux sont le jeune homme à sa gauche, transpercant sa gorge de son katana.
“ Il n’y aura pas de prochain village. C’était le dernier. “
Akira ne peut permettre à des bandits de continuer leurs activités sur le territoire du feu. Aujourd’hui est leur dernier jour sur terre.
Les camarades du bandit situées tout autour ne mettent pas beaucoup de temps à réagir. Chacun sort son arme, qu’il s’agisse de sabre ou d’arcs, prêt à en découdre avec le jeune homme laconique. Si la paresse l’anime la plupart du temps, le soldat n’a plus rien à voir avec ce qu’il affiche la plupart du temps.
“ Mais qui c’est ce connard ? “
“ Qui l’a amené, c’était pas l’un des nôtres ? “
“ Aucune idée, merde qui a fait l… “
Trop de parlote, le dernier se prend un senbon dans la gorge. Il s’écroule au sol dans un gargouillis sinistre tandis qu’un second décroche une flèche à l’encontre du soldat, qu’il pare d’un habile coup de katana. Six hommes. Il n’en fera qu’une bouchée. Ces bandits vont vite comprendre le fossé qui sépare un shinobi d’un homme banal. Sans discuter, Akira prend alors appui sur le sol pour charger rapidement vers le plus proche à l’aide de son chakra. Le mouvement perturbe complètement l’adversaire, qui ne s’attendait pas du tout à voir quelqu’un approcher si vite.
“ Putain comment… “
Un mort. La tête tranchée horizontalement entre les deux mâchoires, une tranche nette et précise. Ses entraînements samouraïs portent finalement bien leurs fruits. La force de ses coups s’est nettement développée, sans parler de la rapidité à laquelle il frappe. Les sacs de chair suivant en font les frais, tentant tant bien que mal de frapper un soldat bien trop rapide pour eux. Chaque esquive est calibrée, merci king, et chaque contre attaque mortelle. Les cadavres s'enchaînent très rapidement et le dernier debout finit transpercé au visage en quelques secondes à peine. Sans doute est-ce le combat le plus rapide de sa vie. Après tout, Akira n’a plus l’habitude de combattre autre chose que des shinobi depuis son incorporation dans l’armée… et la différence est énorme. Il n’aura aucun mal à se débarrasser des autres.
Ainsi, sans prendre le temps de brûler les cadavres qu’il engendre, le jeune homme se rend à la taverne d’un pas lent mais décidé. Aucune rage ne l’anime. Ou du moins, c’est ce qu’il croit. A ses yeux, Akira ne fait que son devoir de soldat… mais ce n’est qu’un prétexte qu’il invoque pour extérioriser sa colère. La colère de ne pas avoir pu en finir lui-même. La colère de voir son passé, aussi douloureux soit-il, effacé par d’autres. Des inconnus insignifiants. Il n’y a rien de plus rageant. Comme s’il n’avait aucun contrôle sur quoi que ce soit, si ce n’est sa colère et la fréquence de ses siestes.
Mais le soldat se rend bien vite compte que ce n’est que le début en poussant une nouvelle fois la porte de la taverne. Ses yeux s’arrêtent sur un petit corps échoué au sol, face contre terre. Le corps de la jeune femme blonde, nue, désarticulé et sans vie. Ainsi sa mélodie n’aura-t-elle pas pu satisfaire ses bourreaux. Dommage pour eux, celle-ci était en fait leur requiem.
Le temps semble s’être figé. La pianiste ne joue plus, elle n’est plus en état. Les bandits autour font tant de bruit qu’ils n’ont pu entendre le combat à l’extérieur, continuant de boire et rire comme des ahuris sans se soucier de ce qui les attend. L’homme qui était précédemment aux côtés de la pianiste, sûrement son bourreau, est occupé à boire à s’en empoisonner le sang. Sans doute fait-il bien, au moins mourra t-il alcoolisé. Il paraît que la douleur est moins forte.
" 霧の灰 - KIRI NO HAI "
Suivant ses paroles, le Kogami remplit alors la pièce d’un brouillard de cendres chaudes en quelques secondes à peine. Le lieu étant clos et relativement petit, celui-ci ne tarde pas à remplir la pièce jusqu’au plafond. Les premiers cris sont forts, terribles. Les suivants se font plus rares. Agonisants. Crier serait du suicide dans cet enfer immolé. Ceux qui ne respirent pas les braises pour mourir rapidement finissent brûlés de toutes parts, agonisants en attendant que leur chair se consume. Certains tentent bien de s’enfuir vers la sortie mais Akira les y attend, tranchant quiconque passe à sa portée d’un coup de sabre.
“ Vos agissements sur le territoire impérial sont intolérables. “
Répète t-il mécaniquement, imperturbable. Mais personne n’est en état de l’entendre ou de comprendre. Rapidement, plus une âme ne vit dans la pièce. Et lorsque le nuage dense retombe enfin, ce n’est que pour dévoiler les cadavres calcinés et boursouflés des bandits restés à l’intérieur. Cette mort doit sûrement être horriblement douloureuse. Akira n’a finalement que peu usé du haiton pour tuer au long de sa vie, le sabre lui étant toujours apparu plus rapide et efficace. Manifestement, le soldat se trompe depuis tout ce temps. Ces ordures n’ont eu que ce qu’elles méritent de toute manière.
Ainsi, laissant ce charnier grossier derrière lui, Akira emporte avec lui le corps sans vie de la pianiste. Sans doute était-elle serveuse à l’auberge en fin de compte. Il ne pourra de toute manière jamais lui demander. Emportant doucement le corps comme s’il était fait de porcelaine alors que la vie l’a déjà quittée, le soldat choisit finalement un endroit à l’écart du village pour l’enterrer. Mieux vaut éviter de la laisser reposer sur le lieu même de sa mort. Ou peut-être est-ce une manière pour lui de projeter sa rancoeur en elle, jugeant que cet endroit l’a bien trop fait souffrir pour mériter d’y accueillir une âme innocente.
Une fois la sépulture creusée sans qu’il puisse y poser de nom, Akira reste un instant à ses côtés à observer le ciel gris. A croire que même lui ne compte pas afficher une once de réconfort. Tout se doit d’être gris. Morne. Pourtant, l’Hijine parvient à retirer du positif de tout cela. Au moins un point. Cet endroit n’est désormais plus que du passé et cessera de le hanter à jamais. Car s’il ne peut oublier, chacun a fini par payer pour ce qu’il a subit.